FRAL - Appel Franco-allemand en sciences humaines et sociales

Champs de Force Affectifs dans l'Espace Urbain – SPACEFORCE

SPACEFORCE : Champs de force affectifs dans l'environnement urbain

Qu’est-ce qui rend un lieu de ville attrayant ? Cette question a une pertinence scientifique et politique, car les grandes villes font face à des défis tels que la croissance démographique, la flambée des loyers et l’augmentation de la ségrégation sociale entre les différents quartiers. Diverses disciplines, telles que l’architecture, l’urbanisme et l’économie, ont étudié cette question. Nous comblons des lacunes importantes en appliquant une perspective socio-psychologique.

Dynamiques sociales motivées par des représentations personnelles et collectives de l’attractivité urbaine

SPACEFORCE vise à aborder les mécanismes socio-psychologiques plus profonds qui sous-tendent l’émergence de représentations personnelles et collectives de l’attractivité urbaine (appelées ici signification affective), que nous supposons être à la base des décisions humaines concernant le lieu de résidence, les modes de transport, les activités de loisirs, etc. Pour ce faire, nous proposons de combiner l’expertise du premier PI français étudiant le jugement affectif en contexte spatial à l’aide d’une approche expérimentale, avec l’expertise du PI allemand étudiant les dynamiques affectives de la communication humaine à l’aide d’une approche de modélisation computationnelle. Nous visons à développer et à valider une théorie mathématiquement formalisée de la façon dont les processus affectifs régissent les perceptions, les décisions et les comportements humains dans l’espace urbain. En nous appuyant sur les principales traditions théoriques en psychologie sociale et en sociologie (théorie du champ, théorie de la cohérence, constructionnisme social, affect control theory), nous proposons que les processus de construction du sens personnel et collectif génèrent des champs de force affectifs, qui à leur tour contraignent le comportement humain dans la ville. Nous créerons un modèle informatique appelé ACT-space (pour affect control theory of urban space) qui fait des prédictions précises sur la façon dont les humains perçoivent affectivement et se comportent dans les environnements urbains. Nous utiliserons ensuite une technologie innovante de réalité virtuelle, dans laquelle le participant français a une expertise étendue, pour chercher une validation écologique d’ACT-space.

Nous recueillons les significations affectives culturelles de plus d’un millier d’identités sociales, de lieux et d’actions dans les espaces urbains en utilisant des méthodes traditionnelles telles que des questionnaires. Nous utilisons des échantillons représentatifs de France et d’Allemagne. Nous intégrons ensuite ces données dans un modèle informatique qui simule la façon dont les gens perçoivent affectivement et se comportent dans les environnements urbains. Nous testons empiriquement ces prédictions en menant des expériences avec des participants immergés dans des environnements urbains virtuels.

Nous avons deux résultats préliminaires. Premièrement, les identités sociales (par exemple, policier, secrétaire, enseignant, membre de gang) ont des connotations affectives similaires dans les cultures française et allemande. Cependant, certaines différences existent. Par exemple, le pouvoir et les sentiments positifs sont moins corrélés pour les identités sociales en Allemagne qu’en France. Deuxièmement, les distances symboliques entre les identités sociales dans l’espace affectif culturel affectent la façon dont les gens s’attendent à ce qu’elles gardent des distances physiques dans l’espace réel.

Nous pensons que l’impact scientifique du présent projet sera élevé. Premièrement, il intègre deux traditions théoriques en psychologie sociale (psychologique : PI français ; sociologique : PI allemand) qui se sont développées en quasi isolement depuis les années 1950. Nous fusionnons ici les points de vue selon lesquels le comportement des individus dépend de leur évaluation affective de la situation en fonction de leurs buts personnels, motivations et processus cognitifs de jugement, mais aussi du maintien des significations collectives adoptées à partir du système social plus large. Deuxièmement, la théorie résultante de la perception affective de l’environnement a de nombreuses applications pratiques. Comme elle permet de prédire comment les humains se comporteront dans un contexte spatial donné, ACT-space peut servir d’outil pour concevoir des espaces favorisant la régulation du flux de comportements (cf. lieux bondés, espaces commerciaux, espaces publics) ou pour concevoir des robots qui naviguent dans l’environnement en fonction de leur signification affective, comme le font les humains. ACT-space prédit également les attentes et préférences des individus quant à l'agencement des choses et des personnes dans l'espace, ce qui peut servir à créer des lieux plus attrayants, ou à mieux comprendre des dynamiques sociales nuisibles (par exemple, la ségrégation résidentielle). ACT-space peut en outre modéliser comment les individus se représentent affectivement l’environnement, ce qui est utile pour planifier l’impact de tout changement apporté au paysage urbain (par exemple, où construire un parc pour un impact positif maximal ?). Troisièmement, le projet pose les bases nécessaires pour des simulations plus avancées à l’avenir, comme l’utilisation de la modélisation basée sur les agents où de nombreux agents artificiels suivant des règles issues d’ACT-space produisent des phénomènes émergents capables d’expliquer des dynamiques sociales à une plus grande échelle. Ces approches de modélisation ont été appliquées fréquemment ces dernières années pour mieux comprendre les dynamiques comportementales des villes (par exemple Batty 2013), mais elles souffrent souvent d’hypothèses irréalistes concernant les mécanismes psychologiques des agents individuels (voir Schröder & Wolf 2017 pour une discussion et un contre-exemple).

