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Le passé en mouvement : textes, manuscrits et paysage monumental vénitien (1291-1381) – PastVenice

Résumé de soumission

Ce projet est dédié à l’étude des relations entre la mémoire du passé et la représentation du pré-sent à travers l’étude du cas exemplaire de Venise au XIVe siècle. Important centre commercial re-liant l’Europe, l’Afrique et l’Asie, la République de Venise connaît alors un intense processus d’auto-définition historique : entre 1291 et 1381, elle vit une période de « crise », lorsque ses ambitions et son rôle dans l’espace méditerranéen ont été réduits. Notre hypothèse est que ces circons-tances ont conduit à restructurer et à réinventer une histoire offrant des événements assez puis-sants pour répondre à un besoin urgent d’homologation sociale. Le lien intrinsèque entre sa voca-tion cosmopolite et son besoin d’origines mythographiques nouvelles façonne la production litté-raire et artistique de la ville, ainsi que son paysage urbain et l’auto-perception de ses habitants. À travers ce processus, la ville devient un espace où un « passé » idéalisé est inventé et mis en scène. De même, la promotion d’un passé illustre permet à Venise de promouvoir son image à l’étranger, objectif essentiel pour une ville dont la prospérité et le mode de vie reposent essentiel-lement sur le commerce. L’un des effets de cette mise en scène du passé vénitien est son impact sur l’affirmation de l’identité collective et individuelle. Le concept d’ «altérité» apparaît alors, une notion essentielle dans une ville fonctionnant comme un pont entre différents mondes et cultures et s’appuyant sur des modèles commerciaux alternatifs aux entreprises militaires.
Notre objectif à travers ce projet est d’analyser les étapes qui relient l’élaboration de nouveaux ré-cits du passé à l’invention de la venetianitas. En dépassant la tendance dominante qui consiste à considérer les textes, les monuments, les objets et les personnes comme des entités séparées, notre perspective sera plus inclusive, en décrivant le fonctionnement d’un réseau au sein duquel se négocie l’équilibre entre identité et altérité. Cette nouvelle perspective dévoilera comment le mécanisme d’élaboration de l’histoire devient un outil nécessaire pour affirmer le rôle d’une ville en tant que puissance commerciale internationale. En effet, la narration historique devient la force de propulsion d’une stratégie de marketing culturel et politique, que nous étudierons dans ses aspects historiques, narratifs et visuels. Notre hypothèse est que différentes catégories d’objets (les textes, les mosaïques, les sculptures, les manuscrits, les objets de luxe) participent à un phénomène global de propagande et de communication. La nécessité de regagner l’hégémonie commerciale internationale entraîne un remodelage de l’infrastructure politique et juridique vé-nitienne et, dans son contexte culturel, dicte des directives précises pour l’importation et l’exportation. En effet, pour l’importation sont mis en avant des techniques et des objets néces-saires à l’invention des structures mythiques de la ville et forgeant l’intemporalité de son image, à l’exemple des mosaïques à fond d’or ou de l’achat d’objets de l’Antiquité tardive qui sont retou-chés, imités, contrefaits. En revanche, l’exportation repose sur la reformulation de catégories et de techniques anciennes pour en créer de nouvelles. Ces nouveaux objets, qualifiés d’opus veneticum, affirment la prégnance de Venise sur la scène internationale.
La méthodologie choisie permettra ainsi de décrire un modèle plus global, afin de comprendre comment les enjeux et les usages du passé sont ancrés dans le présent, et donc de déconstruire un mythe de l’art et du tourisme qui résiste aujourd’hui comme une grande icône de la culture oc-cidentale. En d’autres termes, il s’agit de saisir les stratégies d’invention de la mémoire sur les-quelles repose le processus de mythification des lieux, des cultures et des paysages visuels, des stratégies qui participent encore de nos jours à la promotion de l’image de Venise en tant que pa-radigme unique, mirifique et intemporel.

Coordination du projet

Ilaria Molteni (EA4116 SAVOIRS ET PRATIQUES, DU MOYEN AGE À L'ÉPOQUE CONTEMPORAINE)

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

SAPRAT EA4116 SAVOIRS ET PRATIQUES, DU MOYEN AGE À L'ÉPOQUE CONTEMPORAINE

Aide de l'ANR 124 963 euros
Début et durée du projet scientifique : - 24 Mois

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