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Vie et mort d’un réseau de régulation génétique au cours de l’évolution. – EvolNet

Vie et mort d’un réseau de regulation génétique au cours de l’évolution.

L’objectif de ce projet est de comprendre l’origine génétique de l’innovation morphologique. Notre modèle d’étude est l'évolution d’un motif de pigmentation sur l'aile des mâles d'un groupe de drosophiles chez qui ce trait a évolué de manière répétée. Par une démarche comparative et intégrée, l'ambition de ce projet est de cartographier les événements génétiques responsables de l'évolution de la pigmentation de l'aile, de sa naissance à sa mort.

Pourquoi une tâche d’aile permet de mieux comprendre l’évolution morphologique.

Les études comparatives de génétique du développement ont montré que les plans du développement animal sont encodés dans des réseaux de régulation génétique complexes (GRNs) constitués de composants conservés au cours de l'évolution. L’évolution morphologique proviendrait de changements dans les interactions entre ces composants, plutôt que de créations ou pertes de gènes ou de leurs fonctions. Il demeure toutefois des lacunes majeures entre ces modèles théoriques de l'évolution des formes et les exemples répertoriés : la plupart des études se sont concentrées sur des comparaisons entre seulement deux espèces, dans lesquelles la distinction entre l'anecdote et le résultat significatif est difficile. En outre ces études se sont souvent concentrées sur les pertes ou la diversification de caractères sans étudier les gains, les innovations évolutives. De plus les études se concentrent habituellement sur le lien entre divergence morphologique et changement d’un seul composant du réseau (un nœud ou une connexion). Comment de nouveaux traits morphologiques apparaissent, et comment le réseau génétique sous-jacent est apparu, n'est donc toujours pas clair. Cette énigme est à l'origine de ce projet. L'évolution du motif de pigmentation sur l'aile de mâles drosophiles est un système idéal pour étudier cette question. Ce trait est apparu et a été perdu plusieurs fois indépendamment dans le groupe. Des résultats précédents ont montré que ce trait est génétiquement complexe, ce qui en fait un bon modèle pour étudier l'évolution des réseaux en général, mais suffisamment simple pour que l'on puisse retracer les changements génomiques à l'origine de l'évolution de ce caractère. Nous proposons d'utiliser une combinaison de génomique fonctionnelle, d’évolution moléculaire, de modélisation formelle des GRNs, et de génétique fonctionnelle afin d'identifier les mutations génomiques qui expliquent l'apparence et les pertes secondaires de la pigmentation de l'aile.

L'ambition de ce projet est de cartographier les événements génétiques responsables de l'évolution du GRN de la pigmentation de l'aile, de sa naissance à sa mort. Ce projet est fondé sur une démarche comparative et intégrée : je propose d'utiliser une combinaison de génomique fonctionnelle, évolution moléculaire, modélisation formelle des GRNs, et génétique fonctionnelle afin d'identifier les mutations génomiques qui expliquent l'apparition puis les pertes secondaires de la pigmentation de l'aile. L’approche intégrée de ces différentes méthodes en accroit significativement la sensibilité et spécificité. Notre analyse sera réalisée dans un cadre comparatif entre espèces, rendu possible grâce aux progrès des techniques de séquençage et de transgénèse. Ce projet génomique a la particularité de s'attaquer à une question biologique bien précise, au contraire de nombreux travaux du domaine dont la production de données est trop souvent l'unique finalité.
Ce projet s'articule autour de 4 thèmes interconnectés : (i) nous construirons les ressources génomiques nécessaires à notre projet. Nous utiliserons ces ressources pour comparer les composants de la régulation de l'expression des gènes entre espèces et entre conditions : nous mesurerons au cours du développement les niveaux d'ARNm afin d'identifier les changements d'expression qui reflètent les changement de pigmentation. Nous identifierons également les changements de cis-régulation pertinents en analysant les profils de liaison de facteurs de transcription et la structure de la chromatine. (iii) Nous cartographierons les changements génomiques qui ont causé ces changements phénotypiques en reconstruisant le réseau de régulation de la pigmentation, et en l'utilisant pour identifier parmi les mutations celles qui le plus probablement causent l'évolution morphologique. (iv) Ces changements seront finalement testés in vivo.

