Le rôle des ennemis naturels dans la diversité béta des arbres tropicaux – NEBEDIV
Le rôle des ennemis naturels dans la diversité béta des arbres tropicaux
La diversité des plantes tropicales est très élevée et elle inclue une composante significative de beta-diversité, à travers les habitats et les régions. Pourtant, les rôles relatifs de la biogéographie ainsi que des facteurs biotiques et abiotiques dans l’assemblage des communautés tropicales restent mal connus. Le projet NEBEDIV a pour objectifs d’évaluer de manière exhaustive la beta-diversité de forêts tropicales via de larges gradients géographiques et environnementaux.
Nous testons l’hypothèse de la Beta-diversité médiée par les Ennemis Naturels) en échantillonnant des plantes, des insectes et des communautés microbiennes du sol à travers les forêts amazoniennes.
Les ennemis naturels influencent de manière significative la diversité énorme des communautés d’arbres tropicaux. Le projet NEBEDIV nous permet d’analyser les deux composantes clés sous-tendant l’hypothèse NEDB : (1) la caractérisation de la co-variation des communautés de plantes, insectes et champignons à large échelle à travers le bassin amazonien ; et (2) l’estimation de l’importance de la spécificité d’hôte dans les interactions plantes-ennemis naturels.<br />En particulier, nous réalisons des inventaires de biodiversité à large échelle afin de déterminer si les remplacements d’espèces au sein des communautés se fait de manière coordonnée entre les plantes, les insectes, les oomycetes et les champignons ; et si une telle coordination apparaît dans des situations géographiques et environnementales particulières. <br />Nous analysons les arthropodes de surface ainsi que les microorganismes racinaires associés aux plantes hôtes afin de déterminer l’ampleur et l’échelle de spécificité des interactions plantes-ennemis naturels. En particulier, we analyserons les relations entre les distances phylogénétiques entre plantes et la similarité des communautés d’ennemis naturels qu’elles supportent.
Le projet s’organise en trois séries de taches. La première série implique un échantillonnage complet d’arbres, d’insectes et de communautés microbiennes du sol le long de gradients environnementaux à l’échelle de l’Amazonie entière. En particulier, ce projet se concentre sur une recherche collaborative en Guyane Française et Manaus au Brésil. Des subventions additionnelles nous ont permis d’ajouter un échantillonnage à Loreto au Pérou amenant ainsi à un total de plus d’une centaine de sites échantillonnés à travers des milliers de kilomètres. Notre réseau de sites est unique parce qu’il examine un gradient environnemental contrasté représenté par des forêts de sables blancs très pauvres en nutriments, les forêts de bas-fonds, mais aussi les forêts de terra-firme riches en argile déjà bien étudiées, au sein et entre les régions étudiées. Cela autorise une analyse sans précédent du turnover des espèces tropicales le long de gradients environnementaux s’étendant sur tout le bassin amazonien.
La deuxième série de taches consiste en un échantillonnage des interactions trophiques, centré sur les plantes hôtes, des insectes herbivores et des champignons racinaires. Pour chacune des lignées monophylétiques de plantes hôtes couvrant les groupes d’Angiospermes, nous collectons les insectes directement sur des arbres juvéniles ainsi que les champignons dans les racines et la rhizosphère, dans une partie (48) de nos parcelles permanentes. L’intégration des données moléculaires générées pour ces échantillons nous permettra de tester l’influence de la distance phylogénétique sur la spécialisation d’hôte à la fois pour des associations de surface et souterraines, et le long des gradients environnementaux et géographiques.
Nous sommes en train the faire des manipulations en conditions contrôlées sur la pathogenicite des Peronosporales (Phytophthora et Pythium) sur les différentes lignes de plantes notes, pour valider les etudes descriptives.
A ce jour, l’échantillonnage des communautés de plantes a été réalisé entièrement en Guyane et au Pérou. Etant donné que nous avons dus faire face à des délais de délivrance des permis, l’échantillonnage complet des parcelles à Manaus au Brésil sera réalisé fin 2016.
La collecte des arbres dans 74 parcelles atteint plus de 2300 taxons uniques, pour lesquels des herbiers ont été réalisés et standardisés. Uniquement 7% de recouvrement en présence d’espèces ont été observés entre les parcelles de Guyane et du Pérou, soulignant une béta-diversité géographique substantielle.
