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Les Mille et une nuits: Sources et Fonctions dans l’Islam Médiéval Arabe – MSFIMA

Les sources des Mille et une nuits, la littérature médiane et leur rôle dans l’islam

La majorité des textes des Mille et une nuits ainsi que les livres du même genre demeurent en l’état de manuscrits inédits. Il s’agit de rendre cette littérature, qui n’est ni populaire ni savante mais médiane, accessible le plus largement et, à sa lumière, mieux comprendre la complexité de la civilisation de l’islam médiéval qui l’a produite.

La partition de la littérature arabe médiévale et ses fonctions

Les sources manuscrites inédites des Mille et une nuits appartiennent à une littérature médiane, qui, à côté des littératures savante et populaire, permet de mieux comprendre la complexité de la société de l’islam médiéval et de sa production culturelle. Actuellement, seule une infime partie des manuscrits de la littérature médiane a été publiée (moins de 5%). Il s’agit donc de faire reconnaître l’importance de cette catégorie littéraire inédite, de grouper en un seul lieu les copies de tous les textes qui appartiennent à la littérature médiane, y compris les Mille et une nuits, afin de les rendre accessibles au public et, par l’analyse de leur contenu, de proposer une autres vision de la société de l’islam médiéval, puisque celle-ci, pourtant réputée conservatrice, a permis l’apparition d’une vaste littérature de distraction souvent irrespectueuse et subversive.

Dans un premier temps, nous avons réuni toutes les références des sources des Mille et une nuits qui ont été publiées par des spécialistes (H. Zotenberg, D. B. Macdonald, M. Mahdi, H. Grotzfeld) puis nous les avons complétées par un long travail de prospection des catalogues des grandes bibliothèques du monde, de Rabat à Yale ; une fois établie la liste des textes des Nuits et des autres ouvrages du même genre (littérature médiane), nous avons entrepris d’en acquérir des copies en commençant par les textes les plus importants, qui sont aussi souvent les plus anciens (mais pas toujours). Dans un deuxième temps, nous nous sommes mis à subdiviser les (copies des) manuscrits obtenus par conte et à grouper ensemble les différentes versions d’un même conte afin de les comparer avec les versions savantes et populaires qui utilisent le même schéma narratif (la même structure), puis de les classer. La nature d’un manuscrit ou d’un conte donnés et les variations qui y sont introduites apportent des informations précieuses sur le contexte de leur élaboration et les représentations sociales en jeu, en l’occurrence ceux d’une certaine composante sociale de l’islam médiéval. La liste des manuscrits, leur contenu et les différentes versions des contes seront fournis dans une base de données.

Les résultats majeurs du projet, à ce stade, pourront être appréciés au moyen : (1) du livre prévu en 2014, aux presses de l’IFPO (Institut Français du Proche-Orient), sous l’intitulé « Introduction aux sources manuscrites des Mille et une nuits, Edition critique de quelques textes remarquables », il contiendra une introduction générale sur la problématique des Mille et une nuits et du nouveau concept de « littérature arabe médiane », la liste complète des sources disponibles (ce qui est en soi une autre nouveauté majeure) et leur classification ainsi que l’édition critique de cinq contes parmi les plus importants et les plus anciens ; (2) une base de données, fin 2013, consultable par l’intermédiaire du site internet de l’INALCO (Institut National des Langues et des Civilsations Orientales) et à la BULAC (Bibliothèque des Langues et des Civilisations), conservée à la BULAC, qui donnera un accès aux versions manuscrites libres de droits.

Perspectives ouvertes par le projet : (1) repenser l’histoire de la littérature médiévale non pas selon les deux catégories habituelles, savante et populaire, mais en ajoutant une troisième catégorie, la littérature médiane, et donc selon une subdivision et une connaissance plus fines de la production culturelle médiévale, plus à même d’expliquer son évolution vers la littérature moderne ; (2) promouvoir du même coup une connaissance plus fine de l’islam médiéval, en tant que civilisation, à travers la connaissance de cette littérature médiane de divertissement, oubliée aujourd’hui, et très surprenante, car subversive et allant à l’encontre des idées reçues par bien des aspects (2) alimenter des enseignements sur la littérature, les contes ou les traditions narratives et leur circulation à l’intérieur et à l’extérieur du domaine arabe grâce à la masse de manuscrits inédits de recueils de contes qui deviendront accessibles et au réseau qui sera tissé, à partir de ces textes, avec les littératures savantes et populaires arabes et non arabes ; (3) procéder à l’édition critique de recueils de la littérature arabe médiane et à leur traduction.

