JCJC SHS 3 - JCJC - SHS 3 - Cultures, arts, civilisations

Stratégies d’adaptation et régulations bioéconomiques en milieu fragile : le rôle des « desert kites » – GLOBALKITES

Le Projet GLOBALKITES: pour une nouvelle approche de structures archéologiques énigmatiques

GLOBALKITES propose de définir la variabilité et la fonctionnalité de grandes constructions archéologiques appelées « desert kites ». Longtemps considérés comme des pièges de chasse, les kites pourraient aussi avoir servi à la domestication animale. Dans un large contexte spatial (de l’Arabie au Caucase) et temporel (du Néolithique à nos jours), nous proposons une approche interdisciplinaire à la croisée de l’anthropologie, de la géomatique et des sciences archéologiques.

Comprendre le phénomène « kites » à l’échelle globale

Le projet couvre un domaine géographique important dont le centre névralgique s’étend d’environ 600 km du nord au sud et de 300 km d’ouest en est. Cette région en particulier, où les kites sont les plus nombreux, couvre le sud de la Syrie, l’est de la Jordanie et le nord de l’Arabie Saoudite. Parallèlement à ce noyau proche-oriental, des structures similaires ont été récemment découvertes dans des régions particulièrement excentrées. Ainsi, des contrées aussi inattendues que l’Arménie, mais également l’ouest de l’Ouzbékistan et du Kazakhstan ou encore les hautes terres occidentales du Yémen ont livré des structures similaires aux kites levantins. Un premier inventaire bibliographique et des observations préliminaires d’images satellitaires ont ainsi révélé l’existence de plusieurs milliers de structures. <br />Ces découvertes récentes induisent donc un potentiel tout à fait exceptionnel qu’est l’étude approfondie de ce phénomène : l’utilisation des kites à travers le temps et l’espace. Les principales questions sur lesquelles portent le projet concernent la fonctionnalité et la datation des kites : est-il possible de détecter une utilisation comme piège de chasse et/ou comme enclos pour animaux domestiqués, ou en voie de l’être ? Et par ailleurs, quelle emprise chronologique les kites couvrent-ils ? D’autres questions fondamentales sont également au cœur du projet. L’extension géographique en est une, ainsi que l’explication de cette extension : convergence culturelle ou véritable influence technique interrégionale ? Enfin, les stratégies d’adaptation des groupes humains concernés seront observées, ainsi que les questions de régulation bioéconomique en milieu fragile, avec notamment la potentielle surexploitation des espèces animales sauvages et l’appropriation exclusive d’un territoire par l’homme.

Les objectifs du projet consistent à analyser l’extension spatiale du phénomène, rechercher des caractères régionaux pour les kites et établir des typologies, mettre en relation la présence des kites avec les caractéristiques du milieu, comprendre le fonctionnement des kites, approcher le territoire des groupes à l’origine des kites et préciser leur fonction au sein de ce territoire. Parallèlement, il s’agit de définir dans quels contextes bioclimatiques ces constructions originales ont été utilisées, à quand remonte, en différents points du globe, leur usage et enfin, quels étaient les animaux, sauvages ou (et) domestiques concernés.
Les résultats sont obtenus par l’application de différentes méthodes de datation (radiocarbone, U/Th, thermoluminescence, étude des poussières anthropiques, comparaison des artefacts archéologiques), dont certaines sont novatrices pour l’étude des kites. L’approche géoarchéologique est également tout à fait nouvelle dans le contexte de l’étude de ce type de structure. Enfin, l’approche archéozoologique et ethnoarchéologique ajoute une réflexion essentielle sur l’écologie, le comportement animal et les systèmes économiques de subsistance et l'exploitation et la gestion des ressources animales.
Un inventaire utilisant les ressources de la géomatique (notamment les Systèmes d’Informations Géographiques, SIG) tendant à l’exhaustivité vient d’être finalisé à l’échelle du Proche Orient étendu aux régions dans lesquelles les kites ont été signalés (du Yémen à l’Ouzbekistan). Grâce à l’implication de chercheurs complémentaires par leurs terrains d’étude et leurs compétences ainsi que l’existence de réseaux de collaboration scientifique internationaux, un travail de terrain permet d’appliquer des techniques de pointe et efficaces, comme le relevé associé aux bases de données spatiales, l’analyse spatiale en géomatique, les méthodes de prélèvements, d’analyses et de datation, les fouilles et sondages, et les méthodes archéozoologiques.

