Pour des nuits urbaines durables et inclusives – SMARTNIGHTS
SMART NIGHTS
Pour des nuits urbaines durables et inclusives
Enjeux et objectifs
L’objectif initial du programme de recherche Smartnights est de créer une base de connaissances pour élaborer des politiques publiques durables en matière de vie nocturne étudiante dans les villes universitaires de taille moyenne (Montpellier, Reims, Grenoble et Lyon comme villes étalon). En effet, des notions telles que la ville « 24 heures sur 24 » ou la « ville festive » ne soulignent pas seulement l’importance de la nuit urbaine dans la revitalisation de beaucoup de villes désindustrialisées mais aussi la « nocturnalisation » croissante de la vie quotidienne dans la société occidentale. L’économie de la nuit est devenue une des clés de l’économie urbaine, de la stratégie marketing des autorités urbaines. Cependant, au-delà de ces potentialités, le développement de la vie nocturne est aussi caractérisé par des tendances négatives telles des formes de fragmentation sociale et spatiale, rendues visibles à travers l’expression de conflits. Le programme de recherche permet de décoder les sources de conflits entre étudiants et résidents (nuisances sonores, impacts fonciers, intégration sociale, etc.), et les mécanismes créant des inégalités socio-spatiales face au « droit à la nuit » qui émerge de l’expansion récente de la vie nocturne. In fine, la définition d’un « habiter la nuit » apparaîtra à travers les analyses.<br /><br />Les objectifs de ce programme sont :<br />• Analyser les politiques publiques, les régulations et la gouvernance de la vie nocturne dans les cas d’études<br />• Accéder à une meilleure compréhension des modèles de consommation nocturne des étudiants<br />• Identifier les impacts pour les habitants du développement de la vie nocturne étudiante et leurs réponses aux nuisances produites<br />• Elaborer des politiques publiques cohérentes pour encourager à la mise en place de nuits urbaines durables et assurer une coexistence pacifique entre les différents groupes sociaux.
Gouvernance, politiques et réglementation de la vie nocturne
- Analyses de documents et de statistiques
- Entretiens avec les parties prenantes
- Analyse des données
Consommation de la vie nocturne
- Analyse quantitative (questionnaire en ligne)
- Analyse statistique
- Analyse qualitative (travail ethnographique de terrain)
- Entretiens individuels et groupe de discussion avec des étudiants universitaires
- Analyse des données
Conflits temporels de la vie nocturne
- Entretiens individuels avec les résidents locaux
- Analyse des données
Uniquement pensée comme festive et fréquentée par des étudiants, la nuit est peu représentée dans les politiques urbaines : on ignore les autres pratiquants et ceux qui en sont exclus. Sa gestion est envisagée sous l’angle de la conflictualité et de l’insécurité. Mais le marketing urbain développe une vision contradictoire où la nuit est pensée comme ressource urbaine à travers l’événementiel afin d’attirer des populations à hauts revenus et très diplômées, des touristes..
Dans ses dimensions sociale, raciale et spatiale, l’économie de la nuit reste nettement fragmentée. Elle est dominée par la jeunesse blanche (15-35 ans) tandis que les populations d’origine non-européenne, les classes sociales les moins riches, les femmes, les plus âgés en sont plus ou moins exclues.
L'accroissement récent des populations étudiantes en fait les moteurs de cette vie festive. Pour eux, la nuit est aussi espace ou expérimenter un sentiment de liberté mais aussi apprendre la gestion de l'excès.
L’expansion de cette économie de la nuit suscite des problèmes croissants de bruit et de comportements asociaux ou violents liés aux consommations excessives d’alcool et de drogue.
Cela doit être rapproché de l’impréparation face à l’augmentation de divers problèmes de la vie nocturne dans de nombreuses villes universitaires. En effet, beaucoup de villes découvrent une augmentation des problèmes graves concernant la coexistence entre les résidents et les usages de loisirs nocturnes alcoolisés. La vie festive est marchandisée (au sein d’espaces privés) et polarisée (au centre-ville), amenant à la création de conflits du fait d’une surfréquentation concentrée en certains espaces urbains avec des problèmes de bruits, de propreté, de dégradations, de sécurité, etc. Cela débouche sur une forte conflictualité que les élus peinent à gérer pour l'avoir peu pensée ni intégrée dans les plans de développement marketing ou touristique.
La crise provoquée par l'épidémie du Covid 19 a en quelques jours supprimée cette nuit festive de l'espace publique et collectif. Cela pose différents problèmes qui vont probablement la marquer durablement.
L'impact économique est déjà considérable: en France, la nuit festive fait vivre autant de monde que l'industrie chimique (100 000 personnes) souvent déjà assez précaires et aujourd'hui mal protégés par les dispositif d'urgence. Le nombre de faillite et le chômage vont probablement être très élevés dans ce secteur. Les villes en tirent souvent des revenus conséquents qui se sont évaporés, sans compter l'extinction provisoire du tourisme que cette activité soutenait..
