CE11 - Caractérisation des structures et relations structure-fonction des macromolécules biologiques

Elucidation du réseau d'interactions entre les RNPv du virus influenza A requis pour l'incorporation du génome – FluCode

FluCode : les secrets de l’encapsidation du génome des virus influenza A

Chez l’homme, les virus influenza A causent des épidémies de grippe saisonnières et occasionnellement de graves pandémies. Ils sont aussi à l’origine de pandémies chez l’animal (oiseaux, porcs, etc) qui ont un coût économique considérable. Les Orthomyxoviridae, dont font partie les virus influenza A, sont caractérisés par un génome segmenté, constitué de 6 à 8 ARN simple brin de polarité négative (8 dans le cas des virus influenza A).

L’encapsidation du génome : une étape clé du cycle réplicatif des virus influenza A

Le caractère segmenté du génome des virus influenza facilite leur évolution par réassortiment des ARN viraux (ARNv), mais il complique singulièrement son encapsidation. En effet, une particule virale doit contenir au moins une copie de chaque ARNv pour être infectieuse. Il est admis que chaque ARNv contient des signaux d’encapsidation qui permettent l’incorporation sélective d’exactement une copie de chaque ARNv. A cause de sa complexité, l’encapsidation du génome des virus influenza A constitue potentiellement une cible thérapeutique de choix, mais son mécanisme reste, dans l’ensemble, à élucider au niveau moléculaire. Les équipes partenaires du projet ont précédemment montré que des interactions directes entre ARNv par appariement, de même que la nucleoprotéine (NP) qui se lie aux ARN de manière non homogène et non aléatoire, sont cruciales pour l’encapsidation du génome, mais le réseau des interactions impliquées (le code) reste à établir. L’identification des interactions ARN/ARN et ARN/NP entre les 8 ribonucléoprotéines virales (chacune constituée d’un des ARNv, d’un complexe polymérase et de multiple copies de NP) qui sont nécessaires à leur encapsidation est précisément l’objet du projet FluCode.

Le projet FluCode est basé sur deux approches méthodologiques complémentaires. D’une part, la méthode SPLASH est fondée sur le pontage de régions des ARNv qui sont spatialement proches, suivi par la digestion des ARN par des RNases et l’analyse des régions pontées par séquençage à haut débit. Cette approche permet d’identifier les régions de deux ARNv différents proches l’une de l’autre dans les particules virales, et donc les contacts entre ARNv, mais aussi les régions d’un même ARNv rapprochées dans l’espace par la structure de celui-ci. Les zones de contacts identifiées peuvent s’étendre d’environ 50 à 200 nucléotides. D’autre part, nous comparons la réactivité des ARNv dans les particules virales intactes ou désassemblées vis-à-vis de plusieurs réactifs chimiques. Les ARN modifiés sont réverse transcrits dans des conditions induisant des mutations dans les ADNc en face des nucléotides modifiés. Ces mutations sont ensuite analysées par séquençage à haut débit. Les variations de réactivité des ARNv lorsque les particules virales sont désassemblées doivent permettre d’identifier les contacts entre vRNPs. De plus, la combinaison de plusieurs réactifs chimiques nous renseigne sur la nature de ces contacts : interactions ARN/ARN ou ARN/NP. Cette cartographie des ARNv donne des informations sur chaque nucléotide, mais n’identifie pas les régions partenaires des interactions ARN/ARN. C’est pourquoi elle est complémentaire de la méthode SPLASH.

La méthode SPLASH révèle que chaque ARNv établit plusieurs contacts avec les autres ARNv, établissant un réseau de contacts global qui englobe les huit ARNv. Des mutations dans les zones de contact abolissent les pontages, ce qui renforce l’idée que les régions identifiées correspondent non seulement à des zones de proximité, mais aussi à des zones d’interaction. La cartographie en solution avec un réactif SHAPE révèle de nombreux changements de réactivité lors du désassemblage des particules virales, dont des augmentations de réactivité sur plusieurs nucléotides consécutifs qui correspondent probablement à des contacts entre vRNPs. La comparaison de ces données avec les données de SPLAH et l’identification par bioinformatique de la totalité des interactions ARN/ARN stables possibles au sein du génome viral identifie une liste restreinte de contacts potentiels entre ARNv au sein des particules virales.

