CE03 - Science de la durabilité

Gérer durablement les transitions dans les systèmes socio-écologiques – Matres

MATRES: vers une gestion durable les transitions des systèmes socio-écologiques

Les systèmes socio-écologiques (SES) fonctionnent de manière complexe et imprévisible, réduisant la capacité des décideurs à trouver des solutions pour les rendre durables ou les restaurer en cas de dommages. En effet, il reste difficile de caractériser l'évolution de ces systèmes dans le temps face aux changements et aux perturbations. Les approches de modélisation des systèmes dynamiques peuvent contribuer à améliorer notre connaissance sur le comportement de tels systèmes complexes.

Caractériser les transitions des systèmes socio-écologiques...

Les transitions d’un système dynamique sont classiquement définies en physique comme le passage d’un état à un autre et peuvent être caractérisées par les propriétés de la dynamique du système (bassin d’attraction, valeurs propres, etc.). Cependant, l’analyse des transitions dans les SES reste difficile car les outils classiques utilisés en physique ne peuvent pas être appliqués dans certains cas. Tout d’abord, dans le cas des modèles à base d’agents (ABM), l’analyse des transitions n’est possible que dans les cas où une approximation comme le champ moyen permet de réaliser l’analyse. En effet, traiter des modèles à haute dimension reste un défi pour évaluer la dynamique des transitions. De plus, la présence de points de bascule dans les modèles hybrides donne lieu à des trajectoires inattendues qui peuvent être difficiles à analyser en raison : 1/ des formalismes hybrides (ABM couplés à des EDO), 2/des interactions complexes au sein des SES, 3/de la présence d’instabilités (points de bascule). Nous avons pour objectif de proposer des outils mathématiques permettant de définir une typologie des transitions SES issues de la littérature et de définir des régimes de transition. La principale originalité de Matres est d'utiliser une propriété d'intérêt pour définir les transitions plutôt qu'à partir d'un état.<br /><br />L'objectif principal de Matres est de développer un cadre conceptuel et les outils numériques associés pour la gestion durable des transitions dans les systèmes socio-écologiques. Notre principale contribution est de caractériser les régimes dynamiques et leurs transitions dans les systèmes socio-écologiques en mobilisant une approche basée sur les ensembles, en s'inspirant des travaux issus de la théorie de la viabilité. Ces régimes seront caractérisés par l’introduction de différents niveaux de désirabilité et différents niveaux de contrôle. A l’aide d’ateliers participatifs avec les parties prenantes, le cadre méthodologique développé sera appliqué à trois cas d’étude: la gestion des biodéchets, la gestion forestière, et la gestion de la qualité de l’eau lacustre. Ce projet se situe dans le domaine des systèmes complexes et des sciences de la durabilité.

La majorité des travaux issues de la littérature utilisent des approches d’optimisation. Cependant, certains SES peuvent être mal définis, avec de nombreuses incertitudes concernant leurs paramètres et leurs variables associées. Ainsi, au lieu d’optimiser un état, il pourrait être préférable de gérer les SES dans une gamme de d’états acceptables, ce qui est l’objectif de la théorie de la viabilité. Nous mobiliserons donc des approches issues de la théorie de la viabilité. Pour cela, nous baserons notre analyse sur des travaux récents différents ensembles de gestion sont définis en fonction des propriétés du système dynamique contrôlé. Une des originalités de l'approche menée par Matres réside dans la définition de régimes à partir de la durabilité de la désirabilité et des noyaux de viabilité. Des travaux antérieurs ont considéré un seul ensemble de désirabilité et au plus deux niveaux de contrôle (l'un étant l'absence d'action). La principale contribution de Matres repose sur l'ajout de plusieurs ensembles de désirabilité ainsi que de différents niveaux de contrôle et des algorithmes nécessaires à la résolution de ces nouveaux problèmes de contrôle. Au lieu d’analyser ces transitions SES à partir d’une vue basée sur les états, nous analyserons les transitions en fonction d’une propriété d’intérêt, supposée être un sous-ensemble de l’espace d’état. Cette approche s’inspire clairement de la vision de Holling (1973) qui définit la résilience écologique en fonction de la capacité à récupérer une propriété durable d’intérêt au lieu de récupérer l’état initial (engineering resilience). Par conséquent, nous visons à développer un formalisme mathématique de cette approche basée sur les ensembles de la transition. Ensuite, nous analyserons la gestion des transitions à travers le prisme de la théorie de la viabilité. Nous viserons à proposer un cadre mathématique pour contrôler les transitions de régime. L’objectif est de s’appuyer sur la topologie de la gestion durable en supposant que différents ensembles d’actions de coût et d’efficacité croissants sont disponibles. Cela nous permet de définir des noyaux de viabilité qui dépendent du type d’actions sur le système et également de définir des transitions entre ces noyaux de viabilité. Enfin, la dernière partie sera consacré aux algorithmes de résolution des problèmes associés et à l’application des approches Matres à différentes études de cas de complexité croissante. L’objectif est de développer une preuve de concept pour passer des concepts aux études de cas pour mettre en évidence la généricité de notre approche : gestion de l’eutrophisation des lacs; gestion des biodéchets, et la gestion forestière à Doller. Neuf ateliers, trois pour chaque étude de cas, nous permettront d'interagir avec les parties prenantes afin de collecter des données pour contribuer à définir différents niveaux de désirabilité et différents niveaux de contrôle, tout en leur présentant les principaux résultats du projet.