Le travail entrepris en Arménie a permis de repérer et d'étudier plus d’une centaine de ces structures, disposées linéairement le long des fronts de coulées volcaniques. Orientés selon la pente des versants, ces kites présentent une forte ressemblance avec ceux du Proche-Orient, notamment en Syrie et en Jordanie, tout en présentant une homogénéité morphologique qui signe une spécificité régionale. La combinaison de plusieurs indices chronologiques situe leur construction entre le début de l’âge du Bronze et le début de notre ère. Cette fourchette, encore large, sera précisée grâce à la datation d’échantillons prélevés dans des sondages au printemps 2013. Plusieurs indices révélés par l’architecture des kites et leur insertion dans le paysage tendent à leur attribuer une fonction cynégétique, même si leur fonctionnement reste encore incompris au stade de notre étude. D’autres terrains sont prévus prochainement au Kazakhstan, en Jordanie et en Arabie Saoudite. Ces opérations vont ainsi renforcer nos liens avec les institutions partenaires à l’étranger, et vont permettre la récolte de données novatrices dont l’analyse sera publiée au fur et à mesure de l’avancée du projet. Un autre projet s’est développé en parallèle de GLOBALKITES, à travers le financement d’un doctorat sur la reconnaissance des formes sur support cartographique et d’images satellitaires, en partenariat avec le Labex Intelligence des Mondes Urbains de l’Université de Lyon et en collaboration avec le Laboratoire d’Informatique en Images et Systèmes d’informations (LIRIS, UMR 5205). Le développement d’un outil informatique de reconnaissance des kites là où ils ne sont pas encore repérés en est l’objectif final.

GLOBALKITES s’inscrit dans différents domaines de la recherche fondamentale. Par l’étude d’un type de structure archéologique, ce projet aborde un ensemble de thèmes, parmi lesquels figurent le développement de la domestication animale, le contexte théorique qui oppose la chasse à l’élevage, les modes de peuplement et les types de territoires en zones arides ou semi-arides, la question du nomadisme face à la sédentarité, et enfin les rapports hommes/milieu en tenant compte de l’artificialisation du paysage et de la dégradation de la biodiversité matérialisée par l’extinction d’espèces animales.
Le projet est donc particulièrement ancré dans les interrogations actuelles sur le lien entre l’homme et la nature et sur le concept de durabilité du développement des sociétés et de leurs relations avec le milieu qui les entoure.
Les kites représentent un mystère de l’archéologie qui reste inexpliqué sur bien des aspects. Ce que nous appelons le « phénomène kites » renvoie à l’explosion et l’abondance de telles structures au Proche Orient et aussi de leur présence dans des contrées très éloignées de cette centralité. Ce phénomène est suffisamment marquant à travers les témoignages archéologiques pour que son étude participe pleinement à la tentative de répondre à toutes ces questions anthropologiques, qu’elles soient plus spécifiquement historiques, géographiques ou encore ethnologiques. L’inventaire de ces structures, facilité par l’accessibilité aux images satellites du type Google Earth, qui sont maintenant connues dans divers endroits de la planète, appelle à s’interroger sur les rapports qu’ont pu entretenir les hommes avec leur milieu, et en quoi l’artificialisation du paysage, ainsi qu’une forme de standardisation des techniques à grande échelle, ont amené à la dégradation de la biodiversité et à la disparition d’espèces, comme par exemple l’autruche ou l’oryx en Arabie, et certaines espèces de gazelles du Levant.

Dans le cadre de la mise en place du projet, une première communication scientifique a été présentée à Caen les 6 et 7 décembre 2012, au cours du colloque organisé par le Réseau National des Maisons des Sciences de l’Homme « Quelles sciences humaines et sociales pour le 21e siècle ? ». Par ailleurs, trois projets d’articles sont en cours de finalisation : une courte présentation dans la revue britannique Antiquity, un article détaillé sur les aspects géomatiques et géoarchéologiques des opérations de terrain en Arménie qui sera proposé à la revue du CNRS Paléorient et un article généraliste inaugural du projet incluant tous les aspects de la recherche dans une revue internationale archéologique. Enfin, le site internet du projet, www.globalkites.fr est en cours d’achèvement (mise en ligne juillet 2013) qui présentera le projet, les membres, les actualités et surtout un outil cartographique destiné à la communauté scientifique qui montrera la répartition mondiale des kites ainsi qu’un ensemble de données factuelles pour chaque structure individualisée.