Les autres résultats majeurs à ce jour incluent l’échantillonnage initial des plantes hôtes des lignées choisis en Guyane et au Pérou à l’aide de subventions supplémentaires obtenues par PI Baraloto. Nous avons sélectionné onze lignées focales représentant la gamme de diversité des Angiospermes néotropicales ligneuses : Bombacoideae, Eschweilera, Inga, Lauraceae , Licania, Micropholis, Moraceae, Myrtaceae, Nyctaginaceae, Protium, et Rubiaceae.
Nous avons collecté les communautés microbiennes du sol associées à chaque arbre hôte juvénile, plus précisément dans les racines fines et le sol. En Guyane, Jean Legeay a été recruté en thèse avec pour objectif de comparer trois approches indépendantes de description des communautés d’Oomycètes : i) essais de piégeages suivis d’isolement de souches et identification moléculaire ; ii) métabarcoding d’ADN environnemental extrait du sol, et iii) metabarcoding d’ADN extraits de feuilles utilisées comme piège.
Greg Lamarre, recruté comme post-doc, a développé une méthode unique de collecte des arthropodes sur les arbres cibles, le ‘socket trap’, qui permet un échantillonnage instantané de l’ensemble des arthropodes présents sur les parties aériennes de la plante.
A ce jour, nous avons collecté plus de 1500 tiges des onze lignées sur plus de 31 parcelles dans 5 régions de Guyane ; ainsi que plus de 1200 tiges des onze lignées sur 28 parcelles au Pérou.
L‘élément le plus remarquable du projet est à ce jour l’échelle du plan expérimental. Nous avons échantillonné des sites éloignés et uniques de Guyane, du Pérou et du Brésil, collectant des données dans des régions peu visitées jusqu’à présent. Dans l’ensemble, cela représente un effort sans précédent de caractérisation de la diversité de la forêt amazonienne. Nous prévoyons la description de nombreux nouveaux taxons d’arthropodes et de champignons, de même que potentiellement plusieurs nouvelles espèces d’arbres. Les bases de données et les approches de modélisation que nous développons vont ainsi contribuer à une amélioration significative de nos connaissances sur le turnover des espèces dans les forêts les plus diverses de la planète. Les trois groupes cibles sont particulièrement sous-étudiés dans les tropiques, et aucune tentative n’a à ce jour été faite afin de les étudier simultanément sur les mêmes sites, particulièrement à l’aide d’un plan expérimental bien répliqué. Les données générées seront donc essentielles à l’estimation de la biodiversité régionale, comme outils d’aide à la décision à l’attention des responsables politiques dans le choix des aires protégées de la région, ainsi que pour améliorer les modèles de dynamique de la diversité en réponse aux scénarios de changements globaux attendus.
Une contribution parallèle importante du projet a été la formation d’étudiants multinationaux ainsi que le développement d’une équipe de recherche collaborative multinationale travaillant sur la biodiversité Amazonienne à l’échelle continentale. Nous avons obtenu des fonds complémentaires du programme AIRD GuyAmazon qui nous ont permis d’organiser des séminaires de travail à l’attention d’étudiants, de post-doc et de chercheurs français, brésiliens, péruviens et américains à la fois au Brésil et en France. Plus de 40 étudiants ont ainsi été formés lors de ces sessions, et le projet a subventionné la recherche de plus de 11 étudiant en France et au Brésil.
Les publications incluent :
Guevara, J. E., G. Damasco, C. Baraloto, P. V. A. Fine, M. C. Peñuela, O. Bánki, C. Castilho, A. Vincentini, D. Cárdenas, F. Wittmann, N. Targhetta, O. Phillips, J. Stropp, I. Amaral, P. Maas, A. Monteagudo, E. M. Jimenez, R. Thomas, R. Brienen, A. Duque, B. Magnusson, C. Ferreira, E. Honorio, F. de Almeida Matos, F. Ramirez Arevalo, J. Engel, P. Petronelli, R. Vasquez, and H. ter Steege. 2016. Low phylogenetic beta diversity and neoendemism in Amazonian white sand forests. Biotropica 48: 34-46.
Lamarre, G. P. A., D. S. Amoretti, C. Baraloto, F. Bénéluz, I. Mesones, and P. V. A. Fine. 2016. Phylogenetic overdispersion in Lepidoptera communities of Amazonian white-sand forests. Biotropica. 48: 101-109.
