Encéphalites au virus Ac Mong au Nord Vietnam : aspects virologiques, épidémiologiques, cliniques, et immunologiques d'une virose émergente. – AVE Project

Depuis 1999, les autorités vietnamiennes signalent une épidémie d'encéphalite saisonnière, non due au virus de l'encéphalite japonaise, dans la province de Bac Giang, au Nord du Vietnam. Cette épidémie a lieu de façon récurrente en début de saison des pluies (mai à juillet), touche les enfants de 1 à 8 ans, et fait au moins 50 à 100 victimes par an. Le tableau clinique est caractérisé par une évolution plus rapide, et un taux de létalité plus élevé, comparé à l'encéphalite japonaise. Les premières études concluent à une origine virale, d'un virus encore jamais décrit. L'encéphalite se déclarant habituellement par des crises comitiales en pleine nuit, le virus a été baptisé Ac Mong (cauchemar) Virus (AMV). Objectifs : caractériser le virus, produire des outils diagnostiques pour identifier le réservoir animal et les modes de transmission, développer des stratégies de contrôle de l'épidémie, améliorer la prise en charge clinique et étudier la réponse immune de l'hôte.A partir des prélèvements déjà en notre possession, nous déterminerons les caractéristiques du virus. Le clonage et séquençage du virus permettra de réaliser l'analyse phylogénétique du virus et de développer les primers de PCR à visée diagnostique. Nous mettrons au point des sérologies à partir d'antigènes viraux provenant des surnageants de cultures cellulaires inoculées par le virus. Nous créerons des modèles murins afin d'étudier la physiopathologie de la maladie. Ces travaux seront menés par les Drs Manuguerra et Gessain à l'Institut Pasteur de Paris (IPP), en collaboration avec le Dr Nga, du National Institute of Hygiene and Epidemiology (NIHE) à Hanoï.
Les outils diagnostiques seront validés au Vietnam sur des échantillons de sérum et de LCR collectés sur des patients. A l'aide de ces outils, le NIHE (Dr Hien) réalisera en collaboration avec l'unité d'épidémiologie des maladies émergentes de l'IPP (Dr Fontanet) une étude cas-témoin à la recherche des principaux facteurs de risque de la maladie. Outre le rôle potentiel de vecteurs type moustiques, cette enquête étudiera le rôle des plantations de litchis, introduites concomitamment au début de l'épidémie, et incriminées par la population locale dans la genèse de l'épidémie. Nous déterminerons également la part des infections asymptomatiques par une enquête de séroprévalence dans les villages les plus touchés. Nous testerons différentes espèces animales (broyats de moustiques, chauves-souris, punaises) afin d'identifier le réservoir animal et les vecteurs afin de décrire le cycle du virus. Ces travaux seront réalisés au NIHE au laboratoire des arboviroses et encéphalites du Dr Nga en collaboration avec le Dr Brey, entomologiste. Nous apporterons également une expertise clinique afin d'améliorer la prise en charge des patients (Dr Vinh et Dr Lortholary). Enfin, la réponse immune de l'hôte sera étudiée in vitro et chez l'animal sur la plateforme d'immunologie humaine du Dr Albert de l'IPP.
La caractérisation de ce nouveau virus a pour objectif prioritaire de produire des outils diagnostiques qui serviront à identifier le réservoir animal du virus, à décrire ses modes de transmission, à évaluer des interventions de prévention, et à améliorer la prise en charge des patients. La compréhension de la pathogénèse de ce nouveau type d'encéphalite et de la réponse immune de l'hôte permettra d'initier des recherches sur des antiviraux et vaccins humains. Ce projet multidisciplinaire, rassemblant épidémiologistes, virologues, immunologistes, cliniciens, zoologistes et entomologistes, permettra de renforcer les liens existants entre l'IPP et le NIHE autour de la thématique des virus émergents. De tels liens nous paraissent essentiels dans une région du monde qui a récemment été confrontée à l'émergence de nouveaux virus tel le coronavirus du SRAS et celui de la grippe aviaire.