JCJC SVSE 7 - JCJC - SVSE 7 - Biodiversité, évolution, écologie et agronomie

Un génome fait de multiples copies divergentes permet-il à un animal parasite de plantes d'évoluer en l'absence de reproduction sexuée ? – ASEXEVOL

Evolution en absence de reproduction sexuée chez un animal ravageur de cultures: un génome en plusieurs copies divergentes pourrait être la clé.

Comment un animal se reproduisant sans sexe peut-il être un des ravageurs de cultures les plus dommageables pour l'agriculture ? Les animaux à reproduction asexuée ne disposent pas des avantages liés à la reproduction sexuée en terme de plasticité génétique (brassage d’allèles et recombinaison). Chez le nématode à galles Meloidogyne inocgnita, nous avons identifié un génome en plusieurs copies divergentes. Une telle structure génomique permet-elle une plasticité en l'absence de sexe ?

Une plasticité génétique liée à la présence de régions génomiques en plusieurs copies ?

Objectifs<br />- Déterminer quelle proportion de gènes est en plusieurs copies à cause de la structure particulière des génomes de nématodes à galles.<br />- Déterminer si ces gènes en plusieurs copies forment des blocs dupliqués.<br />- Déterminer les pourcentages de divergence moyen au niveau nucléotidique entre ces blocs dupliqués.<br />- Etudier comment se répartit cette divergence entre régions codantes, introniques et intergéniques..<br />- Calculer la divergence moyenne entre copies de gènes présentes sur des blocs dupliqués.<br />- Déterminer si des copies de gènes issues de blocs dupliqués évoluent sous sélection positive ou diversifiante, signe d'une possible divergence fonctionnelle entre copies.<br />- Générer des données transcriptomiques à haut débit (RNAseq) et en triplicat pour déterminer les patrons d'expressions des gènes au cours du cycle de vie du nématode.<br />- Déterminer si des copies de gènes issues de blocs dupliqués possèdent des patrons d'expression divergents.<br />- Générer des données RNAseq en triplicat au cours d'expérience d'infestation du nématode sur des plantes hôtes communes à l'ensemble des Meloidogyne vs. des plantes hôtes spécifiques des espèces asexuées.<br />- Déterminer si les gènes en mutli-copies provenant des blocs dupliqués sont exprimés différentiellement sur hôte universel vs. hôte sepécifique.<br /><br />L'ensemble de ces résultats nous permettra de tester si la structure particulière du génome offre un potentiel de plasticité fonctionnelle. De plus nous pourrons également déterminer si cette potentielle plasticité joue sur le plus grand succès parasitaire des Meloidogyne asexués.

- Détection des gènes en copies multiples dans les génomes de Meloidogynes.
Pour cet aspect, nous avons utilisé McScanX et des BLAST réciproques des protéines et CDS prédits dans les génomes de 3 Meloidogyne à reproduction asexuée et un à reproduction sexuée.

- Détection des blocs dupliqués
Utilisation de McScanX pour détecter des blocs de 3 gènes colinéaires minimum présent en au moins 2 copies, dans les 4 génomes de Meloidogyne.

- Evaluation des % de divergence.
Utilisation de nucMer et BLAST et des informations fournies par les fichiers GFF pour l'évaluation des % de divergence nucleotidiques entre régions codantes, intergéniques et introniques.

- Détection des copies de gènes sous sélection positive et diversifiante.
Calculs des ratios taux de substitutions non synonymes / taux de substitution synonymes (dN/dS) entre copies de gènes issues de duplications en bloc. Détection d''episodic diversifying selection« (EDS) par méthodes phylogénétiques.

- Détermination des patrons d'expression des gènes et copies de gènes avec expression divergente.
Utilisation d'outils tels que Cufflinks et Trinity pour la reconstruction des transcrits. Utilisation des RPKM plus approches de type EdgeR et DEseq pour l'identification de copies différentiellement exprimées.

- Nous avons montré que plus de 90% des gènes chez les Meloidogyne à reproduction asexuée sont dupliqués, alors que seulement 47% sont dupliqués chez l'espèce sexuée. Chez les Meloidogyne asexués, une partie de ces gènes sont dupliqués en bloc et ces milliers de blocs occupent plusieurs mégabases des gènomes de ces espèces. Par comparaison, seulement une dizaine de blocs sont trouvés chez l'espèce sexuées pour quelques kilobases du génome.

