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21/12/2023

Mesures de simplification : "une volonté forte d’être au service de nos bénéficiaires"

Engagée depuis plusieurs années sur la voie de la simplification, l’Agence nationale de la recherche (ANR) poursuivra en 2024 les efforts menés pour alléger la charge de travail des scientifiques et des gestionnaires. Retour avec Thierry Damerval, président-directeur général de l’ANR, sur les principales mesures déjà mises en œuvre et sur les réflexions à venir.

Dans son discours sur l’avenir de la recherche française, le président de la République, Emmanuel Macron, a rappelé la nécessité de libérer le temps de recherche de la « bureaucratie et de la complexité administrative ». L’année 2024 sera donc placée sous le signe de la simplification sous le pilotage du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche.

À l’ANR, le virage de la simplification a été pris depuis plus de cinq ans et Thierry Damerval revient avec nous sur les actions menées au service des scientifiques et des gestionnaires.

Pourquoi l’ANR s’est-elle mobilisée ces dernières années pour mettre en œuvre une démarche ambitieuse de simplification ?

Thierry Damerval : Les mesures déjà mises en place par l’ANR sont guidées par une volonté forte d’être au service de nos bénéficiaires et de leur proposer toujours plus de solutions adaptées à leurs attentes et à leurs besoins.

Tout au long de l’année, et plus particulièrement lors de l’ANR Tour, devenu depuis cette année les Rendez-vous de l’ANR, nous allons à la rencontre des scientifiques et des gestionnaires. Ces échanges sont un levier essentiel pour percevoir les évolutions attendues en matière d’amélioration et de simplification. Nous sommes également attentifs aux évolutions techniques de nos systèmes d’information qui rendent possible la mise en place de nouveaux services.

Quelles sont les principales mesures de simplification des procédures administratives déjà effectives pour le dépôt et le suivi des projets ?

T.D. : Il s’agit d’une série de mesures, parfois techniques, qui ont été mises en place progressivement et partagent la même logique d’allègement et de service.

Le premier niveau est celui de la lisibilité des appels à projets. Jusqu’en 2017-2018, l’appel à projets générique (AAPG) était orienté et ciblé sur la base des défis sociétaux, ce qui conduisait à un descriptif des orientations et des objectifs de 185 pages dans la documentation scientifique. L’évolution de l’AAPG vers une logique complètement ouverte et non prescriptive, couvrant tous les champs des sciences, a permis de réduire ce descriptif à une quarantaine de pages.

Si l’on se penche sur le suivi des projets financés, un autre exemple significatif de mesure de simplification est la suppression en 2021 du rapport scientifique intermédiaire qui conditionnait une tranche de financement pour les projets de l’AAPG.

Un portail dédié a également été mis en place pour améliorer le suivi des projets et permet à tous les déposants et bénéficiaires de financements ANR d’avoir accès en temps réel à l’ensemble des projets qui leur sont rattachés.

Charte

Simplification et services aux utilisateurs : les mesures mises en place depuis 5 ans

Amélioration de la lisibilité de l’offre de financement, réduction de la charge administrative, accélération du processus de financement et simplification du suivi des projets financés : retrouvez l’ensemble des mesures mises en place par l’ANR.

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En ce qui concerne France 2030, une série de mesures de simplification a été déployée en 2023. Cette démarche répond à l’objectif de faire converger, à chaque fois que c’est possible, les documents demandés et les règlements financiers des appels à projets menés dans le cadre du plan d’action de l’ANR et dans le cadre de France 2030.

Enfin, dans le registre de la simplification administrative, on peut également citer l’évolution du fonctionnement du préciput. Versé en complément du financement des projets de recherche, le préciput, abondement financier revenant aux établissements gestionnaires et hébergeurs des projets sélectionnés, était attribué à l’origine sur présentation de justificatifs de dépenses, encadrées par une charte. Son mode d’attribution a été fortement simplifié et est devenu forfaitaire. C’est une simplification pour les établissements dans l’utilisation qu’ils font du préciput et un allègement de la charge administrative, d’autant plus important que le taux de préciput est en augmentation. Il est ainsi passé de 19 % des coûts des projets en 2020 à 30 % en 2023 et il sera de 32,5 % en 2024, avec la cible d’être à 40 % en 2027. Il représente un abondement aux établissements qui est passé de 104 millions d’euros en 2020, à plus de 210 millions d’euros en 2023.

