CE34 - Contaminants, écosystèmes et santé

Effets des particules alimentaires de dioxyde de Titane sur les interactions microbiote-hôte : rôle du récepteur aryl hydrocarbure et impact sur le développement de désordres métaboliques et du cancer colorectal. – TitADiet

Exposition orale chronique à l’additif alimentaire E171 (dioxyde de titane) et risques de maladies chroniques chez l’homme : rôle du microbiote intestinal dans un modèle souris.

Des particules de TiO2 sont utilisées comme colorant (additif E171) dans de nombreux aliments transformés. Le projet TitADiet étudie les conséquences d’une exposition orale chronique au E171 sur l’apparition sinon l’aggravation de désordres métaboliques et/ou de lésions tumorales intestinales. Un lien avec une dysbiose intestinale et ses conséquences sur l’intestin, l’immunité et le métabolisme sera évalué.

Conséquences d’une exposition chronique à l’additif E171 aux doses alimentaires sur le métabolisme et le risque de cancer colorectal chez la souris.

Le dioxyde de titane (TiO2) est un colorant/opacifiant blanc et un agent de brillance retrouvé dans les confiseries, les aliments transformés, les sauces et le glaçage. En Europe, l’utilisation du TiO2 alimentaire (référencé E171) est autorisée sans établissement d’une dose journalière acceptable. Après ingestion, le TiO2 est capable d’interagir avec la flore intestinale. Or, le microbiote intestinal est souvent négligé en toxicologie alimentaire alors qu’il joue un rôle clé dans plusieurs fonctions physiologiques telles que les fonctions digestives, métaboliques et immunitaires. Une altération du microbiote intestinal (appelée dysbiose) est associée à différentes maladies telles que l’obésité et le cancer colorectal (CCR). L’objectif de TitADiet est d’étudier le lien entre l’exposition orale chronique au E171 et l'apparition et/ou l'aggravation de désordres métaboliques et de CCR en évaluant l'impact du TiO2 sur la composition et la production de molécules protectrices par le microbiote et ses conséquences sur la barrière intestinale, la réponse immune, le métabolisme et l’initiation de lésions précancéreuses au niveau intestinal. Outre l’apport de données inédites en toxicologie, ce projet aidera les parties prenantes et les industriels dans leur décision de maintenir ou non l’autorisation et l’utilisation du E171 dans les aliments. TitADiet pourrait également permettre d’établir un lien potentiel entre facteurs environnementaux (ici ingestion de l’additif alimentaire E171) et l’augmentation de certaines maladies chroniques liées à la dysbiose intestinale comme les troubles métaboliques et le CCR.

TitADiet utilise des souris de laboratoire nourries avec des régimes supplémentés ou non avec l’additif alimentaire E171 à des doses d’exposition humaine. Les protocoles utilisés suivent les recommandations de l’Efsa sur la durée d’exposition minimale (90 jours) pour être utile à l’évaluation du risque sanitaire pour l’homme, notamment l’incorporation de l’additif aux aliments (croquettes) pour des conditions réalistes d’exposition en population générale. Après plusieurs mois d’exposition des souris aux différents régimes et doses, les impacts sur le microbiote intestinal, la fonction barrière de l’intestin et le métabolisme sont étudiés par une combinaison d’approches moléculaires ciblées ou à haut débit (métagénomique, transcriptomique, métabolomique) dans les deux sexes. De plus, des approches de transfert de microbiote intestinal et d’antibiothérapie ainsi que l’utilisation de souris déficientes pour des gènes d’intérêt nous permettrons de déterminer le rôle du microbiote intestinal dans les effets potentiellement délétères du E171.

Nos résultats préliminaires montrent qu’une exposition orale chronique à l’additif E171 dès la gestation ou chez des souris adultes altère la composition ainsi que la capacité du microbiote intestinal à produire des molécules protectrices pour l’hôte. Ces effets sont observés uniquement chez les mâles exposés au E171 et s’accompagnent d’une inflammation intestinale dite à « bas bruit » et d’une intolérance au glucose. De plus, une exposition au E171 chez le mâle aggrave les effets métaboliques délétères d’un régime riche en graisse lorsque cette exposition à l’additif débute dès la gestation. Aucun effet sur le microbiote intestinal et le métabolisme n’a été observé chez les femelles exposées au E171 dès la vie in utero. Seule une diminution de la réponse immune intestinale pro- et anti-inflammatoire a été observée chez les femelles traitées au E171. Ces résultats concluent à un dimorphisme sexuel dans les effets d’une exposition chronique au E171 au niveau intestinal et métabolique et montrent le potentiel délétère sur le métabolisme du glucose quand l’exposition à l’additif débute dès la gestation et se poursuit à l’âge adulte.

