DS0501 - Productions durables

Trichogramma pour la protection des cultures: Pangénomique, Traits d'histoire de vIe et Capacités d'établissement – TriPTIC

TriPTIC : Trichogramma pour la protection des cultures.

Etude de la génomique, des traits d'histoire de vie et des capacités d'établissement des trichogrammes pour le développement de programmes de lutte biologique efficaces et alternatifs à l’utilisation des pesticides

Contexte et enjeux scientifiques

Plusieurs initiatives ont été lancées pour réguler l’utilisation d’intrants chimiques (e.g. directive européenne REACH, plan Ecophyto 2018). Dans ce contexte, le développement de programmes de lutte biologique contre les ravageurs des cultures est un enjeu majeur. Le genre Trichogramma s’attaque à 10 ordres d’insectes, principalement des Lépidoptères. Certaines espèces sont commercialisées pour le contrôle de ravageurs des cultures (T. brassicae contre O. nubilalis), des productions sous serres (T. evanescens contre Noctuidae), des vergers (e.g. T. cacoeciae contre C. pomonella). Toutefois, la situation actuelle n'est pas satisfaisante car 1) la biodiversité inter et intra-spécifique des trichogrammes est mal documentée, 2) des proxies d'efficacité sur le terrain ne sont pas bien identifiés et le lien entre phénotype individuel et dynamique des populations doit être mieux étudié; 3) la récente réglementation impose des exigences strictes pour l'introduction d'agents de lutte biologique exotiques et pour une ré-évalutation de la biodiversité locale. Dans le genre Trichogramma, nous travaillerons principalement sur 4 complexes d’espèces largement étudiés, élevés et commercialisés pour contrôler plusieurs ravageurs d'importance économique en Europe, y compris dans les régions méditerranéennes, et en Amérique du Nord. Notre objectif est d’adresser i) le challenge sociétal eu égard à l’implémentation de programmes de lutte biologique efficaces et sécurisés ii) des questions de pointe en biologie évolutive. Le projet à 4 objectifs principaux.<br />1) Produire une caractérisation génétique précise des différentes souches et des barrières au flux de gènes.<br />2) Comprendre comment les traits d’histoire de vie varient en fonction de l’histoire évolutive et de l’habitat<br />3) Déterminer quel trait individuel peut prédire le succès d’établissement des populations<br />4) Participer à la construction d’une base de données et une collection de référence mondiale pour les trichogrammes<br />

Le WP1 «du génome à l’espèce» fournira 1) une caractérisation fine des souches via des marqueurs RAD 2) des outils d’identification clefs en main pour les autres WPs, les écologistes et les professionnels de l’agriculture (comparaison du pouvoir résolutif des marqueurs classiques par rapport aux loci RAD) 3) une première phylogénie du groupe.
Le WP2 « du microbiome au phénotype» utilisera des méthodes de séquençage à haut-débit pour caractériser la diversité des symbiontes bactériens infectant les souches et pouvant avoir un impact sur leur phénotype ou sur les barrières reproductives.
Le WP3 « du phénotype individuel à l’espèce » évaluera les traits phénotypes individuels en utilisant des méthodes de pointe pour l’analyse d’image (approches éthomiques). Il génèrera des données sur 1) les traits d’histoire de vie, leur variabilité et le potentiel adaptatif qu’ils confèrent, 2) les stratégies de déplacement pour la recherche de l’hôte et la spécialisation écologique 3) les barrières reproductives.
Le WP4 «du phénotype à la dynamique des populations» examinera les processus démographiques et génétiques en jeu lors de l’établissement des populations et des premières phases d’expansion en utilisant des microcosmes. Il étudiera également comment des pressions de sélection hétérogènes le long du front d’invasion peuvent affecter la dynamique spatiale et temporelle de l’assemblage de la communauté de parasitoïdes et testera si la diversité fonctionnelle de la communauté augmente ou non sa performance dans un agro-ecosystème complexe.
Le WP5 «de la collecte au transfert» sera en charge de l’échantillonnage, du maintien des souches en collection et du transfert vers les porteurs d’intérêt. Ce WP contribuera à la création d’un Centre de Ressources Biologiques pérenne qui stockera les souches, l’ensemble des productions du projet (vouchers, ADN etc.) ainsi que les connaissances acquises pour que celles-ci soit utilisées à long terme pour la recherche académique et appliquée.

