Politiques de développement et inégalités de santé : modes de recompositions sociales et environnementales dans la lutte contre le paludisme et la résistance au traitement dans la péninsule indochinoise – SOREMA
Evolution du paludisme à l’aune des changements socio-économiques et écologiques
Deux phénomènes concomitants induisent une réorganisation des politiques de santé dans la région du sous Mékong (Cambodge et frontières avec le Viêt Nam et le Laos) : la persistance du paludisme et de ses formes sévères ; ainsi que l’émergence de résistances au traitement. Deux priorités sont à concilier: réduire les inégalités vis-à-vis de l’infection et perpétuer l’efficacité du traitement.
Les politiques de lutte contre le paludisme entre priorités nationales et enjeux internationaux
Dans un contexte national où le paludisme est loin d’être le problème de santé prioritaire, on observe toutefois une attention « globale » de ce qui se passe eu égard à la succession d’émergences des résistances dans cette partie du globe. L’enjeu consistant à éradiquer le paludisme s’étend au-delà des frontières car les dynamiques « locales » propres à l’émergence de la résistance aux médicaments concernent le monde entier, Afrique y compris. Les quatre grands objectifs du projet consistent à :<br />- identifier les mécanismes générateurs d’inégalités sociale et sanitaires à travers l’évolution du paludisme et la diffusion de la résistance.<br />- montrer les réaménagements écologiques associés aux déplacements humains, qui reconfigurent les dynamiques endémiques de l’infection et conduisent à une recrudescence de l’infection et de la résistance aux médicaments.<br />- réaliser une mise en perspective historique du paludisme qui permettra de comprendre dans quels cadres, et dans quelles directions, évoluent les nouvelles politiques de santé.<br />- analyser les interrelations entre stratégies internationales, politiques nationales, interventions locales et savoirs intégrés. Celles-ci sont en voie de reformulation à une époque où le risque de diffusion de résistance prédomine sur la scène mondiale.<br />L’originalité du projet réside dans une approche interdisciplinaire intégrée. La synthèse des savoirs des treize chercheurs (en anthropologie, sociologie, géographie, histoire, entomologie, santé publique, parasitologie, épidémiologie, biologie) permettra de proposer une analyse articulée et cohérents précisant les liens entre mouvements de population, bouleversements géo-écologiques, variables épidémiologiques et entomologiques, et inégalités de santé.<br />
Deux développements révélateurs du contexte actuel asiatique sont retenus:
1) la question de la variabilité de l’exposition au paludisme qui est associée au processus d’émergence de la résistance aux anti-paludéens. Il est nécessaire d’examiner les paramètres qui influent sur les inégalités face à la maladie dans une société en mutation : circulation humaine accrue, milieux écologiques anthropisés, changement sociétal y compris dans les milieux les plus reculés, politiques nationales corrélées avec les interférences internationales qui participent aux prises de décision locales.
2) les problématiques liées à la colonisation spatiale et humaine du territoire, aux interventions publiques de santé et aux épisodes de résistance. Cette exploration historique constitue un tremplin indispensable pour resituer une des questions centrales qui vise à rendre compte des activités de santé contemporaines et futures.
La méthodologie, essentiellement qualitative, se penche sur l’identification spatiale de l’infection, des mécanismes de production des inégalités de santé, des mouvements de population et de l’avancée de la résistance. L’analyse mettra en avant les modalités de réaménagement des inégalités de santé. Au Cambodge, elle se réalise dans trois microsites et porte sur : 1/ les dynamiques qui façonnent les inégalités face au paludisme ; 2/ les modifications qui touchent les écosystèmes sociaux et naturels ; 3/ les politiques de santé internationales qui se répercutent localement ; 4/ les conditions historiques qui les sous-tendent ; 5/ l’interférence entre savoirs locaux et savoirs globaux ; 6/ les stratégies originales associant initiatives de santé et services de prestations sociales.
La fédération de chercheurs en sciences sociales avec des spécialistes en sciences médicales constitue une condition incontournable permettant de surmonter les verrous technologiques et sociaux propres à la compréhension du phénomène étudié.
Le premier résultat attendu tient à la mise en place de d’une collaboration interdisciplinaire capable d’articuler les méthodologies : concilier les échelles, les espaces et les temporalités adoptés par chacun, de façon à s’assurer en fin de compte que les recoupements sont possibles entre les résultats apportés par les uns et les autres. Le second type de résultat attendu est lié au développement d’une production de connaissances sur un terrain spécifique et familier.
Le troisième résultat espéré tient à la constitution d’un réseau scientifique international, national et local afin que les intervenants de santé opérant à divers échelons (décisions, information, implantation, validation…) puissent profiter des retombées du projet. Le quatrième résultat tient à l’aboutissement d’un travail montrant la capacité d’une équipe à constituer un dosage savant et minutieusement élaboré à partir des quatre objectifs dont l’articulation ne coule pas de source.
Ce dosage est la condition sine qua non pour l’obtention d’un produit final finement développé. Comme l’intention est d’aboutir à une synthèse des faits rapportés, la vocation de cette synthèse est de se traduire en un résultat optimal, abordant une question de santé publique centrée sur le paludisme non pas comme phénomène isolé de ses racines sociales et biologiques mais comme production historique, socioculturelle et géo-écologique. Cette démonstration sera en mesure de présenter l’existence d’une maladie, le paludisme, non plus comme une fatalité mais comme la combinaison de dynamiques complexes rarement prises en considération en dépit d’intentions passées. C’est donc sous des conditions d’exhaustivité et d’équilibrage entre les faits rapportés que le projet sera en mesure de fournir une analyse originale et éclairante.
