DS03 - Stimuler le renouveau industriel

Simulation des résistances thermiques d'interface: utilisation des transitoires de chaleur pour des simulations en dynamique moléculaire ab initio – SIRENA

Calcul de résistances thermiques d’interface par dynamique moléculaire ab initio

Prédire quantitativement les résistances thermiques d’interface pour comprendre et optimiser la dissipation thermique dans les nanodispositifs

Deux configurations ciblées: une couche moléculaire interfaçiale et une interface abrupte entre deux amorphes

Lorsque la chaleur est créée au cœur d’un dispositif, elle s’évacue en se propageant à travers les différents matériaux qui le compose. A chaque interface, une résistance thermique vient contrer ce phénomène. Comprendre et quantifier les résistances thermiques d’interface est donc primordial pour réduire les pertes de chaleur des dispositifs. L’objectif du projet SIRENA est de calculer ces résistances thermiques avec une méthode à l’échelle atomique, et ceci en se plaçant dans deux configurations distinctes. La première est celle d’une couche moléculaire d’interface, en l’occurrence une couche d’alcanes prise en sandwich entre deux blocs de silicium qui font office de réservoirs de chaleur. Cela correspond à la configuration de « thermal interface materials » utilisés pour optimiser la dissipation thermique. La seconde configuration est celle d’une interface abrupte entre deux matériaux amorphes utilisés dans les mémoires à changement de phase, le Ge2Sb2Te5 (GST) et le SiO2. La conductivité thermique de ces amorphes est également étudiée, afin de rechercher des effets de réduction similaires à ceux qui sont observés dans les cristaux, et qui impactent eux aussi la dissipation thermique.

Pour parvenir à une prédiction quantitative des résistances et conductivités thermiques, l’idée est d’utiliser la dynamique moléculaire ab initio qui permet de décrire la structure et la dynamique de matériaux en excellent accord avec les mesures. Cette prédictivité vient de ce que la structure électronique est calculée ab initio (par théorie de la fonctionnelle de la densité ou DFT) et utilisée pour calculer les forces interatomiques au lieu de recourir à des paramètres empiriques qui sont particulièrement inadaptés lorsqu’il s’agit de deux matériaux distincts mis en contact, ce qui est le cas des interfaces. Cette prédictivité a toutefois un coût calculatoire qui la rendait incompatible avec le calcul de propriétés thermiques, même sur des ordinateurs à haute performance (HPC) accessibles sur les centres nationaux ou via l’infrastructure européenne PRACE. L’approche qui a été utilisée dans ce projet vise à simuler le régime transitoire de l’équation de la chaleur, comme une expérience sur ordinateur, ce qui va nous permettre de déterminer les grandeurs d’intérêt, conductivités et résistances thermiques d’interface. Le point de départ de SIRENA est un premier test qui avait été réalisé pour calculer la conductivité thermique du GeTe4 amorphe à une taille d’environ 2 nm.

Les résultats du projet SIRENA montrent en particulier qu’il y a des effets de réduction de la conductivité thermique dans les matériaux désordonnés comme dans les cristaux, qui ont été beaucoup plus étudiés de ce point de vue. L’origine de ces effets reste encore à élucider pour déterminer s’il s’agit de modes se propageant malgré le désordre. Dans tous les cas, ils doivent être considérés pour optimiser la diffusion thermique de dispositifs qu’ils composent, comme les mémoires à changement de phase (PCMems).

Les travaux sur la conductivité thermique des amorphes seront poursuivis tout d’abord dans le cadre d'un projet de l'ITI QMAT qui commencera le 1er octobre 2022. En particulier dans le cas de l’amorphe de SiN un des objectifs est de pouvoir combler le gap entre les tailles accessibles par nos calculs et les dimensions expérimentales. Cela sera fait en développant un potentiel interatomique dit de « Machine Learning » à partir des simulations FPMD réalisées durant SIRENA. Un autre objectif est de pouvoir valider les effets nanométriques obtenus par calcul avec des mesures expérimentales. Des premiers essais sont en cours à la fois pour les conductivités thermiques et les résistances thermiques d’interface.

