Caractérisation des vésicules membranaires et des virus dans l’intestin pour le diagnostic et la compréhension des Maladies Inflammatoires Chroniques de l’Intestin – PRIMAVERA
Virus et vésicules extracellulaires intestinales associés à la maladie de Crohn
Ce projet vise à énumérer et identifier les spécificités des nanoparticules (NP) biologiques que sont les virus et les vésicules extracellulaires du le microbiote intestinal des patients atteints de la MC, avec un double objectif de diagnostic et de compréhension de la maladie.
Enumération et caractérisation des virus et des vésicules extracellulaires dans les selles et le sang de patients atteint de la maladie de Crohn comparé à des controles sains
Les maladies inflammatoires de l'intestin (MICI), qui regroupent la maladie de Crohn (MC) et la colite ulcéreuse, sont des maladies complexes qui résultent d'une combinaison de facteurs génétiques et environnementaux, avec un rôle clé du microbiote intestinal. Elle se caractérise par une inflammation chronique associée à un déséquilibre de la composition du microbiote intestinal (c'est-à-dire une dysbiose). Alors que l'on s'efforce de comprendre le rôle des composants bactériens intestinaux, les nanoparticules (NP) biologiques, comprenant les virus et les vésicules membranaires, restent largement sous-étudiées malgré leur grande abondance. Les virus qui infectent les bactéries, ou bactériophages (phages), jouent un rôle clé dans l'écologie microbienne en modulant les communautés bactériennes. La faible caractérisation des virus et vésicules intestinaux est en partie due à des difficultés techniques. En effet, détecter, dimensionner et compter les NPs biologiques est difficile avec les méthodes actuelles.<br />Ce projet vise à identifier les spécificités des nanoparticules (NP) biologiques présentes dans le microbiote intestinal des patients atteints de la MC, avec un double objectif de diagnostic et de compréhension de la maladie, grâce au développement de nouvelles techniques. Dans ce but, notre premier objectif est de développer une nouvelle technique, la microscopie optique interférométrique, et les protocoles associés, pour dénombrer et dimensionner facilement les virus et les vésicules à partir d'échantillons intestinaux. Dans un deuxième temps, nous voulons exploiter les modifications de la composition des virus de l'intestin associées à la maladie de Crohn pour développer un nouvel outil de diagnostic. De plus, nous voulons déchiffrer le rôle des virus dans la maladie pour ouvrir la voie à de nouveaux traitements.
Pour valider le dispositif commercial d'ILM, le Videodrop, des préparations purifiées de bactériophages et de vésicules membranaires à partir de selles ont été obtenues. Les concentrations des préparations de phages ont été déterminées par différentes techniques : dénombrement des phages par plages de lyse, PCR quantitative (qPCR), microscopie par épifluorescence, ILM et NTA.
Nous avons énuméré les virus et vésicules dans les selles de 40 individus : 20 sains et 20 patients atteints de la maladie de Crohn, dont 10 étaient en poussée inflammatoire au moment du prélèvement, et 10 en rémission.
Enfin, Nous avons réalisé une analyse du virome des échantillons de selles et de sang provenant d'une cohorte de cinq volontaires sains et de cinq patients atteints de MICI (participant à l'étude Suivitech). L’analyse du virome sanguin a été ajouté au projet pour compléter nos données sur la dysrégulation du microbiote chez les MICI, en corrélation avec des altération de perméabilité intestinale qui pourraient entrainer une translocation des virus intestinaux vers la circulation sanguine. Le protocole d'extraction et d'amplification de l'ADN viral a été développé de manière à obtenir une représentation quantitative des viromes.
Enfin, nous avons réalisé un montage permettant l’acquisition simultanée des signaux d’interférométrie et de fluorescence. Cette simultanéité permet d’apporter un paramètre supplémentaire dans la discrimination des signaux de mélanges complexes de nanoparticules.
Nous avons ainsi montré que le Videodrop ne détecte pas les objets ayant un diamètre inférieur à 90nm. La majorité des phages ayant un diamètre inférieur, en attendant le développement de dispositifs plus sensibles par nos partenaires, nous avons utilisé une autre technique pour l'énumération des virus. Par contre, comme la majorité des EVs intestinales sont plus grandes que 90 nm, nous avons utilisé le Videodrop pour les quantifier. Nous n’avons pas observé de différence concernant la quantité d’EVs entre malades et contrôles, par contre nous avons observé plus de virus chez les malades en poussée comparé aux sains.
Nous avons observé que le virome du plasma sanguin est dominé par des bactériophages infectant les Protéobactérie, les Bacteriodetes et les Firmicutes dans les deux cohortes. Bien que nous n'ayons pas observé de différences quantitatives dans la charge virale des patients atteints de MICI et des individus sains, nous avons constaté une augmentation du chevauchement de l'ADN viral dans le sang et les selles des patients atteints de MICI par rapport à celui des volontaires sains, ce qui correspond à l'augmentation observée de la perméabilité intestinale dans les MICI. De plus, dans les deux types d'échantillons, sang et selles, une augmentation de la prévalence des phages tempérés a également été observée.
