Traitement laser du tungstène en interaction avec des ions d'hélium – LETHE
Traitement par laser du tungstène en interaction avec des ions hélium
Une description détaillée des changements dans le processus de recyclage (en raison des interactions hydrogène-hélium/paroi et lumière/paroi) permettra de prédire le comportement des composants du revêtement du plasma pendant le fonctionnement du plasma et pendant les instabilités du plasma et de proposer des méthodes efficaces pour prévenir la dégradation des composants du revêtement du plasma et pour améliorer le contrôle du plasma.
Étude du processus de recyclage et de la dégradation des PFC due à l'interaction avec le plasma
WP1 : Les mécanismes physiques qui sous-tendent la dégradation des matériaux (par exemple, la formation de cloques ou la recristallisation des métaux) et le changement de leurs propriétés physico-chimiques (par exemple, le piégeage d'espèces implantées dans le volume ou l'adsorption d'espèces sur la surface). Le premier WP se concentrera sur l'étude des synergies entre le plasma He et les charges thermiques induites par laser sur la microstructure du tungstène et la rétention HI.<br /><br />WP2 : L'influence des charges thermiques (transitoires), par exemple les ELMs (simulées par de courtes charges laser de haute puissance), dans le processus de recyclage en fonction des conditions de surface. Dans ce deuxième WP, nous caractériserons expérimentalement l'évolution de la température et de la densité d'un plasma (avec une température initiale similaire à celle d'un plasma de fusion de bord) suite à l'interaction de matériaux en tungstène implantés d'ions avec un laser de haute puissance.<br /><br />WP3 : Le développement de méthodes optiques pour prévenir la dégradation dramatique de la surface telle que la formation de cloques et l'éclatement qui peut conduire à la perturbation du plasma. La troisième tâche sera confrontée au problème technique de la dégradation de la surface. Un système ellipsométrique sera utilisé pour effectuer des mesures in-situ en continu (pendant l'implantation d'ions) des propriétés optiques du tungstène. Le suivi de la modification des propriétés optiques induite par l'évolution de la surface due à l'implantation d'ions permettra de déclencher une irradiation laser de forte puissance avant la formation de cloques afin de rétablir les conditions physico-chimiques de surface propre (24 mois).
Nous avons acquis un laser de haute puissance (500W, 1080 nm, modèle Laser Qube 500w) et un ellipsomètre spectroscopique in-situ (400-1000 nm, modèle Woolam iSe). Les deux instruments ont été installés dans deux montages expérimentaux différents pour réaliser d’un côté des mesures de thermo-désorption induite par laser (LID) sur des échantillons de W implantés avec des ions d’He et, de l’autre côté, l’étude de la modification morphologique et des propriétés optiques du W dans un environnement plasma.
Le développement de la technique LID était l'objectif principal de la tache WP2a (Workpackage Development of the LID) et a permis de reproduire les expériences de thermo-désorption effectuées avec des méthodes classiques (chauffage radiatif avec un filament de tungstène). L’adaptabilité de la technique LID a permis d’avancer plus rapidement que prévu sur la tache WP1a, l’objectif de cette tâche étant de caractériser l’interaction He+-W et pouvoir étudier la cinétique de formation de cloques. Nous avons pu réaliser des expériences de thermo-désorption, à partir de la température ambiante jusqu’à environ 2000 K, température difficilement atteignable dans des temps courts (< 60 secs) avec un chauffage radiatif. Ces expériences représentent une des premières investigations in situ du dépiégeage de l’He implanté dans le W (un monocristal W(110)) et ont permis de mesurer les températures de désorption de l’He. Ces températures peuvent être associées (en utilisant l'analyse dite de « Redhead ») à des énergies de liaison des différentes « espèces » (cluster d’He, cluster He – lacune) formées lors des processus de piégeage et de diffusion de l’He dans le W. La comparaison des énergies obtenues expérimentalement avec les énergies issues des modèles théoriques (par exemple DFT) est en bon accord et pourra permettre de mieux contraindre le développement des modèles de rétention de l'He et de croissance des cloques basés sur des quantités ab initio. Les processus de piégeage et de formation des cloques seront ensuite étudiés en changeant la terminaison de surface (plus précisément en utilisant des échantillons polycristallins) et l’énergie des ions. Ces études permettront de compléter le WP1a. En outre, la possibilité d’installer l’ellipsomètre et le laser dans deux montages expérimentaux différents a permis de débuter en parallèle la tache WP1b. L’objectif de cette tâche était d’étudier la formation des cloques induites par le plasma d’He la corrélant à la réponse optique (notamment en utilisant un ellipsomètre spectroscopique in-situ dans la gamme 400-1000 nm) du W lors de l’exposition au plasma. Cette tâche a été préparée en menant des études préliminaires sur les propriétés optiques du W, le rôle de la rugosité de surface et de la composition chimique des échantillons. Les propriétés optiques de cinq échantillons de W avec différentes valeurs de rugosité (20-100 nm) ont été mesurées, avec un réflectomètre optique, pendant un recuit laser (rampe en température de 300 à 1100 K). Nous avons observé une augmentation de la réflectivité après recuit et démontré qu'elle était due à un changement de la composition chimique de la surface, en particulier une réduction de l’épaisseur d'oxyde natif. En mettant en évidence le rôle joué par la rugosité et les impuretés de surface (par exemple, l'oxyde), ces études permettront de mieux comprendre les mesures ellipsomètriques que nous avons acquises en exposant différents échantillons de W à des plasmas de D et d'He.
