DS0801 - Rapport au risque et innovation sociale

Le Transfert des Technologies Universitaires et son Optimisation – UTTO

Le transfert de technologies universitaires et son optimisation

S’il est souvent acquis que les connaissances et les technologies universitaires contribuent à l’innovation et à la croissance, les arrangements sociaux et les politiques qui favorisent les inventions académiques et permettent leur transfert restent à être découverts. <br />La création d’une base de données nationale permet à l’équipe d’explorer de nouvelles dimensions de la production de savoirs scientifiques et techniques et leur transfert, avec un focus sur l’impact de la politique scientifique.

Vers un modèle enrichi du transfert de connaissances et technologies academique, et de la politique publique de la science

Après la deuxième guerre mondiale, le financement public de la science a été justifié par les défaillances de marché dues à la non-appropriabilité des résultats de la recherche fondamentale. Sa contribution à l’économie était largement conceptualisée comme un « débordement de connaissances ». La compréhension des arrangements sociaux et le design de politiques publiques de la science était limités. Les parties prenantes ayant perçues une sous-exploitation des connaissances et technologies académiques, un “nouveau modèle de transfert” a été introduit (Bayh-Dole Act) conférant aux universités US les droits sur les inventions générées sur financements fédéraux, leur délégant ainsi le rôle de manager cette propriété (à leur éventuel profit). D’autres modèles ont été progressivement abandonnés dans le monde pour adopter des législations similaires en raison de la supériorité supposée de ce modèle. Il n’est pourtant toujours pas prouvé que ce modèle soit optimal ayant pour désavantage de potentiellement réduire les incitations des professeurs innover et décourager la recherche contractuelle avec l’industrie. En outre, le seul focus sur le transfert de technologies a longtemps caché le fait que d’autres politiques plus traditionnelle de la science telle que le financement de recherche fondamentale sur projet, ou la stimulation de groupes d’excellence pourraient fortement stimuler l’innovation, pour peu qu’elles soient conçues de manière adaptée. <br /><br />Le projet UTTO reconsidère, sur des bases empiriques claires et précises, des questions fondamentales: dans quelle ampleur les chercheurs et professeurs inventent-ils directement ou produisent-ils des connaissances utilisée directement par les brevets? Quel est l’effet de la politique de transfert? Quelle relation entre excellence, nouveauté et risque d’une part et impact économique de l’autre? Dans quelle mesure le financement de la recherche fondamentale affecte-il l’invention, la recherche en entreprise et l’innovation?

Le projet UTTO s’appuie sur la construction d’une base de données d’ampleur nationale décrivant la recherche académique française. Ces données nous permettent de documenter l’activité de recherche de presque tous les chercheurs et enseignants-chercheurs employés dans les universités et organismes jusqu’en 2016. L’activité de recherche (laboratoires), les publications (WoS), les brevets (Patstat), les contrats de recherche et de consultance avec des entreprises, le financement sur projet (ANR), la sélection des clusters of excellence (LabEx) et universités d’excellence (IdEx) du PIA, ont été matchées au niveau individuel.

Cette base de données nous permet 1/ d’explorer de nouvelles dimensions de la production de connaissances et de technologies, et 2/ de mieux tracer et quantifier l’impact direct de la recherche académique à l’économie.

Les méthodes utilisées dans ce projet sont essentiellement empiriques et quantitatives. Lorsque c’est possible, nous faisons usage des méthodes contrefactuelles (groupes de contrôle) afin d’identifier l’impact de certaines politiques de la science bien que seules soient disponibles des données d’observation.

Les travaux réalisés peuvent être synthétisées en deux principales dimensions:

1/ Apprécier de nouvelles dimensions de la production de connaissances scientifiques et technique:

Nous montrons comment les réseaux professionnels (Bergé, Carayol, & Roux, 2018) et les équipes (Akcigit et al, 2018) affectent la productivité de la recherche; Nous proposons une nouvelle mesure de la nouveauté scientifique et mettons en évidence sa relation à l’impact scientifique (Carayol, Lahatte & Llopis, 2018); Nous analysons la relation entre le risque et les résultats scientifiques et techniques (à venir); Nous réinterprétons la relation entre la complexité des projets scientifiques et l’interdisciplinarité (Carayol & Maublanc, 2018); Nous analysons la sélection de projets de recherche (Lanoe, 2018) et l’impact de différents instruments de financement de la science (Carayol & Lanoe, 2018; Carayol & Henry, 2019).


