DS0203 - Transformations et inter-conversions énergétiques

Modélisation de la progression d’enzymes dans des assemblages et parois lignocellulosiques – LIGNOPROG

Qu’est-ce qui fait bouger les enzymes ? Identifier les facteurs limitant la progression des enzymes dans les substrats lignocellulosiques

La biomasse lignocellulosique est une source durable de carburants, molécules et matériaux. Mais sa complexité limite l’efficacité de sa transformation par chimie verte via l’utilisation d’enzymes. La détermination des facteurs de sa récalcitrance est donc un enjeu scientifique et industriel.

Comprendre les freins à la progression des enzymes dans les biomasses végétales pour mieux les transformer

La biomasse lignocellulosique (BL) est un réseau complexe de polymères constituant les parois végétales et est considérée comme une alternative durable pour fournir une panoplie de carburants et produits chimiques en alternative aux produits issus du carbone fossile. Cependant, la complexité architecturale et chimique de la BL est aussi un frein à sa conversion industrielle notamment par des enzymes. Il est donc primordial d’identifier en particulier les facteurs biochimiques et structuraux qui contrôlent la progression des enzymes, donc leur activité, et quels sont les plus critiques : c’est l’objectif principal du projet Lignoprog.<br />A travers la mise en œuvre de techniques de microscopie de pointe, nous avons développé des approches pour mesurer la progression et les interactions d’enzymes impliquées dans la dégradation de la biomasse lignocellulosique. Les résultats obtenus permettent de déterminer les facteurs ayant la plus forte influence sur la progression des enzymes. La modulation de ces facteurs, liés au substrat et aux enzymes, doit permettre d’optimiser le processus de transformation de la biomasse.

Mesurer la progression d’enzymes dans des susbtrats lignocellulosiques est un véritable challenge, car c’est généralement l’effet de la catalyse enzymatique qui est observé et non l’enzyme elle-même. Pour le relever, nous utilisons des techniques de fluorescence car la fluorescence est un paramètre très sensible à son environnement. En greffant chimiquement à une enzyme une molécule fluorescente, nous avons mis au point une procédure pour suivre sa progression dans des substrats lignocellulosiques en utilisant la microscopie confocale de fluorescence. Grâce aux données recueillies, nous pouvons également déterminer l’affinité de l’enzyme pour les polymères contenus dans le substrat. Grâce à la connaissance de la composition du substrat, et en faisant varier les propriétés liées aux enzymes, nous pouvons en déduire le rôle joué par différents facteurs. En complément, l’analyse de la topographie et de la topochimie de surface des échantillons permet de rendre compte de la dynamique de déconstruction à une échelle moléculaire.

Grâce à l’utilisation de systèmes modèles de substrats lignocellulosiques, il est possible de mesurer la progression et les interactions d’enzymes dans des systèmes représentatifs de l’architecture des parois végétales et de déterminer finement les motifs structuraux impliqués dans les interactions non-spécifiques.
De la même manière, une nouvelle technique de fluorescence multi-modale permet de se servir de l’autofluorescence naturelle de la lignocellulose pour évaluer des interactions avec des sondes fluorescentes.Enfin, la quantification de la déconstruction de la lignocellulose à l’échelle nanométrique est possible et démontre le rôle de la lignine même à faible concentration.

La possibilité d’identifier, quantifier et donc hiérarchiser l’impact de facteurs chimiques et structuraux sur la progression d’enzymes dans des substrats lignocellulosiques permet d’envisager l’optimisation des process de transformation de la biomasse lignocellulosique. Tout d’abord, au niveau des enzymes, les méthodologies développées permettront d’orienter le choix vers des enzymes possédant des modulations et/ou des propriétés de surface qui permettent de minimiser les interactions non productives. Au niveau des substrats, le choix de pré-traitements pourra être effectué de façon à minimiser la présence ou l’apparition de motifs chimiques perturbateurs.

Le projet a donné lieu à 5 articles scientifiques.

