Blanc SVSE 6 - Blanc - SVSE 6 - Génomique, génétique, bioinformatique et biologie systémique

Fonction des protéines RNaseIII-like de plantes. Implication dans l’épigénome. – Epi-RNase

Fonction des protéines RNaseIII-like de plantes. Implication dans l’épigénome.

Les petits ARN produits par les protéines RNaseIII de type Dicer régulent l’expression génique au cours du développement et en réponse aux stress. La plupart des organismes possèdent également des protéines de type RNaseIII classique dont la fonction reste majoritairement inconnue. Le but de ce projet est d’étudier ces protéines chez la plante modèle Arabidopsis.

Relation structure-fonction et rôle biologique des protéines RNaseIII-like de plantes

Le génome de la plante modèle Arabidopsis possède 4 gènes (appelées DCL) qui codent des protéines RNaseIII de type Dicer qui produisent les petits ARN (miRNAs et siRNAs) qui régulent l’expression génique au cours du développement et en réponse aux stress. Arabidopsis possède également dans son génome 3 gènes (appelées RTL) qui codent potentiellement d’autres protéines de type RNaseIII qui s’apparentent plus aux RNaseIII de type bactériennes ou fongiques. RTL2 est exprimé ubiquitairement et permet la maturation d’ARN ribosomique, tandis que RTL1 et RTL3 ne sont quasiment pas exprimés (à l’exception d’une très faible expression de RTL1 dans les racines). Notre projet vise à exprimer ces protéines in vitro et in vivo et à les purifier afin de caractériser leur activité et d’identifier quels ARN constituent leurs substrats naturels. Les relations structure-fonction seront également étudiées grâce à des expériences de swap (échanges de domaines entre ces 3 protéines). La perte de fonction de ces protéines n’ayant apparemment aucune incidence sur le développement de la plante dans des conditions de croissance contrôles au laboratoire, notre projet vise à dresser l’inventaire des miRNAs et siRNAs chez des mutants défectifs pour chacune de ces protéines et à caractériser les modifications de l’épigénome induites chez ces mutants. Une étude similaire (inventaire des miRNAs et siRNAs et caractérisation de l’épigénome) sera également réalisée sur des plantes qui surexpriment chacune de ces protéines afin de mieux appréhender leur rôle biologique.

L’étude biochimique des protéines RNaseIII-like de plantes est réalisée après purification des protéines recombinantes solubles produites chez la bactérie. L’obtention de protéines fonctionnelles et la mise au point d’un système de clivage in vitro des ARN sont les enjeux majeurs de la partie biochimique du projet. Les expériences de swap nécessaires à l’étude des relations structure-fonction nécessitent d’ajouter des sites de restriction entre les domaines et donc de vérifier que l’ajout de ces sites ne perturbe pas l’activité des protéines. L’étude génétique des protéines RNaseIII-like de plantes est réalisée après obtention de mutants défectifs pour ces protéines ainsi que de plantes surexprimant ces protéines. L’obtention de réels mutants est particulièrement difficile à vérifier pour les gènes RTL1 et RTL3 car ils sont très peu exprimés. La vérification de la surproduction des protéines quant à elle nécessite d’ajouter des tags aux protéines et donc de vérifier au préalable que ces tags n’affectent pas l’activité des protéines. L’inventaire des miRNAs et siRNAs chez les mutants et les surexpressurs est réalisé par séquençage à haut débit suivi d’une analyse bioinformatique. La caractérisation des modifications de l’épigénome induites chez ces plantes est réalisée sur les sites correspondants aux modifications des miRNAs ou siRNAs grâce à des enzymes sensibles à la méthylation de l’ADN, ou d’une manière globale par séquençage à haut débit après traitement du génome entier au bisulfite. Les modifications des histones sont réalisées après purification de la chromatine suivie d’une analyse locale ou globale.

Le séquençage des petits ARN de plantes surexprimant la protéine RTL1 a montré l’effet spécifique de RTL1 à l’égard des siRNA. La surexpression de RTL1 inhibe les différentes formes de silencing post-transcriptionnel des transgènes mettant en jeu des siRNA (S-PTGS et IR-PTGS). La mutagénèse du domaine RNaseIII ou la délétion du domaine de fixation aux ARN double brin abolissent l’activité de RTL1. Le gène RTL1 est induit en réponse à l’infection virale, mais la plupart des virus inhibent l’activité de la protéine RTL1. Quelques loci produisant spécifiquement des siRNA quand RTL1 est surexprimé ont été identifiés. La production de ces siRNAs requiert, selon les loci, DCL2, DCL3 ou DCL4, indiquant que RTL1 agit en amont des DCLs. Une protéine His-RTL1 a été produite chez la bactérie. RTL1 clive in vitro les ARN cibles identifiées in vivo. Cette activité requiert un domaine RNaseIII fonctionnel. Plusieurs sites de coupures ont été identifiés par primer extension in vivo et in vitro. RTL1 semble effectuer une coupure franche au niveau d'une structure en tige-boucle associée à une séquence consensus de 4-5 nucléotides. RTL1 semble s’associer à un complexe protéique d’environ 700 kDa. Plusieurs partenaires potentiels ont été identifiés par spectrométrie de masse, suivie de séquençage.
Le séquençage des petits ARN de plantes surexprimant la protéine RTL2 a montré a montré un effet très limité de RTL2, restreint à quelques loci. Les siRNAs dépendants de RTL2 font généralement 24-nt et induisent la méthylation de l’ADN correspondant. In vitro, RTL1 et RTL2 ne coupent pas les même ARNs. Des swaps entre les domaines de RTL1 et RTL2 ont été réalisés afin de déterminer l’origine de la spécificité de ces protéines vis-à-vis de leurs cibles.