Ce projet de recherche propose de définir la variabilité et la fonctionnalité de grandes constructions archéologiques faites d’alignements de pierres appelées « desert kites ». Longtemps considérés comme des pièges de chasse, les kites pourraient aussi avoir servi à la domestication animale. Dans un contexte archéologique large, où les kites semblent avoir été utilisés du Néolithique aux époques subactuelles, nous proposons une approche interdisciplinaire à la croisée de l’anthropologie (archéologie et ethnologie), de la géomatique et des sciences géoarchéologiques et bioarchéologiques.
Le projet couvre un domaine géographique important dont le centre névralgique s’étend d’environ 600 km du nord au sud et de 300 km d’ouest en est. Cette région en particulier, où les kites sont les plus nombreux, couvre le sud de la Syrie, l’est de la Jordanie et le nord de l’Arabie Saoudite. Parallèlement à ce noyau proche-oriental, des structures similaires ont été récemment découvertes dans des régions particulièrement excentrées. Ainsi, des contrées aussi inattendues que l’Arménie, mais également l’ouest de l’Ouzbékistan et du Kazakhstan ou encore les hautes terres occidentales du Yémen ont livré des structures similaires aux kites levantins. Un premier inventaire bibliographique et des observations préliminaires d’images satellitaires ont ainsi révélé l’existence de plus de 1200 structures, 63 % ayant déjà été observés par d’autres chercheurs précédemment, mais aussi 37 % que nous avons nouvellement découverts. Ces découvertes récentes induisent donc un potentiel tout à fait exceptionnel qu’est l’étude approfondie de ce phénomène : l’utilisation des kites à travers le temps et l’espace.
Les principales questions sur lesquelles portent le projet concernent la fonctionnalité et la datation des kites : est-il possible de détecter une utilisation comme piège de chasse et/ou comme enclos pour animaux domestiqués, ou en voie de l’être ? Et par ailleurs, quelle emprise chronologique les kites couvrent-ils ? D’autres questions fondamentales sont également au cœur du projet. L’extension géographique en est une, ainsi que l’explication de cette extension : convergence culturelle ou véritable influence technique interrégionale ? Enfin, les stratégies d’adaptation des groupes humains concernés seront observées, ainsi que les questions de régulation bioéconomiques en milieu fragile, avec notamment la potentielle surexploitation des espèces animales sauvages et l’appropriation exclusive d’un territoire par l’homme.
Afin de répondre à ces problématiques, nous proposons de réunir une équipe pluridisciplinaire issus de trois laboratoires du CNRS (UMR 5133 – Archéorient, UMR 6249 – Chrono-Environnement, UMR 6636 – Lampea). Une collaboration est également prévue avec des mathématiciens et des informaticiens de l’Université Lyon 1. Les compétences de chacun s’exprimeront notamment dans le cadre de techniques et de méthodes traditionnelles ayant largement fait leurs preuves. D’autres méthodes à la pointe de la recherche actuelle seront aussi utilisée telles que la géomatique et les systèmes d’information géographique (SIG), la géostatistique, les études isotopiques, la paléoclimatologie… pour citer les principales. Ce programme de recherche érige donc un pont entre différents domaines scientifiques, concrétisé par la complémentarité des différentes approches et méthodes employées. Les choix de diffusion de l’actualité du projet et des résultats mettent à l’honneur les outils actuels de communication (site internet, webmapping). Ces moyens permettent une diffusion « en temps réel » et accessible aussi bien aux chercheurs qu’au grand public. Enfin, un tel programme n’est pas envisageable sans d’étroites collaborations internationales. Ces partenariats scientifiques et logistiques impliquent des chercheurs ayant déjà travaillé à leur échelle sur les kites ainsi que des équipes locales, de la péninsule Arabique à l’Arménie.

Coordination du projet

REMY CRASSARD (Environnements et sociétés de l'Orient ancien) – remy.crassard@mom.fr

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

CNRS - ARCHEORIENT Environnements et sociétés de l'Orient ancien

Aide de l'ANR 150 000 euros
Début et durée du projet scientifique : décembre 2012 - 48 Mois

Liens utiles

Explorez notre base de projets financés

 

 

L’ANR met à disposition ses jeux de données sur les projets, cliquez ici pour en savoir plus.

Inscrivez-vous à notre newsletter
pour recevoir nos actualités
S'inscrire à notre newsletter