Les activités du projet SIRENA ont donné lieu à plusieurs articles dans des revues internationales à comité de lecture, et trois autres articles sur les derniers résultats obtenus doivent encore paraître car en phase de rédaction. Ces activités ont résulté dans une reconnaissance du consortium qui s’est traduite par de nombreuses invitations à des congrès internationaux. Enfin, de nombreuses propositions et projets ont découlé de SIRENA, dont un projet qui débutera en octobre et qui ouvre des perspectives vers les PCMems et les qubits.

Le problème abordé par la proposition SIRENA est celui de la modélisation quantitative du transport de chaleur aux hétéro-interfaces, c'est-à-dire aux interfaces entre matériaux différents. C'est une situation typiquement rencontrée dans les nanotechnologies actuelles et en développement. Par exemple, dans les circuits intégrés, la chaleur générée au niveau du canal du transistor (silicium, SiGe, III-V) s'évacue vers la face arrière en traversant plusieurs interfaces avec d'autres matériaux isolants ou semi-conducteurs, et par la face avant à travers des interfaces avec le métal des interconnections. La simulation numérique à l'échelle atomique est un outil inestimable pour étudier le transport thermique dans les nanostructures en se focalisant sur les mécanismes fondamentaux des échanges thermiques dans des systèmes modèles dédiés. Nous proposons ici de réaliser des simulations à l'échelle atomique afin de réaliser une avancée significative dans la compréhension quantitative des résistances thermiques d'interface. Dans ce but, nous allons combiner la dynamique moléculaire premiers principes (FPMD, pour "first-principles molecular dynamics") et une méthode développée récemment pour étudier la conduction thermique par dynamique moléculaire (MD, pour "Molecular Dynamics") dans des systèmes de grande taille, la dynamique moléculaire d'approche à l'équilibre (AEMD pour "approach to equilibrium molecular dynamics"). L'AEMD réduit considérablement le temps de calcul en tirant partie de transitoires de température. La validation du principe de cette approche et la comparaison avec l'expérience seront réalisées sur deux systèmes sélectionnés parce que i) leur taille, ainsi que l'échelle de temps de leur réponse thermique sont compatibles avec un traitement en FPMD et ii) ils ont été étudiés récemment par la technique expérimentales de caractérisation la plus avancée, d'où une parfaite contre-partie expérimentale. Le premier de ces systèmes est une monocouche auto-assemblée d'alcanes placée entre une surface d'or et une surface de silicium, une configurationétudiée actuellement de manière expérimentale à IBM Zurich Research Laboratory par B. Gotsmann. Ce système est particulièrement adapté à une validation de principe car il a été montré que la MD classique ne peut pas donner dans ce cas d'estimation quantitative de la résistance thermique, et ceci à cause des différents types de liaisons chimiques entrant en jeu.
Le second système est l'interface d'un verre de chalcogénure, Ge2Sb2Te5 (GST) avec un cristal ou un amorphe, dans la lignée d'une de nos études sur un autre verre, GeTe4. Dans cette étude, que nous avons publiée tout récemment, la méthodologie FPMD/AEMD a été fructueusement utilisée pour obtenir la conductivité thermique. Ici nous allons nous intéresser à la résistance thermique d'interface entre le GST et des films de silicium/silice, et ainsi déterminer l'un des paramètres fondamentaux du transfert de chaleur dans les mémoires à changement de phase. Le choix du verre de GST vient de ce que nous disposons de structures obtenues par FPMD pour ce matériau, et avec différents degrés de désordre chimique (densité de défauts). En étudiant ces deux classes de systèmes (couche moléculaire d'interface et contact direct entre deux matériaux denses), nous exploiterons au mieux les possibilités de l'approche FPMD/AEMD afin de déterminer de manière quantitative la résistance thermique d'interface de prototypes d'intérêt technologique.

Coordination du projet

Evelyne Martin (Institut d'électronique, de microélectronique et de nanotechnologie)

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

IPCMS Institut de physique et chimie des matériaux de Strasbourg
IEMN Institut d'électronique, de microélectronique et de nanotechnologie

Aide de l'ANR 200 566 euros
Début et durée du projet scientifique : décembre 2017 - 48 Mois

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