CE01 - Terre fluide et solide

Observations spatiales des calottes polaires : changements de masse entre 2013 et maintenant – SOSIce

Observations spatiales des calottes glaciaires : Changements de la masse de glace évalués de 2013 à aujourd'hui.

L'élévation du niveau de la mer est devenue un défi pour la société, notamment en raison des calottes polaires. La perte de masse de ces calottes est due à l'augmentation du ruissellement de la fonte de surface et de l'écoulement de la glace associée au réchauffement climatique. Nous proposons d'améliorer notre compréhension de la composante dynamique. En effet, la dynamique reste la plus grande incertitude dans la contribution actuelle et future des inlandsis à l'élévation du niveau de la mer.

Le projet reconstituera à haute résolution temporelle le flux de glace pour des glaciers du Groenland afin d'affiner leur bilan de masse et d'améliorer les capacités de prévision des modèles.

L'avènement de la télédétection spatiale a permis de collecter de grandes quantités de données sur des lieux éloignés et isolés tels que les calottes glaciaires. Pour la première fois, des cartographies à l'échelle du continent ont permis une description plus précise de la structure dynamique et géométrique des calottes glaciaires et ont également démontré que les calottes glaciaires perdent effectivement de la masse depuis 2000. Cependant, la collecte historique de données de télédétection est spatialement incomplète ainsi que temporairement éparse. Par conséquent, la plupart des cartes distribuées sont et restent mosaïquées, empilées ou moyennées afin de maximiser la couverture spatiale mais au détriment de l'information temporelle. Actuellement, les changements à court terme ne sont pas correctement pris en compte dans les calculs de bilan massique, ce qui pourrait finalement biaiser ces estimations. Cependant, au cours des dernières années, nous sommes entrés dans une nouvelle ère d'observations spatiales des calottes glaciaires. Ces satellites offrent pour la première fois la possibilité d'acquérir des données en continu sur les calottes glaciaires afin de cartographier le mouvement et l'élévation de la glace. <br />Profitant de l'opportunité offerte par ces nouveaux satellites d'acquérir des données en continu au-dessus de l'Antarctique et du Groenland, le projet caractérisera, avec de hautes résolutions spatiales et temporelles, les changements structurels et le bilan de masse qui se produisent sur certains glaciers critiques des inlandsis. En parallèle, nous continuerons à développer le cadre d'Elmer/Ice pour des simulations d'ensemble réalistes et les appliquerons aux glaciers susmentionnés. L'évaluation rigoureuse des résultats du modèle permettra de mieux évaluer (1) les performances des paramétrages actuels du modèle et (2) la principale source d'incertitudes dans les estimations du bilan de masse.

Nous utilisons les acquisitions radar Sentinel-1 de l'ESA (tous les 6 jours), optique Sentinel-2 (tous les 5 jours) et optique Landsat-8 de l'USGS (tous les 16 jours) pour déterminer la vitesse de la glace de surface sur une base hebdomadaire. Ce travail fournira un enregistrement précis de l'évolution temporelle du mouvement de la glace et devrait nous permettre d'en apprendre davantage sur les signaux saisonniers et à long terme que les modèles doivent prendre en compte, sur les forçages externes à différentes échelles temporelles et, bien sûr, sur l'évolution du débit de la glace de l'échelle sub-annuelle à l'échelle décennale.
Nous utiliserons aussi les mesures d'élévation de CryoSat-2/ESA, ArcticDEM, TanDEM-X/DLR, ATM/NASA et IceSAT-2/NASA pour établir l'évolution de l'élévation de la surface sur une base mensuelle à annuelle.
Nous développerons des simulations d'ensemble réalistes avec le modèle d'écoulement de la glace Elmer/Ice, établirons des métriques pour évaluer les sorties du modèle et assimilation des nouvelles observations obtenues par le projet.
Enfin, nous prévoyons l'assimilation des séries temporelles de la surface libre de glace et de la vitesse de la glace en utilisant des méthodes d'assimilation de données d'ensemble, basées sur le filtre de Kalman d'ensemble.

