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Robustesse de l'excitabilité dans les neurones dopaminergiques – ROBUSTEX

Comment les neurones maintiennent-ils une activité stable en dépit des perturbations génétiques et environnementales qu’ils subissent ?

Le but du présent projet est de déterminer les mécanismes qui permettent aux neurones dopaminergiques de maintenir leur activité électrique en dépit de la délétion de certains de leurs canaux ioniques. Etant donné la vulnérabilité de certaines sous-populations de neurones dopaminergiques à la neurodégénérescence (maladie de Parkinson), il est crucial de déterminer si ces sous-populations ont une robustesse variable face à ce type de perturbations.

Définir la robustesse des neurones dopaminergiques pour mieux comprendre leur fragilité.

Les neurones dopaminergiques de la substance noire compacte ont la particularité de dégénérer lors de la maladie de Parkinson. Les symptômes de cette pathologie, principalement d’ordre moteur (bradykynésie, diskynésie, voire akynésie), n’apparaissent cependant que lorsque la perte des neurones dopaminergiques de la substance noire compacte atteint 60 à 70% de la population originale. La perte de neurones dopaminergiques n’est cependant pas homogène, et il semble que les neurones exprimant la calbindine (CB+), une protéine de liaison au calcium, soient relativement protégés de la neurodégénérescence. D’une manière générale, on pourrait émettre l’hypothèse que les neurones dopaminergiques CB+ présentent une plus grande résistance, ou robustesse, aux perturbations environnementales telles que celles qui déclenchent la maladie de Parkinson. Ainsi, comprendre les mécanismes de la robustesse de l’activité neuronale dans les neurones dopaminergiques de la substance noire compacte pourrait permettre de mieux comprendre pourquoi certaines sous-populations spécifiques de neurones dopaminergiques sont si vulnérables à la neurodégénérescence.

Les méthodes utilisées dans ce projet sont essentiellement des méthodes électrophysiologiques qui permettent de déterminer la contribution précise des variations de propriétés des canaux ioniques dans la variabilité de l’activité des neurones dopaminergiques. Notamment, nous utilisons la technique d’action potential clamp pour déterminer si les variations dans les cinétiques des courants sodiques et potassiques activés durant le potentiel d’action sont responsables de la variabilité de durée et de forme du potentiel d’action d’un neurone dopaminergique à un autre. D’autre part, nous utilisons la méthode de dynamic-clamp pour simuler des conductances ioniques (notamment les courants IH, IA et le courant calcique porté par le canal Cav1.3) et déterminer si leurs relations quantitatives précises (corrélations positives, négatives, etc…) peuvent expliquer la robustesse du phénotype électrique des neurones dopaminergiques.

Au cours des 18 mois de projet qui ont été financés, nous avons essentiellement effectué un travail de caractérisation du phénotype électrique des neurones dopaminergiques de la substance noire compacte, préalable nécessaire à l’étude de la robustesse du phénotype de ces neurones. Ainsi, nous avons caractérisé le phénotype de ces neurones en utilisant des enregistrements en courant imposé de nombreuses propriétés électrophysiologiques (16 variables différentes) et en appliquant ensuite des analyses statistiques multi-variées à ces mesures électrophysiologiques. Nous avons entrepris cette caractérisation non seulement dans des neurones matures (29 jours postnataux), mais également dans des neurones juvéniles (à partir de 2 jours postnataux). Nous avons ainsi pu montrer que le phénotype électrique mature observé in vitro est acquis dès la fin de la deuxième semaine postnatale (P14), et que la trajectoire développementale qui permet d’acquérir ce phénotype est non linéaire. Cette étude nous a également permis de proposer une méthode nouvelle pour caractériser précisément un phénotype électrique, ce qui va nous permettre dans le futur de définir très précisément les variations phénotypiques liées à des perturbations chroniques de l’activité. Cette étude vient d’être accepté à eLife avec des révisions mineures (écriture principalement). D’autre part, en ce qui concerne plus précisément l’optimisation de la forme du potentiel d’action dans les neurones dopaminergiques, nous avons entrepris une caractérisation morphologique et électrophysiologique des neurones dopaminergiques au cours du développement. La morphologie des neurones dopaminergiques, et notamment la localisation de l’axone et du segment initial de l’axone (compartiment de genèse du potentiel d’action), est extrêmement variable, même à des stades précoces du développement. Pourtant, les propriétés électrophysiologiques de ces neurones ne semble pas particulièrement affectée par cette variabilité.