Blaison, C. (2023). Les distances dans l'espace des connotations affectives d'Osgood prédisent les distances physiques attendues entre diverses identités sociales [Invited talk]. 3ème édition des “Journées de la Cognition Sociale,” organisées par le laboratoire de psychologie sociale et cognitive (LAPSCO) de l’Université Blaise Pascale, Clermont-Ferrand et l’ADRIPS, France.
Blaison, C. (2022). Affective judgment in spatial context: Orienting within physical spaces containing people and things. Social and Personality Psychology Compass [social cognition section], e12653. (PsycINFO, Scimago-Scopus : Q1 Social psychology, IF 2021 = 3.80).
Blaison, C. (2023). Les distances dans l'espace des connotations affectives d'Osgood prédisent les distances physiques attendues entre diverses identités sociales. Conférence invitée dans le cadre de la 3ème édition des “Journées de la Cognition Sociale,” organisées par le laboratoire de psychologie sociale et cognitive (LAPSCO) de l’Université Blaise Pascale, Clermont-Ferrand et l’ADRIPS, France.
Blaison, C. (2023, 15 septembre). Affective judgment in spatial context: Orienting within physical spaces containing people and objects. Laboratoire de Psychologie Sociale (UNILAPS), Université de Lausanne, Suisse.
Blaison, C. (2023, 25 août). Affective judgment in spatial context: Orienting within physical spaces containing people and objects. Laboratoire de Psychologie et de Neuroscience Cognitives (PsyNCog), Université de Liège, Belgique.
Dametto, D., Vieira, L.***, Blaison, C., & Schröder, T. (2023) EACIS Emergent Affective Configuration of Identities in Space [Communication orale]. Social Simulation Conference 2023, Glasgow, Scotland.
Dametto, D., Vieira, L., Schroeder, T., & Blaison, C. (2023). Are feminine roles and identities really perceived to be better and lesspotent than their masculine counterparts? [Poster]. General Meeting of the European Association of Social Psychology 2023, Krakow, Poland.
Vieira, L., Adamczak, R., Guimier, M., Delaunet, P., & Blaison, C. (2023). Do More Intense Social Threats Fade Away Quicker with Increasing Physical Distance [Talk] ? 19th General Meeting of the European Association of Social Psychology. Krakow, Poland.

Qu'est-ce qui rend un endroit dans une ville attrayant ? Cette question est pertinente tant d'un point de vue scientifique que politique étant donné les défis actuels auxquels sont confrontées de nombreuses grandes villes (augmentation de la population, des loyers, ségrégation sociale accrue). L’architecture, l'urbanisme et l'économie se sont déjà emparées de ces questions. Ici, nous proposons d'étudier les mécanismes socio-psychologiques plus profonds qui conduisent à l'émergence de représentations collectives de l'attractivité urbaine (i.e., leur signification affective), que nous supposons sous-tendre les décisions humaines quant aux choix résidentielles, des activités de loisirs, etc.
Pour cela, nous combinons l'expertise du responsable scientifique français à propos de l’étude expérimentale du jugement affectif de l’espace urbain, avec l'expertise du responsable scientifique allemand à propos de la modélisation informatique de la dynamique affective de la communication humaine. Nous visons à développer et valider une théorie mathématiquement formalisée de la façon dont les processus affectifs régissent les perceptions, les décisions et les comportements humains dans l'espace urbain. Capitalisant sur les grandes traditions théoriques de la psychologie sociale et de la sociologie, nous proposons que les processus de création de significations personnelles et collectives génèrent des champs de force affectifs qui contraignent le comportement humain dans l’espace urbain. Nous allons développer un modèle informatique, ACT-space, qui sera capable de prédire avec précision la façon dont les gens perçoivent affectivement et se comportent dans l’espace urbain. Pour valider ce modèle, nous utiliserons entre autres la technologie de la Réalité Virtuelle (VR), dans laquelle le participant français possède une solide expertise.
Le projet comprend les étapes méthodologiques suivantes: (1) compilation d'un vaste dictionnaire de concepts et de vignettes décrivant un échantillon représentatif d’interactions sociales dans l’espace urbain, ainsi que leurs significations affectives telles que dérivées d'une enquête auprès des répondants français et allemands; (2) utiliser les données de (1) pour paramétrer un modèle computationnel (ACT-space) capable de prédire la probabilité d'interactions spécifiques homme-environnement; (3) générer des simulations avec ACT-space pour explorer des différences interculturelles significatives entre la culture urbaine française et allemande; (4) une série d'expériences utilisant des vignettes pour tester les prédictions sémantiques d’ACT-space; (5) une série d'expériences visuelles pour tester les prédictions spatiales d’ACT-space; (6) la compilation d'une bibliothèque visuelle d'identités urbaines (avatars) et de lieux qui seront utilisés ensuite dans un environnement VR; et (7) une série d'expériences utilisant la technologie VR pour tester les prédictions comportementales produites par ACT-space.

Coordination du projet

Christophe Blaison (Laboratoire de Psychologie Sociale: Menace et Société)

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

FHP Fachhochschule Potsdam / Institute for Urban Futures
Laboratoire de Psychologie Sociale: Menace et Société

Aide de l'ANR 255 708 euros
Début et durée du projet scientifique : août 2021 - 36 Mois

Liens utiles

Explorez notre base de projets financés

 

 

L’ANR met à disposition ses jeux de données sur les projets, cliquez ici pour en savoir plus.

Inscrivez-vous à notre newsletter
pour recevoir nos actualités
S'inscrire à notre newsletter