Evaluation de l’importance des transmissions oligogéniques dans l'infertilité masculine – OLIGO-SPERM
Evaluation de l’importance des transmissions oligogéniques dans l'infertilité masculine
Il est admis que les causes génétiques jouent un rôle majeur dans l’infertilité masculine pourtant le rendement diagnostic reste faible. Des résultats préliminaires chez la souris suggèrent que l’accumulation de variants pathogènes pourrait affecter la fonction reproductrice. Puisque les seules causes monogéniques sont à ce jour explorées, nous croyons qu’une transmission oligogénique pourrait expliquer une majorité des cas sans diagnostic.
Objectifs principaux
Nous prévoyons de produire des modèle de souris portant jusqu’à 5 mutations hétérozygotes dans différents gènes de la spermatogénèse afin d’identifier les défauts structuraux et fonctionnels induits par cette accumulation de mutations. Nous comparerons ensuite la charge mutationnelle dans les gènes associés à l’infertilité chez des patients infertiles et des individus fertiles. Ce projet devrait accroitre nos connaissances sur la génétique de l’infertilité masculine, de réduire l’impasse diagnostique et d’améliorer la prise en charge du patient.
Grace à l’approche CRISPR/Cas9, nous prévoyons de produire différents modèles murins avec de multiples mutations hétérozygotes (MMM) dans différents gènes associés à l’infertilité (WP1). Dans nos travaux préliminaires nous avons réalisé ces modèles avec des mutations dans des gènes associés à la même fonction (assemblage et mouvement flagellaire). Ici, nous générerons des MMM avec jusqu’à 5 mutations dans des gènes avec des fonctions plus variées, impliqués dans la prolifération cellulaire et la méiose. Une étude précise du phénotype reproductif sera réalisée pour chaque MMM avec une étude approfondie des paramètres spermatiques afin d’identifier un impact morphologique ou fonctionnel de cette accumulation de mutations. De plus, la qualité nucléaire (compaction, fragmentation) et le contenu en ARN non codants des MMM seront comparés aux souris sauvages. Enfin, la compétence à assurer la fécondation et le développement embryonnaire de ces spermatozoïdes sera évaluée in vivo (accouplements) et in vitro (IVF, ICSI).
Pour confirmer l’importance de l’hérédité oligogénique dans l’infertilité chez l’homme nous proposons ensuite d’évaluer la prévalence de ce mode de transmission en comparant la charge mutationnelle dans des gènes associés à l’infertilité entre un groupe d’individus infertiles et fertiles (WP2). Après un séquençage exomique, nous comparerons la charge mutationnelle de variants rares dans les gènes liés à l’infertilité entre 300 individus infertiles non apparentés avec une oligozoospermie modérée à légères (>5M/ml and < 15M/ml) et 300 individus fertiles. Le recrutement de cette cohorte sera assuré par la collaboration avec les fédérations des CECOS et BLEFOC. Après l’appel des variants, nous réaliserons une étude cas-contrôle ciblant dans un premier temps un panel d’environ 500 gènes candidats (panel in silico) sélectionnées à partir des données disponibles dans la littérature. Ensuite, nous construirons un réseau biologique de la spermatogénèse par bioinformatique intégrative dans le but d’identifier de gènes candidats moins évidents et d’améliorer améliorer notre connaissance des défauts de la spermatogénèse entrainant une infertilité.
A ce stade de l'étude, la production des souris multi-hétérozygotes a démarré depuis plusieurs mois et les premières analyses du phénotype reproductif des souris mâles devraient pouvoir démarrer d’ici le dernier trimestre 2023. La sélection des gènes cibles en amont a permis de définir une courte liste de gènes dont l’inactivation bi-allélique (mutations délétères à l’état homozygote) entrainent une infertilité (azoospermie) chez les mâles mais pas d’infertilité chez la femelle. Également, nous nous sommes assurés que l’inactivation mono-allélique (mutation hétérozygote) de chacun de ces gènes (isolément) n’ait pas d’effet significatif sur la reproduction. Ainsi et afin de répondre à nos premiers objectifs, nous avons sélectionné 4 gènes appartenant à la même cascade de biologique au sein de la spermatogenèse : Piwil1, Piwil2, Rnf17 et Tdrd6, chacun impliqué dans le Piwi pathway. Afin d’augmenter la vitesse de production des animaux multi-mutants, la stratégie d’injection simultanée de plusieurs RNAg ciblant les 4 gènes candidats a été privilégiée. Ainsi nous espérons pouvoir obtenir les premiers animaux mâles multi-hétérozygpotes pour les 4 gènes évoqués en 12 mois environ au lieu de plusieurs années avec les stratégies de croisement et d’injection habituelles.
En parallèle, près de 120 individus contrôles ont pu aussi être recrutés pour l’étude. Les séquençages exomiques complets a démarré et nous devrions avoir les premiers retours des analyses d’ici la fin du premier semestre 2023. La cohorte des patients infertiles est encore en cours de recrutement au sein de différentes établissement de soin privés ou publiques en France mais également à l’international. L’objectif d’une cohorte de 150 patients devrait être atteint d’ici la fin 2023.
