Comprendre le rôle du cycle de détyrosination/re-tyrosination de la tubuline dans la plasticité synaptique – SPEED-Y
Une meilleure appréhension des mécanismes moléculaires et cellulaires de la plasticité synaptique est importante pour notre compréhension du développement et des fonctions du cerveau. Des maladies dégénératives et psychiatriques ont été associées à des altérations des connexions synaptiques. Du côté postsynaptique, les épines dendritiques sont plastiques et leurs modifications de structure dépendent des cytosquelettes d'actine et de microtubules. Alors que les filaments d'actine sont principalement concentrés dans les épines, les microtubules sont plutôt confinés aux dendrites. Plusieurs groupes ont cependant montré que des microtubules dynamiques pénètrent transitoirement dans les épines, modulant leur morphologie et les mécanismes de plasticité.
Les microtubules sont des fibres du cytosquelette formés de dimères de tubuline alpha/beta qui ont des architectures et des fonctions polyvalentes dans les cellules. La tubuline alpha subit une modification spécifique, le clivage de sa tyrosine C-terminale et sa ré-addition, respectivement réalisés par une carboxypeptidase (TCP) et une ligase (TTL). Ce cycle (deTyr/Tyr) a été associé au cancer, à des cardiomyopathies et à une désorganisation cérébrale. Le Partenaire 1 a démontré le rôle vital de la TTL dans le cerveau, et récemment réussi à identifier des TCPs composées de vasohibine (VASH1 ou 2) associées à la petite protéine SVBP (Aillaud et al, Science 2017). L’équipe a aussi réalisé une analyse structure-fonction du complexe, et révélé que la perte de SVBP conduit à des anomalies cérébrales et une déficience cognitive chez la souris et l’homme (Wang et al., NSMB 2019 & Pagnamenta et al., HMG 2019). Le cycle deTyr/Tyr a été depuis longtemps lié à la dynamique des microtubules: les formes tyrosinées et détyrosinées de tubuline alpha sont respectivement présentes dans les microtubules dynamiques et non-dynamiques. Des liens de causalité ont été établis par le Partenaire 1, tels que la plus grande sensibilité des microtubules tyrosinés aux moteurs de la famille kinésine 13 catalysant la dépolymérisation des microtubules.
Le projet SPEED-Y vise à mieux comprendre les mécanismes biologiques qui relient la dynamique des microtubules aux fonctions des épines dendritiques. Nous émettons l'hypothèse que l’activité des épines dépend du statut de (dé)tyrosination des microtubules, établis par les enzymes TCP et TTL. Notre étude récente de cerveaux de patients Alzheimer corrobore cette hypothèse: une perte de TTL et une accumulation de tubuline modifiée (deTyr) s’accumule lors de la neurodégénérescence, induisant une perte de microtubules dynamiques très probablement délétère. Malgré son identification de longue date, la fonction de la TTL dans les neurones matures n’a pas été étudiée. Avec notre récente découverte des TCPs, nous sommes maintenant en mesure de décrypter comment cette modification réversible de la tubuline pourrait moduler/contrôler la plasticité synaptique. Nous proposons de décrypter le rôle du cycle deTyr/Tyr dans la plasticité synaptique à la fois au niveau cellulaire (neurones de l'hippocampe) et dans le tissu cérébral (région CA1 de l'hippocampe) en utilisant des souris transgéniques TTL et TCPs récemment développées. Le programme sera réalisé en étroite collaboration entre les trois partenaires, associant leurs compétences sur le cytosquelette et en neurobiologie moléculaire et cellulaire, électrophysiologie et microscopie super-résolutive. Nous entendons (a) établir des relations de cause à effet entre le statut de (dé)tyrosination de la tubuline et les paramètres de plasticité synaptique des neurones, (b) préciser le rôle fonctionnel du cycle dans la transmission neuronale, et (c) montrer comment la régulation des enzymes est cruciale pour la plasticité synaptique. Ce projet fondamental pourrait guider un nouveau concept thérapeutique ciblant les enzymes de détyrosination pour améliorer la dynamique des microtubules dans les synapses de neurones en dégénérescence.
Coordination du projet
Marie-Jo Moutin (GRENOBLE INSTITUT DES NEUROSCIENCES (GIN))
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Partenariat
GIN - Moutin GRENOBLE INSTITUT DES NEUROSCIENCES (GIN)
INP Institut Neurophysiopathologie
GIN - Buisson GRENOBLE INSTITUT DES NEUROSCIENCES (GIN)
Aide de l'ANR 598 617 euros
Début et durée du projet scientifique :
- 36 Mois