dans la version initiale du projet, l’étude systématique de l'interaction plasma D/W n'était pas prévue, néanmoins des expériences de calibration réalisées avec un plasma de D ont révélé la possibilité d’étudier la cinétique de dégazage de D grâce aux mesures ellipsomètriques in-situ. C'est pourquoi nous avons décidé de consacrer trois mois à une étude plus détaillée de cette interaction. En outre, nous avons reçu un financement de la part de l’ISFIN (Institut Sciences de la Fusion et de l’Instrumentation en environnements nucléaires) pour financer une mission à l’Institut Jozef Stefan en Slovénie et mener, en 2023, des expériences complémentaires en utilisant la technique d’analyse par réaction nucléaire (NRA, Nuclear Reaction Analysis) sur nos échantillons de W implantés avec ions D et He.
1. Pappalardo et al., Optical properties of tungsten: a parametric study to characterize the role of roughness, surface composition, and temperature, Optics 2022, 3, 216–224. doi.org/10.3390/opt3030021
2. Dunand et al., Flux dependence of helium retention in clean W(110): experimental evidence for He self-trapping, under review in Nuclear Materials and Energy
Dans un plasma de fusion, les ions s'échappent du plasma de cœur et frappent les parois du réacteur où ils restent implantés, pour ensuite désorber à cause des températures élevés des parois (~900 K). Ce processus d'implantation/dégazage est appelé recyclage. Il concerne principalement le divertor de tungstène qui reçoit le flux de puissance le plus élevé (jusqu'à 40 MW/m²). L'interaction du flux de particules avec les parois peut induire des modifications de l'état de surface et des propriétés thermo-mécaniques des composants face au plasma, affectant ainsi le bon fonctionnement du réacteur.
Pour ces raisons, dans le cadre du projet LETHE, nous étudierons expérimentalement les changements dans le processus de recyclage induits par les interactions He/paroi et lumière/paroi. Ces études sont nécessaire pour prédire comment les parois se comporteront pendant le fonctionnement du plasma dans les tokamaks. Les expériences seront menées grâce à un dispositif ultravide permettant de caractériser la composition atomique des surfaces des échantillons, d’implanter de l’hélium avec des faisceaux ou un plasma, et de quantifier les espèces piégées dans le volume des matériaux par thermo-désorption.
Trois sont les principaux objectifs du projet LETHE :
1. Comprendre les mécanismes physiques sous-jacents la dégradation des matériaux (par exemple, la formation de cloques) et le changement de leurs propriétés physico-chimiques après des cycles d'implantation de He/thermo-désorption. De plus, un ellipsométre spectroscopique in situ, développé dans le cadre du projet LETHE, permettra de sonder la dégradation de la surface des matériaux pendant l'interaction ion-surface.
2. L'étude de l'influence des charges thermiques dans le processus de recyclage et, par conséquent, sur les paramètres du plasma de bord. Les charges thermiques, simulées par un laser de haute puissance, atteignant des échantillons pré-implantés, induiront une désorption soudaine des espèces piégées qui, par conséquent, perturbera le plasma. Les propriétés du plasma (par exemple la température et la densité) seront mesurées par une sonde de Langmuir.
3. Mise au point d'une méthode optique pour empêcher la dégradation de la surface, comme la formation de cloques, qui peut entraîner une perturbation du plasma.
Coordination du projet
Marco Minissale (Physique des interactions ioniques et moléculaires)
L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.
Partenariat
PIIM Physique des interactions ioniques et moléculaires
Aide de l'ANR 225 599 euros
Début et durée du projet scientifique :
- 48 Mois