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Partenariat FutureFoodS : vers des systèmes alimentaires plus justes, plus sains, plus durables

Par Anne-Sophie Boutaud

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Mis à jour le 26/03/2025

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26/03/2025

Partenariat FutureFoodS : vers des systèmes alimentaires plus justes, plus sains, plus durables

Malnutrition, gaspillage alimentaire, surexploitation des ressources, émissions de gaz à effet de serre… Face aux défis environnementaux, sanitaires, économiques et sociaux du XXIème siècle, nos systèmes alimentaires montrent leurs limites. Pour nourrir la population mondiale sans compromettre les générations futures, la question n’est plus de produire davantage, mais de permettre à toutes et tous de consommer mieux. C’est pour répondre à cet enjeu majeur qu’a été lancé à l’été 2024 le partenariat européen FutureFoodS. Coordonné par l’Agence nationale de la recherche (ANR), ce programme ambitieux, présent au Village des Solutions pour la Nutrition dans le cadre du 4e Sommet Nutrition for Growth (NG4) organisé du 26 au 28 mars 2025, a pour objectif d’établir collectivement les bases scientifiques et méthodologiques de systèmes alimentaires plus durables.

Environnement

FutureFoodS présent au Village des Solutions pour la Nutrition dans le cadre du NG4

Organisé du 26 au 28 mars 2025, le 4e Sommet Nutrition for Growth (NG4) à Paris rassemble des dirigeants de nombreux pays, des représentants du secteur privé et d’ONG, dans l’objectif de lutter contre la malnutrition et d’améliorer la qualité de l’alimentation à l'échelle mondiale. 

En marge de ce sommet, un Village des Solutions pour la Nutrition, ouvert à toutes et tous et porté par Expertise France, se tient au Parc André-Citroën, Paris 15e, à l’initiative du Ministère de l'Europe et des Affaires étrangères et de la Commission Européenne. FutureFoodS y participe, aux côtés de l’INRAE, afin de présenter ses objectifs et ses missions le 27 mars à 11h. 

Plus d’informations sur nutritionforgrowth.org 

Des systèmes alimentaires sous tension

En 2023, plus de 730 millions de personnes souffraient de sous-alimentation chronique1, soit un peu moins de 10 % de la population mondiale. En France, la même année, 37 % des français déclaraient être en insécurité alimentaire, un chiffre grimpant à 41 % chez les jeunes. Les causes sont multiples : l’augmentation du prix des produits alimentaires, la stagnation des salaires, la hausse des coûts de l’énergie… Autant de facteurs qui poussent certains foyers français à sacrifier la qualité nutritionnelle de leur alimentation au profit de produits moins chers mais plus pauvres en nutriments essentiels.

Parallèlement, depuis 1975, la prévalence de l’obésité a presque triplé ; et le nombre de maladies métaboliques et cardio-vasculaires a explosé. Selon une étude publiée récemment dans la revue The Lancet, d’ici à 2050, 60 % des adultes et un tiers des enfants et adolescents seront en situation de surpoids ou d’obésité sur la planète – contre, par exemple, un peu plus de 47 % aujourd’hui en France. L’évolution profonde de nos rythmes de vie et de nos modes d’alimentation est en majeure partie responsable. « Nous voyons émerger de nouvelles fractures alimentaires. L’urbanisation et le télétravail ont modifié nos comportements : plus de sédentarité, une alimentation de plus en plus ‘prête à consommer’, et un éloignement croissant entre le consommateur et le producteur. » abonde Marie-Josèphe Amiot-Carlin2, responsable scientifique sur l'alimentation et les systèmes alimentaires à l'ANR, et chercheuse en nutrition et en santé publique.

Coordonné par l’ANR en collaboration étroite avec l’Office fédéral pour l’agriculture et l’alimentation allemand (BLE) et réunissant 83 organisations issues de 29 pays, le partenariat européen FutureFoodS-European partnership for a sustainable Future of Food Systems3 s’inscrit dans ce contexte. « Ce partenariat est une tentative de dépasser les approches fragmentées de la recherche sur l’alimentation » explique Marie-Josèphe Amiot Carlin. « Il s’agit de construire des systèmes alimentaires respectueux de l’environnement, socialement équitables, économiquement viables, sains et sûrs. Ce qui suppose une transformation en profondeur de nos modes de production et de consommation. » ajoute-t-elle.

En effet , loin de s’opposer, les réalités de la consommation alimentaire sont les deux faces d’un même fléau : la malnutrition. La triple charge de cette dernière, avec la co-existence de la sous-nutrition, chronique ou aigue, les carences en micronutriments et l'obésité et le surpoids, illustre l’ampleur du défi, inscrit dans l’Agenda 2030 des Nations Unis : le deuxième Objectif de développement durable (ODD), Faim « zéro », vise à éradiquer la faim et la malnutrition en garantissant l’accès à une alimentation sûre, nutritive et suffisante pour tous. Il appelle à la « mise en place de systèmes de production alimentaire et de pratiques agricoles durables et résilientes ». « Un système alimentaire rassemble tous les acteurs et les activités impliqués dans la fourniture d’aliments : la production, le transport, la transformation, la distribution, et la consommation des produits alimentaires du champ à l'assiette » explique Marie-Josèphe Amiot-Carlin.

