Perturbation endocrinienne des molécules migrant des contenants alimentaires – les solutions de substitution sont-elles sans danger ? – PoLySafe

Dans PoLySafe, nous visons à fournir une preuve de principe scientifique que l'utilisation complémentaire de méthodologies que nous développons dans le consortium (notamment la concentration des molécules chimiques dans les matrices) et de méthodologies existantes peut être utilisée pour affiner les normes actuelles sur les matériaux en contact avec les aliments. Nous évaluerons également de manière approfondie l'impact endocrinien et métabolique des molécules libérées pendant le processus de chauffage de quatre types de récipients alimentaires : acier inoxydable, verre, cellulose et polypropylène.
Les paramètres biologiques ciblés sont : 1) la transactivation dans les cellules exprimant des récepteurs nucléaires humains (NRs), 2) le potentiel de modulation du métabolisme cellulaire hépatique humain (NRs), 3) le potentiel de modulation du métabolisme cellulaire hépatique humain (métabolomique et modélisation bioinformatique), 3) le potentiel d'altération de l'activité de la thyroïde, de l'œstrogène et du système nerveux central. L'activité des axes thyroïdien, œstrogénique et androgénique à l'aide de tests OCDE (validés ou en cours de validation). Il est important de noter que, contrairement à la plupart des études qui ne portent que sur le récipient d'aliments solides, PoLySafe permettra d'identifier les molécules migrant de chaque type de récipient dans des conditions réalistes.

Pour les besoins du projet, le LNE s’est équipé d’un évaporateur haut-débit parallèle (RapidVap – Labconco). Il est ainsi possible d’évaporer simultanément 8 solutions de 500 mL. Au vu du volume très important de simulant à traiter (près de 200L).
Lors de la rédaction du projet en 2019 seul le test XETA (permettant de déceler l’activité thyroïdienne) avait été validé par l’OCDE (TG 248). En juin 2022 le test permettant de déceler les perturbations androgéniques (RADAR) a été validé par l’OCDE (TG 251). En 2022 nov le test REACTIV (permettant de détecter les perturbations oestrogéniques) a été présenté à l’OCDE par le P5 pour sa phase finale de validation

WP1 Les objectifs de développement des méthodologies pour concentrer les molécules dans le simulant acide acétique et dans l’huile sont atteints.
La concentration de 500x pour l’acide acétique a été effectuée par évaporation, avec une extraction par solvant et évaporation ou sur cartouche puis évaporation. La méthode sur cartouche a été préférée (85% des molécules conservées).
La concentration 150x pour l’huile a été atteinte avec une méthode similaire.
Une publication de cette méthodologie est planifiée pour début 2023.
Neuf barquettes ont été utilisées pour les premiers essais avec l’acide acétique 3% : 5 barquettes en cellulose, 1 en polypropylène, 2 en inox et le blanc en verre. Les 7 autres barquettes vont être mises en contact avec l’acide acétique.
Les 16 barquettes ciblées dans le projet vont aussi être mises en contact avec de l’huile de tournesol

WP2 Les premiers essais effectués sur neuf barquettes (5 celluloses, 2 inox, 1 polypropylène et le blanc dans un contenant en verre) ont permis de voir que la barquette 3308 (Cellulose) induit une activité anti androgénique. Les autres molécules contenues dans les simulants n’induisent pas de liaison spécifiques sur de récepteurs nucléaires. Il reste à effectuer les essais sur les cellules ayant été transfectées avec des récepteurs aux hormones thyroïdiennes.

WP3 : Les partenaires 1 et 5 ont pu tester 1) la faisabilité de la dilution de l’échantillon de simulant concentré. 2) vérifier que les larves de médaka et de xénope n’étaient pas affectées par l’acide acétique résiduel.
3) montrer que des effets biologiques étaient observés sur différents barquettes.
Effets oestrogéniques avec les barquettes 3299 et 3306, effets androgéniques avec les barquettes 3308 et 3309 et effets thyroïdiens avec la barquette 3303.

WP4 : Nous pouvons observer qu’aucune molécule organique ne migre des contenants en verre ou en inox (3306 et 3311) comme attendu.
Les contenants en cellulose ou en polypropylène relarguent des molécules (de 2 à 14).

Un site internet est en cours de réalisation.
Le projet PolySafe et sa présentation à différentes conférences, et dans l’article de Pour la Science (juin 2021) a engendré de nombreux contacts et de nombreuses discussion qui nous permettent d’envisager des collaborations et des tests complémentaires sur d’autres types de contenants/items alimentaires (pailles en papier, gobelets en carton etc.) grâce à un budget complémentaire obtenu de la part d’un mécène (Crédit Mutuel via le MNHN).