Lors de cette première phase du projet nous avons,
WP1 : 1) validé une approche d’amplification totale de génome pour obtenir 120,000 marqueurs RAD à partir d’un spécimen unique de trichogramme 2) construit une librairie RAD avec 13 espèces de trichogrammes, 3) construit et publié un pipeline bio-informatique pour le traitement des données RAD qui permet une exploration large des paramètres d’analyse.
WP2 : 1) mis au point un protocol pour l’amplification et le séquençage simultanné des gènes COI (barcode insecte) et 16S (microbiome) 2) développé un pipeline bioinformatique pour l’analyse rapide et fiable des données 3) testé ce protocole sur 5 souches de Trichogrammes.
WP3 : 1) développé un plugin convivial pour ImageJ (CODICOUNT) qui permet la quantification automatique des taux de parasitisme d’œufs. La méthode a été testé sur c.a. 50 souches de T. cacoecieae, T. brassiceae and T. chilonis, 2) mis au point un protocole expérimental et un pipeline analytique pour quantifier automatiquement i) la phototaxie et la géotaxie des trichogrammes, ii) leur vitesse de déplacement, iii) leur performance en fonction de la distribution des œufs de l’hôte.
WP4 : 1) caractérisé le temps de développement et le sex-ratio de 55 souches, 2) caractérisé les dynamiques locale des populations de 30 souches représentant la diversité échantillonnée en début de projet.
WP5 : 1) initié un projet de science participative pour collecter des souches sur le territoire national et échantillonné sur 60 sites, 2) barcodé toutes les souches en collection avec COI ou plusieurs marqueurs, 3) conduit des tests de croisement entre souches pour évaluer les barrières reproductives 4) développé une base de données avec les photos des caractères clef pour l’identification des trichogrammes mondiaux, 5) soumis un projet (maintenant accepté) pour l’accréditation du Centre de Ressource Biologique.

La phase critique du projet était l’échantillonnage. Nous avons donc mis en place des réseaux collaboratifs et avons mené plusieurs campagne d’échantillonnage afin d’accumuler de nombreuses souches. A ce jour plus de 200 souches sont disponibles dans le Centre de Ressources Biologiques. Les inférences sur la génomique, la phénomique et les dynamiques de population conduites lors de cette première phase du projet vont donc être généralisées à l’ensemble des souches. Les résultats préliminaires confirment que la taxonomie du groupe doit être revue et montrent que les souches sauvages ou élevées en laboratoire depuis plusieurs années ont des phénotypes différents (e.g des stratégies différentes pour l’exploitation des œufs de l’hôte) ou que les souches collectées présentent des génotypes et des dynamiques de population contrastés.

- Papier publié: Cruaud A.*, Gautier M.* (eq. contributors), Rossi J.-P, Rasplus J.-Y, Gouzy J. (2016). RADIS: Analysis of RAD-seq data for InterSpecific phylogeny. Bioinformatics 32, 3027–3028
- Logiciel disponible gratuitement: RADIS (http://www1.montpellier.inra.fr/CBGP/software/RADIS/)
- Papier en préparation : Perez G., Burte V., Baron O., Calcagno V. CODICOUNT : une méthode d'analyse d'image pour déterminer automatiquement le nombre d'oeufs et les taux de parasitisme lors de l'élevage de Trichogramma sp. Les Cahiers Techniques de l'INRA.
- Accréditation du Centre de Ressources Biologiques EP-coll (http://www.spe.inra.fr/Toutes-les-actualites/EP-Coll) obtenue.