Nous avons d'abord créé une série temporelle sur un secteur de terminaison terrestre au Groenland à haute résolution temporelle. Nous avons ensuite étudié différentes méthodologies de post-traitement afin de générer des séries temporelles calibrées et simplifiées. Nous montrons dans une publication de Derkacheva et al. qu'il est possible d'obtenir des séries temporelles avec une résolution temporelle de 2 semaines et d'améliorer la précision d'un facteur 3 par rapport aux mesures originales. Nous avons établi des séries temporelles annuelles permettant d'établir l'évolution à long terme des glaciers du Groenland. Ces séries temporelles ont été incluses dans 2 études récentes sur l'évolution des glaciers du Groenland (Khan et al. 2020 ; Wood et al. 2021), qui suggèrent toutes deux que les projections actuelles pourraient sous-estimer la contribution du Groenland à l'élévation du niveau marin.

Nous avons montré que les méthodes inverses applitués à nos séries temporelles peuvent être utilisées pour évaluer l'évolution saisonnière des conditions basales (Derkacheva et al. soumis). Nous nous concentrons également sur le développement de méthodes d'ensemble pour mieux quantifier l'effet des incertitudes initiales sur les projections. Nous avons rassemblé un heu de données pour une étude de cas sur Upernavik Isstrøm et pour une comparaison avec notre simulation d'ensemble. Cette étude a montré que la moyenne de notre ensemble de simulation avait des performances similaires à celles d'autres études publiées avec l'avantage que notre approche n'est pas déterministe. Nous allons continuer à travailler sur les processus physiques qui permettraient à l'ensemble de mieux reproduire le retrait des glaciers. Ensuite, nous évaluerons plus précisément les paramètres qui ont une influence significative. Ce travail nous permettra de voir s'il est possible de mettre en place des méthodes d'assimilation pour réduire encore l'incertitude afin d'obtenir des projections plus fiables.

En tirant parti des observations continues et en les assimilant dans un modèle d'écoulement de la glace, nous suivrons l'évolution de la calotte glaciaire d'une manière fondamentalement nouvelle par rapport aux approches actuelles. Les résultats de ce projet permettront de résoudre d'importants problèmes techniques et scientifiques, notamment la capacité de traiter de grandes quantités de données pour l'étude des calottes glaciaires, une meilleure compréhension des processus physiques sous-jacents à l'origine de l'augmentation du débit des glaciers, l'amélioration de l'initialisation des modèles de calotte glaciaire avant le calcul des projections et la réévaluation précise du bilan du niveau de la mer.

1. Derkacheva, A.; Mouginot, J.; Millan, R.; Maier, N.; Gillet-Chaulet, F. (2020) Data Reduction Using Statistical and Regression Approaches for Ice Velocity Derived by Landsat-8, Sentinel-1 and Sentinel-2. Remote Sens., 12, 1935. doi.org/10.3390/rs12121935
2. S.A. Khan, A.A. Bjørk, J.L. Bamber,, M. Morlighem, M. Bevis, K. H. Kjær, J. Mouginot, A. Løkkegaard, D. M. Holland, A. Aschwanden, B. Zhang, V. Helm, N.J. Korsgaard, William Colgan, N.K. Larsen, Lin Liu, K. Hansen, V. Barletta, T.S. Dahl-Jensen, A.S. Søndergaard, B.M. Csatho, I. Sasgen, J. Box & T. Schenk (2020) Centennial response of Greenland’s three largest outlet glaciers. Nat Commun 11, 5718. doi.org/10.1038/s41467-020-19580-5
3. M. Wood, E. Rignot, I. Fenty, L. An, A.A. Bjørk, M. van den Broeke, C. Cai, E. Kane, D. Menemenlis, R. Millan, M. Morlighem, J. Mouginot, B. Noël, B. Scheuchl, I. Velicogna, J.K. Willis, H. Zhang (2021). Ocean forcing drives glacier retreat in Greenland. Science Advances. doi.org/10.1126/sciadv.aba7282
4. A. Derkacheva, F. Gillet-Chaulet, J. Mouginot, E. Jager, N. Maier & S. Cook (submitted) Seasonal evolution of basal environment conditions of Russell sector, West Greenland, inverted from satellite observation of surface flow, The Cryopsh. Disc. doi.org/10.5194/tc-2021-170

