Développement de nouvelles technologies pour suivre le déclenchement de réponses immunitaires à l’échelle de la cellule
Les cascades immunitaires sont des mécanismes particulièrement complexes en raison du nombre important des différents types cellulaires impliqués, et du large spectre de cytokines (qui sont des messagers entre les cellules) libérées par ces cellules.<br />Bien que cette voie de défense des organismes soit particulièrement importante pour son implication dans différentes pathologies (maladies auto-immunes) ou dans des traitements en prophylaxie (vaccination), il n’existe pas à ce jour d’outils qui permette de suivre à l’échelle de cellules individuelles, les cinétiques de sécrétion de cytokine(s).<br />Le projet Multicells a donc vocation d’étudier ces réponses cellulaires à l’aide de biopuces originales, mettant en œuvre une technique de détection optique sans marquage (la Résonance Plasmonique de Surface).<br />Ce projet implique 3 partenaires, chacun étant expert dans différents domaines : la Chimie (fonctionnalisation de surface), la Biologie (suivi de réponse immunitaire) et la Physique (micro-technologies et instrumentation). Au delà d’une meilleure connaissance du système immunitaire, nous envisageons que notre technologie soit une solution performante pour le criblage rapide de molécules avec un potentiel vaccinal par exemple.<br />
Le développement de micro-leviers en silicium permet la fonctionnalisation de surface à l’échelle micrométrique. La combinaison de ces outils de dépôt, avec une chimie de capture de cellule/cytokines ainsi qu’un traitement anti-adhésif autour des dépôts permet la production de biopuces fonctionalisées. L’imagerie de Résonance Plasmonique de Surface permet quant à elle de suivre la réponse cellulaire en temps réel, et sans marquage de l’échantillon.
Arrivés à mi-projet, un certain nombre de résultats ont été obtenus :
-validation d’un protocole chimique de traitement de surface pour limiter l’adhésion non spécifique des cellules autour des régions fonctionnalisées
-validation d’un modèle animal (cellules de rate de souris), ainsi que d’un mode de stimulation immunitaire. Ces cellules ont également été caractérisées en terme de profils de cytokines libérées selon des méthodes de routine en biologie moléculaire
-duplication et mise en service d’un automate de dépôt à l’aide de « bioplumes » (microleviers en silicium. Il s’agit d’une version 1.0 du système, la version 2.0 étant en cours de développement. En effet, la première génération de microleviers ne permet pas de réaliser des dépôts <14µm de diamètre alors que les cellules murines ont un diamètre moyen de 8 µm. Nous proposons à ce jour deux solutions :
1) le développement de « nano-leviers » pour décroître la taille des dépôts, avec des problèmes instrumentaux spécifiques importants à gérer
2) l’utilisation de masque de dépôt faisant office de « pochoirs » pour la réalisation de dépôts micrométriques
L’interaction active et régulière entre les différents partenaires devrait permettre de décider de la voie la plus pertinente au cours des 12 prochains mois.
Les perspectives de ce projet, lorsqu’il sera abouti peuvent se décliner de la manière suivante:
- à moyen terme, cette nouvelle technologie pour l’analyse de la réponse immunitaire à l’échelle de cellules individuelles devrait générer un volume conséquent de données, inaccessibles par ailleurs.
- à plus long terme, il est envisageable que cette technologie puisse constituer une méthode de référence pour l’étude des sécrétions cellulaires, comme l’est l’ELISA ou l’ELISPOT dans une moindre mesure. Des applications industrielles seront possible notamment pour le criblage de molécules immuno-modulatrices (anti-inflammatoires ou immuno-stimulantes) pour les traitements de maladies inflammatoires ou de vaccins.
La passivation de surface de biopuce à ADN a été validée, un article est en cours de rédaction. Cet article présente les premiers travaux concernant la passivation de biopuces, l’extension au biopuces à protéines, qui constitue le fondement du projet, est actuellement en cours.
Un brevet a été co-déposé par les partenaires 1 & 3 pour la détection temps réel de sécrétions cellulaires (mais sans accès à l’échelle de cellules individuellement organisées). Ici encore, il s’agit d’un brevet précurseur qui devrait ouvrir la voie à d’autres brevets.
