Développement de nouveaux réactifs organoiodés I(III) chiraux porteurs de ligands carbonés transférables et évaluation de leur capacité à induire l’asymétrie dans des réactions de création de liaison Carbone–Carbone. Compréhension et rationalisation des aspects théoriques des structures (analyses topologiques) et de la réactivité chimique (accès à l’hypervalence, processus d’échange et de couplage de ligands) de ces iodoarènes/iodanes.
La chimie des composés à base d’iode hypervalent (iodanes) a connu un développement impressionnant depuis le début des années 1990. Les efforts de recherche actuels se concentrent majoritairement sur la conception d’iodanes chiraux pour la synthèse asymétrique et pour des versions organoiodo-catalysées. Alors que de remarquables progrès ont été réalisés dans le cas de réactions d’oxygénation, d’amination et d’halogénation asymétriques d’alcènes, de cétones ou de phénols, l’utilisation d’iodanes chiraux dans des réactions de transfert de ligand(s) carboné(s), comme des alcynylations, des cyanations, des phénylations et des trifluorométhylations asymétriques, sont très rares. Cela peut s’expliquer par le manque de structures organoiodées I(III) chirales porteuses de ligands carbonés, mais aussi par le fait qu’une meilleure compréhension/rationalisation des aspects théoriques de cette chimie basée sur les iodanes (inter alia, accès des composés organoiodés à l’hypervalence, réactivité des espèces iodées hypervalentes, processus d’échange et de couplage de ligands) est cruciale pour exploiter pleinement le potentiel des organoiodés I(III) chiraux dans des méthodologies de formation de liaison carbone–carbone sans métal de transition. Dans ce contexe, l’objectif du projet de recherche collaborative IODOCHEM est de développer une méthodologie sans métal de transition, idéalement catalytique, basée sur l’utilisation de réactifs organoiodés I(III) chiraux, pour la création asymétrique de liaison carbone–carbone, méthodologie valorisable en synthèse organique de molécules complexes. La réalisation de IODOCHEM repose sur des efforts concertés en synthèse organique (conception, préparation et évaluation de nos propres iodoarènes/iodanes), en chimie quantique (calculs DFT et analyses topologiques de nos iodoarènes/iodanes) et en physico-chimie organique (études de nos iodoarènes/iodanes par spectroscopies photoélectronique X et UV).
Notre développement d’un système organoiodé (catalytique) chiral efficace repose à la fois sur i) la chimie organique expérimentale pour la synthèse et l’évaluation de nos propres iodoarènes/iodanes, ii) la chimie quantique pour les calculs DFT et les analyses topologiques de nos iodoarènes/iodanes, et iii) la physico-chimie organique pour l’étude de nos iodoarènes/iodanes par spectroscopie photoélectronique X et UV. Ces trois approches sont complémentaires dans nos efforts visant à identifier les meilleures modifications structurales à réaliser sur les composés iodés chiraux pour en faire des inducteurs d’asymétrie toujours plus efficaces. Les calculs théoriques, combinées aux études XPS et UPS, devraient aussi permettre de rassembler des informations cruciales pour une meilleure compréhension/rationalisation des aspects théoriques de cette chimie basée sur les iodanes (inter alia, accès des composés organoiodés à l’hypervalence, réactivité des espèces iodées hypervalentes, processus d’échange et de couplage de ligands). Ces avancées bénéficieront à l’ensemble des chimistes impliqués à travers le monde dans la chimie de l’iode hypervalent.
Après 18 mois de travaux de synthèse organique, une série de diiodoarènes C2-symétriques chiraux de type Salen a été préparée (échelle du gramme) en faisant varier la nature et la position des substituants électrodonneurs sur le cycle aromatique iodé. L’installation sur l’atome d’iode de ligands carbonés (alcynyle, cyano, phényle et trifluorométhyle) a été étudiée, notamment via la formation d’espèces intermédiaires organoiodées I(III) de type Koser. A ce jour, l’accès à des structures organoiodées I(III) alcynylées tosylées est maîtrisé et ces composés sont désormais en cours d’évaluation dans des réactions d’alcynylation asymétrique de beta-cétoesters et de naphtols. L’introduction de ligands hétéroatomiques (F, Br, Cl, SCF3) sur les centres iodés de nos diiodoarènes est également étudiée : un nouveau dérivé organoiodé I(III) N-cyclisé porteur d’un chlore a ainsi été préparé et cristallisé avec succès. Des calculs DFT ont confirmé le mode de cyclisation et la géométrie en T observée autour de ses atomes d’iode, prouvant ainsi la fiabilité des bases de calculs utilisées. La chimie quantique a aussi permis d’étudier les chemins réactionnels de l’oxydation de PhI en PhIO, puis en PhIO2, selon l’oxydant et le solvant utilisés. Les résultats sont concluants et doivent être complétés d’analyses IBO pour finaliser l’étude. Quant aux expériences de spectroscopie photoélectronique, une première série d’échantillons iodés (organiques et inorganiques) a été soumise à l’XPS ; ces travaux préliminaires ont confirmé la nécessité de travailler à froid et de s’appuyer sur des calculs théoriques pour aider à l’interprétation des bandes de valence observées expérimentalement. De manière similaire, nos premiers spectres enregistrés en UPS–phase gaz pour des organoiodés I(III) commerciaux sont de très bonne qualité et seront prochainement exploités pour aider à l’analyse des données XPS. Une fois opérationnelles, ces études spectroscopiques seront appliquées à nos iodanes chiraux.