Outre la valorisation scientifique promue par des publications, le projet communiquera et valorisera ses résultats avec le ministère de la Santé de Phnom Penh et les autorités nationales en relation avec ce dernier, les acteurs locaux du développement et les agences internationales (OMS, ONG étrangères) attentifs à une recherche fondamentale pouvant devenir opérationnelle. Ces rencontres, génératrices de débats, ambitionnent de voir s’élaborer un procédé concret d’intervention destiné à réduire les inégalités de santé. Cette recherche espère déboucher sur l’élaboration de stratégies destinées à réduire les inégalités socio-spatiales vis-à-vis du paludisme: les acteurs du système de santé auront alors le choix de se positionner et de prendre des mesures en termes de vigilance épidémiologique ou bien d’actions préventives ciblées. De mêmes retombées s’effectueront en France en présentant et diffusant les résultats interdisciplinaires.
La production de connaissances attendue aura sa place dans des revues internationales et françaises. Des monographies mettront en lumière le renvoi incessant entre dynamiques locales et régionales afin d’offrir des analyses situationnelles adéquates sur des thématiques faisant le lien entre pratiques sociales, environnementales et préoccupations de santé. Des approches conceptuelles (précision des notions d’inégalités et de vulnérabilités, valeur scientifique ajoutée fournie par l’approche historique et biomédicale) reposant sur des travaux issus de thématiques variées montreront la finesse de la problématique. Une autre production scientifique dévoilera des analyses touchant à des questions d’actualité (déplacements humains, accès aux services, connaissances locales, réseaux d’insertion, etc.) afin de préciser les formes déterminantes et/ou circonstanciées qui concourent aux productions d’inégalités dans le domaine du paludisme.
1- Contexte scientifique et objectifs
Deux phénomènes concomitants induisent une réorganisation des politiques de santé dans la région du sous-Mékong (Cambodge et frontières avec le Viêt Nam et le Laos) : la persistance du paludisme et de ses formes sévères ; ainsi que l’émergence de résistances au traitement. Deux priorités sont à concilier: réduire les inégalités vis-à-vis de l’infection et perpétuer l’efficacité du traitement.
Les 4 objectifs du projet consistent à :
- identifier les mécanismes générateurs d’inégalités à travers l’évolution du paludisme et la diffusion de la résistance.
- montrer les réaménagements écologiques associés aux déplacements humains, car ceux-ci reconfigurent les dynamiques endémiques de l’infection et conduisent à une recrudescence de l’infection et de la résistance aux médicaments.
- réaliser une mise en perspective historique du paludisme, qui permet de comprendre dans quels cadres, et dans quelles directions, évoluent les nouvelles politiques de santé.
- analyser les interrelations entre stratégies internationales, politiques nationales, interventions locales et savoirs intégrés. Celles-ci sont en effet en voie de reformulation à une époque où le risque de diffusion de résistance prédomine sur la scène mondiale.
L’originalité du projet réside dans une approche interdisciplinaire intégrée. La synthèse des savoirs des treize chercheurs (en anthropologie, sociologie, géographie, histoire, économie, entomologie, santé publique, épidémiologie, biologie) permettra de proposer un modèle d’analyse articulé et cohérent précisant les liens entre mouvements de population, bouleversements géo-écologiques, variables épidémiologiques et entomologiques, et inégalités de santé.
2- Description du projet, méthodologie
Deux axes significatifs sont retenus:
i. la question de la variabilité de l’exposition au paludisme qui est associée au processus d’émergence de la résistance aux anti-paludéens. Seront examinés les paramètres qui influent sur les inégalités face à la maladie dans une société en mutation (circulation humaine accrue, milieux écologiques anthropisés).
ii. les problématiques liées la colonisation spatiale et humaine du territoire, aux interventions publiques de santé et aux épisodes de résistance. Cette exploration historique constitue un tremplin indispensable pour resituer la question centrale qui vise à rendre compte des activités de santé contemporaines et futures.
La méthodologie associe une exploration extensive de thèmes propres à la sous-région du Mékong. Elle inclut une identification spatiale de l’infection, des mécanismes de production des inégalités de santé, des mouvements de population et de l’avancée de la résistance. A cette fin, elle propose une analyse fine sur trois grandes zones-témoins sélectionnées pour leur représentativité en termes de gestion différenciée du paludisme. L’analyse mettra en avant les modalités de réaménagement des inégalités de santé. Elle sera réalisée dans plusieurs microsites de chacune des trois zones et portera sur : 1/ les dynamiques qui façonnent les inégalités face au paludisme ; 2/ les modifications qui touchent les écosystèmes sociaux et naturels ; 3/ les politiques de santé internationales qui se répercutent localement ; 4/ les conditions historiques qui les sous-tendent ; 5/ l’interférence entre savoirs locaux et savoirs globaux ; 6/ les stratégies originales associant initiatives de santé et services de prestations sociales.
3- Résultats attendus et valorisation
Avec les productions scientifiques classiques (articles, ouvrages) et les techniques modernes de diffusion (revues en ligne, montage d’un site internet, présentations et débats), le projet ambitionne de fournir des éléments critiques dont les acteurs du développement pourront s’emparer. L’organisation d’un workshop autour de la thématique « recherche et action », assortie d’une publication, contribuera à valoriser les résultats.
Coordination du projet
Frederic BOURDIER (INSTITUT DE RECHERCHE POUR LE DEVELOPPEMENT - IRD)
L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.
Partenaire
IPC INSTITUT PASTEUR DU CAMBODGE (IPC)
IRD INSTITUT DE RECHERCHE POUR LE DEVELOPPEMENT - IRD
Aide de l'ANR 180 000 euros
Début et durée du projet scientifique :
January 2012
- 36 Mois