Immédiatement après l’obtention des premiers mâles adultes sexuellement nous réaliserons l’étude du phénotype reproductif. Cela comprendra notamment une étude de la fertilité in vivo et in vitro, des paramètres spermatiques (concentration, mobilité par CASA, morphologie, taille et poids testiculaires), une étude histologique de coupes testiculaires et la qualité nucléaire (TUNEL, bleu aniline…). En parallèle, nous réaliserons une étude transcriptomique comparative entre les différents génotypes afin d’évaluer l’impact de l’augmentation de la charge sur les ARN non codants notamment. En cas de succès de cette première création de lignée nous lancerons la production de 2 nouvelles lignées de souris multi-hétérozygotes avec des gènes de pathways différents impliqués dans le même phénotype et des gènes impliqués dans des phénotypes différents. Les premières données devraient aussi nous permettre de mieux comprendre le fonctionnement des Piwi pathway et les mécanismes physiopathologiques associés à ce pathway.
En parallèle, une fois les données génomiques obtenues nous réaliserons une analyse de charge mutationnelle sur les gènes de la spermatogénèse. Seules les mutations à l’état hétérozygote et avec un impact fort ou modéré pouvant être objectivé par les logiciels de prédiction seront retenus. Nous espérons avoir les résultats définitifs pour ce WP2 fin du premier semestre 2024.
Martinez G, Coutton C, Loeuillet C, Cazin C, Boguenet M, Lambert E, Dhellemmes M, Jean-Pascal Hograindleur JP, Vilpreux C, Muronova J, Kherraf Z-E, Neirijnck Y, Nef S, JEscoffier J, Ray P-F, Arnoult C. Oligogenic inheritance of male infertility in mouse. Elife. 2022;11:e75373.
L’infertilité masculine est un problème de santé publique majeur et semble avoir une composante génétique importante, cependant malgré l’identification récente de nombres causes génétiques grâce au séquençage haut-débit le rendement diagnostic reste désespérément très faible. En effet, lorsque le rendement diagnostic dépasse 50% dans les formes sévères et rares d’infertilité il n’excède pas 10% dans les formes fréquentes et modérées comme l’oligozoospermie. Comme les causes monogéniques sont généralement les seules recherchées, nous émettons l’hypothèse que ce faible taux diagnostic pourrait être dû à une hérédité plus complexe et ainsi qu’une partie des cas d’infertilité masculine s’expliquerait par une transmission oligogénique c’est-à-dire l’accumulation de plusieurs variants hypomorphes dans différents gènes fonctionnellement connectés. Nos résultats préliminaires chez la souris montrent que l’accumulation de mutations hétérozygotes dans différents gènes associés aux anomalies flagellaires augmente significativement les défauts morphologiques et diminue drastiquement la mobilité. Ces premiers résultats suggèrent que l’accumulation de variants délétères peut affecter la capacité reproductive et que la transmission oligogénique pourrait être une cause fréquente d’infertilité masculine. Nous envisageons de poursuivre cette étude initiale pour confirmer cette hypothèse d’une possible transmission oligogénique dans l’infertilité masculine et d’estimer sa fréquence dans les défauts modérés de la spermatogénèse comme l’oligozoospermie.
Grace à l’approche CRISPR/Cas9, nous prévoyons de produire différents modèles murins avec de multiples mutations hétérozygotes (MMM) dans différents gènes associés à l’infertilité (WP1). Dans nos travaux préliminaires nous avons réalisé ces modèles avec des mutations dans des gènes associés à la même fonction (assemblage et mouvement flagellaire). Ici, nous générerons des MMM avec jusqu’à 5 mutations dans des gènes avec des fonctions plus variées, impliqués dans la prolifération cellulaire et la méiose. Une étude précise du phénotype reproductif sera réalisée pour chaque MMM avec une étude approfondie des paramètres spermatiques afin d’identifier un impact morphologique ou fonctionnel de cette accumulation de mutations. De plus, la qualité nucléaire (compaction, fragmentation) et le contenu en ARN non codants des MMM seront comparés aux souris sauvages. Enfin, la compétence à assurer la fécondation et le développement embryonnaire de ces spermatozoïdes sera évaluée in vivo (accouplements) et in vitro (IVF, ICSI).
Pour confirmer l’importance de l’hérédité oligogénique dans l’infertilité chez l’homme nous proposons ensuite d’évaluer la prévalence de ce mode de transmission en comparant la charge mutationnelle dans des gènes associés à l’infertilité entre un groupe d’individus infertiles et fertiles (WP2). Après un séquençage exomique, nous comparerons la charge mutationnelle de variants rares dans les gènes liés à l’infertilité entre 300 individus infertiles non apparentés avec une oligozoospermie modérée à légères (>5M/ml and <15M/ml) et 300 individus fertiles. Le recrutement de cette cohorte sera assuré par la collaboration avec les fédérations des CECOS et BLEFOC. Après l’appel des variants, nous réaliserons une étude cas-contrôle ciblant dans un premier temps un panel d’environ 500 gènes candidats (panel in silico) sélectionnées à partir des données disponibles dans la littérature. Ensuite, nous construirons un réseau biologique de la spermatogénèse par bioinformatique intégrative dans le but d’identifier de gènes candidats moins évidents et d’améliorer améliorer notre connaissance des défauts de la spermatogénèse entrainant une infertilité.
Au final, ce projet devrait accroitre nos connaissances sur les bases génétiques de l’infertilité masculine, de réduire l’impasse diagnostique, d’affiner la prédiction phénotypique et d’améliorer la prise en charge du patient et le conseil génétique.
Coordination du projet
Charles Coutton (CHU Grenoble Alpes)
L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.
Partenariat
CHUGA CHU Grenoble Alpes
Aide de l'ANR 357 020 euros
Début et durée du projet scientifique :
septembre 2021
- 48 Mois