Dans un contexte global de changement climatique, les régions de haute latitude sont un observatoire privilégié et reconnu des dynamiques actuelles. Ces dynamiques spatiales jouent un rôle important dans le fonctionnement physique et hydrologique des glaciers polaires. La connaissance, la quantification et la modélisation des processus glaciaires sont souvent abordées à des échelles larges mais la compréhension des phénomènes à l’échelle des bassins versants est plus rarement mise en œuvre.
Le projet PRISM a permis d’aborder de manière novatrice et quantitative certains processus propres à la cryosphère arctique pas ou peu étudiés jusqu’à présent. Cela a été rendu possible par l’utilisation d’instruments de mesure à haute précision comme le scanner laser terrestre (Terrestrial Laser Scanner) Lidar et les drones. Les travaux ont été conduits dans un bassin glaciaire observatoire (glacier Austre Lovén) situé dans l’archipel du Svalbard (78°N). Ce glacier est référencé au World Glacier Monitoring Service (WGMS basé à Zürich) et fait l’objet de recherches par des équipes françaises et internationales depuis plus de 50 ans.
Trois volets de recherche ont été conduits, nécessitant 8 missions de terrain, en partenariat et grâce à la logistique de l’Institut Polaire Français (Institut Paul-Emile Victor – IPEV). Des collaborations internationales avec des chercheurs Autrichiens et Chinois ont contribué à renforcer le travail de l’équipe PRISM.
Le premier volet concerne la modélisation précise du manteau neigeux dans les versants, sur le glacier, et dans les espaces périglaciaires. Des mesures répétées ont permis de quantifier précisément les dynamiques neigeuses et de comprendre leur influence sur le bilan hydrologique et glaciologique du bassin versant.
Le second volet porte sur l’évolution géomorphologique du bassin versant. La haute résolution des données spatiales acquises au laser a permis de mesurer les mouvements rocheux et d’évaluer l’ampleur des évolutions liées à la déglaciation de la zone ainsi qu’aux évolutions climatiques en cours.
Enfin l’évolution de la glace, qu’il s’agisse des névés présents en pied de versant ou du glacier lui-même, a pu être mise en évidence, montrant l’ampleur annuelle du retrait glaciaire en cours et les conséquences de celui-ci.
Les mesures laser se sont avérées très pertinentes pour rendre visibles les phénomènes majeurs auxquels la cryosphère arctique est soumise. La richesse des données produites a permis d’aller bien au-delà des objectifs initiaux. En nivologie, l’évaluation du manteau neigeux dans les zones les plus inaccessibles est un des résultats marquants du projet. Les évolutions morphologiques du bassin versant ont également été mises en évidence à une résolution inédite. Enfin le retrait glaciaire, déjà mesuré par ailleurs, a pu être représenté avec une précision et à des échelles de temps encore jamais atteintes dans cette région.
Ces résultats ont pu être présentés à la communauté scientifique lors de conférences internationales. Sur le terrain des collaborations directes se sont développées avec des scientifiques Autrichiens et Chinois. L’équipe du projet PRISM a pu renforcer sa visibilité internationale et fait maintenant office d’interlocuteur français dans les groupes de recherche sur la glaciologie arctique, notamment au Svalbard. Enfin la reconnaissance du bassin glaciaire d’étude comme observatoire privilégié par des instances nationales et internationales (Observatoire Mondial des Glaciers) est à porter au crédit de ce projet.
Le projet PRISM avait pour ambition de rendre visibles et interprétables des processus de la cryosphère. le dispositif d’acquisition de données spatiales mis en place s’est avéré efficace. Le Lidar terrestre est un outil approprié qui permet d’obtenir des modèles numériques de surface à une résolution suffisante pour capter les processus d’intérêt. Sur le plan opérationnel, le passage à des appareils fonctionnant sur batterie et pas sur groupe électrogène est indéniablement un progrès qui facilite la mise en œuvre sur le terrain. Les contraintes liées à un milieu glaciaire périlleux et à un climat rigoureux avec des températures parfois froides ont amené l’équipe à adapter son mode de fonctionnement. Le temps de présence sur place est sans aucun doute un facteur important de réussite car il permet de travailler dans les meilleures conditions.
L’évolution du matériel Lidar nous laisse entrevoir des perspectives encourageantes. En effet il est maintenant envisageable de transporter le matériel jusque sur des crêtes montagneuses entourant le bassin versant et ainsi d’optimiser la surface couverte tout en minimisant les effets d’ombre et donc les zones non couvertes. Nous avons pu tester ce nouveau dispositif lors des dernières missions de l’ANR PRISM.
Le travail mené nous a permis de renforcer nos partenariats scientifiques avec nos collègues Autrichiens et Chinois. Ces collaborations continuent encore à ce jour et le soutien renouvelé de l’Institut Polaire Français à notre équipe est un signe de l’importance et de la reconnaissance de nos travaux.