Les perspectives du projet consistent à déterminer le rôle du microbiote intestinal dans les effets du E171 au niveau intestinal et métabolique via des approches de transfert de flore et d’antibiothérapie ainsi que l’utilisation de souris déficientes pour des gènes d’intérêt. Le microbiote intestinal et son interaction avec le système immunitaire intestinal étant souvent négligé en toxicologie, notre approche permettra l’apport de données inédites pour les autorités sanitaires (ANSES, Efsa) quant aux conséquences « santé » de facteurs alimentaires peu absorbés par l’intestin (à l’exemple d’additifs inorganiques communs) impactant l’homéostasie du microbiote et le risque d’une exposition périnatale en comparaison de l’adulte à ces agents.

Une conférence présentant nos résultats préliminaires a été sélectionnée pour le Congrés annuel de la Société Française de Nutrition (SFN) lors des Journées Francophones de Nutrition (JFN, Lille) le 12 Novembre 2021.

Les particules minérales manufacturées sont abondantes dans les produits de la vie quotidienne (cosmétiques, textiles, matériaux de construction), dont l’alimentation. Parmi ces particules, le dioxyde de titane (TiO2) est un additif alimentaire utilisé comme colorant/opacifiant et agent de brillance dans les confiseries, les aliments transformés, les sauces et le glaçage. Il est aussi utilisé pour ces propriétés antimicrobiennes dans les emballages alimentaires. En Europe, l'utilisation du TiO2 alimentaire (référencé E171) est autorisée sans établissement d'une dose journalière acceptable. L'autorité européenne de sécurité sanitaire des aliments (EFSA) a estimé les niveaux d'exposition journalière au E171 entre 0,9 et 10,4 mg/kg de poids corporel (p.c)/jour chez l’enfant et entre 0,3 et 6,8 mg/kg p.c/j chez l’adulte. Face à ces niveaux élevés de consommation, les conséquences pour l’homme d'une exposition chronique aux particules de TiO2 soulèvent des questions de santé publique. Les craintes vis-à-vis de cet additif composée de particules micro- et nanométriques reposent sur des effets génotoxiques, de stress oxydant et inflammatoires des nanoparticules de TiO2 observés sur cellules intestinales. Cependant, la toxicité orale du TiO2 est encore peu étudiée et les autorités sanitaires ont conclu à la nécessité de tests pour évaluer les risques pour la santé des additifs alimentaires contenant des nanoparticules, particulièrement avec le E171. Après ingestion, le TiO2 est capable d’interagir avec le microbiote intestinal avant de traverser la barrière épithéliale intestinale et d’interagir avec les cellules immunitaires, induisant divers effets délétères pour l’hôte. Le microbiote est souvent négligé en toxicologie alimentaire alors qu’il joue un rôle clé dans plusieurs fonctions physiologiques telles que les fonctions digestives, métaboliques et immunitaires. Une altération du microbiote intestinal (appelée dysbiose) est associée à différentes maladies telles que les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI), l’obésité et le cancer colorectal (CCR). Du fait des propriétés antibactériennes du TiO2, une exposition chronique au E171 est susceptible d’induire une dysbiose capable de favoriser le développement de ces maladies.
Dans les pays occidentaux, l’augmentation en parallèle de la prévalence de l'obésité et du CCR suggère des facteurs de risque communs liés au mode de vie. Parmi ces facteurs, l'ingestion chronique de particules inorganiques a été proposée. Nous avons démontré qu’une exposition chronique au E171 chez le rat induit une micro-inflammation ainsi que l’initiation et la promotion de lésions pré-néoplasiques coliques. Nos données préliminaires chez des souris ou des rats exposés au E171 respectivement pendant 60 ou 100 jours, montrent une diminution de la signalisation intestinale du récepteur aryl hydrocarbure (AhR) et de la production de ligands AhR par le microbiote. AhR est un facteur de transcription nucléaire qui possède une activité anti-tumorale et module la réponse immune ainsi que des fonctions intestinales et métaboliques. Nos travaux ont montré qu’une diminution de la production de ligands AhR par le microbiote participait au développement de désordres métaboliques et à la pathogénèse des MICI, deux maladies connues comme facteurs de risque du CCR. L’ensemble de ces données suggère que les déséquilibres dans l’axe microbiote-hôte dans ces maladies pourraient être en partie médiés par un défaut de production de ligand AhR par le microbiote potentiellement induit par une exposition chronique au TiO2.
Le but de ce projet est d'étudier le lien entre l'exposition orale chronique au E171 et l'apparition et/ou l'aggravation de désordres métaboliques et de CRC en évaluant l'impact du TiO2 sur la production de ligands AhR par le microbiote et ses conséquences sur la barrière intestinale, la réponse immune, l’homéostasie métabolique et l’initiation des lésions pré-néoplasiques coliques.

Coordination du projet

Bruno LAMAS (Institut National de la Recherche Agronomique Centre Toulouse - Occitanie)

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

INRA TOXALIM - ENTeRisk Institut National de la Recherche Agronomique Centre Toulouse - Occitanie

Aide de l'ANR 287 496 euros
Début et durée du projet scientifique : mai 2020 - 36 Mois

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