Comme dit précédemment, les principales perspectives données par ce travail seront de mieux comprendre la robustesse de l’activité des neurones dopaminergiques, et par là-même de mieux comprendre comment certaines sous-populations de neurones dopaminergiques résistent à la neurodégénérescence alors que d’autres sous-populations sont plus vulnérables dans des conditions pathologiques.

Dufour MA, Woodhouse A, Amendola J and Goaillard JM. Multi-dimensional analysis of electrical phenotype development in substantia nigra pars compacta dopaminergic neurons. (accepted at eLife with minor revisions).

La robustesse est une caractéristique générale des systèmes biologiques complexes. Elle représente la capacité d’une système complexe à maintenir sa fonction en dépit de perturbations internes et externes. Par certains aspects, le système nerveux des mammifères est étonnamment robuste face aux perturbations : la récupération post-lésionnelle ou la longue phase préclinique asymptomatique de la maladie de Parkinson en sont deux expressions frappantes. In fine, cette robustesse cognitive et comportementale dépend de la capacité de chaque neuron de maintenir un transfert d’information approprié. Décoder les mécanismes sous-tendant la robustesse de l’activité neuronale représente donc une tâche cruciale si nous souhaitons mieux comprendre la physiologie et la physiopathologie du système nerveux.

Dans ce projet, nous étudierons les principes biophysiques sous-tendant la robustesse de l’activité neuronale des neurones dopaminergiques (DA) de la substance noire compacte (SNc) de souris, en utilisant des approches électrophysiologiques et immunohistochmiques. Nous nous concentrerons particulièrement sur la façon dont ces neurones maintiennent leur activité pacemaker et la forme et l’efficacité énergétique de leur potentiel d’action. Pour ce faire, nous planifions d’étudier ces propriétés de décharge dans des conditions contrôle (souris sauvages) et des conditions perturbées (délétion du gène codant pour le canal calcique Cav1.3). En particulier, nous souhaitons déterminer les règles de régulation qui lient le canal Cav1.3 aux canaux HCN et Kv4.3. Ces trois types de canaux jouent un rôle majeur dans la genèse de l’activité pacemaker dans les neurones DA de la SNc. En dépit de son rôle démontré dans l’activité pacemaker, l’absence du canal Cav1.3 n’altère pas significativement cette activité, démontrant ainsi une compensation functionnelle remarquable par les autres types de canaux. Les données acquises dans le laboratoire ainsi que des études publiées récemment suggèrent qu’une régulation dynamique des canaux HCN et Kv4.3 est impliquée dans cette compensation.

De plus, bien que l’activité pacemaker soit maintenue chez la souris KO pour Cav1.3, on ne sait pas si la forme du potentiel d’action est maintenue. Ceci est un point important puisque le potentiel d’action consomme une part significative du budget énergétique des neurones, et la forme du potentiel d’action semble intimement liée à son efficacité énergétique. De plus, il a été proposé que des altérations du métabolisme cellulaire pourraient jouer un rôle dans la dégénérescence préférentielle de certaines sous-populations de neurones DA de la SNc. Nous déterminerons si l’efficacité énergétique du potentiel d’action est maintenue chez la souris KO pour Cav1.3, mais également si tous les neurones DA de la SNc produisent des potentiels d’action avec des efficacités énergétiques équivalentes ou si l’efficacité énergétique du potentiel d’action peut permettre de distinguer différentes sous-populations de neurones DA de la SNc. Dans cette partie du projet, nous nous focaliserons sur les courants qui sous-tendent le potentiel d’action pour déterminer les règles de régulation qui permettent de maintenir la forme du potentiel d’action et son efficacité énergétique lors de perturbations telles que les variations d’expression de canaux ioniques ou leur délétion.

Ainsi, nous pensons que décrypter les règles sous-tendant la robustesse de l’activité pacemaker et la forme du potentiel d’action dans les neurones DA de la SNc aura des implications pour notre compréhension générale de la robustesse de l’activité neuronale, mais également pour notre compréhension de la physiopathologie de ces neurones.

Coordination du projet

Jean-Marc Goaillard (Unité de Neurobiologie des Canaux Ioniques et de la Synapse) – jean-marc.goaillard@univ-amu.fr

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

Inserm UMR1072 Unité de Neurobiologie des Canaux Ioniques et de la Synapse

Aide de l'ANR 273 305 euros
Début et durée du projet scientifique : décembre 2012 - 36 Mois

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