DS0304 - Chimie durable, génie chimique et biotechnologie

Mini voie de biosynthèse des terpènes – Reset

Développement d’une mini-voie de biosynthèse artificielle des terpènes.

Le projet Reset vise à développer une mini-voie de biosynthèse artificielle des terpènes, implémentable au sein de microorganismes ou utilisable in vitro, dans le but de développer une voie d’accès simple, non-polluante et universelle à l’ensemble de ces composés naturels d’intérêt (caoutchouc, prenylated aromatics, caroténoïdes, sesquiterpènes, diterpènes…).

Sous-traiter notre chimie aux microorganismes ou le concept d’usine cellulaire

Les terpènes constituent la plus grande classe de composés naturels avec plus de 50000 structures différentes décrites à ce jour. L’homme exploite, des fois depuis fort longtemps, les propriétés physico-chimiques de certains de ces terpènes (menthol, huiles essentielles, caoutchouc, taxol, carotène…). D’une manière générale, la production de ces composés repose encore essentiellement sur leur extraction de la matière végétale (ce qui a souvent un impact négatif sur l’environnement), la chimie n’étant pas capable de produire à un coup raisonnable certains terpènes dont la structure est fort complexe. Une des possibilités pour contourner ce problème est de développer le concept d’usine cellulaire. En effet certains microorganismes sont déjà exploités par l’homme pour produire des composés d’intérêt comme l’éthanol grâce aux levures ou les antibiotiques grâce aux champignons filamenteux ou aux bactéries (actinomycètes). Grâce aux progrès de la génétique/biologie moléculaire/génomique il est actuellement aisé de cloner un ou plusieurs gènes codant autant d’enzymes impliquées dans une voie de biosynthèse, conduisant par exemple à la synthèse de la pénicilline, dans un microorganisme qui ne possède pas cette voie et lui faire ainsi produire le composé d’intérêt. Le but du projet Reset est d’appliquer ce concept d’usine cellulaire à la production par des microorganismes de différents terpènes d’intérêt mais, et c’est là l’originalité du projet, en n’utilisant pas les voies de biosynthèse des terpènes naturelles (car trop longues, trop d’enzymes impliquées) mais une voie de biosynthèse artificielle, beaucoup plus courte. Ceci est réalisé en assemblant dans une nouvelle voie de biosynthèse, des gènes codant pour des enzymes qui naturellement n’ont pas vocation à travailler de concert. Ce travail d’ingénierie métabolique a pour but d’établir une nouvelle méthode, simple et universelle d’accès aux différents terpènes naturels d’intérêt.

Notre méthodologie est basée sur le fait que les enzymes possèdent souvent une promiscuité de substrat, c’est-à-dire qu’en dehors de leur(s) substrat(s) naturel(s) elles sont aussi capables de catalyser la même transformation mais sur des composés chimiques dont la structure est partiellement différente de celle des substrats naturels. Ainsi la chimie du vivant devient d’un très grand intérêt pour l’humanité qui peut puiser dans ce réservoir de gènes établi tout au long de l’évolution de la vie sur terre. En effet grâce au séquençage massif de génomes et de métagénomes (consortium de bactéries) qui s’est développé de manière exponentielle ces dernières années, l’humanité dispose de plus en plus de banques de données génétiques, dans lesquelles il suffit de chercher les gènes homologues (par analogie de séquence) codant pour une enzyme catalysant la transformation d’intérêt. Ceci permet ensuite de disposer de collections d’enzymes représentatives de la biodiversité d’une famille plus ou moins variées et dont on espère qu’elles seront capables de catalyser la réaction voulue mais sur un substrat d’intérêt en plus du substrat naturel pour lequel elles sont conçues. L’exploration des capacités chimiques du vivant devient ainsi un moyen extrêmement puissant pour réaliser une chimie à façon, non-polluante car utilisant des enzymes ou des microorganismes parfaitement biodégradables et fonctionnant en milieu aqueux. L’accès à cette biodiversité génétique permet ainsi d’envisager non seulement de refaire la chimie naturelle mais aussi par combinaisons de différentes enzymes provenant de différents organismes, d’étendre le champ de la chimie réalisable in cellulo.

Nous avons pu pour l’heure découvrir au travers de l’étude de banques de données génétiques, des gènes codant pour l’ensemble des activités enzymatiques nécessaires à la mise en place de la mini-voie de biosynthèse des terpènes envisagée dans le projet Reset. Cette étude met en évidence l’intérêt d’étudier et d’exploiter de manière raisonnée, l’extraordinaire diversité des activités enzymatiques que la nature nous offre sous forme de gènes codant des enzymes catalysant des réactions enzymatiques d’intérêt. Une des perspectives de ce travail est de remplacer l’extraction de produits naturels (souvent dommageable pour les espèces naturelles) ou leur synthèse chimique (potentiellement polluante et de nature fondamentalement non-renouvelable) par une production réalisée par des microorganismes dans des milieux de culture très simples et ne contenant que des sources de carbone renouvelables, diminuant ainsi l’impact des activités humaines sur la biosphère. Nous avons ainsi montré in vitro et in vivo que ces enzymes sont susceptibles de fonctionner de manière séquentielle sous forme de cascade enzymatique pour la génération de 2 des composés cibles du projet Reset. Le travail qui est en cours de réalisation consiste à étendre cette preuve de concept à l’ensemble des composés cibles du projet Reset. Cette nouvelle approche quant à la (bio)synthèse des terpènes permettra très certainement dans le futur de développer de nouvelles collaborations tant au niveau académique qu’industriel en raison de l’extrême importance des terpènes dans nos sociétés.

