Franchir les frontières juridiques et médicales françaises pour recourir à une aide à la procréation – Outside-ART
En France, la loi de bioéthique, qui encadre l'assistance médicale à la procréation (AMP), est régulièrement révisée pour tenir compte des avancées sociétales et médicales. L’actuel projet de loi en discussion au Parlement depuis 2019 annonce des changements majeurs telle que l’ouverture de l’AMP pour toutes les femmes. Ce projet de loi entend combler le décalage observé entre les demandes sociales et la loi. En effet, les rapports institutionnels français soulignent que de nombreuses femmes et hommes ont recours à l’aide à la procréation en dehors du cadre légal et médical, à l'étranger ou en France de manière illicite. Des recherches scientifiques internationales ont montré que ces recours étaient un phénomène mondial et complexe qui doit être davantage étudié. Certains de ces travaux ont également montré que la France était parmi les principaux pays européens concernés par ces recours. Cependant, le phénomène reste peu documenté en France et les rares études ne permettent pas d’en estimer l'ampleur ni d’en comprendre les logiques et les dynamiques.
Dans une démarche d’évaluation des politiques publiques, le projet vise à étudier et comprendre pourquoi des personnes résidant en France recourent une aide à la procréation en dehors du cadre légal et médical (appelées ici "outsiders de l’AMP") malgré les changements légaux préconisés. Plus spécifiquement, l'objectif est d’évaluer le nombre d’outsiders de l’AMP en France et d’analyser leurs caractéristiques sociodémographiques, leurs expériences et motivations.
Mobilisant les méthodologies pour explorer les populations « difficiles à atteindre » et basé sur un travail préliminaire de 3 ans, le projet Outside-ART collectera trois sources de données : (1) une enquête Internet destinée aux outsiders de l’AMP ; (2) des données administratives provenant des registres de cliniques, d’associations spécialisées et du système d’assurance maladie français ; (3) des entretiens semi-directifs. Trois méthodologies seront mobilisées pour collecter et analyser ces données : (1) un Web-Crawling afin d’assurer une meilleure couverture de l'enquête numérique ; (2) une méthode statistique de pointe, le Benchmark multiplier, afin d'estimer le nombre d’outsiders de l’AMP ; (3) une étude qualitative post-enquête auprès des répondant·es de l'enquête Internet qui accepteront d'être interrogé·es dans le cadre d’un entretien.
Pour mener à bien cette recherche, nous avons mis en place un consortium avec lequel le présent projet a été préparé et testé : une équipe de recherche scientifique avec des chercheures et des ingénieur·es en charge de la réalisation du projet ; un comité scientifique extérieur avec des expert·es en AMP pour superviser les aspects scientifiques du projet ; et un groupe d’utilisateur·rice, avec des associations et médecins, pour garantir la pertinence du projet, sa cohérence avec la réalité, et sa faisabilité.
Le projet Outside-ART de 48 mois aura un impact social et politique important. Il fournira pour la première fois des données empiriques sur l’aide à la procréation réalisée en dehors du cadre légal et médical français; données particulièrement utiles pour les décideurs politiques, les professionnel·les de santé, les associations et les utilisateur·rices. Sur le plan scientifique, le projet contribuera à une meilleure connaissance de l’aide à la procréation et des questions connexes comme les changements sociaux autour de la famille et la parentalité. A travers les publications et communications scientifiques, et la mise à disposition des programmes et de la base de données, le projet pourra être un levier à la mise en place de futures études sur les outsiders de l’AMP et plus généralement les populations « difficiles à atteindre ». Nous avons également pour ambition d’étendre nos collaborations durant le projet pour pouvoir répliquer cette étude au niveau européen.
Coordination du projet
Virginie Rozée (Santé et droits sexuels et reproductifs)
L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.
Partenariat
SDSR Santé et droits sexuels et reproductifs
Aide de l'ANR 342 076 euros
Début et durée du projet scientifique :
- 48 Mois