CE22 - Mobilité et systèmes urbains durables

Travailler à la marge ? Les espaces de travail collaboratifs comme nœuds d’un nouveau système de mobilités hors métropole – PERI_WORK

Travailler à la marge ?

Les espaces de travail collaboratif comme nœuds d’un nouveau système de mobilités hors métropole

Les rapports changeants à la mobilité, à l’activité professionnelle, au projet de vie et au territoire : les nouveaux espaces de travail collaboratif hors métropole et leurs utilisateurs

Le projet prend comme point de départ l’observation d’un essaimage croissant des espaces de travail collaboratif hors métropole, parallèlement à la digitalisation de la société. Ce phénomène s’inscrit dans des tendances de transformation sociétale plus globales qui concernent les manières de travailler et d’organiser le travail, les projets de vie, la conciliation entre sphères professionnelle et privée, la sensibilité grandissante aux enjeux écologiques et les rapports à la mobilité et au territoire. Cette tendance existait déjà avant la crise sanitaire Covid-19, mais elle se trouve finalement renforcée par cette dernière, l’amplifiant et la rendant davantage visible. Elle est liée à de nouveaux comportements de travailleurs du savoir qui cherchent à échapper à la ville et qui voient dans les espaces de travail collaboratif hors métropole un moyen pour concilier leurs projets professionnels et de vie, tout en bénéficiant des réseaux technologiques et sociaux. Le profil de cette catégorie réunit un certain nombre de traits communs (même si sa composition reste assez hétérogène) : un certain niveau d’éducation et de formation professionnelle, parfois même sans diplôme, des parcours marqués par des mobilités et bifurcations, une assez grande autonomie et individualité dans l’exercice de l’activité professionnelle (en tant qu’entrepreneur, indépendant ou travailleur autonome, mais aussi parfois en tant que salarié hautement qualifié et expérimenté). Cette population est aujourd’hui assez minoritaire sur les territoires. Cependant, on peut penser qu’elle y apporte du renouveau.<br />Ce projet cherche à comprendre le rôle de ces espaces sur leurs territoires, en considérant les caractéristiques et trajectoires géographiques et sociales des usagers, leurs interactions et relations à la fois au sein d’un même espace et avec l’extérieur, leurs mobilités, ainsi que leurs projections sur l’avenir.

La méthodologie s’appuie sur trois approches complémentaires:
- la réalisation d’une trentaine de monographies de territoires situés en France, en Allemagne et au Canada à partir d’entretiens semi-directifs avec des membres et animateurs d’espaces de travail collaboratif et des élus locaux et régionaux;
- l’analyse des mobilités individuelles d’utilisateurs d’espaces de travail collaboratif non métropolitains à partir de relevés GPS et de récits de mobilités;
- la réalisation d’une enquête par questionnaire en ligne auprès des utilisateurs occasionnels ou réguliers d’espaces de travail collaboratif situés en métropole ou hors métropole en France, en Allemagne et au Canada. L’enquête a été réalisée au printemps 2020. Elle aborde quatre thèmes : effets de la crise sanitaire, usages/pratiques de l’espace, mobilités, interactions avant la crise sanitaire.

Les monographies de territoire réalisées à ce stade montrent que les profils des individus fréquentant les espaces de travail collaboratif hors métropole sont hétérogènes. Des traits communs se dégagent toutefois comme l’individualité des parcours, l’importance des mobilités résidentielles et professionnelles dans la construction de ces parcours, des niveaux de formation relativement élevés et une sensibilité aux enjeux environnementaux et à la qualité de la vie (conciliation vie professionnelle et vie privée). L’usage de la voiture individuelle s’impose souvent pour les mobilités quotidiennes et professionnelles des utilisateurs d’espaces de travail collaboratif mais il semble réfléchi et est complété, lorsque c’est possible, par des modes alternatifs (vélo, marche, autopartage, covoiturage, train, etc.).

Les premières analyses des relevés GPS et des récits de mobilités mettent en évidence une relative diversité des pratiques de mobilités observées. Les utilisateurs d’espaces de travail collaboratif hors métropoles ne semblent pas avoir renoncé à la mobilité spatiale. Cette mobilité, plus ou moins intense selon les individus, se combine à une adhésion forte à un modèle de développement territorial centré sur le local que l’espace de travail collaboratif vient catalyser. Ce résultat confirme ainsi le rôle des mobilités spatiales comme vecteurs de l’ancrage territorial.

Les premiers résultats de l’enquête quantitative pour la France indiquent que, du point de vue strictement professionnel, la crise sanitaire semble être un faible vecteur de changement pour les utilisateurs des espaces de travail collaboratif. Une majorité des répondants estiment que ces espaces joueront, à l’avenir, un rôle identique dans leur vie professionnelle et personnelle.

Une prolongation du projet de six mois supplémentaires a été demandée (fin en septembre 2022). En dépit des incertitudes liées à la pandémie, l’équipe reste déterminée à poursuivre le projet jusqu’à son terme à travers les actions suivantes :
1) Nouvelle phase d’entretiens semi-directifs avec des acteurs de quelques espaces pour évaluer l’impact de la pandémie sur les activités et la fréquentation.
2) Exploitation des données de l’enquête quantitative par questionnaire.
3) Exploitation de l’enquête GPS.
4) Séminaire de clôture ouvert aux acteurs dans le NETC d’une petite ville du Canada en juin 2022.
5) Actions en direction des acteurs socio-économiques et des médias (forums, conférences, séminaires). A défaut de pouvoir tenir de tels évènements, on privilégiera les formats alternatifs (outre la visioconférence) : interventions à la radio-télévision, publications dans la presse régionale papier et en ligne, chroniques dans la presse on line, diffusion des résultats auprès du comité d’usagers.
Ces actions seront facilitées par le partenariat avec l’Institut d’Aménagement et Urbanisme de Rennes via le recrutement mutualisé (50-50) d’une ingénieure d’études, Anne-Laure Peyrou.
6) Poursuite de la valorisation scientifique (publications).