Trois publications pour les spécialistes et les non spécialistes réalisées dans le cadre du projet :
(1) « Le grand puzzle des Nuits », dans Qantara, n° 86, janvier 2013, p. 32-37 ; fournit une réflexion générale sur les Nuits, leur histoire et leur rapport, comme littérature médiane, aux littératures savante et populaire.
(2) Mille et Une Nuits, Catalogue d’exposition de l’IMA, Editions Hazan, Paris, 2012 ; fait le point à l’aide d’une trentaine d’articles sur la problématique des Nuits.
(3) La Grande Oreille, numéro spécial sur Les Mille et une nuits, n° 52, 2012 ; contient une vingtaine d’articles sur les Nuits, davantage dirigés vers les non spécialistes.

Les Mille et une nuits: Sources et Fonctions dans l’Islam Médiéval Arabe (MSFIMA)

Les Mille et une nuits représentent, après le Coran, le livre le plus remarquable de l’islam médiéval, le plus complexe sur les plans culturel et idéologique, le plus influent aussi. Elles ont marqué la littérature et le cinéma du monde. Elles sont, à partir du XVIIIe siècle, au cœur de l’orientalisme. Cependant, en dépit des travaux réalisés ces trente dernières années, des aspects fondamentaux des Nuits demeurent inconnus : leurs sources et leurs fonctions premières. La majorité des manuscrits des Nuits est en effet inédite (à environ 85%), sans parler des manuscrits analogues. Et pour les contes édités, il existe peu de moyens pour savoir si le texte dont on dispose est complet ou lacunaire, libre ou censuré et, plus généralement, de quel mouvement littéraire, idéologique ou artistique il relevait à l’origine. Nous savons par certains échantillons en circulation combien cette littérature s’opposait aux normes habituelles du monde médiéval, ne serait-ce que par la figure de Shahrazâd. Or de nombreux personnages de ce genre dorment encore dans les manuscrits. C’est d’un véritable mouvement littéraire qu’il s’agit, et c’est un pan entier d’un autre islam, comme civilisation, qui est concerné par ces textes. Leur publication apportera un éclairage nouveau, en termes de diversité, de créativité, d’une plus grande liberté de penser et de concevoir.

L’objectif du projet MSFIMA est de créer une base de données qui réunit les sources des Mille et une nuits et les textes analogues, en somme l’ensemble d’une littérature médiane inédite, ainsi que les variantes populaires et savantes, puis de proposer une interprétation de ce nouveau corpus en relation avec la société de l’islam médiéval arabe, au sens où il y est fait usage de la langue arabe : quelles étaient les fonctions de cette littérature ? Quelles leçons et quelles visions du monde induisait-elle ?

La base de données sera constituée de trois matières, chacune d’un genre différent :
1 - une matière centrale nouvelle qui servira de référence : les manuscrits des Mille et une nuits et les recueils dits analogues, selon la terminologie de David Pinault, qui forment une littérature médiane, inexplorée comme telle jusqu’à ce jour, en arabe moyen ;
2 – une matière périphérique plus savante : les livres d’auteur en arabe classique, tels qu’ils ont été répertoriés en partie par Chauvin et l’Arabian Nights Encyclopedia et qui partagent certains schémas d’intrigues avec des contes des Mille et une nuits ;
3 – une matière périphérique plus populaire : les contes arabes dans les dialectes régionaux auxquels s’applique la nomenclature d’Aarne et Thompson et de Hasan El-Shamy, et qui partagent, là aussi, le même schéma d’intrigue avec les contes des Nuits.

La base de données est en soi un apport inestimable. Elle sera installée à la BULAC, qui a donné son accord pour en assurer une conservation et une diffusion pérennes. En outre, trois publications dans la revue internationale Arabica (Brill, Leyde), qui a également donné son accord de principe, viendront marquer l’état d’avancement du projet, présenter et interpréter les informations réunies et leur assurer une large diffusion.
Les publications concerneront (1) le nouveau corpus des Nuits, (2) l’ensemble d’une littérature arabe médiane qui intègre les Nuits, (3) le rapport de cet ensemble avec la civilisation qui le prend en charge. Notons qu’à partir de là, la voie sera ouverte sans autre effort financier à une édition critique du corpus de la littérature arabe médiane en général et des Mille et une nuits en particulier.

Coordination du projet

Aboubakr CHRAÏBI (INSTITUT NATIONAL DES LANGUES ET CIVILISATIONS ORIENTALES) – aboubakr.chraibi@free.fr

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

INALCO INSTITUT NATIONAL DES LANGUES ET CIVILISATIONS ORIENTALES

Aide de l'ANR 230 000 euros
Début et durée du projet scientifique : juillet 2011 - 48 Mois

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