- La divergence nucléotidique moyenne entre blocs dupliqués est d'environ 8%, et ceci au sein de chaque espèce asexuée. Ces blocs dupliqués se trouvent parfois sur un même scaffold et les blocs forment des breakpoint de synténie. Cela va dans le sens d'une évolution en absence de méiose.

- Nous avons réalisé une analyse phylogénomique de tous les gènes présents sur des blocs dupliqués. Nos analyses montrent qu'au sein d'une espèce donnée les différents blocs ont des histoires évolutives différentes. Cela suggère que des événements d'hybridation ont donné lieu à cette structure génomique dupliquée particulière.

- Nous avons détecté des signes de sélection positive par approche dN/dS dans environ 20 % des paires de gènes issues de blocs dupliqués. Par ailleurs, nous avons trouvé entre 100 et 200 cas d''episodic diversifying selection' (EDS) entre copies de gènes dans chaque espèce à reproduction asexuée.

- Nous avons montré que les événements de sélection positive et diversifiante touchent environ toutes les catégories fonctionnelles.

- Nous avons généré tout le matériel pour le séquençage RNAseq des différents stades de développement du nématode à galles. Le matériel pour les infestations sur plantes hôtes communes vs. spécialisées est en cours de génération.

- Une fois que nous aurons obtenu les données RNAseq sur les différents stades de développement, nous testerons si des paires de gènes issues des blocs dupliqués possèdent des patrons d'expression divergents. Ceci indiquera une possible divergence fonctionnelle et donc un potentiel impact de la structure du génome au niveau fonctionnel. Nous croiserons ces données avec les données de sélection positive et diversifiante.

- Les données RNAseq sur les expériences d'infestation sur plantes hôtes 'communes' vs. spécifiques nous permettront de déterminer si les copies issues de blocs dupliqués sont exprimées de manière différente en fonction de la plante hôte infestée. Ceci indiquerait un possible impact de la présence de ces gènes dupliqués sur le spectre d'hôte des meloidogyne à reproduction asexuée.

L'ensemble des données générées permettra de répondre à ce qui semble actuellement un paradoxe évolutif; le plus grand succès parasitaire des Meloidogyne asexués comparé à celui de leurs cousins sexués. En effet, nos données semblent suggérer que la présence de plusieurs copies génomiques au sein d'une même espèce pourrait fournir une plasticité fonctionnelle et éventuellement un avantage en terme de spectre d'hôtes. Nos données phylogénomiques suggèrent due des événements d'hybridation seraient à l'origine de ces copies.

Présentations orales:
• 7 février 2014: Séminaire d'unité Institut Sophia Agrobiotech. Romain Blanc-Mathieu «How does an obligate asexual plant-parasitic species adapts to its host? Looking for evidences in the multiple diverged copies genome of the root-knot nematode Meloidogyne incognita.« 45'

• 02 - 04 juillet 2014: Workshop: Genome Evolution in Asexual Animals, Lausanne, Suisse. Romain Blanc-Mathieu «Genome singularities in the asexually-reproducing root-knot nematodes; Genome structure and functional divergence of gene duplicates«. 45', speaker invité par Tanja Schwander (prof. Université de Lausanne).

• 16 - 19 septembre 2014: Congrès «18th Evolutionary Biology at Marseilles« (EBM). Romain Blanc-Mathieu «How does an obligate asexual plant parasitic species adapts to its host? Looking for evidences in the multiple diverged copies genome of the root-knot nematode Meloidogyne incognita.« 20'

• 21 - 25 juin 2015: Congrès «Mathematical and Computational Evolutionary Biology«, Porquerolles. Etienne G.J. Danchin «Evolutionary successful and asexual: the paradox of the root-knot nematodes?« 20'

• 26 - 28 aout 2015: Congrès COST SUSTAIN «Evolutionary Genomics of Plant Pathogens«, Kiel, Germany. Invited speaker: Etienne G.J. Danchin «Comparative genomics of root-knot nematodes provides clues to their parasitic success despite asexual reproduction.« 30'

Article en cours de soumission (à Genome Research):
• Blanc-Mathieu R, Perfus-Babeoch L, Da Rocha M, Gouzy M, Sallet E, Martin-Jimenez C, Castagnone-Sereno P, Kozlowski D, Aury JM, Couloux A, Flot JF, Da Silva C, Schiex T, Abad P, Danchin EGJ. Evolutionary successful and asexual: the paradox of the root-knot nematodes?

