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Le rôle des cultures éducatives urbaines (CEU) dans l’évolution des mobilités quotidiennes et des contextes de vie des enfants. Collecte et analyse de traces géolocalisées et enrichies sémantiquement – MOBIKIDS

Mobi'kids: Des traces GPS aux traces sensibles ou l’évolution de l’autonomie des enfants en ville

Le rôle des cultures éducatives urbaines (CEU) dans l’évolution des mobilités quotidiennes et des contextes de vie des enfants. Approche longitudinale et contextuelle pour étudier l’évolution des mobilités et expériences spatiales des enfants au cours de la transition entre l’école primaire et le collège. Développement d'un protocole d'enquête et d'analyses de données mixtes (issues de capteur GPS, questionnaires, données entretien et observation issues de parcours commentés).

Evolution de l’autonomie des enfants dans un contexte de démotorisation des villes et d’encouragement des modes actifs. Recherche interdisciplinaire basée sur une méthodologie originale

Le programme MOBI’KIDS vise à comprendre les conditions de mobilités quotidiennes des enfants et leurs rapports aux espaces de la ville dans un contexte de transformations des modes de vie et du renforcement des modes alternatifs de déplacements encouragés sous le paradigme de « démotorisation des villes ». Il s’agit également d’étudier comment évoluent les mobilités et expériences spatiales des enfants au cours de la transition entre l’école primaire et le collège, en cherchant à dépasser les simples notions de routines pour déceler des formes plus informelles ou spontanées des pratiques enfantines des espaces. La mise en regard des contextes de vie différents (ville-centre vs périphérie urbaine) contribue à caractériser des « cultures éducatives urbaines » (CEU) et les ressorts des changements de comportements et ainsi à accompagner les politiques publiques. La production d’une connaissance fine et localisée des mobilités et pratiques des espaces urbains des familles suppose de concevoir un protocole de collecte et d’analyse de données mixtes alliant des approches quantitatives et qualitatives s’appuyant sur les méthodes et paradigmes des différentes disciplines. Le protocole proposé apporte des connaissances complémentaires à celles issues des enquêtes de mobilité standards (Enquêtes ménages déplacements-EMD). Il s’appuie sur deux partenaires industriels pour le déploiement des capteurs optimisés, des algorithmes de filtrage et séquençage des données géolocalisées, un système d’information en ligne pour enrichir et qualifier les données traces de déplacement et d’activités.

Une enquête longitudinale a été réalisée dans deux communes de Rennes Métropole (Rennes et Orgères) auprès de 90 familles impliquées sur deux périodes scolaires (CM2 and 6ème). Une première étape a consisté à prospecter pour le choix des terrains auprès des acteurs locaux (Rennes Métropole, Mairie, Direction d’écoles primaires, Enseignants), à solliciter les autorisations à l’inspection de l’éducation nationale (pour enquêter auprès des enfants de CM1/CM2) et faire valider les outils de collecte auprès de la CNIL. A l’issue de cette première étape, les familles ont été contactées par l’intermédiaire des écoles primaires (2 écoles à Orgères/ 3 écoles à Rennes).
Dans chaque famille consentant à participer à l’enquête, un enfant et un parent ont pris part à un dispositif s’appuyant sur trois types de collecte complémentaires de données. Les deux premiers types associant traces GPS et enrichies composaient un dispositif original MK MOBIBACK impliquant les deux partenaires industriels. Ce dispositif est constitué d’un point de vue technologique d’un ensemble de boîtiers enregistreurs passifs de données comprenant un GPS et un accéléromètre, d’une plateforme centralisée de collecte des données brutes (issues des boîtiers), de traitement (séquençage) et de mise à disposition (via une API) d’une application « questionnaire » pour tablettes. Chaque individu enquêté (enfant et parent) était ainsi équipé d’un capteur GPS couplant un accéléromètre (conçu par le partenaire RF Track sur un cahier des charges spécifique) pour enregistrer l’ensemble de ses traces ou positions géographiques et temporelles (pendant 5 jours). Une fois segmentées et renseignées (déplacements-arrêts), ces traces ont été qualifiées (des motifs et conditions de réalisation des déplacements et des activités réalisées) et enrichies (questions portant sur les rapports à l’espace, l’autonomie, la socialisation et attitudes parentales) via un questionnaire administré sur tablette. Enfin, une dernière phase de collecte (impliquant un sous-échantillon d’enfants consentants et engagés dans les deux phases précédentes d’enquête) a permis d’observer le vécu des enfants en situation de mobilité (dont situation de changement de modes, la seconde année) en collectant discours et photos (enregistrement-vidéo la deuxième année) des enfants au cours de parcours commentés réalisés en contexte familier (trajet école-domicile).

