Croissance et évolution de planètes dans les disques protoplanétaires – GEPARD
GEPARD: Croissance et évolution des planètes dans les disques protoplanétaires
Les planètes, notamment les géantes, se forment dans des disques de gaz et poussière entourant les étoiles jeunes. Comment elles atteignent leur masse et orbite finale reste mal compris. Les phénomènes inter-liés de migration planétaire et d'accrétion du gaz ne peuvent être compris qu'avec un nouveau paradigme des disques proto-planétaires.
Un meilleur modèle de disques pour une meilleure compréhension de la formation planétaire
Les disques protoplanétaires s'étalent et sont accrétés par l'étoile, et disparaissent en quelques millions d'années. Cette observation a longtemps été attribuée à l'effet d'une mystérieuse viscosité, souvent elle-même attribuée à la turbulence engendrée par l'instabilité magnéto-rotationnelle. Mais des résultats récents remettent ce paradigme en cause. Notre but est d'abord d'établir si les disques protoplanétaires peuvent être plutôt dominés par des couches externes actives, entraînées par des vents de disques, tandis que l'intérieur reste laminaire, avec une viscosité minimale donnée par l'instabilité de cisaillement vertical.<br />Une fois cette structure bien établie au moyen d'études numériques en magnéto-hydrodynamique, nous allons étudier le comportement de planètes géantes dans ces disques. Comment interagissent-elles avec les couches actives ? Repoussent-elles efficacement la couche interne ? Quelle est la nouvelle structure du sillon inévitablement ouvert par une planète géante autour de son orbite, coupant le disque en deux ? Nous espérons trouver que les planètes migrent moins vite que dans un disque visqueux, car la migration des planètes géantes se fait normalement à une vitesse proportionnelle à la viscosité. Ainsi, nous pourrions expliquer la présence de nombreuses exoplanètes géantes situées à plusieurs unités astronomiques de leur étoile, contrairement aux célèbres Jupiters chauds, situés tout près de leur étoile, mais finalement rares. D'autre part, si le gaz et la planète sont moins en contact, cela pourrait expliquer qu'une planète géante ne devient pas une super géante par accrétion emballée de gaz. Nous expliquerions alors tout une partie de la distribution des exoplanètes dans le diagramme masse - distance, qui est si difficile à reproduire par les modèles de synthèse de population.
Nous réalisons des simulations numériques en utilisant deux codes à grille différents. La grille couvre une large région du disque proto-planétaire autour de la planète, en 3D ou en 2D. Nous utilisons des coordonnées sphériques centrées sur l'étoile, dont le plan équatorial correspond au plan médian du disque. En 2D, nous pouvons soit négliger l'épaisseur du disque et simuler le plan médian (pratique pour les simulations d'interactions planète-disque), soit supposer le disque axi-symétrique et simuler une tranche radiale, perpendiculaire au plan médian (pratique pour étudier la structure du disque sans planète).
Nos deux codes sont FARGOCA (développé à l'Observatoire de la Côte d'Azur depuis de nombreuses années, basé sur FARGO de F. Masset, dédié à l'étude des disques protoplanétaires) et PLUTO (code communautaire versatile). Des adaptations des codes sont nécessaire pour les nouvelles conditions de disque que nous étudions. En particulier avant même d'avoir des résultats robustes sur la structure des disques, nous avons implémenté un modèle simplifié de cette structure pour effectuer des simulations préliminaires.
D'octobre 2019 à fin 2020, à Nice nous avons travaillé sur deux aspects principaux de la migration planétaires tandis que notre partenaire allemand de Tübingen s'est concentré sur l'étude de la structure des disques. Nous avons étudié le paradigme général de la migration de type II, à l'aide de simulations numériques 2D, pour étudier finement le couple ressenti par la planète dans son sillon, en fonction de sa position dans le sillon. Le résultat en sera une formule générale de la vitesse de migration, dont la physique et la forme générale ont déjà été établies, et les coefficients restent à mesurer et la validité à tester. Nous avons aussi étudié le cas de planètes géantes dans des disques à très faible viscosité, et mis en évidence deux nouveaux rythmes de migration, selon l'excentricité de la planète. Ces résultats montrent que, comme attendu, la migration des planètes géantes dans des disques peu visqueux en 3D peut être lente.
Dans les presque deux ans qui restent, nous allons finir les travaux en cours, et mettre ensemble les résultats trouvés par nos partenaires de Tübingen et les nôtres, afin d'obtenir une vision globale de la problématique.
2 articles soumis à Astronomy & Astrophysics au 30/12/2020.
Aujourd'hui, plus de 2600 systèmes exoplanétaires ont été découverts, qui contiennent en tout plus de 3500 planètes. Les observations débiaisées montrent que les planètes les plus abondants sont les "Super-Terres" (des planètes de 1 à 20 fois la masse de la Terre) ayant des périodes orbitales inférieures à 100 jours. Elles sont suivies par le groupe des planètes géantes à 1-3 unité astronomique (UA) de leur étoile hôte. Ce type de planète est en fait au moins 10 fois plus abondant que les Jupiters chauds (situés à ~0.1 UA de leur étoile). La distribution des masses des planètes géantes atteint un maximum vers 1-3 masses de Jupiter ; des planètes plus massives existent mais sont assez rares. D'un point de vue théorique, ces observations sont difficiles à comprendre. En effet la migration planétaire vers l'étoile peut expliquer aisément l'existence des super-Terres proches de leur étoile, mais pose problème pour expliquer pourquoi seule une minorité de planètes géantes a atteint des orbites intérieures à 1 UA. Autre problème: l'accrétion de gaz sur des cœurs solides devrait être très rapide. Ainsi, la raison qui a empêché les super Terres de devenir des planètes géantes est inconnue, de même que le processus qui a pu limiter la croissance des planètes géantes à seulement quelques masses de Jupiter.
Ce projet est fondé sur l'idée que les problèmes rencontrés pour comprendre la distribution en masse et rayon orbital des exoplanètes proviennent d'hypothèses incorrectes concernant la structure du disque proto-planétaire dans lequel elles se forment. Le schéma classique d'un disque visqueux, avec une viscosité générée par une forte turbulence causée par l'instabilité magnéto-rotationnelle est remis en cause par les simulations magnéto-hydrodynamiques récentes. Les disques sont probablement bien moins visqueux qu'on le pensait. Toutefois, les disques ne peuvent pas être totalement dépourvus de viscosité, une viscosité minimale étant causée par l'instabilité de cisaillement vertical (VSI). De plus, les vents de disque extraient du moment cinétique de fines couches superficielles des disques proto-planétaires, ce qui engendre un transport radial rapide de gaz vers l'étoile centrale dans ces couches. Notre projet est (i) de construire un modèle réaliste de disque proto-planétaire qui prend en compte à la fois la VSI et les vents de disques, et reproduise ainsi les taux accrétion stellaire observés, et (ii) d'étudier l'accrétion du gaz et la migration des planètes dans ces disques.
Coordination du projet
Aurelien Crida (Laboratoire J.L. LAGRANGE (OCA/CNRS/UNS))
L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.
Partenariat
LAGRANGE (OCA/CNRS/UNS) Laboratoire J.L. LAGRANGE (OCA/CNRS/UNS)
EKUT Universitaet Tuebingen
Université Cote d'Azur Université Cote d'Azur
Aide de l'ANR 212 112 euros
Début et durée du projet scientifique :
octobre 2018
- 36 Mois