Les coûts cachés de l’alimentation

Mais derrière le prix affiché en rayon, l’alimentation a un coût bien plus élevé. Selon un rapport de l’Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) publié en 2023, les effets environnementaux, sanitaires et économiques des systèmes alimentaires représenteraient plus de 10 000 milliards de dollars par an, soit environ 10 % du PIB mondial. Toujours selon la FAO, les systèmes alimentaires sont aujourd’hui responsables de près d’un tiers des émissions mondiales de gaz à effet de serre. La production intensive entraîne également une surexploitation des ressources naturelles, une perte de biodiversité et une dégradation des sols. « Nous avons dépassé six des neuf limites planétaires. L’alimentation joue un rôle clé dans le changement climatique et la pression sur les écosystèmes », souligne Marie-Josèphe Amiot-Carlin.

L’impact de l’alimentation ne se limite pas à l’environnement. La structuration du marché, dominé par quelques grands acteurs, influence fortement les circuits d’approvisionnement et la rémunération des producteurs. « Il existe une distanciation économique et cognitive : peu de gens savent ce que coûte un aliment en intégrant son impact global » appuie Claude Yven, coordinatrice du partenariat FutureFoodS pour l’ANR et responsable de l'unité thématique Alimentation à l’Agence. Les enjeux sont aussi sanitaires et sociaux. En France, 17 % des adultes et des enfants sont en situation d’obésité, tandis que certaines carences nutritionnelles persistent. « Un des défis majeurs est ainsi d’assurer une alimentation diversifiée et accessible à tous, tout en limitant les effets négatifs sur l’environnement et la société » poursuit-elle.

Si les préoccupations autour de l’alimentation se multiplient, leur prise en charge dépasse la seule responsabilité individuelle. « Nous devons sortir aujourd’hui d’une vision court-termiste de l’alimentation. Une assiette équilibrée ne se réduit pas à un choix individuel : c’est le résultat d’un système complexe, où interagissent environnement, économie et santé publique. » insiste Marie-Josèphe Amiot-Carlin. La transition alimentaire nécessite un accompagnement des politiques publiques, une évolution des modèles économiques et une collaboration entre chercheurs, producteurs et entreprises du secteur (TPE-PME), législateurs et consommateurs.

FutureFoodS, un partenariat européen pour la transition des systèmes alimentaires qui s’inscrit dans la stratégie européenne « de la fourche à la fourchette »

Lancé à l’été 2024 à Dijon, FutureFoodS promeut une approche systémique de l’alimentation, intégrant et impliquant les différents acteurs concernés. « Notre mission, c’est de mobiliser la recherche et l’innovation européenne sur les systèmes alimentaires, d’optimiser nos ressources, de les mettre en commun pour développer des synergies. » poursuit Claude Yven. Pour ce faire, quatre grands domaines d’action ont été défini : changer la façon dont on mange, changer la façon dont on transforme les aliments et la manière dont on les distribue, modifier la manière dont nous gérons les systèmes alimentaires et reconnecter les citoyens avec leur alimentation. « Car il nous faut aussi prendre en considération une dimension émotionnelle de l’alimentation : on ne mange pas que pour se nourrir, on mange pour partager, pour se faire plaisir. » souligne-t-elle.

Dans le cadre de ce programme décennal qui mise sur des approches territoriales et sur la coopération entre chercheurs, producteurs, législateurs et consommateurs, six appels à projets devraient être lancés – le premier est en cours. A moyen terme, un observatoire des systèmes alimentaires sera mis en place. « Cet observatoire permettra d’évaluer les transitions, l’efficacité des politiques publiques, d’identifier les leviers de changements potentiels. » détaille Claude Yven. S’appuyant aussi sur une approche participative, les laboratoires vivants (living labs en anglais) - incluant des acteurs publics et privés, des associations, et des citoyens - joueront un rôle essentiel, en permettant d’expérimenter et d’adapter les idées aux réalités du quotidien. Un réseau de connaissance de ces living labs sera déployé. Enfin, des activités seront organisées pour le partage des connaissances, le renforcement et l'expansion de la communauté FutureFoodS, en capitalisant notamment sur les résultats des projets de recherche et innovation financés.

L’alimentation ne peut être pensée isolément : elle est au croisement des enjeux agricoles, sanitaires, environnementaux et sociaux. A tous les niveaux, à toutes les échelles, avec tous les acteurs, cette transition vers la durabilité devra être aussi transectorielle et adaptée, en fonction des cultures et des enjeux de santé propres à chaque pays.

Le partenariat FutureFoodS s’inscrit dans un écosystème d’initiatives européennes dans lequels l’ANR est fortement impliquée.

En savoir plus

Le site de FutureFoodS 

Lancement du partenariat européen FutureFoodS 

FutureFoodS Appel 2024 : Transformer les systèmes alimentaires 

1 Selon le rapport sur l’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde (SOFI) : https://www.unicef.fr/article/la-faim-persiste-depuis-trois-annees-consecutives-alors-que-les-crises-mondiales-saggravent/
2 Depuis 2020, Marie-Josèphe Amiot-Carlin est aussi Vice-Présidente déléguée des Relations Internationales à la SFN (Société Française de Nutrition). En 2023, elle a été nommée au Groupe d’experts de haut niveau sur la sécurité alimentaire et la nutrition (en anglais, High Level Panel of Experts, HLPE-FSN) du Comité de la sécurité alimentaire mondiale, organe des Nations Unies en charge de l’évaluation de la science liée à la sécurité alimentaire et à la nutrition au niveau mondial.
3 Le partenariat FutureFoodS est cofinancé par la Commission européenne, dans le cadre du programme-cadre Horizon Europe.

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