Sur le plan empirique et théorique, le programme a permis de:
- produire des profils (déplacement, autonomie, éducatifs), typologies (lieux de socialisation, cheminements, trajectoires journalières d'activités) et ontologies (activités, déplacements) contribuant à transcrire quelques dimensions des processus observés de façon longitudinale.
- caractériser des tendances d’évolution de déplacements des enfants selon les milieux urbains et des profils de mobilité enfantine associés aux contextes d’apprentissage (profilant des cultures éducatives en cours de définition),
- définir des typologies de lieux et de lieux-moments-activités (LMA) révélant la spontanéité et l’informalité de certaines pratiques enfantines.
- formaliser des ontologies d’activités pour déceler et comparer des routines au sein des familles.
- ébaucher des formes de sensibilités enfantines au cours des déplacements (à pied et à vélo) et une grammaire attentionnelle au cours de trajets scolaires.
-pré-figurer des métriques et modèles de construction d'indicateurs de contextes de déplacements pour expliquer le sens et la fonction des mobilités actives des enfants.
- formaliser différents niveaux descriptifs des cultures éducatives urbaines basés sur les typologies de contextes d’apprentissages et de styles éducatifs.
- produire des mises en forme originales de résultats (Montage vidéo de fragments de conduites cyclistes enfantines; bande son de paroles d’enfants en marche; récit-fiction illustrés d’immersions ambiantales sur les chemins d’écoliers et de collégiens).
Sur le plan méthodologique, le programme a contribué à :
- concevoir et mettre à l’épreuve un dispositif de collecte et de partage de données hybrides (MK MOBIBACK) incluant capteurs passifs GPS, plateforme de traitements (séquençage de traces), partage de données (FTP, API, Cloud, Flux géographiques) et application questionnaire d’enrichissement des traces.
- élaborer une documentation-diagnostic de sa validité scientifique et éthique.
- documenter les chaînes de traitements d’apurement et de stabilisation des données (traces enrichies, données qualitatives) dans des environnements open source.
- développer des outils spécifiques de visualisation et de représentation des données pour l’exploration de dynamiques ou de clusters associés à des patterns de comportements (Appli SIMBA). Les codes informatiques (en langages R, et Python) relevant de ces développements sont disponibles sur github.
Enfin, en termes de transfert, on relèvera :
- un forum MOBI’KIDS ouvert au public les 30 juin et 01 juillet 2022 faisant dialoguer recherche, politiques publiques, société : organisé à partir d’une exposition de la recherche (premiers résultats de MOBI’KIDS) et d’une table-ronde réunissant parents, acteurs associatifs, scientifiques et élus ; il a été renouvelé à Grenoble de façon plus académique le 9 novembre 2022 (exposition réitérée, table-ronde conviant des chercheur.e.s en SHS, Informatique) avec le soutien du GDR MAGIS.

L’intérêt porté aux enfants dans les espaces urbains et aux données spatiales et temporelles afférentes à leurs activités en ville contribue à porter un regard différent sur la qualité des espaces urbains, leur potentiel récréatif et socialisant. Dans ce sens, la problématique de MOBI'KIDS a permis la consolidation de la thématique enfance en ville via sa dissémination dans de nouveaux projets (thèse, AAP) et l’application de briques méthodologiques dans de nouveaux projets (MOBITAF pour l’appli GPS/questionnaire (partenaires Alkante/ESO) ; ANR Velotactique pour la technique des parcours commentés à Vélo (partenaires impliqués ESO/PACTE).
Par ailleurs, les développements technologiques et informatiques opérés dans le programme devraient garantir une certaine généricité de la chaîne de collecte et d’analyse pour un transfert des protocoles de suivi et l’analyse des pratiques individuelles de mobilité vers d’autres acteurs économiques ayant besoin d’une connaissance fine des comportements et de leurs évolutions. Cela favoriserait l'outillage complémentaire des enquêtes traditionnelles en permettant d'augmenter la qualité des informations recueillies sur des périodes plus longues et de réduire les coûts en améliorant les outillages spécifiques visant des automatisations complémentaires.

Le programme MOBI’KIDS a donné lieu à 5 publications (dont 3 de rang international et 1 de transfert institutionnel), 1 ouvrage collectif en préparation, 15 communications dans des colloques (dont 8 de rang international) et 10 actions de vulgarisation (dont 4 contributions dans la presse écrite) et une thèse. A ces productions s’ajoute un plan de gestion des données renseigné au fil de l’eau.
Au-delà des productions de valorisation, le programme a contribué sur le plan méthodologique à :
- la conception et mise à l’épreuve d’un dispositif de collecte de données hybrides et de partage (MK MOBIBACK) incluant des capteurs passifs GPS, une plateforme de traitements (séquençage de traces) et partage de données (FTP, API, Cloud, Flux géo) et une application questionnaire d’enrichissement des traces et de collecte d’informations socio-psychologiques. A cela s’ajoute une documentation-diagnostic (validité scientifique et éthique) du protocole de collecte des traces.
- la formalisation d’une chaîne d’opérations d’apurement et stabilisation des données (traces enrichies, données qualitatives).
- le développement de traitements statistiques appliqués aux données spatio-temporelles de mobilité et activités quotidiennes, à la production d’indicateurs d’autonomie et de profils socio-démographiques et socio-éducatifs.
- l'application web de fouille de données, d’analyse et de comparaison des activités journalières humaines (SIMBA)
- un outil de géovisualisation (Mobi’Kids App) des traces enrichies et sensibles à destination des chercheurs du programme MOBI’KIDS pour l’exploration des données pendant l’analyse.