Fine, P. V. A. and C. Baraloto. 2016. Habitat endemism in white-sand forests: insights into the mechanisms of lineage diversification and community assembly of the Neotropical flora. Biotropica. 48: 21-33.
Roy, Mélanie, Heidy Schimann, Ricardo Braga-Neto, Rosa A E Da Silva, Jaime Duque, Dawn Frame, Felipe Wartchow, and Maria A Neves. “Diversity and Distribution of Ectomycorrhizal Fungi From Amazonian Lowland White-Sand Forests in Brazil and French Guiana.” Edited by Paul Fine. Biotropica 48, no. 1 (January 18, 2016): 90–100.
Lamarre, G. P. A., B. Hérault, I. Mesones, and P. V. A. Fine, & C. Baraloto. 2016. Taxonomic and functional composition of arthropod assemblages across contrasting Amazonian forests. Journal of Animal Ecology 85: 227-239.
Boudier Benjamin (2015). Etude de la diversité des Phytophthora spp. en forêt guyanaise. Mémoire de stage de Master 2, Université de Lorraine.
Schimann, H., Bach, C., Lengelle, J., Louisanna, E., Barantal, S., Murat, C., Buée, M. (2016). Diversity and Structure of Fungal Communities in Neotropical Rainforest Soils: The Effect of Host Recurrence. Microbial Ecology, 1-11.
Les plantes tropicales révèlent une diversité extraordinairement élevée à la fois à l’échelle locale et régionale, se caractérisant par une béta-diversité significative ainsi qu’un turn-over de la composition des espèces entre les habitats et les régions. Cependant, les facteurs sous-tendant la distribution des espèces sont encore très peu connus, puisque que plus de la moitié des plantes connues ont été collectées seulement une seule fois. En particulier, le rôle relatif que jouent la biogéographie, les facteurs abiotiques, et biotiques dans la limitation des distributions des espèces de plantes reste un sujet de débat.
Le projet NEBEDIV constitue une évaluation exhaustive de la béta-diversité de la forêt tropicale à travers de larges gradients géographiques et environnementaux. Nous intégrerons non seulement des analyses à l’échelle de la parcelle de plus d’une centaine de communautés d’arbres à travers l’Amazonie mais aussi une première caractérisation des fonges du sol ainsi que des communautés d’insectes herbivores à cette échelle. De manière critique, nous examinerons les corrélations entre ces différentes communautés à travers les gradients spatio-temporels mais aussi déterminerons la spécialisation à l’hôte des communautés fongiques et des insectes herbivores. Pour ce faire, nous profiterons des travaux de phylogénie moléculaire considérables ainsi que des collaborations établies dans des projets internationaux antérieurs. Etant donné l’infrastructure considérable que nous avons établie ces dernières années, nous estimons que nos équipes sont en position unique pour réaliser cette contribution vitale.
Les bases de données et approches de modélisation que nous pensons développer dans NEBEDIV contribuerons à améliorer de manière significative la compréhension des facteurs qui influence le turn-over des espèces dans les forêts parmi les plus diverses de la planète. Les trois groupes que nous avons choisis d’étudier sont parmi les moins étudiés dans les tropiques, et à ce jour aucune tentative n’a été faite pour les étudier de manière simultanée dans les mêmes sites, en particulier à l’aide d’un schéma expérimental bien répliqué. Les bases de données générées seront par conséquent essentielles pour estimer la biodiversité régionale, pour aider les décideurs politiques dans la détermination de zones à protéger à travers la région, mais aussi pour améliorer les modèles de dynamique de la biodiversité en réponse aux scénarios de changement d’usage des terres et du climat.
Coordinateur du projet
Monsieur Christopher BARALOTO (INSTITUT NATIONAL DE LA RECHERCHE EN AGRONOMIE ANTILLES-GUYANE)
L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.
Partenaire
INRA INSTITUT NATIONAL DE LA RECHERCHE EN AGRONOMIE
IBENS Institut de biologie de l'ENS
EDB Evolution et Diversite Biologique
INRA INSTITUT NATIONAL DE LA RECHERCHE EN AGRONOMIE ANTILLES-GUYANE
Aide de l'ANR 598 268 euros
Début et durée du projet scientifique :
septembre 2013
- 48 Mois