DS0401 - Une nouvelle représentation du vivant

Régulation post-transcriptionnelle de la réponse au stress thermique chez la plante – HEAT-ADAPT

Régulation post-transcriptionnelle de la réponse au stress thermique chez la plante

Dans un contexte de réchauffement climatique, l’étude des mécanismes permettant aux plantes de survivre aux stress environnementaux est primordiale pour assurer le maintien de la production agricole dans les années à venir. Il est donc urgent de comprendre comment les variations climatiques impactent le cycle de vie des végétaux afin d’adapter rapidement l'agriculture aux futures hausses de température. Ce projet vise à comprendre comment les plantes régulent leur réponse au stress thermique.

Caracterisation d'un nouveau mécanisme de thermotolérance chez les plantes

La survie de tous les organismes vivants dépend de leur capacité à adapter leur programme d'expression génique aux variations de leur environnement. Cela est particulièrement vrai pour les plantes terrestres qui n’ont pas comme les animaux la capacité de se soustraire aux conditions difficiles. En outre, la capacité des plantes à survivre aux contraintes environnementales est d'une importance primordiale pour la production alimentaire, en particulier dans le contexte du réchauffement climatique. Nous avons une connaissance limitée des mécanismes moléculaires par lesquels les plantes survivent au stress. Or l’introduction de nouveaux caractères de résistance dans les plantes cultivées nécessite une meilleure compréhension de ces mécanismes. Jusqu'à présent, la plupart des études moléculaires de la réponse des plantes aux stress thermiques se sont focalisées sur l’analyse fonctionnelle des protéines de stress thermiques et sur la caractérisation du réseau transcriptionnel impliqué dans leur production. Nous avons récemment découvert pour la première fois que les plantes reprogramment brutalement la stabilité de milliers d’ARNm lors du stress thermique et que cette reprogrammation est essentielle pour la survie de la plante lors d’une hausse de la température. Cette découverte nous ouvre une voie de recherche extrêmement originale et prometteuse. Nos objectifs principaux dans ce projet sont donc de répondre aux questions suivantes : 1) Quel est le répertoire complet des ARNm affectés lors d'un stress thermique, 2) Quels sont les autres acteurs moléculaires impliqués, 3) Comment les ARNm sont sélectionnés pour la dégradation et 4) quelle est l'importance physiologique pour la plante de ce processus de dégradation. Nous attendons de ce projet des informations nouvelles et originales sur un mécanisme essentiel mais complètement inconnu et qui permet aux plantes de survivre au stress thermique.

Au cours de ce projet, nous allons produire un matériel biologique et générer des données qui permettront de mieux comprendre le rôle biologique joué par la dégradation des ARNm induite par une hausse de la température sur le phénomène de thermotolérance des plantes. Un minimum 40 lignées simples ou doubles mutantes seront construites pendant ce projet. L’ensemble des lignées mutantes seront phénotypées dans au moins cinq régimes de stress thermique différents. Un phénotype de déficit de thermotolérance sera recherché à au moins trois stades de développement différents (sur des plantules pour tester la survie et les défauts de croissance, sur la graine pour tester des défauts de germination et sur les fleurs pour tester des défauts de fertilité). Cette approche génétique combinée avec un crible phénotypique permettra d’établir un répertoire complet des acteurs de la dégradation des ARNm qui sont sollicités dans la mise en place de notre nouvelle voie de dégradation liée à la chaleur. Comme les protéines impliquées dans les processus de dégradation des ARNm sont très conservées chez l’ensemble des végétaux, chaque acteur identifié par cette approche représente une cible potentielle pour de futurs programmes d’amélioration variétale visant à augmenter les propriétés de thermotolérance de plantes d’intérêt agronomique. Nous allons aussi préciser les populations d’ARNm qui sont ciblées par ce mécanisme de dégradation. Ces informations, couplées à notre approche épigénomique, nous permettra de mieux comprendre les principes du ciblage des ARNm vers la dégradation et ainsi ouvrir la voie à l’ingénierie d’ARNm hétérologues qui seraient où non dégradés lors d’une augmentation de la température. Cette capacité d’adresser un ARNm recombinant particulier vers la dégradation en jouant uniquement sur la température de croissance de la plante est inédite et présente un fort potentiel d’utilisation technologique qui pourrait faire l’objet d’un brevet dans le cadre de ce projet.

1. Identification d'un processus de dégradation co-traductionnelle induite lors de stress thermique reliant la stabilité de l'ARNm à un mécanisme de contrôle de la qualité des protéines. Ce travail suggère pour la première fois que la variation de la vitesse d'élongation de la traduction induite par le stress est un processus évolutif conservé conduisant à la dégradation co-traductionnelle de de milliers d'ARNm «nomaux».

2. Identification d'une modification post-traductionnelle spécifique du stress thermique, touchant un lecteur de l'état de méthylation de l'ARNm et qui pourrait réguler la stabilité des ARNm lors d'un stress thermique.

3. Mise en place d'un protocole amélioré pour établir l'état de méthylation des ARNm de la plante.

4. Identification d'un rôle clé pour HSP101 dans la période de récupération de la plante après un stress thermique. HSP101 est importante pour cibler les ARNm stockées vers la traduction après le stress thermique. Un document décrivant ce travail est en préparation.