Le projet MOBI’KIDS vise à comprendre les conditions de mobilités quotidiennes des enfants dans un contexte de transformations des modes de vie et des modes de déplacements impulsés par les enjeux de la ville durable et notamment le renforcement des modes alternatifs de déplacements impulsés sous le paradigme de « démotorisation des villes ». Plus spécifiquement, il porte sur les mobilités et expériences spatiales des enfants en phase d’apprentissage de l’autonomie de déplacements et l’identification des contraintes et leviers de changement pour les modes alternatifs à l’automobile. L’objectif consiste à vérifier l’hypothèse qu’il existe des formes de «cultures éducatives urbaines» (CEU) variant selon les lieux de vie, les situations sociales et les modes de vie. Entendues comme un ensemble d’attitudes, de valeurs et de pratiques, elles seront observées/recherchées dans une diversité de contextes urbains afin d’expliquer d’une part, leur variabilité socio-spatiale, d’autre part comment elles fluctuent et se structurent sur un gradient spatio-temporel définissant des routines vs expériences informelles des espaces de vie. La démarche focalisée sur la métropole de Rennes visera une première série d’analyses statistiques basées sur des données d’enquêtes produites par les Autorités Organisatrices des Transports locales (Origine-Destination, Enquêtes Ménages et Déplacements) nous permettra de dégager les principales tendances de mobilité des enfants et de leur famille suivant les dimensions sociales et spatiales. Ces tendances contribueront à l’échantillonnage (terrain et population) de l’enquête semi-longitudinale (T1 & reconduction en T2 sur une partie de l'échantillon) déployée sur une cohorte de 140 familles (habitantes de d'une ville-centre vs périphérie urbaine). La démarche s’appuie dans un premier temps sur un protocole conceptuel et technique original de collecte et d’analyse des données de nature et source différentes : géolocalisation des déplacements, entretiens individuels post-traces, parcours commentés pour saisir les ambiances urbaines. L'analyse des données se prêtera à trois lectures articulant analyse quantitative et qualitative : 1/ une lecture informatique de type fouille de données permettra de dégager des comportements habituels (patron spatio-temporel) et inhabituels à partir des traces GPS enregistrées ; 2/ une lecture sémantique des entretiens (post- collecte des traces GPS) contribuera à l’analyse des modes de vie des individus enquêtés et caractérisation des contextes sociaux et familiaux, des habitudes et types préférentiels de mobilité, des contextes environnementaux des déplacements et du sens donné à la mobilité ; 3/ une lecture sensible s'appuiera sur les données d'observation in-situ de parcours réalisés par les enfants afin de saisir les contextes matériels, sensoriels, pratiques et temporels.
Ce corpus de traces enrichies contribuera à définir les profils de CEU expliquant les conditions d’apprentissage de la mobilité. Dans un deuxième temps, un atelier/observatoire co-élaboré avec les acteurs de la métropole rennaise sera mis en place auprès d’un sous-échantillon de la population enquêtée en T1. Cette expérimentation liée aux changements de modes consistera à suivre sur une période plus étendue l’évolution des pratiques et conditions de mobilité d’enfants en phase de transition entre l’école primaire et le collège et les rapports aux espaces. Ce projet conduit dans une approche interdisciplinaire construite sur de précédentes collaborations entre équipes issues des SHS et des SII et deux partenaires PME contribue au développement d’outils hybrides de collecte couplant des données de nature différentes (GPS, accélérométriques, discursives, observations) en vue de d’améliorer les protocoles d’enquêtes sur les mobilités et la production d’une connaissance fine et localisée des comportements, des pratiques et de leurs évolutions, complémentaire des grandes enquêtes standards (EMD, ENT).

Coordination du projet

sandrine DEPEAU (Espaces et SOciétés)

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

UMR AAU AAU (Ambiances Architectures Urbanités)
LI LI (Laboratoire d'Informatique)
ALKANTE
RF TRACK
UMR ESO Espaces et SOciétés
PACTE Laboratoire des Politiques publiques, ACtion politique, TErritoires

Aide de l'ANR 510 473 euros
Début et durée du projet scientifique : décembre 2016 - 42 Mois

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