À quoi tiennent les évolutions du taux de gémellité dans les pays développés ? – JUMEAUX
La fréquence des naissances gémellaires a beaucoup augmenté dans les pays développés - elle a été multipliée par deux depuis les années 1970. Ce boom des jumeaux pose un problème de santé publique car ces enfants sont plus fragiles que les singletons au moins au début de la vie, en raison de leur petit poids de naissance, leur tendance à être prématurés, et les complications de l'accouchement, qui ont potentiellement des conséquences à long terme sur la santé. Il est important de mieux comprendre les raisons de cette hausse et des variations selon les pays.
Une contribution importante du projet JUMEAUX sera de constituer une base de données unique avec les taux annuels de gémellité pour tous les pays pour lesquels des statistiques fiables existent, et de rendre cette base de données accessible aux chercheurs.
Utilisant la base de données et des informations complémentaires, nous étudierons les facteurs de l’évolution du taux de gémellité dans les pays développés. Trois groupes de facteurs sont en jeu : comportementaux (la limitation volontaire des naissances, le retard des maternités), biologiques (l’âge de la mère, le rang de naissance), et médicaux (la procréation médicalement assistée, PMA). Nous examinerons leurs rôles dans les évolutions passées et actuelles.
Les deux facteurs les plus importants jusqu’il y a quelques décennies étaient l’âge de la mère et le rang de naissance. Partant d’un niveau bas à la puberté, le taux de gémellité augmente de façon continue avec l’âge jusqu’à atteindre un pic à 37 ans, puis diminue et retrouve un niveau bas à la ménopause. Pour un même âge de la mère le taux de gémellité augmente avec le rang de naissance. Ces variations selon la parité, qui sont moindres que celles selon l’âge, sont supposées être d’origine physiologique, mais le mécanisme à l’œuvre reste un mystère.
Deux autres facteurs sont apparus depuis les années 1960 : la généralisation de la limitation volontaire des naissances et la procréation médicalement assistée (PMA). Quand la limitation des naissances se répand dans une population elle tend à diminuer le taux de gémellité par un effet de sélection par la fécondabilité : les femmes génétiquement prédisposés à avoir des jumeaux sont de moins en moins représentées aux rangs de naissance supérieurs à un, et cet effet augmente au fur et à mesure que les naissances sont mieux contrôlées. Dans l’autre sens, la PMA est associée à une augmentation très importante du risque de naissance multiple.
Jusqu’ici, aucune étude n’a tenté d’évaluer le rôle de ces différents facteurs en les considérant tous en même temps. JUMEAUX est en capacité de le faire à une échelle jamais vue en prenant en compte toutes les données disponibles. JUMEAUX vise à répondre aux questions importantes que posent les tendances de la gémellité dans les pays riches : quelle est la part de la hausse du taux de gémellité qui tient au retard de l’âge à la maternité ? Quelle est la part tenant à la diffusion de la PMA et des autres traitements de la stérilité ? Les taux de gémellité vont-ils continuer à augmenter, ou vont-il atteindre un plateau voire même décroître sous l’influence de l’évolution des pratiques en matière de PMA ? Dans quels pays auront lieu quelles évolutions, et quelles formes prendront-elles ?
Sur la base de nos estimations des niveaux et tendances de la gémellité dans pratiquement tous les pays développés, et en se fondant sur les derniers résultats de nos recherches sur les facteurs affectant les naissances gémellaires, dans une dernière étape, le projet, calculera des projections jusqu’en 2050 selon différents scénarios.
Coordination du projet
Gilles PISON (Eco-Anthropologie et Ethnobiologie)
L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.
Partenariat
EAE Eco-Anthropologie et Ethnobiologie
INED Institut National d'Etudes Démographiques
Aide de l'ANR 252 944 euros
Début et durée du projet scientifique :
mars 2019
- 48 Mois