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Nouvelles implications des forêts Lyman-alpha en cosmologie – NILAC

Nouvelles implications des forêts Lyman-a en cosmologie

Le projet NILAC utilise les informations cachées dans la forêt Lyman-a des quasars distants pour en extraire des constraintes cosmologiques.

Contraintes sur la somme des masses des neutrinos, sur l'inflation et sur la nature de la matière noire

Joignant l'expertise d'expérimentateurs et de théoriciens, l'objectif de ce projet est d'exploiter de manière optimale les informations portées dans les spectres de quasars distants afin d'apporter les contraintes les plus strictes à ce jour sur les masses de neutrinos, sur l'inflation et sur la nature de la matière noire. Plus précisément, le projet abordera les points suivants:<br /><br />1 / Analyse des données Lyman-alpha: Ce travail expérimental consiste à analyser le plus grand échantillon de spectres de quasars à moyenne résolution disponible à ce jour. À la fin du projet, nous produirons la mesure finale du spectre de puissance 1D du flux à partir de l'échantillon complet de quasars BOSS + eBOSS. Ce travail nécessite une excellente compréhension des effets instrumentaux affectant les données, ainsi que des propriétés astrophysiques des quasars qui modulent la forêt de Lya.<br /><br />2 / Contraintes sur les masses de neutrinos. Ces nouvelles données seront confrontées à des simulations hydrodynamiques de pointe pour déterminer les paramètres cosmologiques qui reproduisent au mieux les observations. Ce problème nécessite le développement d'un code de simulations pour tenir compte des effets infimes de la masse des neutrinos sur la formation des structures à grande échelle.<br /><br />3 / Contraintes à l'inflation. Nous testerons l'impact d'une variation non nulle du facteur d'échelle avec le mode, en considérant les échelles pertinentes et un paramétrage adéquat.<br /><br />4 / Contraintes sur la matière noire. Alors que les contraintes cosmologiques des points 2) et 3) ci-dessus sont dérivées dans le scénario CDM standard, nous exploiterons des options alternatives, telles que la matière noire sous forme d'axions, la WDM sous forme de neutrinos stériles ou la matière noire interagissant faiblement. Nous confronterons les données de 1) à des simulations dédiées de matière noire pour dériver des contraintes sur la nature des particules de matière noire.

Le projet s'articule autour de 5 tâches.

La tâche 1 s'occupe de la coordination du projet. Parce que la collaboration comprend deux institutions (CEA-Saclay en France et TWTH en Allemagne), nous prévoyons d'avoir des réunions régulières pour échanger sur les avancées du projet.

Tâche 2: analyse des données Lya
Le but de cette tâche est de mesurer le spectre de puissance de flux Lya 1D (le long de la ligne de visée des quasars) dans 13 bins en redshift allant de z = 2,2 à 4,6. Nous utiliserons 170 000 quasars de BOSS et 40 000 de eBOSS à z> 2,1, complétés par le spectre de puissance 1D à des échelles plus petites provenant de 100 quasars à des redshifts entre 3,5 et 4,5, observés par XQ-100 sur le VLT. Nous étendrons la mesure en utilisant les premières données du projet DESI. De précieux résultats cosmologiques peuvent être dérivés de n'importe quelle combinaison de ces sous-ensembles.

Tâche 3: masses de neutrinos
Pour contraindre les masses des neutrinos, nous utilisons des simulations hydrodynamiques dédiées, variant les paramètres cosmologiques en présence d'une composante en free-streaming. Nous construisons une vraisemblance à partir de ces simulations, en ajoutant des paramètres de nuisance pour modéliser les effets systématiques, qu'ils soient d'origine instrumentale ou astrophysique. Nous étudions également l'impact du feedback baryonique aux échelles galactiques à l'aide d'un ensemble distinct de simulations dédiées.

Tâche 4: l'inflation
Nous définirons une paramétrisation du spectre de puissance primordial permettant de s'écarter d'un indice spectral invariant d'échelle à petite échelle. Côté analyse, nous étudierons conjointement les données Lya et les données CMB de Planck.

Tâche 5: contraintes sur les particules de matière noire
L'objectif principal de cette tâche est d'aborder la question de la matière noire (DM) sous un nouvel angle. La tâche 5 est le principal objectif scientifique des développements entrepris dans les tâches 2 et 3.

L'équipe du projet a obtenu la mesure la plus précise à ce jour du spectre de puissance du flux Lya 1D, améliorant le résultat précédemment publié (de la version DR9 en 2013), à la fois en précision (atteignant une réduction par un facteur de deux) et en redshift. Nous avons également effectué une étude approfondie des sources d'incertitudes systématiques identifiées qui affectent la mesure. Le spectre de puissance résultant est en excellent accord avec celui des données DR9. Cette nouvelle mesure a été présentée dans un article, maintenant publié dans JCAP.

Cette mesure a été utilisée pour calculer le spectre de puissance linéaire à 3D de la matière à un redshift de 0. Cette mesure est également utilisée dans une étude collaborative majeure des deux partenaires de ce projet, conduisant à la contrainte la plus stricte à ce jour sur la somme des masses de neutrinos, établissant une limite supérieure de 0,11 eV à un niveau de confiance de 95% en utilisant la combinaison des données Lyman-a et Planck (température et polarisation). Cette limite est encore ramenée à 0,09 eV en ajoutant l'effet de lentille du CMB et les données BAO. Le papier présentant ces résultats a été soumis au JCAP et est actuellement en cours de revue.