Le projet a déjà fourni des résultats très intéressants et les analyses à grande échelle à venir (méthylome et des mesures de demi-vie des ARNm) devraient permettre des percées importantes dans le domaine.

1. Heat-induced ribosome pausing triggers mRNA co-translational decay in Arabidopsis thaliana
Remy Merret, Vinay K. Nagarajan, Marie-Christine Carpentier, Sunhee Park, Jean-Jacques Favory, Julie Descombin, Claire Picart1, Yee-yung Charng, Pamela J. Green, Jean-Marc Deragon and Cécile Bousquet-Antonelli. Nucleic Acids Research, 2015, Vol. 43, No. 8 4121–4132. nar.oxfordjournals.org/content/43/8/4121.full.pdf+html.

2. Heat induces storage of ribosomal protein mRNAs to enchance ribosomes production during post-stress recovery in Arabidopsis
Rémy Merret, Marie-Christine Carpentier, Jean-Jacques Favory, Claire Picart, Cécile Bousquet-Antonelli, Pascal Tillard, Laurence Lejay, Jean-Marc Deragon, and Yee-yung Charng. In preparation.

Dans un contexte de réchauffement climatique mondial, l’étude des mécanismes permettant aux plantes de survivre aux stress environnementaux est primordiale pour assurer le maintien de la production agricole dans les années à venir. Les experts du climat prévoient une hausse des températures de 1,5 à 5,8 °C d'ici 2100 ce qui pourrait entraîner une diminution de 15% à 50% des rendements agricoles. Les étés exceptionnellement chauds des dernières années ont fait subir aux plantes des températures extrêmes qui, combinées à d'autres stress comme la sécheresse, ont déjà eu un impact négatif sur la production agricole mondiale. Il est donc urgent de comprendre comment les variations climatiques impactent le cycle de vie des végétaux afin d’adapter rapidement l'agriculture aux futures hausses de température. Nous avons actuellement une connaissance limitée des mécanismes moléculaires par lesquels les plantes survivent aux stress. Par conséquent, l'étude de la régulation de l'expression des gènes en réponse à des signaux environnementaux est fondamentale pour mieux comprendre comment les plantes grandissent et se développent. Nous avons récemment découvert que les plantes reprogramment radicalement la dégradation de leurs ARNm lors d’un stress thermique. En effet, nous avons observé que la protéine de liaison à l'ARN LARP1 s’associe lors d'un stress thermique (15 min à 38 ° C) avec l’exonucléase (5’-3’) XRN4 pour mettre en place un processus massif de dégradation des ARNm qui cible plus de 4500 ARNm chez Arabidopsis. LARP1 est nécessaire pour adresser XRN4 aux polysomes pendant le stress thermique, suggérant qu'une partie de la dégradation est amorcée sur des ARNm encore engagés dans la traduction. Nous avons également montré que des plantes incapables de produire XRN4 sont clairement affectées dans leur capacité à survivre à au moins un régime de stress thermique. Dans l'ensemble, ces résultats suggèrent fortement que les plantes régulent la réponse au stress thermique en induisant un processus essentiel de dégradation ciblée des ARNm. Suite à ce travail pionnier, de nombreuses questions demeurent. En particulier, nous voulons identifier dans ce projet: 1) Quel est le répertoire complet des ARNm affectés lors d'un stress thermique, 2) Quels sont les autres acteurs moléculaires impliqués, 3) Comment les ARNm sont sélectionnés pour la dégradation et 4) quelle est l'importance physiologique pour la plante de ce processus de dégradation. Pour répondre à ces questions, ce programme combinera des approches de biochimie, de génétique et de phénotypage avec l'utilisation d'approches génomiques innovantes. En effet, nous utiliserons un approche originale de marquage non-radioactif couplée à un séquençage massif nous permettant de conduire une étude globale de la stabilité des ARNm à 20°C et 38°C. Nous évaluerons aussi l'importance des marques épigénétiques de méthylation sur la stabilité des ARNm en réalisant une analyse du méthylome ARN à 20°C et 38°C. La plupart des études à ce jour ont analysé le phénomène de la thermotolérance des plantes au niveau transcriptionnel. Une grande originalité de ce travail est de postuler que le processus post-transcriptionnel est également déterminant pour l’acquisition des propriétés de thermotolérance. Les quatre modules de travail interdépendants de ce projet permettront de déterminer pour la première fois l'importance physiologique de la dégradation des ARNm pour la survie des plantes au stress thermique. Les deux partenaires du projet sont fortement complémentaires et ont déjà collaboré à la découverte initiale de la voie de dégradation induite par la chaleur. Le partenaire 1 possède une forte expertise dans les études moléculaires du métabolisme des ARNm alors que le partenaire 2 est un expert des méthodes de phénotypage permettant d’explorer et de caractériser le phénomène de thermotolérance. Le regroupement de ces deux partenaires va permettre de faciliter l'avancée des connaissances dans ce domaine.

Coordination du projet

Jean-Marc Deragon (Laboratoire Génome et développement des Plantes)

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

ABRC Agricultural Biotechnology Research Center, Academia Sinica
Université de Perpignan/CNRS UMR5096 Laboratoire Génome et développement des Plantes

Aide de l'ANR 196 248 euros
Début et durée du projet scientifique : septembre 2014 - 36 Mois

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