Electrolixiviation-Electrodepôt pour la valorisation des métaux précieux contenus dans les déchets d'équipements électriques/électroniques – EE4Precious
Procédé d'Electrolixiviation-Electrodéposition pour la récupération des métaux précieux contenus dans les déchets d'équipements électriques et électroniques (DEEE)
EE4Precious vise à développer un procédé de chimie douce pour la récupération des métaux précieux (Ag, Au, Pd, Pt) dans des déchets d'équipements électriques et électroniques (DEEE) en particulier les cartes de circuits imprimés. Le procédé envisagé est électrochimique et utilise des solvants ioniques.
Développement d'un procédé à faible impact environnemental pour la récupération sélective de l'argent, de l'or et du palladium contenus dans des boues anodiques de traitement de DEEE.
Les DEEE, et en particulier les circuits imprimés dits « riches » (ordinateurs portables, téléphones intelligents, tablettes, centres de données, etc.), représentent une ressource secondaire riche en métaux précieux (MP). lls contiennent généralement 50 à 100 ppm de platinoïdes (PGM) et 50 à 500 ppm d’Au, contre à 1 à 10 ppm et 1 à 20 ppm dans la plupart des ressources primaires, respectivement. Parmi les MP, les PGM sont des éléments particulièrement stratégiques pour les pays européens en raison de leur coût très élevé et de leur faible disponibilité. Les industries européennes dépendent fortement de la Russie et de l’Afrique du Sud, les principaux producteurs de PGM, nécessitant le développement de procédés de récupération efficace des PGM à partir de ressources secondaires. Cependant, la France est très peu active dans le recyclage des PGM et exporte la plupart de ses déchets contenant des PGM vers d’autres pays. <br />Jusqu’à présent, il n’y a pas de procédés industriels en France et pas d’unités métallurgiques dans le monde dédiées à la valorisation des DEEE. Les procédés industriels existants en Europe ou en Asie (Umicore, Boliden, Aurubis, Mitsubishi ou LS Korea) et comprennent un traitement pyrométallurgique réalisés dans des hauts fourneaux, permettant la récupération du Cu et un mélange contenant Ag, Au et les PGM. Cette fraction métallique est ensuite traitée via un procédé hydrométallurgique comprenant de nombreuses étapes : lixiviation chimique, extraction liquide/liquide, distillation fractionnée, utilisant des réactifs nocifs comme l’eau régale, les cyanures des composés organiques volatils, ce qui est loin des considérations de développement durable.<br />Le projet EE4Precious vise à développer un procédé plus respectueux de l’environnement pour la récupération sélective des métaux précieux (Ag, Au, Pd, Pt) contenus dans les DEEE. Le processus développé à la fin du projet doit être intégré par Terra Nova Développement, partenaire du projet, dans la première unité métallurgique entièrement dédiée au traitement DEEE, Sanou Koura (Donchery, France), actuellement en construction. <br />Le procédé s’appuie sur l’utilisation de solvants ioniques en tant qu’électrolytes (liquides ioniques et solvants eutectiques profonds), très peu volatils et à faible impact environnemental, dans un réacteur d’électrolyse unitaire couplant l’électrolixiviation et l’électrodéposition des métaux cibles (EE). La consommation de réactifs chimiques sera réduite au minimum par le recyclage des électrolytes et le contrôle régulier de leur composition. L’analyse du cycle de vie (ACV) du procédé et une étude CAPEX/OPEX permettront d’évaluer son impact environnemental et sa viabilité économique. Bien qu’étant d’un caractère très applicatif, le projet comporte des travaux de recherche fondamentale concernant la physico-chimie des solvants ioniques et la spéciation des métaux dans ces solvants particuliers, nécessaires à la conception d'un réacteur de laboratoire.
EE4Precious vise à développer un procédé de chimie douce pour la récupération des métaux précieux (Ag, Au, Pd, Pt) dans des déchets d'équipements électriques et électroniques (DEEE) en particulier les cartes de circuits imprimés. Le procédé envisagé est électrochimique, avec lixiviation anodique du déchet et dépôt de métal pur à la cathode. Les solvants utilisés sont des solvants ioniques, aux propriétés coordinantes et de grande stabilité électrochimique, pouvant remplacer efficacement les solutions aqueuses de complexants nocifs. Le projet, basé sur des aspects fondamentaux et appliqués, a pour objectifs :
- la compréhension du comportement des métaux dans l’électrolyte par une approche de l'échelle macroscopique à l'échelle moléculaire (WP1). Le WP1 couvre ainsi les propriétés macroscopiques des électrolytes (viscosité, conductivité…), l’étude des interactions à l’échelle moléculaire entre les espèces ioniques, et la spéciation des métaux ;
- l’étude de la réactivité et du transport des espèces métalliques solvatées (WP2), visant à déterminer la composition optimale de l’électrolyte, et à caractériser le comportement électrochimique des métaux, en corrélation avec les données issues du WP1 ;
- la conception d’une cellule de laboratoire entièrement surveillée/pilotée sur la base d’un modèle mathématique intégrant les résultats obtenus dans les WP 1 et 2 (WP3). Les aspects critiques du processus pourront ainsi être établis ;
- l’application au traitement d’un déchet synthétique puis réel, fourni par le partenaire industriel Terra Nova Développement (WP4) et l’étude de la durabilité de l’électrolyte. L'analyse du cycle de vie du procédé et les estimations CAPEX/OPEX doivent confirmer son potentiel industriel et environnemental.