La France a adopté le plan Ecophyto 2018 qui recommande de développer la lutte biologique pour remplacer les pesticides. Une lutte biologique sûre et efficace contre les ravageurs nécessite de 1) caractériser génétiquement et phénotypiquement les souches d’ennemis naturels relâchés ; 2) connaitre leurs traits d’histoire de vie, stratégies d’exploitation d’hôte et dynamiques populationnelles ; 3) comprendre les processus contrôlant leur performance après lâcher. Or, ces études ne sont jamais conduites, ce qui limite notre capacité à mettre en place des programmes efficaces. Lors de ce projet, grâce à nos compétences complémentaires, nous nous attaquerons à ces sujets en abordant des questions clefs en évolution : spéciation, hybridation, adaptation, spécialisation et dynamiques d’interaction.
Nous étudierons quatre complexes d’espèces de Trichogramma (Hymenoptera), un des groupes les plus étudiés et commercialisés pour contrôler des ravageurs d’importance majeure en Europe. Ces parasitoïdes sont fréquemment relâchés sans caractérisation taxonomique, génétique, phénotypique ou comportementale ni évaluation des risques. Cette situation doit être améliorée pour répondre au décret 2012-140 adopté par la France stipulant que les organismes de lutte doivent être caractérisés avant lâcher pour assurer une traçabilité et éviter des effets collatéraux. Les complexes d’espèces de Trichogrammes sont mal connus et renferment des entités séparées par des barrières reproductives poreuses. Les souches montrent un polymorphisme de traits intra et inter populationnel influencé par l’environnement. Certains traits clefs pour la lutte biologique n’ont que peu été documentés (e.g. mouvement et capacité de dispersion). Certains symbiontes sont connus pour influer les fitness individuelles, l’isolement reproducteur et la spécialisation mais peu de données sont disponibles sur les communautés associées aux Trichogrammes. Enfin on connaît très peu l’histoire évolutive des Trichogrammes.
Grâce à des méthodes innovantes et puissantes nous proposons:
1) de caractériser les limites d’espèces, flux génétiques et potentiels évolutifs au sein des complexes ainsi que de phénotyper leurs traits d’histoire de vie. Nous caractériserons les souches que nous échantillonnerons sur le terrain et celles commercialisées, grâce à des méthodes de génotypage, phénotypage et de screening de symbiontes haut-débit. Nous développerons des méthodes encore rarement utilisées pour la caractérisation génétique (séquençage RAD) et phénotypique (éthomique haut débit),
2) d’étudier l’impact à l’échelle populationnelle des traits caractérisés individuellement,
3) d’analyser les processus évolutifs en jeu lorsque des populations sont introduites dans un nouvel habitat, seules ou en combinaisons.
Comprendre les pressions sélectives en jeu (e.g. prévalence du conservatisme de niche), et développer nos connaissances sur les phénotypes, le potentiel d’hybridation des souches relâchées entre elles et avec la faune locale ainsi que l’influence de la compétition et de la facilitation entre espèces devrait nous permettre de i) sélectionner les souches les plus appropriées ii) maximiser nos chances d’introduire sans risque et durablement une souche iii) mieux anticiper son impact et modifier notre stratégie de lutte si besoin.
La lutte biologique implique souvent des partenariats public-privé essentiels car i) les souches sont produites et vendues par des firmes privées ii) l’identification de nouvelles souches candidates nécessitent des compétences scientifiques académiques. C’est pourquoi nous avons inclus un work package dédié à la maintenance des souches caractérisées et au transfert de connaissances vers les porteurs d’intérêt (écologistes, agriculteurs, firmes) via une base de données accessible en ligne. Ce groupe de travail sera organisé autour du Centre de Ressource Biologique récemment monté à l’UMR ISA et dédié à la lutte biologique utilisant des macro-organismes.


Coordination du projet

Jean-Yves Rasplus (UMR 1062 Centre de Biologie et de Gestion des Populations)

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

ISA UMR 1355 Institut Sophia Agrobiotech
LBBE UMR 5558 Laboratoire de Biométrie et Biologie Evolutive
CBGP UMR 1062 Centre de Biologie et de Gestion des Populations

Aide de l'ANR 599 853 euros
Début et durée du projet scientifique : septembre 2014 - 48 Mois

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