Les organismes ont évolué pour détecter des métabolites et ces capacités de détection sont utilisées par l’homme depuis fort longtemps. Récemment, la biologie de synthèse a étendu et rationalisé la biodétection avec l'ingénierie de biocapteurs cellulaires. Les principaux avantages des biocapteurs cellulaires par rapport à la détection abiotique basée sur des anticorps, l'hybridation d'acide nucléique ou l'analyse métabolomique sont : des coûts moins élevés, une meilleure stabilité et la possibilité d'être utilisés directement dans les lieux de soins ou à domicile chez les patients.
Ce projet vise à mettre en place une plateforme de développement de biocapteurs cellulaires programmable et évolutive pour la détection multiplexée de biomarqueurs dans des échantillons cliniques. Afin d’illustrer cette technologie, nous avons choisi la détection de biomarqueurs de maladies chroniques (cancer, schrizophénie, insuffisance rénale, urémie). Nos biocapteurs cellulaires seront évalués sur des échantillons cliniques de patients du CHU de Montpellier.
La technologie des biocapteurs cellulaires pour la clinique est pertinente car les partenaires du projet ont récemment résolu deux principaux goulets d'étranglement limitant son application : (i) l'augmentation du nombre d'analytes qui peuvent effectivement être détectés et (ii) l’augmentation de la fiabilité du fonctionnement des biocapteurs dans des fluides physiologiques complexes.
La plupart des biocapteurs actuels ne sont activés que par une demi-douzaine de signaux d'entrée. Pour pallier cette lacune, le partenaire MICALIS a récemment élargi la palette de molécules biologiquement détectables en concevant et en développant systématiquement des voies métaboliques qui transforment des substances chimiques non détectables en molécules pour lesquelles des capteurs existent déjà. La méthode a été testée avec succès pour l'ingénierie de biocapteurs permettant de détecter des polluants, des médicaments et des biomarqueurs tels que l'acide benzoïque et l'acide hippurique.
L'autre défi limitant le déploiement des biocapteurs est leur fonctionnement peu fiable avec un faible rapport signal sur bruit dans des échantillons complexes et hétérogènes. Le partenaire CBS a résolu ce problème en développant une plateforme de traitement du signal qui utilise des amplificateurs génétiques. Le CBS a démontré la détection d'une glycosurie anormale dans l'urine de patients diabétiques. Ce travail, publié dans Science Translational Medicine, valide la capacité opérationnelle de la technologie dans les échantillons cliniques.
Dans le présent projet, nous proposons de combiner les avantages des développements récents ci-dessus en détectant des biomarqueurs par des voies métaboliques synthétiques agissant comme des dispositifs analogiques en déclenchant une réponse numérique en utilisant des circuits génétiques fonctionnant de manière robuste dans des échantillons cliniques. Un tel système hybride analogique/numérique n'a pas encore été développé pour les biocapteurs.
Nos biocapteurs seront mis en œuvre dans des bactéries et dans des systèmes acellulaires sur papier. Les capteurs bactériens peuvent contenir des circuits de détection complexes, ils n'ont pas besoin de ressources coûteuses et sont bon marché à produire. Cependant, les biomarqueurs toxiques ou ne pouvant pas traverser la membrane cellulaire peuvent s'avérer difficile à détecter. Nous proposons donc de tester nos constructions dans des systèmes acellulaires, dépourvus de membrane mais disposant de toute la machinerie de transcription et traduction. Dans de tels systèmes, les biocapteurs peuvent être stockés après lyophilisation, les circuits de détection peuvent être facilement optimisés en changeant simplement la quantité d'ADN codant pour les différentes fonctions et finalement, les systèmes acellulaires étant abiotiques leurs réglementation et acceptation s’en trouvent simplifiées.
Monsieur Jean-Loup FAULON (MICrobiologie de l'ALImentation au Service de la Santé Humaine)
L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.
MICALIS MICrobiologie de l'ALImentation au Service de la Santé Humaine
CBS Centre de biochimie structurale
CHU Centre Hospitalier Universitaire de Montpellier
Aide de l'ANR 469 049 euros
Début et durée du projet scientifique :
février 2019
- 36 Mois