Les usagers de la nuit se sont retirés dans les espaces résidentiels où demeurent des pratiques privées, parfois partagées en ligne. Cependant, les impacts psychologiques seront probablement importants. Dans le même temps, les premiers résultats d'enquête montrent une certaine résignation des usagers qui anticipent une pause de courte durée. Leur consommation d'alcool, de drogue et même l'intensité de leur pratique sexuelle semble avoir régressée.
Cependant, il sera difficile d'imaginer une reprise des activités aux niveaux antérieurs à la crise avant probablement 6 mois à un an. Couplé à des mesures de distanciation qui réduisent les interactions et la fréquentation, cela va avoir un impact psychologique comme économique très important et peut-être même susciter des changements plus profonds difficiles à anticiper.
Alors que beaucoup d'entre elles avaient des politiques qui se contentaient de gérer les nuisances, les villes vont devoir développer enfin des politiques plus globales.
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Des notions telles que celles de la ville « 24 heures sur 24 » ou de la « ville festive » ne soulignent pas seulement l’importance de la nuit urbaine dans la revitalisation de beaucoup de villes désindustrialisées mais aussi la « nocturnalisation » croissante de la vie quotidienne dans la société occidentale. L’économie de la nuit est devenue une des clés de l’économie urbaine, un élément crucial de la stratégie marketing de beaucoup de villes, de leur réputation internationale, tout autant qu’un facteur important de leur compétitivité touristique. Cependant, au-delà de ces potentialités, le développement de la vie nocturne est aussi caractérisé par des tendances négatives. Dans ses dimensions sociale, raciale et spatiale, l’économie de la nuit reste nettement fragmentée. Elle est dominée par la jeunesse blanche (15-35 ans) tandis que les populations d’origine non-européenne, les classes sociales les moins riches, les femmes, les plus âgés en sont plus ou moins exclues. Dans le même temps, l’expansion récente de cette économie de la nuit suscite des problèmes croissants de bruit et de comportements asociaux ou violents liés aux consommations excessives d’alcool et de drogue (Gwiazdzinski, 2007).
Malgré le nombre croissant d’études sur ces dynamiques, beaucoup d’entre elles continuent d’en ignorer certaines dimensions. En particulier, les effets produits par l’expansion récente de la vie nocturne dans des villes universitaires de taille moyenne a suscité peu d’attention. Cela doit être rapproché de l’impréparation face à l’augmentation de divers problèmes de la vie nocturne dans de nombreuses villes universitaires de taille moyenne (Crozat, 2008). En effet, beaucoup de villes découvrent une augmentation des problèmes graves concernant la coexistence entre les résidents et les usages de loisirs nocturnes alcoolisés (Nofre et al., 2017; Nofre et al., 2018). Ces dynamiques dégradent souvent la qualité de vie pendant la soirée et remettent en cause l’idée d’une coexistence harmonieuse entre groupes sociaux urbains.
L’objectif de ce projet est de constituer une base de connaissances pour développer des politiques et régulations cohérentes de la vie nocturne étudiante en déchiffrant les sources d’inégalité et de conflits qui se développent à la suite de l’expansion récente de cette vie nocturne étudiante. Dans cette étude, la vie nocturne est définie par les pratiques de consommation et les activités réalisées pendant la soirée par les jeunes et des populations d’autres âges, qui se déroulent dans l’espace public ou des établissements nocturnes tels que les bars, discothèques, cinémas, théâtres, ainsi que dans les équipements et évènements spécifiquement dédiés aux étudiants. Ces questionnements sont clairement théorisés mais ils ne peuvent trouver de réponse qu’à partir d’une approche empirique rigoureuse au moyen de la méthode comparative. Le projet rassemble des chercheurs qui ont montré par leurs travaux (doctorats ou publications ultérieures) leur capacité à explorer d’un côté l’évolution de la nuit urbaine et de l’autre l’observation de la jeunesse. Ce groupe conduira une étude approfondie sur les pratiques nocturnes dans quatre villes universitaires de taille moyenne : 1) Montpellier 2) Reims, 3) Lyon, 4) Grenoble.
Coordinateur du projet
Monsieur Dominique CROZAT (Acteurs, ressources et territoires dans le développement)
L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.
Partenaire
TRIANGLE/CNRS TRIANGLE : ACTION, DISCOURS, PENSEE POLITIQUE ET ECONOMIQUE
HABITER HABITER
ART-Dev Acteurs, ressources et territoires dans le développement
PACTE Pacte - Laboratoire de sciences sociales
Aide de l'ANR 332 986 euros
Début et durée du projet scientifique :
novembre 2018
- 36 Mois