Communication olfactive des émotions entre l’animal et l’Homme – Emodour

Un nombre croissant d’études a démontré qu’une communication émotionnelle existe entre les humains et les animaux, mais ce sont les modalités visuelles et acoustiques qui ont surtout été étudiées, alors que la communication olfactive, malgré son caractère primitif et répandu, a été négligée. Pourtant, nous venons de montrer récemment que les bovidés et équidés perçoivent les signaux olfactifs humains en lien avec nos états émotionnels, et ces signaux ont commencé à être caractérisés d’un point de vue chimique. Cela nous encourage à explorer davantage la communication chimique des émotions des humains vers les animaux, mais aussi des animaux vers les humains. Nous proposons un projet sur deux espèces animales (Equus caballus, Ovis aries), avec trois objectifs. (1) Déterminer si ces espèces discriminent les odeurs émotionnelles humaines et si ces odeurs induisent des émotions en retour chez l’animal. (2) Réciproquement, discriminons-nous les odeurs animales en lien avec leurs émotions et comment y réagissons-nous ? (3) Analyser la composition chimique des odeurs émotionnelles produites par les humains, les chevaux et les moutons, afin de confirmer l’existence de différences chimiques entre les odeurs correspondant à différentes émotions chez une même espèce, et de déterminer si les trois espèces partagent des signatures chimiques communes en lien avec leurs émotions. En termes de méthodes, la collecte des odeurs émotionnelles humaines se fera en s’appuyant sur des protocoles déjà bien établis et publiés. Les participants visionneront des extraits de films chargés émotionnellement (effrayant, joyeux, triste ou inspirant le dégout) pendant qu’ils porteront des compresses sous les aisselles. La collecte des odeurs émotionnelles animales suivra le même principe. Chevaux et moutons seront soumis à des situations de valences émotionnelles opposées (positives, comme des contacts tactiles agréables, et plus négatifs, comme un environnement nouveau), pendant qu’ils porteront des compresses placées sous des ceintures abdominales. Ces odeurs seront ensuite testées chez les sujets receveurs, dans des tests adaptés à chacune des espèces. Ainsi, les chevaux et les moutons participeront à des tests dits ‘d’habituation/discrimination’ qui permettront de déterminer s’ils peuvent discriminer entre différentes odeurs émotionnelles humaines. Puis ils seront soumis à des batteries de tests permettant d’évaluer leur réactivité émotionnelle (ex. test de néophobie) en fonction qu’ils sont exposés ou non aux odeurs émotionnelles humaines. Les humains quant à eux participeront à des tests spécifiques permettant de déterminer s’ils sont capables d’évaluer de façon implicite ou explicite les odeurs animales (ex. tests standardisés en laboratoire où ils auto-évalueront leur état émotionnel avant et après avoir senti l’odeur). Les batteries de tests proposées aux animaux et aux humains sont bien maitrisées par les équipes du consortium. Enfin, pour décrire la composition chimique des signaux émotionnels dans la sueur humaine et animale, les COV extraits seront analysés par chromatographie en phase gazeuse couplée à la spectrométrie de masse. Ce projet interdisciplinaire rassemblera des compétences en éthologie cognitive, psychologie humaine et écologie chimique, et permettra de mieux comprendre la communication chimique des émotions entre humains et animaux. Quatre équipes scientifiques collaboreront sur ce projet. Il sera porté par des scientifiques reconnus dans les domaines de la cognition animale, des émotions et du bien-être, de la relation humain-animal, de la perception olfactive et de l’écologie chimique.