Dans le cadre de cette dynamique de simplification, la durée des projets et les montants des financements ont également évolué. Pouvez-vous nous en dire plus sur ces mesures qui répondent à la demande du président de la République d’accompagner les équipes sur des temps plus longs ?

T.D. : L’augmentation des moyens liés à la loi de programmation de la recherche (LPR) a tout d’abord eu pour résultat l’augmentation du taux de sélection. Pour l’AAPG, ce taux est passé de moins de 10 % il y a une dizaine d’années à 17 % en 2020 et à plus de 24 % aujourd’hui.

Elle nous a aussi permis d’augmenter le financement apporté aux projets. Pour les projets collaboratifs académiques, le financement moyen par projet était de 470 k€ en 2020 et nous sommes aujourd’hui à environ 520 k€. Une tendance à la hausse qui devrait se poursuivre et qui est un objectif de la deuxième phase de croissance budgétaire prévue dans la LPR.

En 2022, nous avons introduit la possibilité d’un financement sur une durée de 5 ans, ce qui répond à un besoin exprimé par les équipes, et nous avons élargi la typologie des projets financés. Il est par exemple désormais possible de déposer des projets sans résultats préliminaires ou des projets « suites » de projets déjà financés. Le soutien à des projets mono-équipe dans le cadre de l’AAPG a également été réintroduit il y a deux ans.

D’autres évolutions ont-elles contribué à une amélioration de la perception de la charge de travail liée aux appels à projets de l’ANR par les scientifiques et les gestionnaires ?

T.D. : Le premier levier pour agir sur la perception de la charge de travail liée aux appels à projets est de veiller collectivement à ne pas les multiplier. Il est d’ailleurs important de rappeler que l’augmentation des moyens de l’ANR dans le cadre de la LPR n’a pas conduit à une augmentation du nombre d’appels à projets de notre plan d’action.

C’est avec ce souci de simplification et d’amélioration de la lisibilité globale des appels à projets que le portail appelsprojetsrecherche.fr a été lancé en 2021 par l’ADEME, l’ANR, l’Inserm / ANRS-MIE, l’Anses et l’INCa.

Les partenariats engagés par l’ANR avec les régions sont également un levier important en matière d’harmonisation et de coordination des appels à projets. Parmi les partenariats mis en place avec la Guadeloupe, la Normandie, les Pays de la Loire, les Hauts-de-France, le Grand Est et la région PACA, on peut, par exemple, citer dans les Pays de la Loire la suppression d’une partie des appels à projets de la région, qui apporte désormais un financement complémentaire aux projets retenus ou classés dans l’AAPG. En PACA, la région peut apporter un complément de financement sur des programmes spécifiques de recherche partenariale, les LabCom et les Chaires industrielles, portés par l’ANR.

Pour les partenariats avec les agences internationales, le mécanisme de « lead agency » allège également les démarches administratives. Ce mécanisme a été mis en place dans les collaborations de l’ANR avec la DFG1 allemande, le FNS2 suisse, le FNR3 au Luxembourg, FWF4 en Autriche, la NSF5 américaine, le CRSNG6 canadien, les Fonds de recherche du Québec, la FAPESP7 au Brésil et il permet de déposer un seul dossier auprès de l’agence qui l’évalue. Auparavant, un « double dépôt » et une « double évaluation » étaient nécessaires.

La question de la perception est au cœur des travaux pilotés par le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. Quels retours avez-vous sur la façon dont les changements déjà mis en place sont perçus par les scientifiques et les gestionnaires ?

T.D. : Nos interactions régulières avec les établissements et les scientifiques, dans le cadre des événements que nous organisons et du réseau CAP Recherche, nous permettent d’évaluer qualitativement les actions menées et de voir émerger de nouvelles propositions. Il est d’ailleurs utile de rappeler que nous sommes à la disposition des établissements et des communautés scientifiques pour organiser des rencontres, être à l’écoute et identifier ensemble de nouvelles voies d’amélioration.