Les développements méthodologiques et instrumentaux rendus possibles par l’ANR PRISM portent encore leurs fruits aujourd’hui et ont permis de renforcer le statut du glacier Austre Lovén en tant que glacier observatoire présentant un intérêt pour un suivi de long terme, statut reconnu par des instances nationales (IR OZCAR) ou internationales (World Glacier Monitoring Service – WGMS).
L’exploitation de ces résultats fait l’objet de plusieurs articles ainsi que d’une thèse actuellement en cours. Ces travaux ont également été présentés lors de conférences internationales. Ils font en outre l’objet de présentations lors du cursus des étudiants de géographie et d’ingénierie des différents membres de l’équipe, ainsi que lors d'événements de dissémination de la culture scientifique. Sur le terrain, nous avons également eu l’occasion de mettre en avant nos travaux en août 2016 lors de la visite de Madame la Ministre de l’Environnement.
Dans un contexte global de changement climatique, les régions de haute latitude sont un observatoire privilégié et
reconnu des dynamiques actuelles. Le projet PRISM a pour objectif principal l’étude des versants en milieu polaire. Plus
précisément, il s’agit de décrire, de comprendre et de modéliser les aspects spatiaux des dynamiques de pentes dans les
bassins glaciaires. Ces dynamiques spatiales jouent un rôle important dans le fonctionnement physique et hydrologique
des glaciers polaires. Les versants varient selon la fonte du permafrost, l’épaisseur de la couverture neigeuse, et les
contraintes glaciaires. La combinaison de ces facteurs est génératrice de processus qui sont encore mal connus. L’objet
même de l’étude proposée dans ce projet n’est pas d’une instrumentation aisée. La quantification des processus à
l’oeuvre nécessite l’acquisition de données précises à des résolutions spatiales et temporelles fines. Les difficultés liées à
l’accès aux versants ne rendent pas un travail de terrain direct possible. La télédétection, pour des raisons évidentes liées
à la pente des versants, trouve ici ses limites. Seules les techniques de scanner laser terrestre (Terrestrial Laser Scanner
ou TLS) peuvent permettre une appréhension fine des dynamiques observables. Le site d’expérimentation prévu dans le
cadre du projet PRISM est le bassin du glacier Loven Est situé au Spitsberg (79°N). Ce glacier est étudié par des
chercheurs français et étrangers depuis les années 60. Les données actuellement disponibles pourront être croisées avec
les résultats obtenus dans le cadre du présent projet, et offriront de précieux éléments contextuels permettant de
modéliser le comportement des versants au cours du temps et d’extrapoler les résultats acquis localement à la totalité des
versants du bassin glaciaire. Trois volets de recherche sont envisagés. Les dynamiques neigeuses sont abordées à
travers l’estimation du volume neigeux présent sur les versants. La modélisation fine des versants au maximum et au
minimum neigeux annuel permettra de déduire les volumes de neige accumulée. Des mesures intermédiaires pourront en
outre permettre de comprendre l’évolution temporelle du manteau neigeux (avalanches, fonte). Ces mesures seront
complétées, autant que possible, par des mesures manuelles de hauteurs et d’équivalent en eau de la neige, par des
profils de densité ainsi que par des relevés automatiques de températures. Les dynamiques rocheuses, tout comme la
neige, seront essentiellement abordées grâce au scanner laser terrestre. Cet outil permet une résolution suffisamment
fine pour pouvoir quantifier les éboulements, les glissements de terrain ou la reptation des versants. Ces processus sont
liés au contexte microclimatique, le permafrost étant affecté à la fois par les températures de surface et par les
précipitations, notamment pluvieuses, et aux caractéristiques physiques des versants (pente, orientation, nature et
fracturation des roches). L’approche spatiale des dynamiques rocheuses sera couplée aux mesures de température faites
dans les versants. Tous ces paramètres jouent un rôle à l’échelle du bassin glaciaire puisque c’est le glacier qui finit par
recevoir et charrier les roches issues de ces phénomènes. Enfin les dynamiques de la glace des versants seront
également étudiées. Les névés seront localisés et quantifiés. La distinction entre nouvelle glace de versant et ancienne
glace du glacier sera établie. La base des versants connaît des variations spatiales, y compris à l’échelle annuelle, telles
que l’évolution du niveau de la rimaye ou les variations de l’interface glacier/versant en fonction du retrait glaciaire. Là
encore, les relevés effectués par laser terrestre permettront un suivi précis de ces zones de contact, et ce en différents
points critiques du glacier : zone d’accumulation, zone d’ablation, pente faible, pente forte.
Monsieur Florian TOLLE (Théoriser et modéliser pour aménager UMR 6049 CNRS) – florian.tolle@univ-fcomte.fr
L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.
THEMA Théoriser et modéliser pour aménager UMR 6049 CNRS
Aide de l'ANR 186 207 euros
Début et durée du projet scientifique :
décembre 2012
- 48 Mois