DS01 - Gestion sobre des ressources et adaptation au changement climatique

RElation entre le Changement climatique et formation des lAtérites – RECA

RElation entre Changement climatique et formation des lAtérites

La surface terrestre, et plus particulièrement les latérites qui occupent 80% du volume total des sols, est en constante évolution. Elle réagit aux changements climatiques au travers de l’érosion et l’altération, en participant significativement à la consommation de gaz à effet de serre comme le CO2. Ce projet, centré sur la datation de latérites du Bassin Amazonien, cherche à proposer un modèle d’évolution des sols tropicaux face aux grands changements climatiques présentés et passés.

Dater et quantifier l’impact des changements climatiques passés et présents sur les sols tropicaux du Bassin Amazonien.

Ce projet consiste à dater différentes générations de minéraux secondaires majeurs de sols tropicaux (une argile, la kaolinite, et des oxydes et oxyhydroxydes de fer) par deux méthodes complémentaires et à relier les grandes phases d’altération à l’origine de ces sols aux grands changements climatiques passés. L’approche minéralogique et géochimique qui est développée dans ce projet permet de reconstituer des conditions paléo-environnementales et de quantifier les flux d'éléments ayant généré ces profils latéritiques. L’ensemble des résultats permettra de construire un modèle global d’évolution des sols tropicaux du Bassin Amazonien, et de prédire leur évolution face aux grands changements climatiques.

Dans un premier temps, plusieurs profils d’altération sont sélectionnés dans le Bassin Amazonien en fonction de leur âge présumé et de leur localisation. Les minéraux secondaires issus de ces profils (kaolinites, oxydes et oxyhydroxydes de fer) sont étudiés d’un point de vue minéralogique et cristallographique depuis l’échelle macroscopique à l’échelle atomique. Nous allons dater des populations des minéraux secondaires bien identifiés minéralogiquement. Ces méthodes de datation récentes sont particulièrement adaptées car elles s’appliquent aux minéraux secondaires les plus communs des latérites qui peuvent enregistrer des temps géologiquement longs, et sont utilisées afin de déterminer les périodes majeures de cristallisation des différentes générations. En particulier, la chronologie de la formation des cuirasses ferrugineuses sera alors reliée aux conditions paléoclimatiques (température, précipitation) dérivées de la combinaison d’outils géochimiques et d’indices minéralogiques : (i) à l’échelle globale, avec par exemple les courbes de drainage continental connues, (ii) et à une échelle plus régionale au travers de marqueurs géochimiques de l’altération, l’analyse des rapports goethite/hématite ou les rapports isotopiques de l’O et H sur les minéraux secondaires. De plus, les systèmes isotopiques « non-conventionnels » (Li, Si et Fe) aideront à différencier les évolutions de l’altération liées aux étapes diverses de formation des latérites et pourront apporter des indications sur les processus de redistribution de ces éléments et sur le rôle de l’activité biologique (végétation, organismes) dans leur budget, lors de différents stades de formation de latérites. Le couplage du bilan de matière avec les âges des phases majeures d’altération des profils latéritiques permettra dans les meilleurs cas d’obtenir des taux d’altération et d’érosion, qui seront comparés aux autres environnements d’altération actuels ou passés étudiés par ailleurs à la surface de la Terre.

La première partie du projet s’est focalisée sur la préparation des différentes missions de terrain, et la mise en place des protocoles analytiques et méthodologiques. Trois missions de terrain ont été réalisé en 2017 et 2018 (Amazonie centrale, Suriname, Guyane) et une centaine d’échantillons ont été récoltés le long de profils latéritiques. Les protocoles d’extraction et de caractérisation minéralogique des différentes générations de minéraux secondaires ont été mis au point. Les échantillons collectés en 2017 et 2018 sont en cours de caractérisation, de purification (kaolinites), ou de micro-prélèvement (oxydes et oxyhydroxydes de fer) pour les datations. Des résultats de datation de kaolinites et d’oxydes ou oxyhydroxydes de fer provenant de cuirasses d’Amazonie assimilables dans le programme RECA ont été publiés récemment (Allard et al., 2018). D’autres données de datation sont en cours d’acquisition. En parallèle, le travail sur la rétention de l’He dans la goethite a été réalisé et un article a été soumis (Bassal et al., soumis). Par ailleurs, le travail sur les isotopes conventionnels et non-conventionnels est en cours.

D’ici une année, la majorité des données (minéralogiques, géochimiques, datation) seront acquises, ce qui permettra de réaliser des modèles temporels d’altération portant notamment sur l’évolution des profils de latérites. Ces modèles d’évolution établis dans le contexte amazonien constitueront des références pour l’étude de latérites dans d’autres environnements de la ceinture intertropicale. Les processus de transformation/redistribution du Fe (et le rôle possible des organismes) lors de la formation et/ou altération d’une cuirasse pourront être décrits grâce au couplage des datations (différentes générations des oxydes de Fe) et de l’approche isotopique (variabilité isotopique du Fe au sein d’une même génération ainsi qu’entre différentes générations des minéraux dans la cuirasse). De plus, en combinant les données isotopiques avec les indices géochimiques et minéralogiques, nous allons tenter de relier les variations isotopiques intra- et inter-générations aux changements de conditions climatiques lors de la formation des cuirasses. Ce travail ouvre aussi d’autres perspectives avec l’impact de la biologie sur la cristallisation des minéraux, et les relations avec l’évolution de la biodiversité et des paysages en Amazonie.

