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Contrôle photonique de l’organisation et de la polarité cellulaire – LICOP

Contrôler la migration d’une cellule par la lumière

En activant par la lumière des voies de signalisation biochimiques et ce à une échelle subcellulaire, il est possible de contrôler la polarité d’une cellule et donc de guider sur commande la migration de celle-ci.

Décrypter le traitement de l’information dans les réseaux d’interactions cellulaires

Le comportement d’une cellule est la résultante d’un grand réseau d’interactions moléculaires qui implique de nombreuses voies de signalisation. Celles-ci sont finement régulées dans le temps et l’espace et permettent à une cellule de prendre des décisions vis-à-vis de son environnement physique et chimique. En parallèle, ce réseau d’interactions contrôle la morphologie de la cellule lui permet d’effectuer ses fonctions telles que la différentiation ou la division. Un des grands enjeux de la biologie actuelle est de comprendre comment l’information environnementale est traitée et interprétée par ce réseau. La difficulté principale est que l’architecture et le fonctionnement de ce réseau est très différent de ce que proposerait un ingénieur. Le traitement de l’information est massivement parallélisé, l’encodage se fait sur de multiples échelles spatiales et temporelles et repose sur des processus physico-chimiques complexes. De plus ce réseau est fortement interconnecté avec de nombreuses boucles de rétroactions. En pratique il est donc très difficile d’identifier la causalité au sein de ce réseau dès lors que des éléments distants de ce réseau sont considérés. Ce projet propose d’utiliser une nouvelle méthode permettant de perturber de l’intérieur ce réseau afin de décrypter son fonctionnement et découvrir le support du « langage interne » de la cellule. Ceci permettra à terme de traiter certains disfonctionnements de la cellule qui ne sont pas encore compris telles que ceux impliqués dans le cancer. En particulier nous éluciderons les conditions de signalisation suffisantes pour établir un axe de polarité ainsi que la robustesse de cet axe dans le modèle de la cellule en migration.

En faisant produire par une cellule des protéines exogènes provenant des plantes ou de micro-organismes il est possible de fabriquer des outils moléculaires sensibles à la lumière qui permettent de contrôler la signalisation cellulaire. Cette approche, dite optogénétique, permet dans notre cas d’induire par la lumière l’accrochage entre deux protéines et ainsi d’activer des petites protéines de signalisation qui sont centrales pour la polarité cellulaire. En utilisant un microscope de fluorescence, il est alors possible de mesurer quantitativement la perturbation induite ainsi que la réponse de la cellule au niveau de divers effecteurs moléculaires.

Nous avons pu mettre en place les outils moléculaires et les approches quantitatives. En fusionnant les domaines catalytiques des facteurs d’échanges de Guanine TIAM et INTERSECTIN au cryptochrome Cry2 qui dimérise avec son partenaire CIBN ancré à la membrane plasmique nous avons pu activer localement dans la cellule les RhoGTPases cdc42 et Rac1. Cette méthode est très efficace et reproductible. Nous sommes capables de créer un gradient stationnaire d’activité en quelques secondes et de le maintenir à loisir pendant plus d’une heure. En imageant en TIRF le recrutement membranaire, en DIC la morphologie cellulaire, et en fluorescence le noyau, nous avons pu corréler la perturbation avec la réorganisation globale de la cellule quand celle-ci s’est mise en migration suite à notre perturbation. Nous pouvons donc contrôler la polarité et la migration cellulaire grâce à notre nouvelle sonde optogénétique. Nous comptons publier dans une revue internationale cette première étape du projet (Milestone 1 et délivrable 1 du projet).

