L’analyse des nombreux micropolluants organiques présents dans les eaux usées urbaines requiert des méthodes longues et complexes. Le projet WaterOmics vise à développer des méthodes de caractérisation d’échantillons complexes et des méthodes de traitement de données simplifiées
s méthodes actuelles pour l’analyse non-ciblée des micropolluants organiques par spectrométrie de masse haute résolution (HRMS) sont longues et complexes. Ce projet vise à développer une approche exhaustive pour traquer les polluants organiques dans les eaux urbaines par HRMS, en (1) développant des méthodes d’extraction, de caractérisation et d’analyse de composés polaires et non-polaires dans les eaux urbaines ; (2) développant des méthodes de traitement de données et des indices globaux dérivés d’empreintes HRMS ; et (3) appliquant des méthodes statistiques pour l’analyse et la comparaison d’eaux usées urbaines en parallèle d’analyses de toxicité. <br />La réalisation de ces objectifs permettra d’améliorer les connaissances sur les méthodes de détection des micropolluants organiques par les méthodes d’analyse non-ciblées en HRMS. Cela peut ainsi mener à l’identification de nouvelles classes de composés chimiques, de métabolites et de sous-produits de dégradation formés dans les procédés de traitement des eaux usées. Les performances de filières de traitement d’eaux usées vis-à-vis de l’élimination des micropolluants organiques seront étudiées, notamment dans les procédés d’oxydation. Un suivi à long terme de l’évolution des eaux usées arrivant en station d’épuration sera également effectué pour identifier de potentiels polluants émergents
L’approche adoptée pour caractériser la diversité de micropolluants organiques présents dans les eaux urbaines repose sur plusieurs aspects : l’utilisation de différents protocoles d’extraction et de fractionnement des micropolluants pour mieux appréhender la diversité des molécules ; l’utilisation ultérieure de méthodes d’analyse diversifiées permettant de détecter des molécules de propriétés physico-chimiques contrastées (polaires et apolaires) par chromatographie (différents types de colonnes) et par spectrométrie de masse haute résolution ; le développement d’indices spécifiques (en particulier basés sur les formules brutes des molécules) pour la caractérisation de familles de composés sans aller jusqu’à l’identification précise des structures moléculaires ; l’évaluation de la toxicité des échantillons pour identifier les familles de molécules les plus toxiques. Les données obtenues en spectrométrie de masse haute résolution ne sont habituellement pas caractérisées par de tels indices globaux mais sont plutôt utilisées pour l’identification précise de molécules individuelles. Les résultats d’indices globaux seront obtenus à l’aide d’algorithmes open source de détection et de traitement de données pour l’obtention des formules brutes. Ce type d’analyse de données est couramment utilisé pour les analyses en spectrométrie de masse très haute résolution, des comparaisons seront donc effectuées entre ces différentes technologies de détection pour évaluer la robustesse de l’approche
Un premier résultat du projet concerne des analyses effectuées sur des eaux usées traitées soumises à différents traitements oxydants, en particulier à l’acide performique dans le cadre de la collaboration avec le SIAAP. Ces analyses ont permis de commencer le développement d’indices globaux de caractérisation des eaux usées et leur intégration dans une application R/Shiny. En particulier, les eaux usées traitées à l’acide performique ont été caractérisées en termes de nombre de micropolluants avant et après traitement, et des méthodes statistiques ont été appliquées avec succès pour l’identification de sous-produits d’oxydation, appelés N-oxydes, formés lors du traitement par réaction avec des molécules pharmaceutiques présentes dans les eaux usées (ex. la lidocaïne). L’identification de ces sous-produits de type N-oxydes est inédite dans ce type de traitement, des travaux réalisés en parallèle visent à préciser les conditions de formation de ces produits et leur toxicité
Ce projet fournira des outils innovants pour caractériser et suivre le comportement des composés organiques dans les eaux urbaines, ce qui bénéficiera aux acteurs de l’eau, chercheurs, opérationnels et industriels du traitement de l’eau. En particulier, la caractérisation des eaux usées traitées et rejetées en Seine sera continuée à partir des travaux déjà réalisés (désinfection à l’acide performique) pour mieux évaluer l’amélioration de la qualité des eaux en vue d’une potentielle baignabilité de la Seine et la Marne lors des Jeux Olympiques de 2024.
