Nous explorons les effets de différents types de stress de l’embryon sur les comportements, le développement cognitif et le cerveau des juvéniles. Les modèles choisis sont tous ovipares, pour mieux contrôler le stress embryonnaire et/ou maternel, et phylétiquement éloignés (mollusques, poissons, oiseaux) pour potentiellement généraliser les résultats obtenus.
Le stress embryonnaire (via le stress de la mère ou, potentiellement un stress chronique directement perçu par l’embryon) a des conséquences majeures sur le développement comportemental et cognitif du jeune. Les mécanismes sous-jacents et la valeur adaptative de stress prénatals sont mal connus. Les espèces ovipares sont idéales pour mener des recherches sur ces questions. En particulier lorsqu’elles possèdent dès la naissance des répertoires comportementaux riche et une architecture cognitive sophistiquée comme les modèles qui sont proposés dans PReSTO’Cog.
Les modèles d’étude choisis impliquent une approche radicalement comparative, des mollusques invertébrés marins (seiche) aux poissons (truite, poisson zèbre) et oiseaux (poule, caille). Par ailleurs les modèles choisis diffèrent par leur niveau de domestication. Pour chaque espèce, les effets de stress prénatals « naturels » sont comparés à ceux de stress « artificiels ». Ce projet intègre donc différentes dimensions : proximales (mécanismes) et ultimes (adaptatives et évolutives).
Au terme des premières séries d’expériences, le stress prénatal induit des modifications comportementales et/ou morpho-anatomiques chez les juvéniles de toutes les espèces testées ici. Les effets sont différents en fonction de la nature du stress appliqué au juvénile. Le phénotype comportemental des poussins, cailleteaux et petits de seiche semblent plus sensibles aux stress maternels et artificiels. Ces effets différentiels sont atténués chez les alevins de truite (plus sensibles au stress maternel et naturel) et semblent absents chez le poisson zèbre.
Les résultats des séries d’expériences en cours (effets physiologiques, cognitifs et cérébraux) affineront ces données, en apportant une dimension adaptative aux réponses spécifiques observées. En effet, des modifications comportementales peuvent aider à compenser des déséquilibres physiologiques ou, à l’inverse, des processus neurophysiologiques ou endocrinien peuvent aider à réguler des perturbations comportementales des jeunes induites par un stress prénatal. La complétion de ces travaux sera nécessaire pour évaluer les champs d’application des recherches proposées (compréhension des mécanismes, application à l’élevage et au bien-être des espèces d’intérêt).
Après avoir achevé sa structuration matérielle et humaine, le projet est actuellement en phase d’acquisition active de données. Dans son état actuel d’avancement (18 mois), le projet a pu être valorisé par 8 communications dans des congrès internationaux, 7 communications en congrès nationaux. Deux symposia dédiés au stress prénatal ont été organisés par des partenaires du consortium qui ont réuni parmi les plus grands spécialistes du domaine au plan international. Un effort certain a été fait en direction de la communication vers le publique, via l’intervention dans un médium national ou via plusieurs conférences national grand ’public. Chaque partenaire a participé à l’effort de communication, de valorisation et de production scientifique du projet.
PReSTO’Cog vise à étudier les effets de stress embryonnaires naturels, artificiels et maternels sur le comportement, le système endocrinien et la plasticité cérébrale de juvéniles à des stades très précoces. Ce projet rassemble 5 équipes de recherche : de l’Université, du CNRS de l'INRA et d'IFREMER pour un ensemble de 14 chercheurs/enseignants-chercheurs et 9 techniciens très complémentaires, tant dans leurs approches disciplinaires (éthologie, endocrinologie et neurobiologie) que dans leurs compétences techniques. Le stress prénatal (SP) a été le sujet d'un intérêt scientifique spectaculairement grandissant ces vingt dernières années et, de nos jours, il interpelle avec force des domaines aussi différents que la recherche fondamentale, le bien-être animal et la préservation des espèces ou la santé humaine. PReSTO'Cog développe des études sur des modèles très innovants et adaptés : céphalopode (seiche), poissons (poisson zèbre et truite) et oiseau (caille et poulet). Ces modèles animaux sont tous ovipares. Il n’y a pas de soins parentaux aux œufs chez la seiche, la truite et le poisson zèbre, et ils peuvent être remplacés par un maintien des œufs en incubateur artificiel chez les oiseaux. Ainsi, ces particularitéspermettent un accès direct aux embryons et un contrôle rigoureux de leur environnement sensoriel, ce qui est impossible chez les mammifères. Les modèles proposés étant tous précoces (les petits sont autonomes à la naissance), une analyse des réponses comportementales dès l’éclosion est possible, en évitant d’éventuels biais induits par des interventions de la mère.
PReSTO'Cog s’intéresse à deux questions fondamentales qui ne sont pas encore abordées dans la littérature ou sont sujettes à de vifs débats :
1- Le stress prénatal de l’embryon a-t-il des effets bénéfiques ou délétères sur les comportements adaptatifs des juvéniles ?
2- La nature du facteur de stress (naturel ou artificiel) appliqué à l’embryon modifie-t-elle ces effets du SP?
Une question supplémentaire, mais cruciale sera abordée dans ce projet :
3- Le stress maternel induit-il chez les embryons l’émergence de phénotypes similaires à ceux observés lors de l’application d’un facteur de stress directement sur l’embryon ? Le cas échéant, par quels mécanismes ?
Pour répondre à ces questions, différents modèles d'étude ont été choisi avec soins, des invertébrés aux vertébrés, des poïkilothermes aux homéothermes et de modèles sauvages à des modèles plus ou moins domestiqués.
Les facteurs de stress « naturels » correspondent à des stimuli que les embryons sont susceptibles de percevoir en conditions naturelles (situation d’alarme, odeurs de prédateurs…). Les facteurs de stress artificiels correspondent à des facteurs potentiellement rencontrés en conditions d’élevage (manipulation, exposition à des substances aversives…). Ces facteurs de stress naturels ou artificiels seront aussi appliqués chez les mères juste avant la ponte. Des études endocriniennes permettront de mettre en évidence les réponses physiologiques de l’embryon, ou, le cas échéant de la mère, à ces facteurs de stress.
Pour évaluer les capacités d’adaptation comportementale des nouveau-nés de chaque espèce, nous proposons une batterie de tests évaluant les comportements exploratoires, défensifs et/ou alimentaires. Chez les espèces grégaires, les tempéraments des jeunes placés en situation sociale seront également observés. Ces études seront complétées par l’évaluation des performances cognitives au cours d’apprentissages embryonnaires. En parallèle, les conséquences de stress prénatals sur le développement cérébral seront évaluées.
La comparaison des résultats obtenus chez ces modèles, très différents mais possédant tous des modalités de développement bien circonscrites et contrôlables, permettra d'élargir les conclusions de ces recherches à une grande variété d'espèces.
Monsieur Ludovic DICKEL (Groupe Memoire et Plasticite comportementale) – ludovic.dickel@unicaen.fr
L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.
IFREMER Institut Francais de Recherche pour l'Exploitation de la Mer
Institut National de la Recherche Agronomique (INRA) Laboratoire de Physiologie et Génomique des Poissons
Université de Rennes 1 Ethologie animale et humaine - Université Rennes I
Institut National de la Recherche Agronomique (INRA) Physiologie de la Reproduction et des Comportements
Universite de Caen (UNICAEN) Groupe Memoire et Plasticite comportementale
Aide de l'ANR 360 253 euros
Début et durée du projet scientifique :
février 2014
- 42 Mois