DS0103 -

Evalution du risque environnemental lié à la maîtrise du biofouling en zone littorale méditerranéenne – FOS-SEA

Impact environnemental et sanitaire du rejet d'eaux chlorés en mer

De nombreuses industries localisées sur le littoral utilisent l'eau de mer pour des besoins d'échange thermique. Afin d'éviter le risque de prolifération de microalgues, biofilms et dépôts de crustacés dans les canalisations, elles sont amenées à traiter l'eau de mer avec du chlore. Que devient le chlore une fois combiné avec l'eau de mer? Telle est la question majeure à laquelle le projet FOS-SEA veut répondre

AAmélioration des connaissances sur la nature des sous-produits formés lors de la chloration de l'eau de mer et sur l'impact environnemental et sanitaire de ces sous-produits

Le projet FOS-SEA vise à une meilleure connaissance de la nature des sous-produits pouvant être générés lors des procédés de chloration lorsque l'eau de mer est utilisée comme eau d'appoint, de déterminer les schémas réactionnels de leur formation et de leur devenir, d'étudier leur transfert dans les différents compartiments de l'environnement et leur dissémination et, enfin, d'étudier leur toxicité et celle de leurs métabolites

Le projet FOS-SEA rassemble des chimistes de l'environnement, des biologistes marins et des toxicologues afin de quantifier et d'identifier les sous-produits de chloration et leur devenir dans les différents compartiments de l'environnement (eau, air, sédiments, poissons, moules, oursins) et d'étudier leur toxicité individuelle ou en mélange (effet «cocktail«). Il réunit également un institut associant citoyens, décideurs locaux et industriels.
La méthodologie retenue repose sur 8 campagnes d'échantillonnage en mer qui permettent d'avoir une vision ponctuelle de l'état de la contamination de la zone d'étude et sur des prélèvements intégratifs permettant de connaitre non plus des niveaux instantanés de pollution mais des flux de pollution. Ces campagnes permettent de réaliser des mesures sur site et de prélever des échantillons des différents compartiments de l'environnement pour des analyses plus fines en laboratoire.
L'étude de la toxicité est réalisée sur des oursins d'élevage mis au contact des principales molécules identifiées (seules et en mélange) afin de déterminer les doses ayant un impact sur leur développement et pouvoir les comparer aux doses réellement trouvées dans la zone d'étude.

Les 6 premières campagnes ont permis d’identifier la nature et les niveaux de plus d’une trentaine de molécules dont l’origine ne peut être imputable qu’aux rejets chlorés des industriels de la zone d’étude. Toutefois, les niveaux de concentration ne semblent pas atteindre des niveaux de toxicité importants. L’effet « cocktail » reste toutefois à étudier.
Parmi l’ensemble de ces composés, un seul est retrouvé dans l’air : seul le bromoforme présente une constante de volatilisation suffisante pour être transféré de l’eau vers l’air. Là aussi, il a été démontré que son origine ne pouvait être que d’origine locale et liés aux activités de chloration de l’eau de mer.

La caractérisation des effets cytotoxiques et génotoxiques de trois composés organo-bromés (seuls ou en mélange), représentants principaux des trois grandes familles de sous-produits organo-bromés, a été démontrée sur les stades précoces du développement d’oursins.
Il a également été mis mise en évidence une adaptation locale des individus d’oursins de Fos-sur-mer (en particulier au bromoforme -composé majoritairement retrouvé dans l’eau-), qui passe, au moins en partie, par une différence de réponse transcriptomique à l’exposition au stress chimique par rapport au contrôle.

La toxicité du bromoforme, principal DBP détecté dans le golfe de Fos-sur-mer, a été caractérisée sur des peuplements naturels de procaryotes hétérotrophes ainsi que de phytoplancton < 20µm

Les résultats de ces recherches permettront d'évaluer les impacts environnementaux des rejets d'eaux chlorés en mer et d'acquérir de nouvelles connaissances qui pourront aider les autorités régulatrices locales et nationales pour formuler des stratégies de contrôle et des lignes directrices pour une utilisation raisonnée et régulée du procédé de chloration

A ce stade, 2 articles scientifiques ont été publiés (dans l'International Journal of Human and Environmental Health et Environmental Science and Pollution Research): elles reprennent les données acquises lors des 3 premières campagnes d'échantillonnage menés dans le site d'étude (Golfe de Fos), notamment l'identification des sous-produits bromés issues du rejet d'eaux chlorées en mer, et les effets toxiques de 3 molécules caractéristiques des 3 familles d’organohalogénés les plus fréquemment rencontrés, sur les oursins. L’effet « cocktail » de ces 3 molécules a été démontré.
Cinq communications orales réalisées dans deux conférences internationales (Etats-Unis et Finlande) ont permis d'échanger avec les chercheurs opérant dans le même domaine d'étude et de comparer les résultats obtenus dans différents pays

