Evaluation de la capacité neutralisante des IgA contre les variants du SARS-CoV-2 – MUCOVID
Les IgA ont été extraites du sérum et de liquides broncho-alvéolaires de patients avec une forme sévère de COVID-19. D'autre part, les IgA ont été purifiées à partir de lait maternel de femmes vaccinées COVID-19. La capacité neutralisante des IgA purifiées a été mesuré par un test de pseudoneutralisation.
Par ailleurs, la réponse vaccinale a été étudiée chez une population de patients lupiques.
Dans un premier temps, nous avons pu mettre en évidence une meilleure capacité neutralisante des IgA dimériques vis-à-vis des variants du SARS-CoV-2 comparativement aux IgA sériques monomériques et aux IgG sériques (Figure 1), suggérant que l’avidité des IgA leur confère une moins grande sensibilité aux évènements mutationnels viraux.
Suivant le deuxième objectif de ce projet, nous avons mis en évidence dans la circulation sanguine des cellules sécrétrices d'IgA à la suite de la vaccination. Néanmoins, leur nombre faible ne nous a pas permis d'analyses plus poussées. Chez les patients lupiques, la prise de certains immunosuppresseurs (méthotrexate et mycophénolate mofétil) diminue drastiquement la réponse vaccinale. La prise de corticostéroïdes au long cours n’était par contre pas associée à une mauvaise réponse vaccinale. Ces découvertes ont permis la mise en place d’un schéma vaccinal adapté chez ces patients.
Sur le plan biologique, nous avons démontré que le compartiment de lymphocytes B naïfs circulants mesurés le jour de la vaccination était inversement corrélé à la réponse neutralisante.
Enfin, nous avons mesuré l’activité neutralisante du sérum prélevé à J42 après vaccination. 82% des patients étaient capables de neutraliser efficacement la souche de référence et le variant alpha, alors que le variant delta était neutralisé dans 76% des cas.
En conclusion, ce travail met en évidence le caractère puissamment protecteur de l’IgA et pose la question du rôle possible de l’IgA sécrétoire dans la limitation de la transmission des variants viraux chez les sujets infectés.Il pourrait être envisagé d’inclure à terme une stimulation locale dans nos stratégies vaccinales, sous la forme par exemple de nébulisations locales afin d'induire ces IgA sécrétoires.
La détermination de marqueurs prédictifs de la réponse vaccinale chez le patient lupique a permis de déboucher sur des recommandations thérapeutiques personnalisées avec un schéma vaccinal adapté.
Les résultats du premier objectif ont été soumis à publication. Les résultats du 2ème objectif ont été publiés dans la revue Annals of Rheumatic Diseases en octobre 2021 (cf communiqué de presse : www.aphp.fr/contenu/bonne-tolerance-du-vaccin-bnt162b2-pfizer-biontech-et-bonne-efficacite-de-la-reponse)
L'immunoglobuline A (IgA), principal anticorps au niveau des muqueuses, joue un rôle crucial dans la protection de l'hôte contre les infection en neutralisant les virus et en empêchant leur fixation aux cellules épithéliales. Le SARS-CoV-2 infectant initialement le nasopharynx, les IgA spécifiques du SARS-CoV-2 sont rapidement produites après l'infection et contribuent efficacement à la neutralisation du virus. De façon notable, les IgA dimériques sont 10 à 15 fois plus neutralisantes que leurs équivalents IgG, elles représentent donc des candidats prometteurs pour le développement de nouveaux anticorps monoclonaux neutralisants.
Un effort exceptionnel débuté en mars 2020 avec les services de soins intensifs et de médecine interne de l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière a conduit à la constitution d'une bio-banque de sérums et de lavages broncho-alvéolaires de patients COVID-19, avec toutes les autorisations éthiques nécessaires. Grâce à ces échantillons cliniques déjà collectés, le but du projet MUCOVID est d'évaluer rapidement le potentiel de neutralisation des IgA contre les variants émergents du SARS-CoV-2. L'efficacité des IgA induites par une infection naturelle sera comparée à celle des IgA produites après vaccination, ce qui permettra d'obtenir des informations importantes sur la protection des muqueuses déclenchée par les vaccins COVID-19. Une meilleure compréhension de la réponse humorale mucosale dans le contexte des variants du SARS-CoV-2 apportera aussi des clés pour la mise au point de rappels vaccinaux appropriés et permettra d’identifier des biomarqueurs de l'efficacité vaccinale.
Coordinateur du projet
Madame Delphine Sterlin (Delphine Sterlin)
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Partenaire
CIMI-Paris Delphine Sterlin
Aide de l'ANR 48 600 euros
Début et durée du projet scientifique :
avril 2021
- 6 Mois