La biomasse lignocellulosique (BL) est un réseau complexe de polymères constituant les parois végétales (PV). Elle a différentes origines : résidus agricoles et forestiers, culture dédiées. Comme la BL est composée de polymères variés tels la cellulose, les hémicelluloses et les lignines, la transformation de la BL dans les bio-raffineries peut potentiellement fournir une panoplie de produits chimiques. La transformation de la BL est ainsi considérée comme un moyen de limiter l’émission de gaz à effet de serre et une alternative durable aux produits issus du carbone fossile.
Cependant, la complexité architecturale et chimique de la BL est aussi un frein à sa conversion industrielle. Pour atteindre ce but, non seulement la fraction cellulosique mais aussi les fractions hémicellulosiques et ligneuses doivent être valorisées, sinon les bio-raffineries ne seront pas compétitives. Le principal challenge à relever est celui du coût élevé et de la relative faible efficacité de l’étape de déconstruction enzymatique de la BL. Malgré des avancées récentes, la transformation totale de la BL n’est pas encore réalisée. En réalité, l’activité et la progression enzymatiques sont restreintes dans la PV : c’est la récalcitrance. Quels sont donc les facteurs qui limitent la conversion de la BL et comment peuvent-ils être levés ? Ces facteurs concernent aussi bien la BL (composition, architecture,…) que les enzymes (interactions non-spécifiques, inactivation de la catalyse,…). Puisque la déconstruction de la BL est un processus dynamique, durant lequel les enzymes progressent dans un réseau hétérogène complexe, il est primordial de définir la relation qui existe entre ces facteurs et la progression des enzymes et quels sont les plus critiques.
Etant donné que, dans les PV, ces facteurs sont nombreux et complexes, nous proposons tout d’abord de mettre en œuvre dans Lignoprog des assemblages modèles de la BL qui contiennent certains polymères et interactions existant dans les PV. Il s’agit d’une alternative originale et pertinente, car les assemblages modèles sont maîtrisés en termes de complexité. Ces assemblages seront utilisés pour mettre en place les protocoles de mesure de la mobilité et des interactions d’un ensemble d’enzymes actives sur la BL, par l’utilisation de techniques microscopique de pointe (FRAP et FLIM-FRET). Les résultats obtenus seront dépendants de paramètres liés aux enzymes (taille, affinité, catalyse,…) et aux assemblages (type et concentrations des polymères, type d’interactions,…). La modélisation de l’ensemble des données obtenues mettra en évidence les paramètres les plus influents sur la mobilité et les interactions, les éventuelles interactions entre les paramètres, et leur hiérarchisation.
Dans la seconde partie, la même méthodologie sera appliquée à des sections de PV pré-traitées issues de deux espèces (mono- et dicotylédone). La progression des enzymes sera suivie par FRAP à l’échelle tissulaire dans plusieurs zones morphologiques, et l’impact de la déstructuration enzymatique sera observée par microscopie à force atomique à une échelle subcellulaire, afin de révéler les composants de la BL qui ont été transformés et ceux qui sont apparus.
Lignoprog combinera des outils de microscopie et physico-chimie pour caractériser les enzymes, les assemblages modèles et les PV afin de déterminer les motifs chimiques et structuraux qui limitent le plus la progression des enzymes au cours de la déconstruction. Les résultats obtenus seront essentiels pour optimiser la transformation de la BL : ils pourraient mener vers de nouvelles directions pour modifier certains de ces motifs via les outils de biologie moléculaire, et faciliter la sélection des enzymes les plus efficaces par l’utilisation de nos assemblages modèles. De plus, même si elle n’est appliquée qu’à un petit nombre d’enzymes et de systèmes lignocellulosiques, notre stratégie pourra facilement s’appliquer à une plus grande variété d’échantillons.

Coordination du projet

Gabriel PAES (UMR Fractionnement des Agroressources et Environnement)

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

UMR 0614 FARE UMR Fractionnement des Agroressources et Environnement

Aide de l'ANR 236 731 euros
Début et durée du projet scientifique : septembre 2014 - 36 Mois

Liens utiles

Explorez notre base de projets financés

 

 

L’ANR met à disposition ses jeux de données sur les projets, cliquez ici pour en savoir plus.

Inscrivez-vous à notre newsletter
pour recevoir nos actualités
S'inscrire à notre newsletter