Les viromes fécaux et sanguins de 10 patients et 10 sujets sains additionnels sont en cours d’analyse. Nous allons chercher à identifier les hôtes principaux des phages intestinaux qui sont plus abondants chez les patients atteints de la maladie de Crohn que chez les individus sains. Cela permettra de comprendre d’une part si l’augmentation de leur nombre dans la maladie de Crohn joue un rôle actif dans la maladie, par exemple si l’on découvre que les phages des patients Crohn ciblent une espèce clé pour la symbiose. Le deuxième objectif de ce projet est de poursuivre la caractérisation des phages trouvés dans le sang, et leur similitude avec les virus intestinaux, afin de comprendre si la perméabilité membranaire altérée chez les patients permet un transport accru des phages intestinaux à travers l’épithélium intestinal, ce qui pourrait participer à l’inflammation systémique observée chez ces patients. Enfin, nous développerons et utiliserons des techniques de préparation des ADN phagiques avant séquençage qui permettent d’identifier tout aussi bien les phages à ADN simple-brin que ceux à ADN double-brin, ce qui est n’est pas possibles avec les méthodes actuellement disponibles.
aucun
Les virus et les vésicules membranaires produites par les bactéries et l’épithélium constituent une fraction importante mais négligée du microbiote intestinal. Plusieurs études indiquent que la composition en virus du microbiote intestinal est modifiée chez les patients atteints de Maladies Inflammatoires Chroniques de l'intestin (MICI), maladie de Crohn et recto-colite hémorragique, qui concernent plus de 200 000 malades en France. Par ailleurs, l’importance des vésicules membranaires commence tout juste à être appréhendée, avec la découverte de leur rôle dans la médiation des effets anti-inflammatoire de certaines bactéries par exemple.
Dans l’ensemble, il existe de nombreuses indications que la fraction "nanométrique" du microbiote intestinal, ie les virus et les vésicules, est liée à l’état de santé des individus. Le but de ce projet est d’identifier les spécificités de cette nano fraction du microbiote intestinal chez des patients atteints de la maladie de Crohn, et ce dans un double objectif de diagnostic et de compréhension de la maladie.
Ces objectifs nécessitent le développement de nouvelles approches expérimentales. En effet, si nos connaissances sur les virus du microbiote intestinal sont bien moindre que celles sur la fraction bactérienne de cet écosystème, c’est en partie en raison de difficultés techniques, liées à la fois à leur très petite taille et à leur très grande diversité génétique. Leur petite taille rend leur numération et caractérisation globale très difficile, tandis que la diversité génétique complique grandement leur description et classification par le séquençage haut-débit.
Dans ce projet, nous souhaitons développer deux approches nouvelles et complémentaires pour décrire la fraction nanométrique du microbiote intestinal de patients atteints de la maladie de Crohn et de sujets sains. La première approche utilise un nouveau dispositif optique, breveté par les partenaires 2 et 4, et a la potentialité de donner la distribution de taille et de densité de toutes les particules de plus de 25 nm de diamètre, soit la très grande majorité des virus et des vésicules présents dans le microbiote intestinal. Ce dispositif optique devrait nous permettre d’obtenir une signature optique de la maladie de Crohn, qui sera la base d’un nouvel outil de diagnostic très rapide. En effet, par rapports aux autres techniques existantes de dénombrement et caractérisation des virus, ce dispositif a une très grande facilité d’utilisation et ne nécessite pas de purifier les particules avant leur observation. Le développement du dispositif optique en vue de sa commercialisation sera également poursuivi en parallèle.
Cette approche devrait permettre de différentier les malades des individus sains, mais elle ne donnera que très peu d’informations concernant les mécanismes en jeu. Pour élucider le rôle des virus et vésicules dans la maladie, nous allons utiliser de nouvelles approches en métagénomiques (méta3C et méthode de coabondance, développée dans l’unité du partenaire INRA de cette proposition), qui devraient nous permettre d’identifier les hôtes des virus, et donc de comprendre leur impact dans le déroulement de la maladie. Les vésicules seront analysées par spectroscopie Raman, qui permet, par l’identification des lipides qui constituent les membranes, d’identifier les cellules productrices, eucaryotes ou bactériennes. Nous espérons que ces résultats, en révélant les mécanismes en jeu, ouvriront la voie à de nouvelles stratégies de traitement de la maladie.
Coordination du projet
Marianne De Paepe (Microbiologie de l'alimentation au service de la santé)
L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.
Partenaire
Institut Langevin Institut Langevin Ondes et Images
CDR SA CENTRE DE RECHERCHE SAINT-ANTOINE
MICALIS Microbiologie de l'alimentation au service de la santé
Aide de l'ANR 543 172 euros
Début et durée du projet scientifique :
February 2020
- 42 Mois