L’étude des spécificités des protéines RTL1 et RTL2 et de leurs substrats respectifs sera poursuivie. Les études in planta visant à déterminer la localisation subcellulaire de ces protéines sont en cours. Le rôle des protéines RTL dans la réponse anti-virale de la plante sera étudié, ainsi que les mécanismes d’inhibition de l’activité RTL par les virus.

Nahid Shamandi1, Matthias Zytnicki2, Cyril Charbonnel3,, Gersende Lepère1, Allison C. Mallory1, Julio Sáez-Vásquez3, and Hervé Vaucheret1 Plants encode a general siRNA suppressor that is induced and suppressed by viruses (soumis)

Le RNA silencing est un mécanisme de régulation conservé, qui fait partie intégrante des mécanismes de contrôle des acides nucléiques invasifs endogènes (répétitions et transposons) ou exogènes (virus et bactéries) visant à préserver l’intégrité et le fonctionnement du génome. Le RNA silencing est également essentiel au contrôle de l’expression des gènes codant des protéines au cours du développement ou en réponse à des stimuli environnementaux. Le RNA silencing est guidé par des petits RNAs, qui sont principalement produits par une classe d’enzymes RNaseIII appelées Dicer. Les petits RNAs sont eux-même régulés. Ainsi, des long RNAs séquestrant les petits RNAs, ou des nucléases dégradant spécifiquement les petits RNAs ont récemment été identifiés. Toutefois, la liste complète des enzymes qui régulent la vie des petits RNAs ou des précurseurs de petits RNAs est loin d’être connue.
Dans ce projet, nous examinerons des enzymes RNaseIII jusqu’à présents non caractérisées et étudierons leur rôle dans la régulation des petits RNA de plantes. Ces enzymes possèdent des domaines RNaseIII et de fixation aux RNA double-brin (DRB) mais ne possèdent pas de domaine RNA helicase ou PAZ, contrairement aux enzymes Dicer. Ces enzymes ressemblent donc aux RNaseIII bactériennes ou fongiques et sont appelées RTL (pour Rnase Three Like). Des résultats moléculaires, génétiques et bioinformatiques obtenus par le Partenaire 1 et le Partenaire 2 indiquent que les enzymes RTL1 et RTL2 de la plante modèle Arabidopsis limitent et stimulent l’accumulation des petits RNAs, respectivement, tandis que des données biochimiques obtenues par le Partenaire 3 indiquent que RTL2 clive des longs RNAs. Le Partenaire 1 a également observé que la modulation de l’expression des enzymes RTL conduit à des modifications épigénétiques héritables. Plus spécifiquement, RTL1 supprime les fonctions associées aux siRNAs de 21 et 24-nt. Des suppresseurs exogènes et endogènes de siRNAs de 21-nt avaient déjà été décrits. Toutefois, des suppresseurs de siRNA de 24-nt n’ont jamais été décrits. Etant donné que les siRNA de 24-nt circulent à travers la plante pour établir des marques épigénétiques à distance des cellules où ils sont produits, et étant donné que RTL1 est exprimé seulement dans les racines, qui sont des censeurs essentiels de l’environnement des plantes, il est particulièrement intéressant d’étudier le rôle de RTL1. Par ailleurs, la surexpression de RTL2 augmente la production de siRNA à certains loci et génère des nouvelles marques épigénétiques. Etant donné que ces marques peuvent être héritées après élimination du transgène RTL2 qui a permis de les induire, on peut penser que l’induction spécifique de RTL2 dans des conditions particulières pourrait jouer un rôle important dans la réponse adaptative des plantes au stress. Au final, nos données suggèrent que RTL1 and RTL2 suppriment et accroissent les marques épigénétiques, respectivement, contribuant ainsi à l’établissement de l’épigénome.
Ce projet vise à comprendre le fonctionnement et le rôle biologique des enzymes RTL par une combinaison d’approches génétiques, bioinformatiques et biochimiques. Nous caractériserons l’activité de RTL1 et RTL2 in vitro et in vivo afin de définir la spécificité de leurs domaines RNaseIII et DRB, et nous identifierons leurs RNA substrats et leurs partenaires protéiques. Nous tenterons également de caractériser RTL3, un gène qui ressemble à la fusion de RTL1 et RTL2 mais qui n’est pas exprimé dans des conditions de laboratoire, afin de déterminer si RTL3 contribue aussi à l’épigénome. Nous étudierons les conséquences physiologiques d’une dérégulation des RTL en analysant le transcriptome et le méthylome de plantes qui ont hérité les modifications phénotypiques après élimination du transgène RTL qui a permis de les induire, et nous cartographierons sur le génome les modifications les plus stables et clonerons les loci correspondants.

Coordination du projet

Hervé VAUCHERET (INSTITUT NATIONAL DE LA RECHERCHE AGRONOMIQUE - CENTRE DE RECHERCHE DE VERSAILLES GRIGNON) – herve.vaucheret@versailles.inra.fr

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

INRA-IJPB INSTITUT NATIONAL DE LA RECHERCHE AGRONOMIQUE - CENTRE DE RECHERCHE DE VERSAILLES GRIGNON
INRA-URGI INSTITUT NATIONAL DE LA RECHERCHE AGRONOMIQUE - CENTRE DE RECHERCHE DE VERSAILLES GRIGNON
CNRS-UPVD CENTRE NATIONAL DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE - DELEGATION REGIONALE LANGUEDOC-ROUSSILLON

Aide de l'ANR 444 000 euros
Début et durée du projet scientifique : - 48 Mois

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