Suivre la mégafaune marine par échantillonnage passif d'ADN environnemental – OMTeDNA
L’inventaire de la biodiversité marine est effectué par l’observation directe, la détection d’activité (acoustique) ou la capture d'organismes vivants, ce qui est souvent difficile à mettre en œuvre du fait de l'inaccessibilité ou de l'écologie des espèces. Une solution novatrice utilisée dans le monde entier, l’ADN environnemental (dite ADNe), est de collecter un échantillon d’eau dans lequel les fragments d'ADN sont filtrés, amplifiés, séquencés et comparer à des banques de données génétiques permettant ainsi de dresser la liste des espèces présentes dans le milieu échantillonné. Les courants, les marées et les vagues contribuent à la dispersion de l'ADNe, mais des études montrent une dispersion verticale et horizontale localisée, permettant à l'ADNe de donner une image des espèces présentes dans la zone étudiée. Cependant, cet échantillonnage réalisé le long d'un transect standard est susceptible de ne pas détecter l’ADN d'espèces mobiles absentes ou en faible densité au moment du prélèvement d’eau. Pour répondre à cette limitation, ce projet va développer une méthode utilisant l'échantillonnage passif de l'ADNe pour inventorier la biodiversité marine (des bactéries à la mégafaune mobile), basée sur l’utilisation de capteurs d'ADNe immergés pour collecter l'ADNe du milieu marin. L’étape 1 du projet est de faire la mise au point de prototypes de capteurs d'ADNe passifs stables à long terme. La forme des matériaux, la porosité, la composition chimique et l'état de surface seront caractérisés en relation avec l’adsorption d’ADN sous une forme intra et extracellulaire. Ces prototypes seront ensuite tester dans des conditions de plus en plus complexes : (1) en mésocosme avec des densités de poissons croissantes pour tester leur capacités à enregistrer ces densités et en fonction des durées d’immersion dans l’eau, (2) dans un bras de mer fermé pour tester la détection d’espèce à faible densité (tortue marine) et la communauté de poissons en comparaison avec la méthode ADNe traditionnelle de transect/filtration et (3) dans un étang littoral communiquant avec la mer pour tester la détection des bactéries, du phytoplancton et de la communauté de poissons également en comparaison avec la méthode ADNe traditionnelle. L’étape 2 de ce projet a pour objectif de valider la détection d’une espèce mobile par un réseau de capteurs passifs. L’expérience consiste à sécréter de l'ADN connu (avec un flux de sécrétion variable), à partir d’un bateau qui effectuera différentes trajectoires à différentes vitesses afin d'imiter le déplacement d'une espèce mobile dans un réseau de capteurs passifs. Afin de comprendre la dispersion de l’ADN entre le donneur (bateau en mouvement) et récepteur (le réseau de capteurs), la courantologie de la zone d’étude sera modélisée grâce au déploiement d’un dispositif de mesures de la circulation de l’eau (bouées radio- équipés). L’étape 3 sera le déploiement des capteurs en milieu naturel (e.g. dans des parcs éoliens offshore, des aires marines protégées) pour évaluer leur fréquentation par la mégafaune mobile, en comparant les performances des capteurs passifs avec des inventaires classiques (ADNe) et complémentaires (enregistrements acoustiques et vidéos). La courantologie des secteurs étudiés sera modélisée (Lagrangian model), à partir de mesures in situ collectées par un réseau de Profileurs de courant acoustiques à effet Doppler (ADCP). L’objectif est aussi d’évaluer le dimensionnement du dispositif (nombre de capteurs, distance entre les capteurs, durée d’immersion) afin de proposer un plan d’échantillonnage optimisé. Ce projet clairement interdisciplinaire permettra d'améliorer considérablement la connaissance du cycle de vie de l'ADNe (état, dispersion, adsorption), d’adapter une méthodologie originale (capteurs passifs) dans ce domaine en pleine expansion (inventaire eDNA) et ainsi renforcer les performances de la surveillance de la biodiversité marine actuellement sous-détectée.
Coordination du projet
Claude MIAUD (Centre d'Ecologie Fonctionnelle et Evolutive)
L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.
Partenariat
CEFE Centre d'Ecologie Fonctionnelle et Evolutive
MARBEC MARine Biodiversity, Exploitation & Conservation
MIO Institut Méditerranéen d'océanologie
IEM Institut Européen des Membranes
MARBEC MARine Biodiversity, Exploitation & Conservation
Aide de l'ANR 467 758 euros
Début et durée du projet scientifique :
septembre 2023
- 48 Mois