L’analyse fine des résultats de SPLASH sur le virus sauvage est en cours. Cette méthodologie va maintenant être appliquée à des virus porteurs de mutations dans la protéine NP ou/et des signaux d’encapsidation qui provoquent des défauts dans l’incorporation des ARNv dans les particules virales. La méthodologie SHAPE va être appliquée sur les particules virales intactes et désassemblées de ces mutants. De plus, nous allons mettre en place la cartographie de l’ensemble des virus sauvage et mutants avec des réactifs qui modifient les bases de l’ARN. Les différences entre virus sauvage et mutants devraient mettre en évidence des interactions jouant un rôle direct dans l’encapsidation des ARNv. La comparaison des différents réactifs modifiant l’ARN nous permettra de discriminer les interactions ARN/ARN des interactions ARN/NP puisqu’il est attendu que la protéine NP protège le squelette ribose-phosphate mais pas les bases de l’ARN. Nous ferons ensuite appel à la génétique inverse pour tester le rôle fonctionnel de certaines des interactions mises en évidence.

Les publications sont prévues à la fin du projet

Les virus influenza A (VIA) sont responsables des épidémies de grippe saisonnière et occasionnellement de pandémies grippales dévastatrices. Leur génome segmenté constitué de 8 ARNv favorise l’évolution virale mais requiert un mécanisme compliqué pour assurer l’incorporation du génome qui reste mal compris. Nos travaux et ceux d’autres groupes indiquent que le génome segmenté des VIA forme un complexe supramoléculaire maintenu par un réseau d’interactions redondantes entre ARNv et révèlent des relations complexes entre les signaux d’empaquetage des ARNv et la nucléoprotéine virale (NP), suggérant que chaque ribonucléoprotéine virale (RNPv), formée par l’association d’un ARNv avec un complexe polymérase et de multiples copies de NP, possède son propre code. Notre but est de décoder le réseau d’interactions entre RNPv, tant au niveau des ARNv que de la NP. A cette fin, nous combinerons la cartographie de l’ARN par plusieurs sondes chimiques avec les pontages ARN-ARN sur un virus sauvage et plusieurs mutants dont les déterminants d’empaquetage du génome auront été altérés par des mutations dans les ARNv ou la NP. Notre projet développe les études précédentes par la combinaison de trois points cruciaux. Premièrement, en réalisant nos études structurales sur des virus mutants, en plus du virus sauvage, nous surpasserons la difficulté de d’identifier les interactions ARNv-ARNv et ARNv-NP cruciales pour l’incorporation du génome des VIA inhérente à la redondance de ces interactions. Deuxièmement, la comparaison systématique des données de cartographie de l’ARN et de pontage obtenues sur des particules virales intactes et désassemblées permettra l’identification sans ambiguité des interactions entre RNPv adjacentes. Troisièmement, en utilisant plusieurs sondes chimiques réagissant avec différentes parties de l’ARN pour réaliser la cartographie des ARNv, nous serons capables de distinguer les interactions ARN-ARN des interactions ARN-NP. Globalement, notre projet devrait fournir la preuve de principe que des interactions ARN-ARN ou/et ARN-NP spécifiques sont essentielles pour l’incorporation du génome des VIA dans les particules virales et apporter un éclairage structural sur la plasticité de ces interactions.

Coordination du projet

Roland Marquet (Architecture et Réactivité de l'ARN (UPR 9002))

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

Medical Center University of Freiburg / Institute of Virology
ARN Architecture et Réactivité de l'ARN (UPR 9002)

Aide de l'ANR 241 434 euros
Début et durée du projet scientifique : février 2020 - 36 Mois

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