Les travaux réalisés sur la caractérisation des micropolluants dans les eaux usées soumises à une désinfection par l’acide performique sont en cours de valorisation dans un chapitre d’ouvrage de l’International Water Association, ouvrage consacré à la désinfection des eaux usées et coordonné par le SIAAP. Ces travaux ainsi que l’identification de sous-produits de type N-oxydes seront également détaillés lors d’une conférence internationale en Corée du Sud (11th Micropol & Ecohazard Conference, 20-24 Octobre 2019).
De nombreux micropolluants émergents (ex. produits de soins corporels, antibiotiques, perturbateurs endocriniens) sont présents dans les eaux urbaines mais leur comportement et leurs transformations dans les stations de traitement des eaux usées et dans l’environnement sont peu connus. Les méthodes actuelles pour l’analyse non-ciblée des micropolluants organiques par spectrométrie de masse haute résolution (HRMS) sont longues et complexes. Ce projet de 4 ans vise à développer une approche exhaustive pour traquer les polluants organiques dans les eaux urbaines par HRMS, en (1) développant un protocole complet et innovant d’extraction et d’analyse de composés polaires et non-polaires dans les eaux urbaines ; (2) développant des méthodes de traitement de données et des indices globaux dérivés d’empreintes HRMS ; et (3) appliquant des méthodes chimiométriques/omiques pour l’analyse et la comparaison d’eaux usées urbaines en parallèle d’analyses de toxicité, avec un focus sur les molécules polaires.
La réalisation de ces objectifs permettra des avancées notables dans les méthodes de détection des micropolluants organiques par les méthodes d’analyse non-ciblées en HRMS. Ceci permettra l’identification de nouvelles classes de composés chimiques, de métabolites et de sous-produits de dégradation, et la catégorisation des produits selon plusieurs indices (ex. formule moléculaire, hydrophilicité/polarité, type de mécanisme de dégradation). Développer des indices spécifiques pour la caractérisation de familles de composés aidera à obtenir des résultats plus rapides à partir de données acquises en HRMS, sans diminuer la précision des informations disponibles dans de telles données. L’originalité du projet WaterOmics réside dans cette approche globale, en évitant les étapes longues et complexes liées à l’identification des structures moléculaires des composés inconnus détectés.
Cette approche sera testée à travers l’évaluation des performances de procédés avancés d’élimination de micropolluants organiques dans les filières de traitement d’eaux usées. La transformation des micropolluants lors des procédés d’oxydation (ozonation, photolyse UV, chloration, peracides) sera d'abord étudiée à l'échelle pilote ou du laboratoire. La performance de station d’épuration importantes de la région Parisienne (dont la plus grande station d’Europe) sera également évaluée en utilisant cette approche. Les résultats fourniront des stratégies de remédiation pour limiter l’impact des micropolluants organiques sur l’environnement. Un important programme de collecte d’échantillons dans les eaux usées, les rejets urbains et l’environnement sera déployé en collaboration avec un partenaire opérationnel de l’assainissement (SIAAP). Un suivi à long terme de l’impact de rejets urbains dans l’environnement sera effectué, et les empreintes HRMS de multiples eaux urbaines (eaux usées, eaux de ruissellement, eaux de surface…) seront collectées dans une base de données. La validation des méthodes et indices développés et leur robustesse sera essentielle par l’analyse de ces matrices urbaines très diverses. Les relations entre les types d’eau urbaine, les classes de contaminants présentes dans ces eaux et la toxicité des échantillons seront établies afin d’obtenir une vue globale de l’exposome lié à ces échantillons.
Ce projet fournira des outils innovants pour caractériser et suivre le comportement des composés organiques dans les eaux urbaines, ce qui bénéficiera à tous les acteurs de l’eau, chercheurs, opérationnels et industriels du traitement de l’eau.
Monsieur Julien LE ROUX (Laboratoire Eau, Environnement, Systèmes Urbains)
L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.
Curtin Water Quality Research Centre
LEESU Laboratoire Eau, Environnement, Systèmes Urbains
SIAAP Syndicat Interdépartemental pour l’Assainissement de l’Agglomération Parisienne
UIUC University of Illinois at Urbana-Champaign
University of Arizona
Aide de l'ANR 272 052 euros
Début et durée du projet scientifique :
octobre 2017
- 48 Mois