Les perspectives dépendront fortement de la qualité de nos meilleurs résultats mais, dans tous les cas, le projet IODOCHEM d’une durée de 4 ans ne saurait être suffisant pour couvrir tous les aspects de cette chimie (conception, synthèse, application, rationalisation, analyses topologiques et études physico-chimiques) et répondre à toutes les questions que nous nous posons dans ce contexte de développement d’un système organoiodé chiral comme organocatalyseur asymétrique… sans oublier les nouvelles interrogations qui ne manquent pas de surgir tout au long de la réalisation de ces travaux de recherche fondamentale. De nouveaux projets seront donc soumis en réponse à divers appels d’offre afin de poursuivre efficacement ces investigations autour de la chimie de l’iode hypervalent.
Deux manuscrits sont en cours de rédaction : le premier concerne la synthèse et la caractérisation de nos nouveaux réactifs organoiodés I(III) chiraux de type Salen, porteurs soit de ligands carbonés alcynyle, soit de ligands hétéroatomiques (tels que Cl, SCF3), et dont les structures sont confirmées par des calculs DFT ; le deuxième porte sur l’étude des chemins réactionnels de l’oxydation de PhI en PhIO, puis en PhIO2, selon les conditions utilisées (DMDO dans l’acétone ou m-CPBA dans le dichlorométhane).
L’évaluation de nos nouveaux iodoarènes/iodanes chiraux dans diverses transformations asymétriques est en cours. Quant aux expériences de spectroscopie photoélectronique X et UV, elles seront poursuivies à l’automne 2020. Deux manuscrits supplémentaires peuvent raisonnablement être attendus courant 2021 sur ces deux axes d’investigation.
La chimie des composés à base d’iode hypervalent, également appelés iodanes, a indiscutablement connu un développement impressionnant depuis le début des années 1990, comme en témoignent la diversité des réactifs iodés hypervalent disponibles aujourd’hui et le nombre de transformations chimiques que ces réactifs peuvent promouvoir. L’intérêt initial pour le développement d’organoiodanes-lambda3- et -lambda5 (i.e., les composés basés sur des centres iodés IIII et IV), qui était essentiellement dû à leurs propriétés oxydantes et à leur capacité à remplacer les réactifs à base de métaux lourds dans des réactions de déshydrogénation et d’oxygénation, a ouvert la voie à l’exploitation des iodanes dans diverses réactions sans métal. Les efforts de recherche actuels se concentrent majoritairement sur la conception d’iodanes chiraux pour la synthèse asymétrique et pour des versions organoiodo-catalysées. Alors que de remarquables progrès ont été réalisés dans le cas de réactions d’oxygénation, d’amination et d’halogénation asymétriques d’alcènes, de cétones ou de phénols, l’utilisation d’iodanes chiraux dans des réactions de transfert de ligand(s) carboné(s), comme des alcynylations, des cyanations, des phénylations et des trifluorométhylations asymétriques, sont très rares. Cela peut s’expliquer par le manque de structures iodane-lambda3 chirales porteuses de ligands carbonés, mais aussi par le fait qu’une meilleure compréhension/rationalisation des aspects théoriques de cette chimie basée sur les iodanes (e.g., inter alia l’accès des composés organoiodés à l’hypervalence, la réactivité des espèces iodées hypervalentes et les processus d’échange et de couplage de ligands) est cruciale pour exploiter pleinement le potentiel des iodane-lambda3 chiraux dans des méthodologies de formation de liaison carbone–carbone sans métal de transition.
Dans ce contexe, l’objectif de ce projet de recherche collaborative IODOCHEM est de développer une méthodologie sans métal de transition, idéalement catalytique, basée sur l’utilisation de réactifs de type iodane-lambda3 chiraux, pour la création asymétrique de liaison carbone–carbone, méthodologie valorisable en synthèse organique de molécules complexes. La réalisation de IODOCHEM reposera sur des efforts concertés en synthèse organique (i.e., conception, préparation et évaluation de nos propres iodoarènes/iodanes), en chimie quantique (i.e., calculs DFT et analyses topologiques de nos iodoarènes/iodanes) et en physico-chimie organique (i.e., études de nos iodoarènes/iodanes par spectroscopie photoélectronique X et UV). Son succès permettra d’établir les fondements du futur de la chimie des réactifs à base d’iode hypervalent et offrira de nouveaux outils alternatifs pour une synthèse asymétrique durable sans métal de transition.
Monsieur Laurent POUYSEGU (INSTITUT DES SCIENCES MOLECULAIRES)
L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.
IPREM INSTITUT DES SCIENCES ANALYTIQUES ET DE PHYSICO-CHIMIE POUR L'ENVIRONNEMENT ET LES MATERIAUX
ISM INSTITUT DES SCIENCES MOLECULAIRES
Aide de l'ANR 351 563 euros
Début et durée du projet scientifique :
janvier 2019
- 48 Mois