Deux types d’électrolytes permettant de lixivier l’Au, le Pd et Ag avec des rendements faradiques quantitatifs ont été définis en début de projet : le mélange de liquides ioniques C4C1Im(NTf2)0,78Cl0,22 et l’Ethaline, un solvant eutectique profond (DES) composé de chlorure de choline (ChCl) et d’éthylène glycol (EG). Les travaux ont été poursuivis dans l’Ethaline, qui possède des propriétés de transport plus avantageuses (faible viscosité, conductivité élevée) et présente l’avantage d’être peu coûteux. La faisabilité du couplage électrolixiviation-électrodéposition (EE) a été établie en cellule de 100 mL pour l’Au et le Pd purs. Des méthodes de dosage des différents métaux par ICP-OES, mises au point en milieu solvant ionique, permettent de contrôler l’efficacité du procédé.
Nous nous sommes ensuite attachés à l’étude des interactions métaux-Ethaline et à la détermination des grandeurs fondamentales nécessaires au développement du procédé. Des procédures permettant l’acquisition de données fiables concernant les propriétés physico-chimiques et les caractéristiques cinétiques des systèmes électrochimiques ont été définies (répétabilité, validation croisée entre partenaires CEA/IJL). Ainsi, les propriétés physico-chimiques de l’Ethaline (densité, viscosité, conductivité, coefficient de diffusion) ont été déterminées, notamment en fonction de la teneur en eau. Les analyses structurelles par SAXS/WAXS en cours permettront d’interpréter ces données macroscopiques en termes d’interactions intra et intermoléculaires et d’ionicité. Des études par spectroscopie Raman et spectrophotométrie UV-visible ont permis d’établir la spéciation du Pd et de l’Au lixiviés dans l’Ethaline, et ont mis en évidence la dismutation lente de l’Au(I) formé. Les analyses par RMN-PFG et NOESY menées actuellement permettront de mieux comprendre les interactions intra et intermoléculaires entre les métaux et le solvant ionique. Concernant l’étude de la réactivité électrochimique des métaux, à ce jour le système de l’Ag, choisi comme modèle, est parfaitement caractérisé dans l’Ethaline en termes de propriétés de transport et de cinétique électrochimique .
La suite des travaux couvrira deux aspects : la poursuite de l’acquisition des données fondamentales (WP1-2) et la mise en œuvre du procédé à l’échelle laboratoire (WP3-4). L’efficacité énergétique, l’impact environnemental et la rentabilité économique du procédé serviront de base de réflexion pour son optimisation. Ainsi, le remplacement de l’éthylène glycol est actuellement à l’étude, afin de réduire l’impact environnemental et le coût du procédé tout en gardant une réactivité chimique similaire vis-à-vis des métaux. L’impact sur les propriétés physico-chimiques du DES, les interactions métal-DES et la faisabilité du procédé est en cours.
Deux aspects du procédé seront ensuite plus particulièrement étudiés :
- la stabilité chimique de l’Au lixivié et son impact potentiel sur le procédé ;
- la sélectivité du procédé et la composition des dépôts métalliques récupérables à la cathode (alliages, métaux purs) en regard de la valorisation économique/du coût du procédé/de son impact environnemental (recyclage du solvant, ACV).
La mise en œuvre à l’échelle laboratoire sera menée en parallèle avec la méthodologie suivante :
- conception d’un réacteur électrochimique à l’aide d’un modèle intégrant les cinétiques réactionnelles et les équilibres chimiques des systèmes métal-DES. L’évaluation des performances sera menée sur un déchet synthétique ;
- application à des mélanges de métaux précieux issus du pré-traitement de déchets réels par TND ;
- étude de la durée de vie et du recyclage du solvant permettant de réaliser l’analyse du cycle de vie du procédé.