La principale perspective de ce projet est le développement d’une nouvelle manière d’appréhender la production des terpènes que ce soit au laboratoire ou en industrie, de telle sorte à générer de manière responsable de très nombreux terpènes d’intérêt pour la société (parfums, caoutchouc, médicament, colorant…). Ainsi nous pouvons envisager de remplacer la chimie actuelle des terpènes (extraction à partir de matériels issus du vivant ou synthèse chimique) par une approche de biologie synthétique plus respectueuse de l’environnement, innovante et source de richesse. Cette nouvelle possibilité encouragera à n’en pas douter des recherches encore plus poussées dans le domaine de la biosynthèse des terpènes afin de pouvoir accéder à une richesse gratuite, c’est-à-dire l’extraordinaire biodiversité en terme de gènes et d’activités enzymatiques que nous offrent la nature. La compréhension que les génomes de tous les êtres vivants constituent une richesse pour l’avenir de l’humanité pourrait contribuer à une prise de conscience accrue de la nécessité de sauvegarder la biodiversité.

A l’heure actuelle et en raison d’une potentielle prise de brevet aucune action de communication au niveau de productions scientifiques (congrès, publication,…) n’a été mise en place.

Les terpènes représentent la classe de composés naturels la plus abondante avec plus de 50000 structures décrites. Ces molécules sont très attractives d'un point de vue industriel en raison de leurs activités biologiques (artémisinine, taxol…), de leurs propriétés organoleptiques et de leurs caractéristiques physico-chimiques (caroténoïdes, caoutchouc…). En tant que produits naturels, l'accès industriel aux terpènes dépend encore largement de l'extraction de sources naturelles telles que les plantes (menthe, camphrier, laurier, carotte, hévéa…). Alors que cette approche est économiquement valable pour l'obtention de terpènes simples et abondants tels le menthol, le camphre ou le carotène, l'accès à des composés plus complexes tels que l'artémisinine ou le taxol est un problème récurrent en raison de la très faible concentration in planta et de la nécessité d'assurer un développement durable en relation avec la protection de la biodiversité. Bien que la synthèse chimique puisse être une solution au problème de l'accès à ce type de terpènes, la complexité structurale des sesqui- et des di-terpènes rend leur synthèse chimique laborieuse et économiquement trop coûteuse. De plus le caractère naturel d'un composé produit par synthèse chimique est perdu ce qui pose problème pour certaines industries. Ainsi pour des raisons à la fois économiques, environnementales et de régulations, la production industrielle des terpènes doit passer de l'extraction ou de la synthèse chimique à des bioprocédés écologiquement responsables.
Les terpènes sont produits par la quasi-totalité des organismes vivants et leur biosynthèse est basée sur l'apport de dérivés pyrophosphates de terpénols simples tels que l'isopenténol, l'alcool de diméthylallyl, le géraniol, le farnésol et le géranylgéraniol aux terpènes transférases et synthases, ces dernières étant impliquées dans la génération des différents squelettes terpéniques hydrocarbonés. Alors que la Nature utilise respectivement soit l'acétyl-CoA dans la voie du mévalonate (6 enzymes) soit le glycéraldéhyde-3-phosphate et le pyruvate dans la voie non-mévalonate (7 enzymes) nous nous sommes demandés si une voie hemi-biosynthètique enzymatique et/ou microbienne d'accès aux terpénoïdes pouvait être construite. Cette route devrait s'affranchir de l'utilisation des voies du mévalonate et du non-mévalonate en utilisant directement comme substrat des terpénols industriels tels que l'isopenténol et le diméthylallyl alcool, soit naturels tels que le farnésol.
Le projet RESET a donc pour but de construire une nouvelle mini-voie de biosynthèse des terpènes, in vivo ou in vitro en fonction de la cible terpénique choisie, et en utilisant comme substrat des terpénols industriels en C5 (prénol et isoprénol, > 10000 tonnes/an) ou le farnésol naturel en C15. Ces précurseurs seront dans un premier temps transformés in vivo ou in vitro en leurs dérivés pyrophosphates précurseurs universels de tous les terpènes grâce à 2 kinases. Dans un deuxième temps ces dérivés pyrophosphates seront transformés par des transférases et des terpène synthases en hydrocarbures terpéniques, terpènes aromatiques ou caoutchouc de haute masse molaire. Les gènes codants ces différentes enzymes (3 à 4 en fonction du produit final) sont connus. L’originalité est d'utiliser ces enzymes dans une voie totalement nouvelle, de manière à développer un bio-accès industriel simple, nouveau, sûr, performant et très efficace à de très nombreux terpènes d'intérêt. Les produits cibles seront des hydrocarbures terpéniques d'intérêt industriel (santalene, germacrene), un dérivé aromatique prénylé, la tryprostatine B, et du caoutchouc de haute masse molaire. En effet le projet est conçu pour avoir la plus grande applicabilité possible (i.e. conduisant au plus grand nombre de structures prénylées ou terpéniques) tout en étant le plus possible en relation avec le développement durable et basé sur la connaissance ainsi que la protection et la valorisation de la biodiversité.

Coordinateur du projet

Monsieur Gilles Iacazio (Institut des Sciences Moléculaires de Marseille)

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

Charabot Société Charabot
EMAC Société EMAC
CEA Génoscope Laboratoire de Criblage des Activités de Bioconversions
LCPO Laboratoire de Chimie des Polymères Organiques
iSm2 Institut des Sciences Moléculaires de Marseille

Aide de l'ANR 611 081 euros
Début et durée du projet scientifique : septembre 2014 - 42 Mois

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