Cibler le microbiote intestinal pour améliorer la prise en charge des patients ayant une hépatite alcoolique : des mécanismes moléculaires au lit du patient – TIMPAH
La maladie alcoolique du foie (MAF) est la première cause de cirrhose dans le monde et reste en attente de thérapeutiques ciblées. Les patients consommant de l’alcool ont une susceptibilité individuelle face au développement et à la sévérité de la MAF qui dépend en partie du microbiote intestinal (MI). Ainsi, le MI de patients ayant une MAF sévère aggrave les lésions hépatiques dans un modèle murin d’alcoolisation. Dans ce modèle, nous avons montré que la pectine, une fibre alimentaire, modifie le MI et ses métabolites (acides biliaires et indoles), diminuant la sévérité de la MAF et restaurant la barrière intestinale altérée par la consommation d’alcool et la dysbiose. La pectine augmente la production des indoles, agonistes du récepteur AhR, diminuant les lésions du foie et de la barrière intestinale. Chez des souris déficientes en récepteur AhR, l’effet de la pectine est altéré mais pas complètement aboli, suggérant que la pectine agit également via d’autres métabolites bactériens. De fait, nous avons montré que les acides biliaires modifiés par la pectine participent également à l’amélioration des lésions hépatiques. Les données actuelles suggèrent que l’amélioration des lésions hépatiques dans la MAF est étroitement liée à l’amélioration de la barrière intestinale. Celle-ci dépend en partie des interactions entre les cellules immunes intestinales, le MI et ses métabolites par des mécanismes encore à explorer.
Notre projet propose un traitement innovant de la MAF fondé sur la prise de pectine. Il s’agit d’une part d’établir la preuve de concept qu’un traitement par la pectine chez des patients ayant une MAF engendre des modifications métaboliques similaires à celles observées dans le modèle murin. Cette validation est particulièrement importante dans le cas des acides biliaires, qui diffèrent entre la souris et l’homme. L’effet de la pectine sera validé en mesurant différents paramètres et en évaluant les modifications du MI, l’amélioration de la barrière intestinale et des paramètres hépatiques. De plus, notre partenariat avec des immunologistes experts dans l’analyse approfondie et non supervisée des cellules immunitaires nous permettra d’identifier les sous-populations modifiées par la pectine et de définir la nature de ces modifications.
La consommation de fibres, dont la pectine, présente l’avantage de son innocuité mais peut engendrer un inconfort digestif freinant le suivi du traitement. Il est donc essentiel de mieux comprendre les mécanismes d’action de la pectine pour proposer de nouvelles pistes thérapeutiques ou complémentaires. Dans nos modèles murins d’alcoolisation, nous utiliserons des régimes enrichis i) en pectine pour cibler la voie des acides biliaires et des indoles ou ii) en tryptophane pour cibler sélectivement la voie des indoles. La comparaison de ces régimes chez des souris déficientes en AhR dans différents types cellulaires (cellules immunes, cellules épithéliales digestives et hépatocytes) nous permettra de clarifier l’impact de ces métabolites sur ces populations cellulaires en lien avec leurs effets bénéfiques. Nous étudierons les modifications du métabolisme des acides biliaires et de la signalisation AhR via les indoles, leur impact sur l’amélioration de la barrière intestinale et des lésions hépatiques. L’analyse approfondie non supervisée des populations immunitaires systémiques, intestinales et hépatiques, combinée à l’analyse in situ de ces cellules permettront d’identifier l les mécanismes moléculaires responsables des effets bénéfiques de la pectine dans la MAF, ouvrant la voie vers l’élaboration de nouvelles thérapies ciblées.
Coordinateur du projet
Madame Anne-Marie CASSARD (Inflammation, Microbiome, Immunosurveillance)
L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.
Partenaire
ITIC Immunologie des tumeurs et immunothérapie des cancers
CRSA Centre de Recherche Saint-Antoine
DRCI Direction de la Recherche et de l'Innovation de l' AP-HP
IC IMMUNITE ET CANCER
MI2 Inflammation, Microbiome, Immunosurveillance
Aide de l'ANR 582 370 euros
Début et durée du projet scientifique :
décembre 2022
- 42 Mois