Les partenaires vont écrire un article collaboratif sur la méthodologie dans un journal de rang A. Deux articles de vulgarisations ont été publiés dans « Pour la Science » de juin 2021 et dans la revue Emballage alimentaire.
Un article faisant état des effets néfastes sur la santé humaine de certains composés alimentaires, a été publié en 2020 dans Environmental Health.
Cinq présentations dans des colloques nationaux et internationaux ont permis de diffuser les objectifs et premiers résultats. Neuf interventions pour des mairies ou des conférences grand public ont aussi permis de diffuser les résultats.
Quatre participations dans des émissions télévisuelles sur les effets des plastiques sur la santé ont été effectuées entre 2020 et 2022.

La loi EGAliM adoptée en novembre 2018 interdira dès 2025 l’usage de contenants plastiques en restauration collective accueillant des enfants. La réutilisation des contenants en acier inoxydable et en verre utilisés historiquement est remise en cause pour des questions logistiques. Par conséquence, de nombreuses communes ont orienté leurs choix vers des contenants en bioplastique à base de cellulose, légers et jetables. Alors que des normes de migration existent et permettent de vérifier la conformité de la quantité du polymère composant les contenants alimentaires et passant vers son contenu, aucune norme n’oblige à l’évaluation des effets biologiques des molécules composant les barquettes. Ceci est d’autant plus vrai pour les composés néoformés (NIAS) lors des processus de réchauffage des aliments. Leurs effets biologiques, incluant la perturbation hormonale ont occasionnellement été évalués sur des modèles cellulaires, mais uniquement pour leurs propriétés oestrogéno-mimétiques, et seulement à partir de fragments de barquettes dissouts. De plus, cette question n'a jamais été abordée in vivo, ni pour les autres points d'impact potentiels des perturbateurs endocriniens. PoLySafe a pour objet de répondre à la question de l’inertie supposée des contenants alimentaires de substitution en mettant en œuvre une stratégie globale, appliquée et innovante, permettant d’orienter les meilleurs choix futurs. Pour ce faire, des contenants alimentaires en polypropylène, cellulose, acier inoxydable et en verre seront mis en présence de deux types de simulants (acide / lipidique) avec un temps et de contact déterminé et à une température représentative des conditions réelles d'utilisation.
Nous évaluerons l’impact des extraits des produits de migration sur l’activité des récepteurs nucléaires humains, sur le métabolisme hépatique (modèle humain; approche par analyse métabolomique globale et modélisation bio-informatique: biologie des systèmes) ainsi que sur la perturbation des axes oestrogénique, androgénique et thyroïdiens, à l’aide de modèles compatibles avec la règle des 3R (Réduire, Remplacer, Raffiner). Ce projet transdisciplinaire a la particularité de réunir cinq partenaires français aux expertises complémentaires, analystes et spécialistes de la thématique des perturbateurs endocriniens et métaboliques. Le LNE assurera la réalisation des extraits et l’identification des molécules présentes, susceptibles de migrer vers l'aliment. L’INSERM utilisera des modèles in vitro pour évaluer les effets, au niveau transcriptionnel, de ces extraits. INRAE étudiera les effets métaboliques à l’aide de la lignée cellulaire HepaRG in vitro, identifiée comme un excellent modèle humain pour les études toxicologiques (Tox21 USA, OCDE, UE H2020 Goliath). Enfin le CNRS et le laboratoire WatchFrog utiliseront des tests sur larves aquatiques, validés ou en cours de validation par l’OCDE. Ainsi, PoLySafe fournira les informations essentielles requises par les régulateurs en un seul projet.
L'objectif de PoLySafe est de générer de manière pragmatique et impartiale les éléments factuels permettant la prise de décision par rapport à une question de santé publique urgente et essentielle (données d’activité biologique et d'impact sur quatre axes endocriniens majeurs des contenants alimentaires). Dans PoLySafe, l'identification des produits chimiques migrants, leur fractionnement et le raffinement des substances actives sont indépendants des travaux sur l'activité des extraits. Cette complémentarité minimise grandement le risque d’échec, et permettra de développer de nouvelles stratégies pour tester les récipients alimentaires nouvellement formulés. Les résultats de ce projet ont pour vocation de contribuer à l'émergence de normes optimisées préalables à la commercialisation. Nous prévoyons également un fort impact médiatique des résultats générés au cours du projet, répondant ainsi à un questionnement légitime du public.