Sur la base de ces hypothèses de recherche, l’objectif de Matres est de passer du statut de résultats conceptuels à celui d’outils opérationnels pour la gestion durable de la transition au sein des systèmes socio-écologiques. Plus précisément, nous cherchons à proposer des outils (basés sur des théories mathématiques, comme la théorie de la viabilité) qui peuvent être associés dans le cadre de la gestion des transitions. Une telle approche a été très peu abordée jusqu’à présent, à la connaissance des auteurs. Matres s’appuiera sur un projet précédemment financé par l’ANR (VIRGO, clôturé en 2023) qui a donné les premières briques pour intégrer la gouvernance des systèmes socio-écologiques à des modèles mathématiques. Nous souhaitons naturellement aller plus loin en nous concentrant sur les transitions dans la recherche d’outils opérationnels pour une gestion durable de la transition.

Les principales perspectives de Matres concernent l’utilisation du cadre de gestion des transitions des SES, qui présente un intérêt primordial pour les décideurs politiques et pour la société en général. Nous prévoyons de fournir une preuve de concept pouvant servir de base au développement futur d’outils opérationnels pour aider les décideurs dans le cadre de futurs projets de recherche. Il est primordial de proposer de nouveaux outils pour gérer les transitions des SES non seulement pour des raisons économiques mais aussi pour des questions sociales. Par conséquent, donner des outils opérationnels pour aider ce développement peut apporter (à long terme) des avantages substantiels en termes économiques et d'emplois. Une autre perspective de Matres est l’utilisation des outils informatiques développés (basés sur la théorie de la viabilité) pour d'autres SES ainsi que pour d’autres projets de recherche.

En termes de valorisation, nous mobiliserons les connaissances générées par cette recherche pour : des articles de recherche et des conférences sur les méthodes employées et leur application spécifique sur des études de cas (gestion de l’eutrophisation lacustre, des biodéchets et d’une forêt). Nous veillerons également à communiquer auprès du grand public par le biais d’interviews et de communications dans les médias locaux et nationaux (journaux ainsi que site web scientifique). Les principales avancées de Matres concernent l’élaboration d’un cadre de gestion des transitions, qui est d’un intérêt primordial pour les décideurs politiques et pour la société en général. Nous diffuserons nos résultats au sein des partenaires du projet ainsi que des parties prenantes comme les organisations locales en charge de la gestion des systèmes socio-écologiques (notamment les syndicats en charge de ces systèmes).

La gestion de la transition se concentre sur des systèmes adaptatifs complexes qui impliquent des changements fondamentaux non linéaires dans les cultures, les structures et les pratiques. La gestion des transitions représente un cadre conceptuel qui englobe de nombreuses facettes des transitions comme la gestion des transitions dans les systèmes socio-écologiques (SES) ainsi que les transitions dans la gouvernance. La gestion de la transition n'a pas été analysée et conceptualisée à travers une approche de modélisation. Notre principale hypothèse de recherche est que les outils mathématiques peuvent aider à l'opérationnalisation de la gestion de transition et qu'ils peuvent contribuer au débat sur la construction d'une gestion de transition durable. Sur la base de ces hypothèses de recherche, l'objectif de ce projet est de passer des résultats conceptuels à des outils opérationnels à destination des décideurs pour une gestion durable de la transition des systèmes socio-écologiques. Plus spécifiquement, nous cherchons à proposer des outils opérationnels (basés sur des théories mathématiques, dont la théorie de la viabilité) qui peuvent être imbriqués dans le cadre de la gestion de transition. Nous nous appuierons sur les travaux récents développés qui ont donné les premières idées pour connecter la gouvernance à des modèles mathématiques efficaces. Nous souhaitons naturellement aller plus loin en ajoutant une brique supplémentaire à ce travail : se focaliser sur les dynamique de transitions pour aller plus loin dans la recherche d'outils opérationnels de gestion durable des transitions. Ce projet mono-équipe impliquera l'ensemble des sept membres du LISC (Laboratoire d'Ingénierie des Systèmes Complexes).

Coordination du projet

Jean-Denis Mathias (Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement)

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

LISC Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement

Aide de l'ANR 576 282 euros
Début et durée du projet scientifique : March 2025 - 48 Mois

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