Les activités sécrétrices cellulaires, c’est-à-dire la libération de biomolécules à l’extérieur de la cellule, marquent le rôle fondamental de nombreuses cellules (neurones, cellules sanguines, organes libérant des hormones…). Dans le cas précis des réponses immunitaires, différents acteurs cellulaires entrent en jeu lors de la réponse inflammatoire. La caractérisation des biomolécules produites et libérées à l’échelle cellulaire présente un fort intérêt non seulement sur un plan fondamental afin de mieux comprendre les cascades d’évènements au niveau cellulaire, mais aussi sur le plan diagnostique afin d’identifier plus rapidement et précisément la source de l’inflammation. Enfin, cette signature inflammatoire est également un outil idéal dans le suivi de la réponse vaccinale, soit dans des modes prospectifs (recherche de biomolécules potentiellement utilisables comme vaccin), soit a posteriori pour évaluer l’efficacité vaccinale.
A ce jour, les approches utilisées couramment en laboratoire de recherche et d’analyse médicale pour doser les produits sécrétés sont principalement basées sur le dosage de molécules contenues dans un surnageant et issues de différentes populations et sous-populations de cellules. La réponse moyennée d’une population est enregistrée, réponse qui peut être significativement différente de celle mesurée au niveau de cellules individualisées. De la même manière, dans le cas de dosages multiparamétriques, ces techniques ne donnent pas accès non plus à une réponse ciblée, en terme de population cellulaire. A titre d’exemple, si des protéines A, B et C sont détectées et dosées à partir de plusieurs milliers (voire millions de cellules), il n’est à ce jour pas possible de déterminer si ces biomolécules sont libérées par la même cellule ou produites par trois sous-ensembles de cellules, sécrétant soit l’une ou l’autre des protéines. La seule technique existant pour donner accès à une mesure d’activité sécrétrice au niveau de cellules individuelles est l’ELISPOT. Cette approche, basée sur un test dont la lecture en point final permet de visualiser à posteriori les ombres des cellules sécrétrices.
Le projet que nous proposons à pour finalité le développement de nouveaux outils pour accéder à l’information au niveau des activités sécrétrices de cellules individuelles. Pour cela, nous souhaitons développer des supports plans fonctionnalisés à l’échelle micrométrique permettant une organisation 2D de lymphocytes « vivants ». Ces supports seront également fonctionnalisés de manière à permettre la détection en temps réel d’une cible ou la détection en point final de plusieurs cibles potentielles sécrétées par la même cellule. Les objectifs sont doubles : parvenir d’une part à doser en temps réel l’activité sécrétrice de cellules individuellement agencées sur une surface et d’autre part parvenir à produire des informations multiparamétriques sur ces sécrétions (dosage de plusieurs molécules sécrétées par une seule cellule). Ce projet pluridisciplinaire fait appel à des compétences en physique pour la fabrication de nouveaux outils de dépôts à l’échelle micrométrique ainsi que pour la mise au point et optimisation de techniques de détection dédiées ; à la chimie pour la manipulation des biomolécules sondes (complexant les molécules sécrétées) et les traitements de surfaces adaptés à la fois à l’utilisation d’échantillons biologiques complexes et permettant le confinement des dépôts (en gérant les propriétés de mouillage des surfaces) ; et enfin (et surtout), ce projet fait appel à des biologistes (immunologistes) qui alimentent le projet en cibles biomédicales pertinentes et caractérisent les échantillons biologiques selon les techniques alternatives disponibles tout en interagissant fortement avec les deux autres partenaires dans l’interprétation des résultats. L’objectif défini en ligne de mire de ce projet est la mise au point de nouveaux outils diagnostiques pour le suivi de réponses immunitaires.
Monsieur Yoann Roupioz (CNRS - DELEGATION REGIONALE RHONE-ALPES SECTEUR ALPES) – yoann.roupioz@cea.fr
L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.
LAAS - CNRS CNRS - DELEGATION REGIONALE MIDI-PYRENEES
INSERM INSERM- DELEGATION DE LYON
INAC/SPrAM CNRS - DELEGATION REGIONALE RHONE-ALPES SECTEUR ALPES
Aide de l'ANR 459 899 euros
Début et durée du projet scientifique :
- 36 Mois