La chloration de l'eau de mer reste considérée comme l'un des moyens les plus efficaces et les moins coûteux pour contrôler la formation de biofilms (micro-fouling) qui pourrait obstruer les échangeurs thermiques ou le développement de moules (macro-fouling) dans les conduites industrielles . Ce procédé est utilisé dans de nombreux sites industriels dans le monde afin de pouvoir utiliser ces eaux soit à des fins de refroidissement (industries pétrochimiques et sidérurgiques) ou à des fins de réchauffement (terminaux méthaniers pour la liquéfaction des gaz). Ce procédé a également été retenu par l'Organisation Maritime Internationale comme l'un des procédés à utiliser pour le contrôle et la gestion des eaux de ballast des navires avant rejet en mer.
Quel que soit le type d'industries, et que ce soit sur terre ou en mer, la chloration est menée soit par dissolution de chlore gazeux, soit par addition de solution d'hypochlorite de sodium, soit encore -dans le cas d'utilisation d'eau de mer- par électrolyse à des doses comprises entre 0,5 et 1,5 mg.L-1 (exprimé en Cl2) sur des eaux prélevées dans le milieu naturel à des débits de plusieurs centaines de m3/s. Elle peut être menée en mode continu à faible dose pour stopper la fixation des larves, réduire leur croissance et les tuer à long terme ou alors par intermittence lorsque l'encrassement des échangeurs thermiques atteint un certain seuil.

La préoccupation majeure liée à l'utilisation de ce procédé est, dans une certaine mesure, le rejet de chlore dans l'environnement avec des impacts connus sur la faune et la flore mais, surtout, la production potentielle de nombreux composés halogénés formés par des réactions complexes entre le chlore résiduel et les constituants minéraux et organiques, naturels ou anthropiques, présents dans le milieu récepteur. Si la formation des sous-produits de chloration est bien étudiée et référencée dans la littérature pour les eaux destinées à la consommation humaine et les eaux douces, peu de données existe sur la nature et les niveaux de concentrations et sur la réactivité et le devenir de ces sous-produits dans les eaux littorales, la plupart étant basée sur les connaissances acquises par la réactivité du chlore avec la matière organique dans les eaux douces. Or, il est connu que le chlore (sous forme Cl2 ou HClO) peut rapidement réagir avec les ions bromure retrouvés dans l'eau de mer pour former instantanément de l'acide hypobromeux, composé beaucoup plus réactif que HClO avec la matière organique.

Dans les environnements marins, les quelques recherches qui ont été menées pour étudier l'impact de la chloration sur l'environnement se sont limités aux usines de dessalement de l'eau de mer et aux centrales nucléaires et thermiques, et à des études menées sur un seul point de rejet. Elles se sont également focalisées sur l'occurrence de peu de composés comme les trihalométhanes et les acides haloacétiques ou même uniquement sur la toxicité globale de ces rejets, sans même rechercher la nature des composés présents. Elles se sont majoritairement limitées à la mesure et à l'identification de ces composés dans le compartiment eau.

Le projet FOS-SEA vise à une meilleure connaissance de la nature des sous-produits pouvant être générés lors des procédés de chloration lorsque l'eau de mer est utilisée comme eau d'appoint, de déterminer les schémas réactionnels de leur formation et de leur devenir, d'étudier leur transfert dans les différents compartiments de l'environnement et leur dissémination et, enfin, d'étudier leur toxicité et celle de leurs métabolites.
Les résultats de ces recherches permettront d'évaluer les impacts environnementaux des rejets d'eaux chlorés en mer et d'acquérir de nouvelles connaissances qui pourront aider les autorités régulatrices locales et nationales pour formuler des stratégies de contrôle et des lignes directrices pour une utilisation raisonnée et régulée du procédé de chloration.

Coordination du projet

Jean-Luc Boudenne (Laboratoire de Chimie de l'Environnement)

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

IECP Institut Ecocitoyen pour la Connaissance des Pollutions
IMBE Institut Méditerranéen d'Ecologie et de Biodiversité marine et continentale
LCE Laboratoire de Chimie de l'Environnement
LNHE EDF R&D SITE CHATOU
PROTEE PROcessus de Transferts et d'Echanges dans l'Environnement

Aide de l'ANR 682 593 euros
Début et durée du projet scientifique : octobre 2016 - 42 Mois

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