L'élévation du niveau de la mer est devenue un enjeu sociétal majeur, en particulier à cause des calottes polaires qui contribuent de façon plus importantes que prévues. La perte de masse des calottes glaciaires est due à l'augmentation du ruissellement de la fonte de surface et de l'écoulement de la glace associée au réchauffement climatique actuel. Nous proposons ici d'améliorer notre compréhension de la composante dynamique de cette perte. En effet, la décharge de glace modulée par les changements de vitesse et d'épaisseur de la glace demeure la plus grande incertitude quant à la contribution actuelle et future des inlandsis à l'élévation du niveau de la mer. Pour quantifier et comprendre la contribution passée, présente et future des calottes à l'élévation du niveau de la mer, il faut répondre aux questions fondamentales suivantes : Comment la vitesse et l'épaisseur de la glace, et donc le débit des glaciers de sortie, ont-elles changé sur des échelles de temps intra-annuelles à décennales ? Quels sont les principaux et les plus importants forçages externes qui contrôlent les changements dans l'écoulement glaciaire dans l'océan ? Comment pouvons-nous utiliser les observations dynamiques des glaces du passé récent pour améliorer les modèles numériques de l'écoulement glaciaire et obtenir des projections plus précises de l'élévation du niveau de la mer ?
Jusqu'à récemment, les réponses à ces questions étaient limitées, principalement parce que les observations des calottes étaient spatialement incomplètes et temporellement éparses, aboutissant à des produits moyennées pour maximiser la couverture spatiale aux dépens de l'information temporelle. Cependant, au cours des dernières années, nous sommes entrés dans une nouvelle ère de l'observation spatiale avec le lancement des satellites CryoSat-2 de l'ESA en 2010, Landsat-8 de l'USGS en 2013 et des quatres Sentinel-1 & 2 de l'ESA entre 2014 et 2016. Utilisés en synergie, ces satellites offrent la première chance d'acquérir des données continues sur les calottes glaciaires afin de cartographier le mouvement et l'élévation de la glace.
Saisissant l'opportunité offerte par ces nouveaux satellites, le projet SOSIce reconstruira à haute résolution temporelle et spatiale l'écoulement glaciaire des plus grands glaciers du Groenland et de l'Antarctique pour affiner les estimations du bilan de masse et d'améliorer les capacités d'assimilation des modèles numériques de l'écoulement glaciaire. Nous avons envisagé ce travail en 3 étapes successives : dériver des séries chronologiques de la structure (1) dynamique et géométrique des glaciers à partir de ces nouveaux capteurs, (2) les assimiler dans le modèle d'écoulement glaciaire Elmer/Ice, et (3) diffuser nos résultats à la communauté scientifique en utilisant les archives publiques.
En profitant des observations continues et en les assimilant dans un modèle, nous suivrons l'évolution de la calotte glaciaire d'une manière fondamentalement nouvelle par rapport aux approches actuelles. Les résultats de ce projet permettraient de résoudre d'importantes questions techniques et scientifiques, notamment la capacité de traiter de grandes quantités de données pour l'étude des calottes glaciaires, une meilleure compréhension des processus physiques sous-jacents qui causent une augmentation de l'écoulement glaciaire, une meilleure initialisation du modèle de calotte glaciaire avant le calcul des projections et une réévaluation précise de la contribution des calottes dans l'élévation du niveau des mers. Ce projet jettera de très bonnes bases pour lancer un effort de collaboration scientifique internationale afin de faciliter la croissance et l'établissement d'un nouveau domaine de la télédétection de la cryosphère sur de vastes ensembles de données, domaine en pleine expansion.

Coordination du projet

Jérémie Mouginot (Institut des Géosciences de l'Environnement)

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

IGE Institut des Géosciences de l'Environnement

Aide de l'ANR 302 034 euros
Début et durée du projet scientifique : décembre 2019 - 48 Mois

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