Le Nadant A-L, C. Marinos et G. Krauss, «Impact de la crise COVID-19 sur les pratiques de coworking«, Colloque Tiers-lieux, organisations et territoires, EM Normandie, Caen, 24 mars 2021.
Le Nadant A-L et R. Suire, panélistes pour le webinaire RGCS, 30 juin 2020 «les transformations du travail post-Covid«
Krauss G. et A-L Le Nadant, Travailler à la marge ? Les espaces de travail collaboratif au cœur d’un nouveau système de mobilités hors métropole, Palimpseste, n°4, 2020, pp.40-43
Krauss G. et C. Marinos. 2019, Les espaces de travail collaboratifs en dehors des centres métropolitains. Formation de nouveaux réseaux ouverts ou entre-soi des travailleurs «autonomes« sur le territoire ? 8e Congrès de l'Association Française de Sociologie, Association Française de Sociologie, Aug 2019, Aix-en-Provence, France.

Depuis quelques années, on observe l’émergence de nouveaux espaces de travail collaboratif (NETC) éloignés des grands centres urbains. Ces lieux de sociabilité constituent une réponse aux nouvelles aspirations d’une population souhaitant évoluer à la marge, aussi bien géographiquement (en s’éloignant des centres urbains) que socialement (en recherchant un équilibre entre vie professionnelle et familiale). Réunissant une équipe pluridisciplinaire de chercheurs, ce projet international propose d’étudier, en s’appuyant sur des terrains situés en Allemagne, Belgique, Canada et France, le rôle que jouent pour les actifs ces « nouvelles centralités périphériques » dont on précisera les impacts en termes de mobilités sur les territoires concernés. Cette recherche approfondit et réoriente un projet en cours d’achèvement sur les tiers lieux (INTIMIDE financé par le GIS M@rsouin, Région Bretagne).
Les comportements d’une nouvelle génération de travailleurs autonomes exerçant une activité professionnelle marquée par le rôle clé du numérique paraissent de nature à redynamiser des territoires non métropolitains, souvent confrontés à la perte d’activités économiques et sociales et à un solde migratoire négatif. Ces perspectives dépendent à la fois de la façon dont ces individus s’inscrivent dans un réseau professionnel, institutionnel ou encore social et de la manière avec laquelle ils sont susceptibles de contribuer directement ou indirectement au développement de leur territoire. A cet égard, l’émergence de NETC situés hors métropole s’inscrit dans de grandes tendances sociétales aujourd’hui à l’œuvre, en particulier la déconnexion entre la « place to live » et la « place to work ». Les aspirations des jeunes actifs par rapport à la qualité de vie et du travail, aux déplacements et au choix des modes de transport et, plus généralement, aux enjeux environnementaux, renouvellent leur rapport au territoire et aux mobilités.
Même si la tendance reste marginale, la part croissante de ces travailleurs – dont une majorité d’indépendants, de solo-entrepreneurs et de télétravailleurs– parmi les actifs est paradigmatique des évolutions de la société contemporaine. Nous postulons pour ces populations l’existence d’un projet de vie plus global qui englobe non seulement les aspirations et activités professionnelles mais aussi des attentes en termes de cadre et de qualité de vie. Ce faisant, l’approche retenue dans ce projet se distingue des explications prédominantes des comportements de mobilité professionnelle d’une part et résidentielle d’autre part, en intégrant des variables non économiques et extra-professionnelles dans le modèle d’analyse.
La problématique proposée consiste à savoir si les NETC peuvent devenir, à l’échelle de leur territoire, des nœuds en termes de concentration spatiale temporaire, en tant que lieux de rencontre et d’activités et points relais d’accès aux réseaux physiques (groupes de pairs face-à-face) et numériques (haut débit). Nous formulons l’hypothèse de la formation de nœuds « à la marge », hors métropole, c'est-à-dire de l’apparition de lieux de centralité relative, géographiquement éloignés des sites et acteurs centraux classiques, mais pourtant essentiels à la trajectoire des travailleurs autonomes.
Les objectifs de la recherche se déclinent selon trois axes. Il s’agit:
1/ de comprendre le rôle des NETC sur leur territoire en étudiant les caractéristiques et trajectoires géographiques et sociales des individus qui les fre´quentent, les interactions entre utilisateurs et fondateurs au sein d’un même espace ainsi que leurs relations avec l’extérieur sur le territoire ou en dehors;
2/ d’observer les mobilités engendrées sur le territoire par les NETC et de mesurer leur capacité à faire nœud, c’est-à-dire à être des points d’ancrage et d’adhérence territoriale ;
3/ d’analyser les projections des individus vers l’avenir pour proposer une analyse prospective des NETC, utile à la définition des stratégies d’aménagement.

Coordination du projet

Gerhard Krauss (ESPACES ET SOCIETES)

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

ESO ESPACES ET SOCIETES
LIRIS Laboratoire Interdisciplinaire de Recherche en Innovations Sociétales
ARUC TÉLUQ, Université du Québec / ARUC (Alliance de recherche université-communauté)
York University / Glendon Campus
LEGO Laboratoire d'Economie et de Gestion de l'Ouest
Université McGill / McGill School of Urban Planning
TVES TERRITOIRES, VILLES, ENVIRONNEMENT ET SOCIETE
LEMNA LABORATOIRE D'ECONOMIE ET DE MANAGEMENT NANTES ATLANTIQUE

Aide de l'ANR 290 388 euros
Début et durée du projet scientifique : septembre 2018 - 36 Mois

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