2/ Mieux retracer et quantifier les contributions de la recherche académique à l’économie:

Nous analysons quels chercheurs produisent des inventions en France et l’impact des politiques de transfert de technologies (Carayol & Carpentier, 2018); Nous montrons comment les professeurs influencent les modes de transfert (Carayol & Sterzi, 2018), ainsi que l’impact du management (Sterzi, Lissoni & Pezzoni, 2018) et des politiques de propriété intellectuelle (Sterzi & Martinez, 2018); Nous évaluons dans quelle mesure les chercheurs et enseignants-chercheurs et quels articles sont cités dans les brevets (Carayol, Tijssen & Winnink, 2019); Nous étudions les contrats de recherche des laboratoires publics avec l’industrie (Bianchini, Llerena and Patsalis, 2018) et comment ils affectent la productivité des entreprises (Carayol, Carpentier & Roux, 2019); Nous mettons en évidence l’impact du financement par projets sur l’invention (Carayol, Carpentier & Roux, 2019) et l’impact des programmes d’excellence sur l’emploi et la R&D (Henry, Monras & Sapanos, 2018).

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Economistes et responsables publics s'accordent désormais sur l'effet positif des connaissances académiques sur la croissance des états et des économies locales. Le Bayh-Dole Act introduit aux USA dans les années 80, est l'initiative politique clef. Plusieurs observateurs suggèrent que le succès technologique des USA repose en grande partie sur ce nouveau modèle commercial de transfert de technologies. Des réformes similaires ont depuis été introduites dans de nombreux pays et la plupart des universités de recherche et des organismes publics de recherche ont fondés des services de transfert de technologies (TTO) qui commercialisent les connaissances académiques et managent les droits de propriété. En France, ce nouveau modèle a été introduit via une série de réformes, dans l'objectif d'accroître les rendements économiques et sociaux de la recherche publique.

Nous montrons, dans cette proposition de recherche, grâce à une première analyse sur les données françaises que nous souhaitons étendre et fiabiliser dans ce projet, que si les brevets universitaires ont significativement augmenté dans la dernière décennie (pour atteindre 14% des familles de brevet en 2012), ceci est principalement dû à une modification de la structure de propriété des brevets académiques, laquelle s'accompagne d'une évolution contrastée de leurs indicateurs de qualité. Ces données et premiers résultats, nous permettent de poser de nouvelles (ou de renouveler) certaines grandes questions. Les incitations académiques traditionnelles sont-elles “alignées” avec le nouvel objectif de contribuer au transfert de technologies? Les différents scénarios de transfert sont-ils associés à différents niveaux d'efficacité, et si oui, pourquoi? Quels sont les impacts réels des changements récents de législation et des nouveaux instruments de transfert de technologie?

Pour répondre à ces questions, nous devons nous appuyer sur une compréhension micro-économique fine de ce nouveau modèle commercial, lequel repose essentiellement sur le jeu entre les trois principaux acteurs du transfert: le professeur (ou le chercheur), le TTO et l'entreprise. En outre, nous construirons une base de données très récente et complète, en appariant, au niveau des individus, informations personnelles, données de brevet, de publication et de financement sur projet. La France est ici considérée comme une étude de cas à part entière. Aucune étude aussi vaste, détaillée et précise n'a jamais été réalisée. Une enquête auprès d'inventeurs académiques, des entretiens de TTO, ainsi que des études de cas sur les sites de Bordeaux et Strasbourg seront réalisées lorsque les données ne sont pas disponibles au niveau national.

Nous proposons, en outre, d'identifier l'impact de politiques ayant ciblé une partie de la population de référence et en mettant en évidence les comportements différenciés des “traités” et des contrôles. Nous étendrons aussi nos investigations au niveau Européen et exploiterons des variations de politiques entre pays dans le temps. Notre objectif est d'offrir des recommandations de politique publique permettant d'améliorer (idéalement d'optimiser) le transfert de technologies.

Les membres de l'équipe sont experts dans le domaine des brevets et du transfert de technologies. Ils sont répartis sur quatre sites, mais plusieurs d'entre eux ont déjà collaboré. La cohésion de l'équipe, incluant la connexion forte avec l'OST (comme fournisseur de données) permettra le respect des délais. De nouvelles collaborations fructueuses seront réalisées, grâce à la réunion d'expertises en microéconomie, sur les pratiques de transfert, en micro-économétrie appliquée, sur les techniques d'identification sur données d'observation et sur différentes méthodes de collecte de données. Le projet devrait, enfin, contribuer à l'établissement d'une base de recherche française sur le transfert de technologies académiques, en lien avec les responsables des politiques publiques, les praticiens et les étudiants.

Coordination du projet

Nicolas CARAYOL (Groupe de Recherche en Economie Théorique et Appliquée)

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

GRETHA Groupe de Recherche en Economie Théorique et Appliquée
CNRS-CES (UMR8174) CES - Centre d'Économie de la Sorbonne (UMR8174 CNRS/UP1)
FNSP Fondation Nationale des Sciences Politiques
BETA - UNISTRA Bureau d'Economie Théorique et Appliquée
CES (CNRS DR PARIS B) CES - Centre d'Économie de la Sorbonne

Aide de l'ANR 283 760 euros
Début et durée du projet scientifique : novembre 2015 - 36 Mois

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