Microbiome "toxique" et progression de la maladie rénale chronique. Une étude prospective – CKD_Microbiome
La maladie rénale chronique (MRC) affecte 10 à 15% des adultes et est associée à un risque élevé de progression vers l’insuffisance rénale terminale, de maladie cardiovasculaire et de mortalité. Peu de traitements sont disponibles pour ralentir la progression de la MRC et réduire ses complications. L'intérêt pour la composition du microbiote intestinal dans la MRC a surgi en raison de son rôle dans la production des toxines urémiques. La fermentation des protéines alimentaires par le microbiote intestinal conduit à la production de déchets métaboliques, appelés toxines urémiques, normalement éliminées par les reins. Ces toxines favorisent la progression de la MRC, l’insulino-résistance et l’inflammation. Cependant, les relations entre les caractéristiques du microbiote intestinal, la production de toxines urémiques et la progression de la MRC n’ont jamais été explorées prospectivement chez l’homme. L’objectif général du projet CKD_Microbiome est d’étudier le rôle et les mécanismes de la toxicité liée au microbiote intestinal dans la progression de la MRC et l’impact potentiel du régime alimentaire sur cette relation. Il inclut un volet observationnel et un volet expérimental.
Le volet observationnel du projet est une étude ancillaire de la cohorte CKD-REIN, qui a inclus 3033 patients adultes avec une MRC stades 3-5 (débit de filtration glomérulaire estimé [DFGe] < 60 mL/min/1.73m²) dans 40 consultations de néphrologie représentatives nationalement entre 01/2014 et 03/2016. Le suivi des patients est en cours et durera 5 ans, avec un recueil annuel de données cliniques et biologiques. L’étude CKD_Microbiome est basée sur un sous-échantillon de 240 patients avec un recueil simultané d’échantillons de sang et de selles, deux fois à 3 ans d'intervalle - aux suivis à 2 ans et 5 ans - ainsi que de données sur l’alimentation. Des protocoles standardisés seront utilisés pour extraire et séquencer l’ADN à partir des échantillons de selles, et déterminer la présence et l’abondance de chaque espèce microbienne et leur fonctionnalité pour tous les échantillons. En parallèle, les toxines urémiques liées et non liées aux protéines seront mesurées dans le sang. Grâce à ces échantillons uniques, nous pourrons étudier les relations transversales et longitudinales entre la composition et les fonctionnalités du microbiote et le niveau de fonction rénale et la vitesse de son déclin sur 3 ans, pour tester l’hypothèse (objectif primaire) selon laquelle le microbiote intestinal aggrave la progression de la MRC par la production de précurseurs des toxines urémiques. Ce volet observationnel évaluera également l’effet modulateur potentiel des profils alimentaires sur ces relations (objectif secondaire).
Dans le volet expérimental du projet, nous explorerons la causalité de la relation entre les espèces microbiennes identifiées et la production de toxines urémiques en étudiant l’impact de la transplantation de microbiote fécal de patients avec des niveaux élevés vs bas de toxines urémiques chez des souris traitées sur leur production de toxines urémiques.
Le consortium CKD_Microbiome réunit 5 équipes complémentaires apportant les expertises en métagénomique et bioinformatique (SD Ehrlich, INRA), analyse des toxines urémiques (JC Alvarez, ZA Massy, UVSQ), épidémiologie et biostatistique (B Stengel, INSERM U1018, S Wagner, CIC, SD Ehrlich, INRA U1367), nutrition (S Wagner, CIC, D Fouque, INSERM U1060), néphrologie et recherche expérimentale (L Koppe, D Fouque, INSERM U1060), ainsi que les capacités opérationnelles nécessaires pour mener à bien ce projet.
Le projet CKD_Microbiome ouvrira de nouvelles pistes conceptuelles et mécanistiques, basées sur les tests du microbiome ‘toxique’ développés chez l’animal, et améliorera la compréhension de la toxité du microbiote dans la MRC. Il permettra d'identifier de nouveaux biomarqueurs de progression de la MRC et de concevoir des interventions visant à modifier le microbiote pour diminuer sa toxicité.
Coordination du projet
Sandra WAGNER (CIC NANCY)
L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.
Partenariat
CESP CENTRE DE RECHERCHE EN ÉPIDÉMIOLOGIE ET SANTÉ DES POPULATIONS
CIC NANCY
UMR_S1060 LABORATOIRE DE RECHERCHE EN CARDIOVASCULAIRE, METABOLISME, DIABETOLOGIE (CARMEN)
MGP MetaGénoPolis
2IC Infection et Inflammation chronique
CICP NANCY
Aide de l'ANR 461 333 euros
Début et durée du projet scientifique :
décembre 2019
- 48 Mois