Les premiers mois ont été dédiés à l’optimisation de protocoles et aux collectes de matériel. Comme prévu, nous avons amélioré l’annotation du génome de l’espèce spottée D. biarmipes.
Le projet initial était centré sur un point du développement de l’aile et l’aspect temporel avait été omis pour des raisons techniques. De récents progrès technologiques nous permettent dorénavant de prendre la composante temporelle en compte. Quelques mois ont été nécessaires pour adapter avec succès ces protocoles à notre question et notre matériel biologique. Nous sommes en train de collecter des ailes au cours du développement chez différentes espèces, tout en conservant une certaines résolution spatiale (région de la tâche vs reste de l’aile).
Les expériences déjà réalisées ont permis de mettre en évidence une corrélation entre l’expression génique et la formation de la tâche de pigmentation : certains gènes ont une expression forte dans la région de la tâche uniquement chez les individus spottés (mâles de certaines espèces). De plus, grâce à des expériences de transcriptomique réalisées sur des lignées transgéniques de D. biarmipes, nous avons montré que l’expression de certains de ces gènes est sous le contrôle (direct ou indirect) du facteur de transcription Dll, dont des travaux précédents ont montré qu’il est un régulateur important de la formation de la tâche. Etonnamment, plusieurs de ces gènes ont une fonction connue dans la formation de la cuticule, souvent associé à la pigmentation. Nos données suggèrent donc que l’évolution de la tâche est liée à des modifications de la cuticule elle-même.
En parallèle, nous avons adapté à notre matériel biologique plusieurs techniques d’analyse de la régulation transcriptionnelle. Afin de comparer entre espèces les régions régulatrices actives nous analysons la structure de la chromatine par des méthodes dites de FAIRE-seq et d’ATAC-seq, ainsi que par des expériences de ChIP-seq sur des marqueurs chromatiniens.

Les méthodes optimisées au cours des premiers mois du projet vont être mises à profit. Les expériences préliminaires de génomique fonctionnelle comparative (RNA-seq, ChIP-seq, FAIRE-seq) nous ont permis d’établir une première liste de gènes candidats, ainsi que d’interactions régulatoires candidates, potentiellement responsables de l’évolution de la formation de la tâche.
Un des autres points forts de notre projet est notre capacité à tester in vivo la fonction des candidats identifiés par les méthodes de génomique fonctionnelle. Par des méthodes de transgénèse, nous avons commencé à tester si la perturbation de l’expression de certains gènes candidats a un effet sur la formation de la pigmentation de l’aile. En parallèle, nous allons également tester l’activité in vivo de régions régulatrices candidates également par des méthodes de transgénèse.
La modélisation formelle du réseau de régulation de la formation de la tâche de pigmentation de l’aile n’a pas commencé, car nous n’avons pas encore accumulé assez de données. Elle va être initiée dans les prochains mois.
L’intégration de différents types de données a jusqu’à présent été très prolifique et nous comptons persévérer dans cette voie. Le projet est à un carrefour : nous avons passé les premiers mois à mettre en place des outils dédiés à notre question et notre matériel biologique. Nous en sommes dorénavant à la phase excitante de production et d’analyse des données, permise par les optimisations initiales. Ce projet permettra d'identifier les changements génomiques responsables de l'apparition, de la diversification et de la perte du réseau de régulation génétique contrôlant la pigmentation de l'aile dans la lignée melanogaster. Ce projet fournira à terme un cadre conceptuel pour plus généralement étudier l’évolution des morphologies afin de mieux identifier quels changements génétiques sous-tendent l’innovation morphologique.

Pas encore de publications et aucun brevet prévu.