La reproduction sexuée permet l'élimination de mutations délétères et génère de la plasticité à travers la recombinaison méiotique et le brassage d'allèles. Chez les animaux, l'absence de méiose et de reproduction sexuée est vue comme une impasse évolutive. Cependant de rares espèces animales sont considérées comme d'anciennes lignées asexuées. Leurs génomes pourraient détenir les clés de ce paradoxe et expliquer comment ils survivent et s'adaptent sans sexe.
La séquence du génome du nématode Meloidogyne incognita est la seule disponible à ce jour pour un animal se reproduisant strictement sans sexe. Ce ravageur notoire, causant des milliards d'€ de dommages à l'agriculture mondiale annuellement, se reproduit sans méiose via parthénogénèse. Au cours de l'annotation et de l'analyse de son génome, notre laboratoire a constaté que celui-ci possède une architecture particulière composée de paires de régions similaires mais divergentes. Ces régions représentent peut être d'anciens haplotypes alléliques ou le résultat d'hybridation. Chez le rotifère bdelloid, un autre animal à reproduction strictement asexuée, une structure génomique en multiples copies divergentes a également été observée. Une telle structure pourrait favoriser la divergence fonctionnelles entre les copies de gènes correspondantes via neo- ou sous-fonctionnalisation, exactement comme pour des gènes paralogues. Ce type de phénomène pourrait représenter un mécanisme de plasticité génomique en l'absence de sexe. Etonnamment, les nématodes à galles à reproduction asexuée ont un spectre d'hôte et une répartition géographique plus larges que leurs cousins sexués. Ces caractéristiques, contradictoires avec les avantages postulés de la reproduction sexuée, sont peut être liées à la structure particulière du génome.
Ici, nous proposons de combiner des données transcriptomiques et génomiques chez Meloidogyne pour déterminer si la divergence de séquence observée entre paires de régions a des conséquences fonctionnelles sur les copies de gènes et procurerait une adaptabilité chez un animal à reproduction asexuée. Nous établirons un inventaire des gènes présents en plusieurs copies chez M. incognita à cause de la structure dupliquée du génome. En analysant les taux de mutations synonymes et non-synonymes entre copies de gènes, nous déterminerons si des copies présentent de possibles divergences fonctionnelles. En utilisant des données d'expression RNA-seq sur différents stades de développement de M. incognita, nous chercherons si des copies divergentes au niveau de leur séquence présentent des divergences d'expression. L'identification de copies de gènes ayant des patrons d'expression divergents constituera la première indication d'une conséquence fonctionnelle de la structure dupliquée des observée chez les génomes d'animaux à reproduction asexuée. Pour déterminer si, chez M. incognita, cette architecture particulière peut être impliquées dans son spectre d'hôte plus large que son "cousin" sexué M. hapla; nous allons infester différentes plantes hôtes avec M. incognita et générer les transcriptomes correspondant en utilisant des techniques de RNA-seq. Les plantes sélectionnées seront soit hôtes compatibles pour les deux Meloidogyne (Tomate, Poivron), soit hôtes compatibles uniquement avec M. incognita (Pastèque, Riz). En comparant les transcriptomes sur différentes plantes, si nous trouvons des copies de gènes spécifiques à la structure de M. incognita exprimées sur des plantes non hôtes pour M. hapla; cela suggèrera que la structure dupliquée peut être impliquée dans son large spectre d'hôte. Une telle structure pourrait procurer une adaptabilité chez un animal à reproduction strictement asexuée.
Notre projet représente une opportunité unique de décrire les premiers mécanismes qui permettraient à des espèces de reproduisant sans sexe d'évoluer et de s'adapter en l'absence de recombinaison méiotique, une question évolutive importante non résolue à ce jour.

Coordination du projet

Etienne DANCHIN (Institut Sophia Agrobiotech, INRA, CNRS, Université de Nice-Sophia Antipolis)

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

ISA Institut Sophia Agrobiotech, INRA, CNRS, Université de Nice-Sophia Antipolis

Aide de l'ANR 269 964 euros
Début et durée du projet scientifique : mars 2014 - 42 Mois

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