1. Allard, T., Gautheron, C., Bressan-Riffel, S., Balan, E., Selo, M., Fernandes, B. S., Pinna-Jamme, R., Derycke, A., Morin, G., Taitson Bueno, G., and Do Nascimento, N. R., 2018, Combined dating of goethites and kaolinites from ferruginous duricrusts. Deciphering the Late Neogene erosion history of Central Amazonia: Chemical Geology, v. 479, p. 136-150.
2. Bassal, F., Roques, J., Gautheron, C., and Balout, H., 2019, Helium diffusion in pure goethite (a-FeOOH) for thermochronology applications: A theoretical multi-scale study: submitted to Computational Materials Science.

Les latérites, qui font partie de la couverture d’altération de la surface terrestre, occupent 80% du volume total des sols et participent significativement au bilan géochimique global de l’érosion et de l’altération, et ainsi à la consommation de gaz à effet de serre. Malgré leur importance à la surface de la Terre, la chronologie de leur formation et de leur évolution en réponse au changement climatique et géodynamique est toujours peu contrainte. Le projet RECA adressera les questions de l’axe 1 du challenge 1 de l’ANR « Fonction et évolution du climat, océans et cycles majeurs » et « Surface continentale : zone critique et biosphère » de l’ANR, par la reconstruction de l’influence du climat sur la formation des latérites. L’originalité du projet RECA est de combiner des données chronométriques et des marqueurs de l’altération et du climat développés ces dernières années de façon à construire un scénario complet et prédictif de la formation et de l’évolution des latérites. Pour cela, nous allons concentrer nos efforts sur la région géodynamiquement stable du bouclier Guyanais et de l’Amazonie centrale, où des latérites se sont formées tout au long du Cénozoïque et sont associées à cinq unités géomorphologiques majeures. Ce projet pluridisciplinaire ambitieux propose, pour la première fois, de réaliser des datations absolues des cuirasses latéritiques associées aux grands épisodes de pénéplanation du super continent sud Américain. Nous allons dater des populations d’oxydes et hydroxydes de fer (hématite, goethite) et d’argile (kaolinite), bien identifiés minéralogiquement, respectivement par (U-Th)/He, (U-Th)/Ne et résonnance paramagnétique électronique. Ces méthodes de datation récentes sont particulièrement adaptées car elles s’appliquent aux minéraux secondaires les plus communs des latérites qui peuvent enregistrer des temps géologiquement longs. La complexité inhérente aux matériaux de l’altération, qui peuvent contenir différentes populations d’un même minéral secondaire, liées à des étapes distinctes de latéritisation, sera prise en compte. La chronologie de la formation des cuirasses sera alors reliée aux conditions paléo-climatiques (température, précipitation) dérivées de la combinaison d’outils géochimiques et d’indices minéralogiques : (i) à l’échelle globale, avec par exemple les courbes de drainage continental connues, (ii) et à une échelle plus régionale au travers de l’intensité de l’altération, l’analyse des rapports goethite/hématite ou les rapports isotopiques de l’O et H sur les kaolinites et d’oxydes et hydroxydes de fer. Une tâche supplémentaire sera d’y associer les méthodes isotopiques « non-conventionnelles » du Li, Si et Fe, qui aideront à différencier les évolutions de l’altération liées aux étapes diverses de formation des latérites. Le couplage du bilan d’altération avec les âges des phases d’altération des profils latéritiques permettra d’obtenir des taux d’altération et d’érosion, qui seront comparés aux environnements d’altération actuel et passé de la surface de la Terre. Afin de mener à bien cette tâche ambitieuse, le projet RECA rassemble un consortium international fait de chercheurs qualifiés dans l’identification des sols latéritiques, les méthodes de datation, la minéralogie environnementale, la géochimie élémentaire et isotopique « conventionnelles » et « non- conventionnelles », et des approches de modélisation des profils d’altération. La synergie des équipes identifiées offre le plus haut niveau de garantie pour surmonter les difficultés techniques et scientifiques, donnant accès aux informations encore cachées sur la formation et l’évolution des sols en réponse au changement climatique sur des échelles de temps géologiques.

Coordination du projet

Cecile GAUTHERON (Universite Paris Sud Geosciences Paris Sud)

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

LABOGEF Laboratório de Geomorfologia, Pedologia e Geografia Física
IG Instituto de Geociências, Brazilia University
GFZ Earth Surface Process Modelling
BRGM Bureau de recherches géologiques et minières
IPGP Institut de physique du globe de Paris
TOTAL Exploration production / TOTAL
CNRS DR12 - CEREGE Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS) - Délégation Régionale Provence et Corse - Centre Européen de Recherche et d'Enseignement des Géosciences de l'Environnement
IMPMC Institut de Minéralogie, de Physique des Matériaux et de Cosmochimie
IPNO Institut de Physique Nucléaire d'Orsay
UPSud GEOPS Universite Paris Sud Geosciences Paris Sud

Aide de l'ANR 588 204 euros
Début et durée du projet scientifique : octobre 2017 - 48 Mois

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