En complément de ces échanges, l’ANR réalise tous les deux ans une enquête de satisfaction auprès de ses publics utilisateurs pour évaluer qualitativement et quantitativement les mesures déployées. En février 2022, la dernière édition de cette enquête a montré une progression du niveau de satisfaction concernant les conditions de dépôt des dossiers (en augmentation de 4 points par rapport à 2018 et de 13 points par rapport à 2017) et un taux de satisfaction de 89 % pour les informations mises à disposition dans les documents d’information pendant le processus de financement.

De nouvelles mesures sont-elles prévues dans les prochains mois ?

T.D. : Le taux de sélection et le montant moyen du financement apporté aux projets continueront leur progression.

Nous allons également poursuivre la réflexion, amorcée dès 2021, notamment avec les comités de pilotage de la programmation de l’ANR, sur le nombre d’étapes du processus de sélection de l’AAPG. Actuellement organisé en deux étapes, celui-ci pourrait passer à une seule étape. Cela permettrait d’apporter une réponse plus rapidement aux porteurs de projets et d’être mieux adapté au calendrier de l’ESR (pour le recrutement de doctorants par exemple). Cette proposition sera soumise aux scientifiques et aux gestionnaires dans le cadre de la prochaine enquête de satisfaction auprès des publics utilisateurs de l’ANR, dont le lancement est prévu en janvier 2024.

Du côté des outils mis à la disposition des porteurs de projet, plusieurs nouveautés sont prévues en 2024. Une nouvelle plateforme sera ainsi mise en place pour permettre aux chercheurs et chercheuses qui le souhaitent de centraliser les informations qui les concernent et de valoriser leurs travaux. Et l’espace utilisateur du portail appelsprojetsrecherche.fr évoluera pour que les informations reliées aux titulaires de comptes ORCID (CV, publications et données) soient automatiquement importées dans leur espace personnel, sans qu’il soit nécessaire de les saisir à nouveau.

Les travaux menés avec le ministère et avec les autres organismes de financement pour renforcer la convergence et l’harmonisation des procédures et des règles seront également poursuivis.

Plus largement, au-delà des démarches de simplification, quels seront les principaux enjeux et nouveautés pour l’ANR en 2024 ?

T.D. : Trois axes importants structureront l’action de l’ANR en 2024.

Tout d’abord, dans le cadre de l’AAPG, nous allons poursuivre notre mobilisation pour des appels à projets très ouverts et libres, à l’initiative des chercheurs et des chercheuses. L’AAPG représente 75 % du plan d’action de l’ANR.

Ensuite, le soutien aux actions de recherche partenariale sera renforcé avec, notamment, l’ouverture du dispositif LabCom aux start-up, le développement des Chaires industrielles et un nouvel appel à labélisation prévu fin 2024 pour le programme Carnot.

En partenariat avec l’ANRT, un processus accéléré va être mis en place pour les LabCom et les Chaires industrielles pour l’attribution de contrats Cifre.

Enfin, nous poursuivrons nos actions et mettrons en place de nouveaux partenariats internationaux dans le cadre de comités mixtes stratégiques entre la France et des pays partenaires (comme cette année avec le Canada). Ces partenariats sont également importants pour développer la recherche et l’expertise scientifique sur les problématiques liées aux changements globaux et au changement climatique, en allant du niveau international au niveau local. À l’international, l’ANR continuera ainsi à coprésider le Belmont Forum, à s’investir dans le programme Horizon Europe et à contribuer à la structuration d’actions co-soutenues par différents financeurs et mobilisant la recherche globalement. Au niveau local, l’appel à manifestation d’intérêt sur les impacts du changement climatique sur les écosystèmes régionaux déployé avec les régions Pays de la Loire et Normandie pourra être étendu à d’autres régions.

 

Pour en savoir plus :

Plaquette « Simplification et services aux utilisateurs : les mesures mises en place depuis 5 ans »

Plaquette « Simplification des procédures France 2030 »

Plan d’action 2024

1 Deutsche Forschungsgemeinschaft
2 Fonds national suisse
3 Fonds National de la Recherche
4 Österreichische Wissenschaftsfonds
5 National Science Foundation
6 Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie
7 Fundação de Amparo à Pesquisa do Estado de São Paulo

Mis à jour le 21 décembre 2023
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