Publication :
ElectroLeaching-ElectroChemical Deposition (EL-ECD) of gold and palladium in a deep eutectic solvent (DES), Journal of Environmental Chemical Engineering, 10(3), 108004, doi.org/10.1016/j.jece.2022.108004
Communications :
1. Coupling electrochemical leaching and electrodeposition in ionic solvents for critical and precious metals recovery, S. Legeai, EUCHEMSIL 2022, 5-10 Juin 2022, Patras, Grèce
2. Electroleaching and electrodeposition in ionic solvents for the recovery of silver from urban mines, C. Bertoloni, EUCHEMSIL 2022, 5-10 Juin 2022, Patras, Grèce
3. Mass transport in Ionic Solvents during electrodeposition of gold and palladium, ILMAT6, 22-26 Novembre 2021, Obernai, France
4. Ionométallurgie : apport des solvants ioniques à l'extraction des métaux de la mine urbaine, S. Legeai, Webinaire GDRPromethee, 9 Décembre 2021
EE4Precious (Electroleaching-Electrodeposition For the recovery of Precious metals from waste electrical and electronic equipments) est un projet de recherche collaboratif impliquant 3 partenaires académiques (IJL, LRGP, CEA) et 1 industriel (TND) aux compétences complémentaires dans le domaine de la mine urbaine. La production de métaux précieux (MP : Au, Pt, Pd) à partir de ressources primaires/secondaires se fait actuellement via des procédés complexes d'extraction utilisant des agents corrosifs et dangereux, et générant des émissions gazeuses nocives. EE4Precious vise à développer une alternative chimique douce pour la récupération de ces métaux stratégiques dans des déchets d'équipements électriques et électroniques (DEEE) en particulier les cartes de circuits imprimés (PCB). D’une production croissante, les DEEE sont beaucoup plus riches en MP que les ressources primaires. Ils représentent un énorme potentiel économique et un atout environnemental pour la préservation des ressources. Comme démontré par le consortium, la séparation efficace des métaux peut être réalisée dans une cellule électrochimique, avec lixiviation anodique et dépôt de métal pur à la cathode (procédé EE). Pour les MP, les liquides ioniques (LI), des solvants coordinants et de grande stabilité électrochimique, peuvent remplacer efficacement les solutions aqueuses de complexants nocifs, comme le montre la récupération du Pt des piles à combustible usagées par EE dans un mélange de LI par l’IJL et le CEA.
EE4Precious porte sur un déchet plus complexe, contenant des MP, issu du traitement des PCB mis au point par TND permettant d’éliminer les métaux de base et la matière organique. Le processus d'EE nécessitera une sélectivité optimale des deux réactions EE pour éviter la dégradation du LI et obtenir des MP purs. Pour cela, la composition du LI sera optimisée en corrélant l’étude des interactions des ions métalliques avec l'environnement LI et les mécanismes/la cinétique des processus d'électrode. Une cellule pilote sera ensuite conçue et testée en vue du développement industriel.
Le projet, basé sur des aspects fondamentaux et appliqués, est organisé en 4 WP en plus de WP0 pour la gestion de projet et la communication. Tout d'abord, une approche de l'échelle macroscopique à l'échelle moléculaire permettra une compréhension approfondie du comportement des métaux dans l’environnement LI. Le WP1 couvre ainsi les propriétés macroscopiques des milieux LI (viscosité, conductivité…), l’étude des interactions à l’échelle moléculaire entre les espèces ioniques, et la spéciation des métaux, en utilisant des techniques analytiques et spectroscopiques avancées (SAXS, RMN-HOESY, EXAFS-XANES). L'inter-corrélation des trois sources de données conduira à des lois physiquement significatives pour les propriétés de la phase LI. La réactivité et la capacité de transport des espèces métalliques solvatées par le LI forment le WP2, visant à déterminer les mélanges de LI optimaux en terme de composition, et à caractériser le comportement électrochimique des systèmes (métal-LI), en corrélation avec les données issues du WP1.
Tirant profit des deux sources de données ci-dessus, un modèle mathématique sera élaboré (WP3). Les aspects critiques du processus pourront ainsi être établis, et une cellule de laboratoire entièrement surveillée/pilotée sera conçue, comprenant une anode sacrificielle à lit compact contenant le déchet et une cathode plate pour la récupération des métaux. La méthodologie d'extraction des métaux sera définie pour une sélectivité et des rendements optimaux avec des mélanges synthétiques, puis avec le déchet réel préparé en WP4.
La viabilité de EE4Precious et son intégration dans la chaîne de traitement des DEEE sera étudiée sous la conduite du partenaire industriel (WP4), ainsi que la durabilité et la purification du LI. Enfin, l'analyse du cycle de vie du procédé EE et les estimations CAPEX/OPEX doivent confirmer son potentiel industriel et environnemental.
Coordination du projet
Sophie LEGEAI (Institut Jean Lamour (Matériaux - Métallurgie - Nanosciences - Plasmas - Surfaces))
L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.
Partenariat
LRGP Laboratoire Réactions et Génie des Procédés
SyMMES Systèmes Moléculaires et nano Matériaux pour l'Energie et la Santé
IJL Institut Jean Lamour (Matériaux - Métallurgie - Nanosciences - Plasmas - Surfaces)
TND
Aide de l'ANR 522 894 euros
Début et durée du projet scientifique :
- 42 Mois