Nous avons produits deux faits marquants durant cette première période:.
1. irfu.cea.fr/Phocea/Vie_des_labos/Ast/ast.php: Le spectrographe Desi ouvre ses 5000 yeux sur le cosmos pour traquer l’energie noire, (October 28, 2019) annonce la première lumière de l'instrument DESI. Suite à cette première lumière, DESI a entamé la phase de commissioning.
2. irfu.cea.fr/Phocea/Vie_des_labos/Ast/ast.php: L’étau se resserre autour des neutrinos du cosmos (December 20, 2O19) présente la mesure du spectre de puissance à 1D du flux Lya, ainsi que ses implications cosmologiques sur la masse des neutrinos et sur la nature de la matière noire. Ce fait marquant est un résumé des 3 papiers ci-dessous.

L'équipe du projet NILAC a publié 3 papiers:
1. Spectre de puissance 1D des données Lyman-a: The one-dimensional power spectrum from the SDSS DR14 Ly forests, Chabanier, Palanque-Delabrouille, Yèche et al., JCAP 07, 017 (2019)
2. Matter power spectrum: from Ly forest to CMB scales, Chabanier, Millea & Palanque-Delabrouille, MNRAS 489, 2247 (2019)
3. Hints, neutrino bounds and WDM constraints from SDSS DR14 Lyman-a and Planck full-survey data, Palanque-Delabrouille, Yèche, Schoneberg, Lesgourgues, Walther et al., arXiv:1911.09073

La cosmologie est à présent entrée dans l’ère de la haute précision, grâce aux observations du fond diffus cosmologique (CMB) et celles des structures à grande échelle (LSS). Alors que le modèle ?CDM a été confirmé comme une description valable des données cosmologiques aux plus grandes échelles, certaines questions restent en suspens, comme la nature de la matière noire, le mécanisme responsable de l'accélération de l'expansion, le rôle exact et le comportement des neutrinos en cosmologie, l'échelle d'énergie de l'inflation et sa connexion avec une théorie fondamentale. L'objectif de cette proposition est d'aborder ces questions à la fois sur le plan expérimental et sur le plan théorique, via les informations contenues dans les forêts Lyman-alpha. D'une part, nous allons analyser le plus grand échantillon disponible à ce jour de spectres quasars à moyenne résolution (provenant des expériences BOSS et eBOSS qui seront tout juste terminées à l’échéance de ce projet), complété par le lot le plus récent de spectres de quasars à haute résolution (XQ-100 sur le VLT et premières données du programme DESI), afin de mesurer avec une précision de l’ordre du pour cent le spectre de puissance du flux Lyman-alpha, à des redshifts entre 2.0 et 4.6, et sur des échelles allant de 0,1 Mpc environ à la centaine de Mpc. D'autre part, nous allons produire des simulations hydrodynamiques de pointe qui incorporeront les ingrédients de différents modèles cosmologiques à tester. Confrontant ces simulations numériques aux données Lyman-alpha, nous déterminerons les jeux de paramètres cosmologiques les plus en adéquation avec les observations.

Avec des données à grand redshift, nous aurons accès aux stades précoces de l'évolution non linéaire des structures, qui s’avèrent les plus adaptés pour repérer la décroissance importante du spectre de puissance de la matière aux petites échelles causée par des particules de matière noire chaude. Avec un bras de levier en échelles couvrant deux ordres de grandeur, nous serons également en mesure de tester la coupure plus douce qui apparaît, par exemple, dans des scénarios de matière sombre mixte ou de neutrinos stériles produits de façon résonante, et nous pourrons également contraindre toute une variété de modèles comportant de la matière noire non-standard tels des modèles de matière noire interactive ou des axions.

La mesure du spectre de puissance à des échelles inférieures au Mpc nous permettra de lever la dégénérescence intrinsèque entre les propriétés en température du milieu intergalactique et les paramètres cosmologiques tels que l'indice spectral scalaire ou la masse des neutrinos. Au-delà de la question de la nature de la matière noire, nous allons donc utiliser notre échantillon unique de données Lyman-alpha, complété par la dernière mesure des anisotropies du CMB obtenue par Planck, pour obtenir la contrainte la plus forte sur la masse des neutrinos, atteignant la limite où l'on pourra confirmer ou exclure le scénario inversé de hiérarchie de masses des neutrinos (qui prédit M? = 0.11 eV d’après les dernières données sur les oscillations des neutrinos).

Enfin, les forêts Lyman-alpha constituent une excellente sonde pour étudier la forme du spectre de puissance de la matière à des échelles inférieures à celles du CMB. Des résultats récents indiquent une légère tension entre les mesures Lyman-alpha et celles du CMB, qui, si elle est confirmée, pourrait avoir des conséquences intéressantes sur les théories de l'inflation, ou constituerait un premier indice en faveur d’une nouvelle physique telle une gravité modifiée ou des interactions entre la matière noire et les autres composants.

Coordination du projet

Nathalie PALANQUE-DELABROUILLE (Institut de Recherche sur les lois Fondamentales de l'Univers)

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

IRFU Institut de Recherche sur les lois Fondamentales de l'Univers

Aide de l'ANR 562 300 euros
Début et durée du projet scientifique : août 2018 - 36 Mois

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