Au cours des 20 dernières années, les études comparatives de génétique du développement ont construit un modèle théorique de l'évolution des formes. Il est maintenant clair que les plans du développement animal sont encodés dans des réseaux de régulation génétique complexes (GRN), constitués de composants conservés au cours de l'évolution, et que l'évolution morphologique provient surtout de changements dans les interactions entre ces composants, plutôt que de créations ou pertes de gènes ou de leurs fonctions . Il demeure toutefois des lacunes majeures entre les modèles théoriques de l'évolution des formes et les exemples répertoriés : la plupart des études se sont concentrées sur des comparaisons entre deux espèces seulement, dans lesquelles la distinction entre l'aléas statistique, l'anecdote et le résultat significatif est très difficile. En outre, ces études se sont souvent concentrées sur les pertes ou la diversification de caractères sans étudier les gains, les nouveautés évolutives. De plus, les études se concentrent habituellement sur le lien entre divergence morphologique et changement dans un seul composant du réseau (un noeud ou une connection). Comment de nouveaux traits morphologiques apparaissent, et comment le réseau génétique sous-jacent est apparu, n'est donc toujours pas clair. Cette énigme est à l'origine de ce projet. L'évolution d’un motif de pigmentation sur l'aile des mâle d'un groupe de drosophiles est un système idéal pour étudier cette question. Ce trait est apparu et a été perdu plusieurs fois indépendamment dans le groupe melanogaster. Des résultats précédents ont montré que ce trait est génétiquement complexe, ce qui en fait un bon modèle pour étudier l'évolution des réseaux en général, mais suffisamment simple pour que l'on puisse retracer les changements génomiques à l'origine de l'évolution de ce caractère. L'ambition de ce projet est de cartographier les événements génétiques responsables de l'évolution du GRN de la pigmentation de l'aile, de sa naissance à sa mort.
Ce projet est fondé sur une démarche comparative et intégrée : je propose d'utiliser une combinaison de génomique fonctionelle, évolution moléculaire, modélisation formelle des GRNs, et génétique fonctionnelle afin d'identifier les mutations génomiques qui expliquent l'apparence et les pertes secondaires de la pigmentation de l'aile. Notre analyse sera réalisée dans un cadre comparatif, rendu possible grâce aux progrès des techniques de séquençage et de transgénèse. Il est notable que ce projet génomique s'attaque à une question biologique bien précise, au contraire de nombreux travaux du domaine dont la production de données est trop souvent l'unique finalité.
Ce projet s'articule autour de 6 tâches indépendantes mais interconnectées, qui peuvent être groupées en 4 thèmes: (i) nous construirons tout dabord les ressources génomiques nécessaires à notre projet (tâche 2). Nous utiliserons ces ressources pour comparer les composants de la régulation de l'expression des gènes entre espèces et entre conditions : nous comparerons les niveaux d'ARNm afin d'identifier les changements d'expression qui reflètent les changement de pigmentation (tâche 3). Nous identifierons également les changements de cis-régulation pertinents en analysant les profils de liaison des facteurs de transcription et d'accessibilité à la DNAse (tâche 4). (iii) Nous cartographierons les changements génomiques qui ont causé des changements phénotypiques en identifiant les mutations qui corrèlent avec l'évolution de la pigmentation (tâche 5), en reconstruisant le GRN de la pigmentation, et en l'utilisant pour identifier parmi ces mutations celles qui le plus probablement causent l'évolution morphologique (tâche 6). (iv) Ces changements seront finalement testés in vivo (tâche 7). Ce projet permettra d'identifier les changements responsables de l'apparition, l'évolution et la perte du GRN sous-tendant la pigmentation de l'aile dans la lignée melanogaster.

Coordinateur du projet

Madame Mathilde PARIS (Organisme de recherche)

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

Aide de l'ANR 276 639 euros
Début et durée du projet scientifique : septembre 2013 - 42 Mois

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