Du point de vue moléculaire, nous comptons développer de nouvelles sondes optogénétique pour activer la RhoGTPase RhoA et ainsi contrôler la contractilité cellulaire. Ainsi nous comptons établir de nouvelles collaborations sur les liens entre contractilité et migration. Par ailleurs, nous aimerions essayer d’importer l’outil optogénétique dans l’embryon de Drosophile.
Du point de vue des problématiques biologiques, maintenant que nous arrivons à contrôler la polarité d’une cellule nous voulons combiner l’optogénétique et la culture sur patrons d’adhésion. De cette manière nous pourrons contrôler aussi l’environnement de la cellule afin de le normaliser et pouvoir quantifier le lien entre signalisation intracellulaire et microenvironnement physique de la cellule.
Du point de vue technologique, nous souhaitons développer une méthode d’illumination structurée basée sur la technologie des micro-miroirs. Cela nous permettra de coupler automatiquement la région illuminée de la cellule avec sa morphologie changeante.

Pas de productions scientifiques pour le moment, un manuscrit est en cours de rédaction.

L’architecture et la dynamique de la cellule sont contrôlées par un circuit moléculaire complexe qui est capable de traiter l’information provenant d’indices environnementaux afin de conduire la cellule dans des états fonctionnels adaptés. Par exemple, les cellules se polarisent lorsqu’elles migrent ou se divisent. Pour ce faire, elles doivent amplifier des signaux locaux et transitoires en des asymétries stables à l’échelle du système. Ce processus dépend essentiellement de deux réseaux interconnectés de protéines, les effecteurs et les régulateurs, plus que de la régulation transcriptionnelle. Les effecteurs sont transitoirement assemblés en des complexes macromoléculaires qui orchestrent l’architecture spatiale et la dynamique de la cellule. Les régulateurs interprètent les indices physicochimiques extrinsèques afin de contrôler les structures des effecteurs dans le temps et l’espace via des modifications biochimiques. Un point central est que ces réseaux de protéines sont régionalisés à l’échelle subcellulaire. En effet un état cellulaire donné peut être vu comme un arrangement de modules fonctionnels qui sont restreint spatialement et temporellement. Ces modules sont des entités subcellulaires autonomes qui sont spécifiées par leurs compositions en effecteurs et leurs programmes de signalisation des régulateurs. Une telle organisation modulaire de la cellule implique qu’un régulateur donné peut être impliqué simultanément dans des fonctions distinctes à différents endroits d’une même cellule. En conséquence, un seul acteur moléculaire n’est pas responsable d’une fonction. Plus exactement, l’essence d’une fonction est imprimée dans les taches computationnelles avancées –comme l’amplification, l’adaptation, le filtrage, l’intégration, et la prise de décision- exécutées par un groupe de molécules agissant collectivement dans un contexte local spécifique. Malgré son rôle essentiel dans le traitement du signal qui sous-tend les fonctions et la réponse d’une cellule, l’étroite coordination spatiotemporelle au sein d’un module des activités des régulateurs et des structures des effecteurs reste mal connue.

Dans ce contexte, nous proposons de développer une approche systémique appliquée à la polarisation cellulaire dans un modèle biologique bien documenté : la migration du fibroblaste. Nous utiliserons des techniques d’optogénétique pour provoquer des modifications biochimiques avec une résolution spatiale et temporelle inaccessible avec les outils moléculaires et pharmacologiques conventionnels. En combinant ces outils optogénétiques pour induire des perturbations de signalisation locales avec de l’imagerie de la réponse cellulaire et de la modélisation mathématique, notre but est de disséquer le traitement du signal opéré par le réseau de régulateurs et de poser les questions fondamentales suivantes :

1) Comment le traitement du signal est-il couplé à l’architecture locale de la cellule ?
2) Quel est le support d’information qui contrôle les transitions entre les modules subcellulaires et les états cellulaires ?
3) Comment la sensitivité et la robustesse cellulaire sont-elles conditionnées par l’environnement de la cellule ?

Notre but ultime est donc d’établir un cadre quantitatif et intégré du traitement du signal qui traduit l’information contenue dans des évènements moléculaires en des fonctions à l’échelle du système.

Coordination du projet

Mathieu COPPEY (Organisme de recherche)

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

CNRS IDF EST

Aide de l'ANR 300 000 euros
Début et durée du projet scientifique : octobre 2012 - 36 Mois

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